La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/04/2021 | FRANCE | N°19VE01856

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 15 avril 2021, 19VE01856


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 et des pénalités correspondantes et, à titre subsidiaire, la réduction de ces impositions supplémentaires en retenant une base imposable soit de 2 200 euros, soit de 8 000 euros, soit de 21 420 euros, ainsi que le versement des intérêts moratoires

prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales et de la capita...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 et des pénalités correspondantes et, à titre subsidiaire, la réduction de ces impositions supplémentaires en retenant une base imposable soit de 2 200 euros, soit de 8 000 euros, soit de 21 420 euros, ainsi que le versement des intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales et de la capitalisation de ces intérêts.

Par un jugement n° 1611436 du 26 mars 2019, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 21 mai et 25 octobre 2019, M. et Mme A..., représentés par Me B... et Me C..., avocats, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013 et des pénalités correspondantes et, à titre subsidiaire, la réduction de ces impositions supplémentaires en retenant une base imposable soit de 2 200 euros, soit de 8 000 euros, soit de 21 420 euros, soit de 29 520 euros, ainsi que le versement des intérêts moratoires prévus par l'article L. 208 du livre des procédures fiscales et de la capitalisation de ces intérêts ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les dépens ainsi que la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- M. A... n'a pas transporté en espèces 135 880 euros mais 135 180 euros ;

- la présomption d'imposition des revenus transférés vers l'étranger prévue au second alinéa de l'article 1649 quater du code général des impôts ne trouve pas à s'appliquer ;

- la somme convoyée ne correspond pas à un revenu dès lors qu'elle n'appartient pas à M. A..., qui a simplement accepté de transporter cette somme pour le compte de plusieurs personnes en Mauritanie et au Mali ;

- à hauteur de 105 660 euros, les espèces appartiennent à M. F... ;

- à hauteur de 21 520 euros, les espèces appartiennent à différentes autres personnes ;

- à hauteur de 8 000 euros, il s'agit d'espèces leur appartenant et pour lesquelles ils ont acquitté l'impôt sur le revenu.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- le règlement (CE) n° 1889/2005 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 relatif aux contrôles de l'argent liquide entrant ou sortant de la Communauté ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties a été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de M. Illouz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... font appel du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 26 mars 2019 ayant rejeté leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales mises à leur charge au titre de l'année 2013.

2. D'une part, aux termes de l'article 1649 quater A du code général des impôts : " Les transferts des sommes, titres ou valeurs réalisés par des personnes physiques vers un Etat membre de l'Union européenne ou en provenance d'un Etat membre de l'Union européenne sont effectués conformément à l'article L. 152-1 du code monétaire et financier. / Les sommes, titres ou valeurs transférés vers l'étranger ou en provenance de l'étranger constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables lorsque le contribuable n'a pas rempli les obligations prévues à l'article L. 152-1 du code monétaire et financier et au règlement (CE) n° 1889/2005 du Parlement européen et du Conseil, du 26 octobre 2005, relatif aux contrôles de l'argent liquide entrant ou sortant de la Communauté ". Pour faire échec aux présomptions édictées par ces dispositions, il appartient au contribuable, quelle que soit la qualification juridique ou comptable que peut recevoir la somme qui est employée à fin d'être transférée, d'établir que les ressources ayant contribué à la constituer ont par elles-mêmes déjà été imposées, ou ne devaient, ou ne pouvaient pas l'être, non seulement au titre de l'année du transfert, mais aussi, le cas échéant, au titre d'années antérieures.

3. D'autre part, aux termes de l'article 3 du règlement Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 : " 1. Toute personne physique entrant ou sortant de la Communauté avec au moins 10 000 euros en argent liquide déclare la somme transportée aux autorités compétentes de l'État membre par lequel elle entre ou sort de la Communauté, conformément au présent règlement. L'obligation de déclaration n'est pas réputée exécutée si les informations fournies sont incorrectes ou incomplètes. / 2. La déclaration visée au paragraphe 1 contient des informations sur : (...) / b) le propriétaire de l'argent liquide / (...) d) le montant et la nature de cet argent liquide (...) ". Aux termes de l'article L. 152-1 du code monétaire et financier, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les personnes physiques qui transfèrent vers un Etat membre de l'Union européenne ou en provenance d'un Etat membre de l'Union européenne des sommes, titres ou valeurs y compris les valeurs mentionnées à l'article L. 561-13, les moyens de paiement décrits par la loi n° 2013-100 du 28 janvier 2013 portant diverses dispositions d'adaptation de la législation au droit de l'Union européenne en matière économique et financière, ou de l'or, sans l'intermédiaire d'un établissement de crédit, d'un établissement de monnaie électronique, d'un établissement de paiement ou d'un organisme ou service mentionné à l'article L. 518-1 doivent en faire la déclaration dans des conditions fixées par décret. / Une déclaration est établie pour chaque transfert à l'exclusion des transferts dont le montant est inférieur à 10 000 euros ". Aux termes de l'article R. 152-6 de ce code : " I. - La déclaration prévue à l'article 3 du règlement (CE) n° 1889/2005 du Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005 relatif aux contrôles de l'argent liquide entrant ou sortant de la Communauté et la déclaration des sommes, titres ou valeurs transférés vers un Etat membre de l'Union européenne ou en provenance d'un tel Etat, prévue à l'article L. 152-1, sont faites par écrit par les personnes physiques, pour leur compte ou pour celui d'autrui, auprès de l'administration des douanes, au plus tard au moment de l'entrée ou de la sortie de l'Union européenne ou du transfert vers un Etat membre de l'Union européenne ou en provenance d'un tel Etat. (...) / II. - Les déclarations mentionnées au I contiennent, sur un document daté, les informations suivantes : (...) 2° Lorsque le transfert est opéré pour le compte d'un tiers : / a) S'il s'agit d'une personne physique, les nom et prénoms du propriétaire des sommes, titres ou valeurs, sa nationalité, sa date et son lieu de naissance, sa profession, son adresse et la nature, le numéro, la date de validité et le lieu de délivrance de ses pièces d'identité ; / b) S'il s'agit d'une personne morale, sa raison ou dénomination sociale, son numéro individuel d'identification prévu à l'article 286 ter du code général des impôts si elle en possède un et son adresse ; (...) / 4° Le montant et la nature des sommes, titres ou valeurs (...) ". En vertu de l'article R. 172-7 dudit code : " Pour l'application de l'article L. 152-1, sont considérés comme des sommes, titres ou valeurs : (...) / 4° Les espèces (billets de banque et pièces de monnaie qui sont en circulation comme instruments d'échange) ".

