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29/04/2021 | FRANCE | N°20VE02158

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 29 avril 2021, 20VE02158


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 21 août 2019 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pendant un an, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " salarié " ou, à

défaut, la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. I... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 21 août 2019 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pendant un an, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " salarié " ou, à défaut, la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 1915405 du 22 juillet 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 24 août 2020 et un mémoire à fin de production de pièces enregistré le 25 août 2020, M. C..., représenté par Me Nunes, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un certificat de résidence d'un an portant la mention " salarié " ou, à défaut, la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de celui-ci au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé en ce qui concerne la réponse au moyen tiré de ce que le refus de séjour était entaché d'un défaut d'examen particulier et au moyen tiré de la violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'erreur de droit en tant que " le premier juge a refusé de mettre en oeuvre ce que la Cour de justice de l'Union Européenne (CJUE) a pourtant dit pour droit " dans la décision de la CJUE C-249/13 M. F... ;

- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée en fait et elle est entachée d'un défaut d'examen particulier ;

- elle est entachée de la violation du principe du contradictoire au sens de la décision de la CJUE C-249/13 M. F... ;

- le préfet a commis une erreur de fait dès lors que sa famille se trouve en France ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnaît aussi les stipulations du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien ;

- elle méconnaît également les articles 5 et 6-4° de la directive 2008/115/CE du parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice, par le préfet, de son pouvoir de régularisation ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire français porte atteinte à son droit à la vie privée et familiale, protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle ;

- la décision lui interdisant le retour sur le territoire français pendant un an, est insuffisamment motivée au regard de la décision du Conseil d'Etat M. E... ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience dans la présente instance.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme G... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. I... C..., ressortissant algérien né le 4 septembre 1981 à Maghnia, a sollicité un certificat de résidence au titre de l'admission exceptionnelle au séjour, le 16 juillet 2019. Toutefois, par un arrêté du 21 août 2019, le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et lui a fait interdiction de retour sur le territoire pendant un an. M. C... en a demandé l'annulation au tribunal administratif de Cergy-Pontoise mais, par un jugement n° 1915405 du 22 juillet 2020, sa demande a été rejetée. Il en relève appel.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, M. C... soutient que le jugement attaqué est insuffisamment motivé en ce qui concerne la réponse au moyen tiré de ce que le refus de séjour était entaché d'un défaut d'examen particulier et au moyen tiré de la violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort toutefois de l'examen du jugement attaqué, que les premiers juges ont répondu à ce moyen au point 9., qui est au surplus complété par les points 3. à 5. relatifs à la motivation. D'autre part, s'agissant du moyen tiré de la violation de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la réponse faite par le tribunal administratif est conforme à l'état du droit applicable, en application de l'avis contentieux du Conseil d'Etat du 22 mars 2010 M. B... A..., n° 333679 classé en A. Il suit de là que le moyen susanalysé doit être écarté dans ses deux branches.

3. En second lieu, M. C... soutient que le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit en tant que " le premier juge a refusé de mettre en oeuvre ce que la CJUE a pourtant dit pour droit " dans la décision de la CJUE C-249/13 M. F.... Il ressort pourtant de l'examen des motifs du jugement, que les premiers juges ont fait une exacte application des décisions rendues par la Cour de Justice de l'Union européenne quant à la mise en oeuvre du droit à être entendu avant l'édiction d'une décision administrative individuelle défavorable, dans les décisions rendues le 5 novembre 2014, Mme H..., sous le n° C-166/13, puis le 11 décembre 2014, M. F..., sous le n° C-249/13. Il suit de là que le moyen susanalysé doit être écarté.

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne le refus de séjour :

4. En premier lieu, M. C... reprend à l'identique les moyens déjà soulevés en première instance et tirés du défaut de motivation de la décision portant refus de séjour et de la violation du principe du contradictoire au sens de la décision de la CJUE C-249/13 M. F.... Dans ces conditions, ces moyens doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 3. à 5., 7. et 8. du jugement attaqué. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré du défaut d'examen particulier.

