Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au président du tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2019 par lequel le préfet de l'Essonne a ordonné son transfert aux autorités allemandes.
Par un jugement n° 1908955 du 10 janvier 2020, le juge désigné du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2020, M. B..., représenté par Me Jaslet, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement attaqué ;
2° d'annuler l'arrêté du 13 novembre 2019 ;
3° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale, ainsi que le formulaire destiné à l'OFPRA, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, ou à défaut de réexaminer sa situation ;
4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière dès lors que la brochure A ne lui a pas été remise dans le cadre de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile ;
- en ne mettant pas en oeuvre la clause discrétionnaire de souveraineté prévue par l'article 17 § 1 du règlement Dublin, alors que sa demande d'asile a été définitivement rejetée par l'Allemagne et que l'Afghanistan connaît une situation de violence aveugle sur l'ensemble du territoire qui expose les civils à un risque important de mort, de torture ou de traitements inhumains ou dégradants, le préfet a entaché son arrêté de transfert d'une erreur manifeste d'appréciation, d'erreur de droit, d'erreur de fait, d'insuffisance de motivation, d'absence d'examen sérieux et de méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013,
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique,
- les décrets n° 2020-1404 et 2020-1405 du 18 novembre 2020 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant afghan né le 2 février 1988, a présenté une demande d'asile le 13 août 2019. La consultation du fichier Eurodac ayant fait apparaître qu'il avait présenté une demande d'asile auprès des autorités allemandes, demande rejetée comme irrecevable le 24 janvier 2018, le préfet de l'Essonne lui a notifié un arrêté de transfert le 13 novembre 2019. Il relève appel du jugement du 10 janvier 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement et notamment : a) des objectifs du présent règlement (...) b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée (...) 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel (...) ". Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et en tout état de cause en temps utile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend.
3. M. B... soutient sans être contredit que, s'il s'est vu remettre le guide du demandeur d'asile en France, la brochure B " Je suis sous procédure Dublin. Qu'est-ce que cela signifie ' ", et la brochure Eurodac lors de ses entretiens individuels en préfecture, les 9 et 12 août 2019, il n'a pas reçu la brochure A " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de ma demande ' ", qui constitue la brochure commune prévue par les dispositions de l'article 4 du règlement. Dès lors qu'il n'est pas établi qu'il a reçu une information complète sur ses droits, alors que cette information complète constitue une garantie pour l'intéressé, M. B... est fondé à soutenir que l'arrêté contesté est intervenu en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 4 du règlement (UE) n° 604-2013 du 26 juin 2013 et qu'il doit être annulé.
4. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que c'est à tort que le tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Il s'ensuit que le jugement du 10 janvier 2020 et l'arrêté du 13 novembre 2013 doivent être annulés.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. M. B... ayant été transféré le 14 février 2020, il n'y a pas lieu d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer une attestation de demande d'asile en procédure normale.
Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
6. M. B... n'a pas présenté de demande d'aide juridictionnelle. Son conseil ne peut par suite se prévaloir des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1908955 du 10 janvier 2020 du tribunal administratif de Versailles est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 13 novembre 2019 du préfet de l'Essonne portant transfert de M. B... aux autorités allemandes est annulé.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.
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N° 20VE00196