4. En premier lieu, M. et Mme A... reprennent en appel le moyen tiré de ce que la somme en espèces que M. A... transportait avec lui, le 12 février 2013, alors qu'il a été contrôlé par le service des douanes de l'aéroport Roissy Charles de Gaulle, s'élève à la somme de 135 180 euros et non, comme l'a retenu l'administration fiscale en tant que base imposable aux redressements en litige, celle de 135 880 euros. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif retenu par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

5. En deuxième lieu, M. et Mme A... soutiennent que la présomption instituée par l'article 1649 quater A du code général des impôts ne trouve pas à s'appliquer en l'espèce, dès lors que M. A... s'est correctement acquitté de l'ensemble des obligations déclaratives découlant des dispositions précitées, lorsqu'il s'est présenté au bureau de détaxe de l'aéroport Roissy Charles de Gaulle, le 12 février 2013, qu'il a seulement commis une erreur sur le montant total des espèces qu'il convoyait, mais que cette erreur ne peut pas être retenue pour réputer son obligation de déclaration non exécutée en application de l'article 3 du règlement du règlement Parlement européen et du Conseil du 26 octobre 2005, dès lors que les dispositions de cet article n'étaient pas reprises en droit interne. Cependant, outre que l'article L. 1649 quater A du code général des impôts fait directement référence à ce règlement, celui-ci est, en application de l'article 288 du traité sur l'Union européenne, obligatoire dans tous ses éléments et directement applicable dans tout Etat membre et n'implique aucun texte de mise en oeuvre. En outre, le ministre relève sans être contredit que M. A... a également omis de mentionner dans sa déclaration l'identité des tiers pour le compte desquels il opérait le transfert. Il s'ensuit qu'en raison des manquements à ses obligations déclaratives, la somme en espèces que M. A... avait en sa possession est présumée constituer un revenu imposable entre les mains des requérants par application des dispositions de l'article 1649 quater A du code général des impôts. Le moyen tiré de ce que les présomptions édictées par cet article ne trouvent pas à s'appliquer doit, par suite, être écarté.

6. En troisième lieu, M. et Mme A... soutiennent que la totalité de ces espèces ne leur appartient pas, mais qu'elles proviennent de tiers résidant en France ayant acquitté un impôt sur ces sommes, désireux d'aider financièrement leur famille vivant au Mali ou en Mauritanie. Cependant, en se bornant à produire quatre attestations sur l'honneur, soit non datées, soient datées après l'envoi de la proposition de rectification leur notifiant les redressements envisagés, sans les étayer des pièces complémentaires établissant l'origine de ces sommes et leur imposition, M. et Mme A... ne renversent pas la présomption instituée par l'article 1649 quater A du code général des impôts.

7. En quatrième lieu, M. et Mme A... soutiennent qu'à hauteur de 105 660 euros, ces espèces appartiennent à M. F..., ainsi que celui-ci l'a reconnu lors de son audition par l'administration des douanes le 12 février 2013. Mais d'une part, ce montant ne correspond pas à celui, de 104 800 euros, que M. F... affirme avoir confié à M. A... dans son attestation du 13 janvier 2016. D'autre part, les déclarations approximatives de M. F... ne sont appuyées par aucun autre document établissant l'origine des fonds et leur caractère ou non imposable. Enfin, la circonstance invoquée par les requérants que le service des douanes a notifié à M. F... une infraction pour manquement à l'obligation déclarative de capitaux à l'exportation, infraction également notifiée à M. A..., n'implique nullement que cette somme appartient à M. F....

8. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 6, les seules attestations produites ne permettent pas d'établir qu'à hauteur de 21 520 euros, les espèces convoyées appartiennent à des tiers.

9. En sixième lieu, M. et Mme A... soutiennent qu'à hauteur de 8 000 euros, les espèces constituent en réalité une partie de leurs revenus sur laquelle ils ont déjà été imposés en France. Toutefois, ils n'assortissent leur affirmation d'aucun justificatif.

10. En dernier lieu, les requérants n'établissent pas le lien qui existerait entre les sommes en leur possession en février 2013 et le retrait, en espèces, de leur compte bancaire, le 9 juin 2015, de la somme de 95 340 euros.

11. Il résulte de ce qui précède que les intéressés n'apportent pas d'éléments susceptibles de faire échec à la présomption qui résulte de l'article 1649 quater A du code général des impôts.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté leur demande de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2013. Leur requête doit, par suite, être rejetée, y compris les conclusions, au demeurant irrecevables, faute d'un litige né et actuel, tendant au paiement des intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

N° 19VE01856 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE01856
Date de la décision : 15/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur le revenu.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Nicolas TRONEL
Rapporteur public ?: M. ILLOUZ
Avocat(s) : CABINET STEERING LEGAL

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-04-15;19ve01856 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award