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15/04/2021 | FRANCE | N°19VE03053

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 15 avril 2021, 19VE03053


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2017 par lequel le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie constatée le 6 janvier 2015, ensemble le rejet de son recours gracieux du 3 avril 2018, et de mettre à la charge du département de la Seine-Saint-Denis la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement

n° 1803795 du 2 juillet 2019, le tribunal administratif de Montreuil a annulé ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 27 novembre 2017 par lequel le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de la maladie constatée le 6 janvier 2015, ensemble le rejet de son recours gracieux du 3 avril 2018, et de mettre à la charge du département de la Seine-Saint-Denis la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1803795 du 2 juillet 2019, le tribunal administratif de Montreuil a annulé ces décisions et mis à la charge du département de la Seine-Saint-Denis la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 août 2019, le département de la Seine-Saint-Denis, représenté par Me F..., avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. E... devant le tribunal administratif ;

3°) de mettre à la charge de M. E... la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit, plusieurs erreurs d'appréciation et ont dénaturé les pièces du dossier ;

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;

- les avis médicaux ne sont pas suffisamment précis pour établir que la pathologie de M. E... serait effectivement en lien avec ses conditions de travail ; ainsi, le certificat établi le 12 février 2015 par le médecin traitant de M. E..., qui n'a pas connaissance du contexte professionnel, est imprécis et repose sur les seules déclarations de l'intéressé ; l'avis de la commission de réforme du 2 octobre 2017 n'est pas davantage circonstancié ; l'expertise du docteur Belcour du 28 juillet 2017 ne retient pas l'existence d'un lien entre la maladie et le service ;

- M. E... a déclaré son syndrome dépressif le 6 janvier 2015, alors qu'il était placé en congé de longue durée depuis le 2 septembre 2013 pour cette même pathologie ; cette circonstance établit l'absence de lien avec le service et l'existence d'un terrain pathologique préexistant ;

- si M. E... fait état d'une situation professionnelle conflictuelle qui serait à l'origine de ses problèmes de santé, il n'apporte aucune précision sur la nature de ce conflit ; en réalité, son comportement est à l'origine de sa pathologie ; l'intéressé a été placé d'office en congé de longue durée bien avant la déclaration de maladie professionnelle ; toutes les mesures prises à l'égard de cet agent ont été motivées par le comportement de l'intéressé qui perturbe le bon fonctionnement du service depuis plusieurs années.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Clot, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., substituant Me F..., pour le département de la Seine-Saint-Denis.

Considérant ce qui suit :

1. M. E... a été recruté par le département de la Seine-Saint-Denis en 2006 en qualité de technicien territorial. Il a été placé d'office en congé de longue maladie le 7 octobre 2008 pour une durée de six mois. Du 20 septembre 2011 au 1er juin 2013, il a été placé en congé de formation. Enfin, l'intéressé a été placé en congé de longue durée à compter du 2 septembre 2013. Le 26 février 2015, M. E... a demandé la reconnaissance de l'imputabilité au service de la pathologie constatée le 6 janvier 2015 par son médecin traitant. Malgré un avis favorable de la commission de réforme du 2 octobre 2017, le président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis a rejeté, par un arrêté du 27 novembre 2017, la demande de M. E... au motif que le lien entre sa pathologie et l'exercice de ses fonctions n'était pas établi. Le recours gracieux présenté par M. E... le 12 janvier 2018 a été rejeté le 3 avril 2018. Le département de la Seine-Saint-Denis relève appel du jugement du 2 juillet 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a, à la demande de M. E..., annulé les décisions susmentionnées des 27 novembre 2017 et 3 avril 2018.

2. Aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions.(...) Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) ".

3. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

4. Les décisions attaquées ont été prises au motif que le lien entre la pathologie de M. E... et l'exercice de ses fonctions n'était pas établi dès lors qu'à la date de la constatation médicale de sa maladie, le 6 janvier 2015, celui-ci était en congé de longue durée depuis le 2 septembre 2013 et que le médecin agréé consulté n'avait pas retenu, dans ses conclusions du 28 juillet 2017, l'existence d'un lien entre la pathologie et le travail de l'intéressé. Si M. E... verse au dossier deux certificats médicaux établis les 12 février 2015 et 7 juillet 2017 par un médecin généraliste, lesquels indiquent qu'il souffre d'un syndrome dépressif réactionnel lié à des problèmes professionnels, ces documents sont dénués de toute précision et ne permettent pas d'établir un lien entre la pathologie de l'intéressé et ses conditions de travail. Pour sa part, l'administration verse au dossier les conclusions de l'expertise réalisée le 28 juillet 2017 par le docteur Belcour, lequel estime que le lien susmentionné n'existe pas. En outre, ainsi qu'il a été dit au point 1, il est constant que M. E..., après avoir bénéficié d'un congé de formation du 20 septembre 2011 au 1er juin 2013, a été placé en congé de longue durée à compter du 2 septembre 2013 et était ainsi absent du service depuis plus de trois ans à la date de la constatation de sa maladie, le 6 janvier 2015. Enfin, si M. E... soutient qu'il a été confronté depuis plusieurs années à des difficultés relationnelles dans son milieu professionnel, lesquelles seraient à l'origine de sa maladie, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il n'est pas, en raison de son comportement, étranger à ces difficultés. Dans ces conditions, et nonobstant la circonstance que la commission de réforme, lors de sa séance du 2 octobre 2017, a émis un avis favorable à la demande de M. E..., la pathologie de ce dernier ne peut être regardée comme directement imputable au service. Par suite, le département de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 27 novembre 2017, ensemble le rejet du recours gracieux du 3 avril 2018, au motif qu'il avait commis une erreur d'appréciation.

5. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. E... devant le tribunal administratif de Montreuil.

6. En premier lieu, Mme G... D..., directrice de la gestion du personnel, signataire de l'arrêté attaqué, bénéficiait en vertu d'un arrêté n° 2016-309 du 6 septembre 2016 d'une délégation du président du conseil départemental de la Seine-Saint-Denis à l'effet de signer tous actes " en matière de gestion du personnel départemental dans son ensemble " et, notamment, comme en l'espèce, les décisions relatives à l'imputabilité au service d'une pathologie. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de l'arrêté attaqué doit être écarté.

7. En second lieu, les décisions attaquées comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. Elles sont ainsi suffisamment motivées.

8. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la régularité du jugement attaqué, que le département de la Seine-Saint-Denis est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Montreuil a annulé l'arrêté du 27 novembre 2017, ensemble le rejet du recours gracieux du 3 avril 2018.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du département de la Seine-Saint-Denis, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. E... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par le département de la Seine-Saint-Denis au titre de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1803795 du tribunal administratif de Montreuil du 2 juillet 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Montreuil par M. E... est rejetée.

Article 3 : Les conclusions présentées par le département de la Seine-Saint-Denis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 19VE03053 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE03053
Date de la décision : 15/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie.


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Thierry ABLARD
Rapporteur public ?: M. CLOT
Avocat(s) : SELARL CENTAURE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-04-15;19ve03053 ?
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