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18/03/2021 | FRANCE | N°19VE04113

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 18 mars 2021, 19VE04113


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de condamner le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation des préjudices résultant du harcèlement moral dont elle estime avoir été victime.

Par un jugement n° 1810096 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2019, Mme B..., représentée par Me C..., avocat,

demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner le département de la Seine-Sai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Montreuil de condamner le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation des préjudices résultant du harcèlement moral dont elle estime avoir été victime.

Par un jugement n° 1810096 du 19 novembre 2019, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 16 décembre 2019, Mme B..., représentée par Me C..., avocat, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner le département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation des préjudices résultant du harcèlement moral dont elle a été victime.

Elle soutient que :

- les premiers juges ont inexactement apprécié les faits de l'espèce ;

- elle est victime d'agissements répétés de harcèlement moral et de discriminations de la part de sa hiérarchie, depuis plusieurs années ; sa mutation, à compter du 28 août 2017, au collège Carrière de Gournay-sur-Marne, doit être regardée comme une sanction ; elle a été placée en congé de maladie à de nombreuses reprises en raison de ces agissements, contraires aux dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-4 du code du travail ; elle a déposé une plainte pour ces faits le 12 septembre 2017 ; l'administration n'a pas respecté ses obligations en matière de sécurité des agents ; ses bulletins de paie comportent des erreurs manifestes et intentionnelles ; les agissements en cause ont excédé le cadre de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique ;

- elle a subi, en raison de ces agissements, des préjudices qui doivent être réparés à hauteur de la somme de 150 000 euros.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- le décret n° 2007-913 du 15 mai 2007 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Clot, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., pour Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... a été engagée par le département de la Seine-Saint-Denis en qualité d'agent non titulaire pour la période du 3 avril 2008 au 30 juin 2013, afin d'exercer les fonctions d'aide de cuisine au sein du collège du Clos-Saint-Vincent de Noisy-le-Grand. L'intéressée a été nommée adjoint technique des établissements d'enseignement le 1er juin 2013 et titularisée à compter du 1er décembre 2013. A compter du 4 novembre 2013, elle a été affectée, à sa demande, au collège Victor Hugo de Noisy-Le-Sec puis au collège François Mitterrand de Noisy-Le-Sec, sur un poste d'aide en cuisine. Mme B... a ensuite été affectée, à sa demande, au collège Le Clos-Saint-Vincent du 9 mai au 27 août 2017. Enfin, elle a été affectée, à compter du 28 août 2017, au collège Carrière de Gournay-sur-Marne. Mme B... relève appel du jugement du 19 novembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département de la Seine-Saint-Denis à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation de ses préjudices résultant des agissements répétés de harcèlement moral dont elle estime avoir été victime.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si la requérante soutient que les premiers juges ont inexactement apprécié les faits de l'espèce, un tel moyen, qui se rattache au bien-fondé du raisonnement suivi par le tribunal administratif, n'est pas de nature à affecter la régularité du jugement attaqué. Il doit, dès lors, être écarté.

Au fond :

3. Aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la rémunération, la formation, l'évaluation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé ou ayant enjoint de procéder aux agissements définis ci-dessus ".

4. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. Pour être qualifiés de harcèlement moral, ces agissements doivent être répétés et excéder les limites de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique.

5. Mme B... soutient qu'elle a été victime, pendant plusieurs années, d'agissements répétés de harcèlement moral et de discrimination de la part de sa hiérarchie et que l'administration a méconnu son obligation de sécurité et de protection de la santé de ses agents.