5. En second lieu, M. C... reprend à l'identique les moyens déjà soulevés en première instance et tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 5° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, de la méconnaissance du b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien, ainsi que des articles 5 et 6-4° de la directive 2008/115/CE du parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008, de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice, par le préfet, de son pouvoir de régularisation et, de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences du refus de séjour sur sa situation personnelle. Il produit en appel sept pièces nouvelles, à savoir les extraits de naissance de ses parents, de sa soeur et de son frère ainsi que le sien, la fiche d'état civil et le livret de famille algériens de ses parents et de leurs enfants. Toutefois ces pièces et ces éléments ne sont pas susceptibles de remettre en cause l'appréciation motivée portée par les premiers juges. Ceux-ci ont notamment retenu que M. C..., âgé de trente-sept ans à la date de la décision litigieuse, est célibataire et sans enfant et ne justifie pas des raisons pour lesquelles sa mère, son frère et sa soeur ont bénéficié d'une mesure de regroupement familial qui ne lui a pas été appliquée, qu'il ne justifie d'aucune insertion sociale en France, ni ne fait état d'une vie professionnelle d'une particulière intensité en se bornant à produire des bulletins de salaire établis entre janvier et décembre 2018 sans justifier d'un contrat de travail visé par l'autorité compétente et, que s'il fait valoir une pathologie grave nécessitant une prise en charge médicale en France et dont l'interruption aurait des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il ne l'établit pas en produisant un compte-rendu d'hospitalisation daté du 15 janvier 2019 relatif à une opération de reconstruction de la deuxième phalange de son auriculaire gauche. Par ailleurs, la formation de jugement a également retenu que, l'intéressé ne remplissant pas les conditions lui permettant de bénéficier de plein droit de la délivrance d'un certificat de résidence, le préfet n'était pas tenu de consulter la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande. Dans ces conditions, les moyens susanalysés doivent être écartés par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif aux points 11., 15., 16. et 20. du jugement attaqué. Il en va de même, pour les mêmes motifs, du moyen tiré de l'erreur de fait.

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

6. M. C... reprend à l'identique les moyens déjà soulevés en première instance et tirés de la violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français sur sa situation personnelle. Après examen des pièces nouvelles produites en appel, détaillées ci-dessus, ces moyens doivent être écartés pour les mêmes motifs que précédemment.

En ce qui concerne l'interdiction de retour sur le territoire français :

7. En premier lieu, M. C... reprend à l'identique le moyen déjà soulevé en première instance et tiré de l'atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Après examen des pièces nouvelles produites en appel, détaillées ci-dessus, les éléments ainsi apportés à l'instance ne sont pas susceptibles de remettre en cause l'appréciation motivée portée par les premiers juges. Dès lors, ce moyen doit être écarté par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif au point 23. du jugement attaqué.

8. En second lieu, aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de l'article 23 de la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 qui était en vigueur à la date du 21 août 2019 à laquelle l'arrêté litigieux a été pris : " (...) / Lorsqu'elle ne se trouve pas en présence du cas prévu au premier alinéa du présent III, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. (...) / La durée de l'interdiction de retour mentionnée aux premier, sixième et septième alinéas du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

9. M. C... soulève le moyen tiré de l'insuffisance de motivation au regard de la décision du Conseil d'Etat M. E..., rendue le 12 mars 2012 sous le n° 354165 et classée en A. Cette décision a toutefois été amodiée par la décision du Conseil d'Etat Mme D..., rendue le 17 avril 2015 sous le n° 372195, également classée en A, aux termes de laquelle : " il incombe à l'autorité compétente qui prend une décision d'interdiction de retour d'indiquer dans quel cas susceptible de justifier une telle mesure se trouve l'étranger. Elle doit par ailleurs faire état des éléments de la situation de l'intéressé au vu desquels elle a arrêté, dans son principe et dans sa durée, sa décision, eu égard notamment à la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, à la nature et à l'ancienneté de ses liens avec la France et, le cas échéant, aux précédentes mesures d'éloignement dont il a fait l'objet. Elle doit aussi, si elle estime que figure au nombre des motifs qui justifie sa décision une menace pour l'ordre public, indiquer les raisons pour lesquelles la présence de l'intéressé sur le territoire français doit, selon elle, être regardée comme une telle menace. En revanche, si, après prise en compte de ce critère, elle ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, elle n'est pas tenue, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément. ".

10. En l'espèce, pour faire interdiction de retour sur le territoire français pendant un an à M. C..., âgé de trente-sept ans à la date de la décision en litige, le préfet a mentionné sa durée de présence en France depuis 3 ans et 3 mois, et le fait qu'il est célibataire et sans enfant et dans les autres paragraphes du même document, le préfet a également rappelé que ses liens familiaux ne sont pas anciens, intenses ou stables et qu'il ne fait état que d'une activité salariale sporadique très récente. Le préfet n'était pas tenu de motiver cette décision au regard des deux autres critères du 8ème alinéa du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité, à savoir l'existence d'une précédente obligation de quitter le territoire français ou encore la menace à l'ordre public constituée par la présence de M. C... sur le territoire français, dès lors que ces deux critères n'étaient pas pertinents pour évaluer la situation du requérant. Il suit de là que la mesure d'interdiction de retour sur le territoire français pendant un an est suffisamment motivée et que le moyen susanalysé, tiré du défaut de motivation, doit être écarté.

11. Il résulte de tout ce qui précède, que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, rendu le 22 juillet 2020 sous le n° 1915405, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 août 2019 du préfet des Hauts-de-Seine rejetant sa demande de certificat de résidence, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, fixant le pays de renvoi et lui faisant interdiction de retour sur le territoire pendant un an. Par conséquent, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'annulation, ensemble celles présentées à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

N° 20VE02158 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE02158
Date de la décision : 29/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: Mme Marie-Cécile MOULIN-ZYS
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : NUNES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-04-29;20ve02158 ?
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