6. En premier lieu, il résulte de l'instruction, notamment de deux rapports établis le 31 août 2017 par l'adjoint-gestionnaire du collège Eugène-Carrière et le 25 juin 2018 par la gestionnaire des agents techniques des collèges, et d'un courrier circonstancié adressé le 23 avril 2018 au conseil de la requérante par le directeur adjoint de la gestion des carrières et des rémunérations du département de la Seine-Saint-Denis, que Mme B... entretient, de manière récurrente depuis 2013, des relations conflictuelles tant avec une partie de ses collègues qu'avec sa hiérarchie, et ceci au sein des différents établissements dans lesquels elle a pu être affectée. A cet égard, si Mme B... soutient que les différentes affectations dont elle a fait l'objet depuis 2013 établissent la réalité du harcèlement moral et des discriminations dont elle s'estime victime, il résulte de l'instruction que ces mutations, demandées pour certaines par l'intéressée, visaient à mettre un terme aux relations conflictuelles susmentionnées et à rétablir ainsi un climat de sérénité au sein des établissements concernés. Aucune des pièces versées au dossier ne permet de regarder ces changements d'affectation comme des sanctions déguisées, ainsi que le soutient l'intéressée. Par ailleurs, la circonstance que la hiérarchie de Mme B... lui a demandé, le 28 août 2017, de nettoyer le réfectoire de l'établissement ne caractérise pas, en elle-même, une situation de harcèlement moral, dès lors que cette tâche n'est incompatible ni avec les missions définies par sa fiche de poste, laquelle prévoit notamment le " nettoyage des matériels et des locaux de cuisine ", ni avec l'article 4 du décret n° 2007-913 du 15 mai 2007 portant statut particulier du cadre d'emplois des adjoints techniques territoriaux des établissements d'enseignement, aux termes duquel " les agents classés au grade d'adjoint technique territorial des établissements d'enseignement sont notamment chargés de fonctions d'entretien courant des locaux et des surfaces non bâties des établissements d'enseignement, qui incluent le maintien en bon état de fonctionnement des installations et la participation aux services de magasinage et de restauration. (...) ". Si la requérante soutient que son état de santé ne lui permettait pas d'accomplir cette tâche et produit notamment à cet égard un certificat médical établi le 27 novembre 2017, elle n'établit pas avoir présenté à l'administration une demande tendant à l'aménagement de son poste de travail. Si Mme B... produit, au soutien de son allégation selon laquelle le chef d'établissement aurait eu la volonté de l'évincer du service, des attestations établies le 5 mars 2018 par une collègue et le 19 février 2018 par l'adjointe-gestionnaire du collège Carrière de Gournay-sur-Marne, ces déclarations ne sont pas corroborées par les autres pièces du dossier. Si la requérante fait également état d'erreurs intentionnelles dans le calcul de son traitement, cette allégation n'est établie par aucune des pièces du dossier. En outre, il ne résulte pas davantage de l'instruction que les agissements de l'administration, invoqués par la requérante, auraient dépassé le cadre de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique ainsi qu'elle le soutient. A cet égard, la circonstance que Mme B... a porté plainte le 12 septembre 2017 pour les faits qu'elle impute à sa hiérarchie ne constitue pas, par elle-même, la preuve des agissements constitutifs de harcèlement moral ou de discriminations qu'elle dénonce. Enfin, si Mme B... fait valoir qu'elle a été placée en congé de maladie à de nombreuses reprises entre 2013 et 2018, il ne résulte pas de l'instruction, ainsi qu'il vient d'être dit, que la dégradation de son état de santé résulterait d'agissements constitutifs de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie. De même, les certificats médicaux produits par la requérante, établis les 3 juin 2013 et 3 octobre 2019 par des médecins généralistes sont insuffisamment circonstanciés. Il résulte de ce qui précède que les éléments de fait exposés par Mme B... ne permettent pas de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.

7. En second lieu, il résulte des éléments exposés ci-dessus que Mme B..., qui ne peut utilement invoquer les dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-4 du code du travail qui ne lui sont pas applicables, n'est pas fondée à soutenir que l'administration aurait méconnu son obligation de sécurité et de protection de la santé au travail.

8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... le versement de la somme que demande le département de la Seine-Saint-Denis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département de la Seine-Saint-Denis au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 19VE04113 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE04113
Date de la décision : 18/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-07-01-01 Fonctionnaires et agents publics. Statuts, droits, obligations et garanties. Statut général des fonctionnaires de l'État et des collectivités locales. Droits et obligations des fonctionnaires (loi du 13 juillet 1983).


Composition du Tribunal
Président : Mme SIGNERIN-ICRE
Rapporteur ?: M. Thierry ABLARD
Rapporteur public ?: M. CLOT
Avocat(s) : AZANCOT

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-03-18;19ve04113 ?
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