La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/01/2021 | FRANCE | N°19VE04222

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 12 janvier 2021, 19VE04222


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au président du tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit.

Par un jugement n° 1908480 du 12 novembre 2019, le juge désigné du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces compléme

ntaires, enregistrées le 26 décembre 2019 et les 16 et 20 janvier 2020, M. A..., représenté par Me...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au président du tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2019 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit.

Par un jugement n° 1908480 du 12 novembre 2019, le juge désigné du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées le 26 décembre 2019 et les 16 et 20 janvier 2020, M. A..., représenté par Me Harir, avocat, demande à la cour :

1° de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2° d'annuler le jugement attaqué ;

3° d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2019 ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, et a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- le jugement attaqué n'est pas suffisamment motivé ;

- la motivation de l'arrêté contesté est stéréotypée ;

- l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire méconnaît l'article 21 de la convention d'application de l'accord de Schengen ;

- elle porte une atteinte excessive à sa vie privée et familiale en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- il devait bénéficier d'un délai de départ volontaire dès lors qu'il séjourne de manière stable et habituelle en France et qu'il pouvait y demeurer légalement jusqu'au 28 novembre 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1405 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience en application des dispositions de l'article R. 732-1-1 du code de justice administrative.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... relève appel du jugement du 12 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 novembre 2019 du préfet de la Seine-Saint-Denis lui faisant obligation de quitter le territoire français sans délai.

Sur la demande d'aide juridictionnelle provisoire :

2. Aux termes de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle : " L'aide juridictionnelle peut être demandée avant ou pendant l'instance. ". Aux termes de l'article 20 de cette loi : " Dans les cas d'urgence, sous réserve de l'application des règles relatives aux commissions ou désignations d'office, l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée soit par le président du bureau ou de la section compétente du bureau d'aide juridictionnelle, soit par la juridiction compétente ou son président. (...) "

3. M. A..., déjà représenté par un avocat, ne justifie pas du dépôt d'une demande d'aide juridictionnelle auprès du bureau d'aide juridictionnelle compétent et n'a pas joint à son appel une telle demande. Aucune situation d'urgence ne justifie qu'il soit fait application, en appel, des dispositions de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991. La demande d'aide juridictionnelle provisoire ne peut, dans ces conditions, qu'être rejetée.

Sur la régularité du jugement :

4. M. A... soutient que le tribunal n'a pas tiré les conclusions de ses propres constatations, et que les premiers juges ont entaché leur décision d'une erreur d'appréciation, en relevant que l'arrêté contesté mentionnait à tort qu'il avait déclaré vivre irrégulièrement sur le territoire français depuis le 1er mars 2013, ce qui révèle selon lui le manque de sérieux de l'examen de sa situation, sans en déduire que cet arrêté est insuffisamment motivé. Ces moyens procèdent, toutefois, d'une contestation du bien-fondé du jugement et non de sa régularité. En indiquant que le préfet avait présenté à l'audience une demande de substitution de motif, que M. A... avait déclaré lors de son interpellation être entré pour la dernière fois sur le territoire français en décembre 2018, qu'il ne justifiait pas être entré depuis moins de trois à la date de l'arrêté contesté et que la substitution de ce motif de fait ne le privait d'aucune garantie, le premier juge a suffisamment motivé sa décision. Il s'ensuit qu'à les supposer soulevés, les moyens d'irrégularité du jugement doivent être écartés.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

5. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. _ L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : [...] 2° Si l'étranger s'est maintenu sur le territoire français au-delà de la durée de validité de son visa ou, s'il n'est pas soumis à l'obligation du visa, à l'expiration d'un délai de trois mois à compter de son entrée sur le territoire sans être titulaire d'un premier titre de séjour régulièrement délivré ; ". Et aux termes de l'article 21 de la convention d'application de l'accord de Schengen du 19 juin 1990 : " 1. Les étrangers titulaires d'un titre de séjour délivré par une des Parties Contractantes peuvent, sous le couvert de ce titre ainsi que d'un document de voyage, ces documents étant en cours de validité, circuler librement pendant une période de trois mois au maximum sur le territoire des autres Parties Contractantes (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., ressortissant pakistanais né le 12 mars 1994, bénéficiaire de la protection subsidiaire en Italie et titulaire d'un permis de séjour délivré par les autorités italiennes, a déclaré lors de son interpellation par les services de police être " revenu en France en décembre 2018 ". Au cours de l'audience devant le tribunal, il a déclaré être entré en France, en train, en août 2019 depuis l'Italie et n'avoir pas conservé ses titres de transport. S'il produit en appel un billet à son nom pour un trajet Milan-Paris en bus le 28 août 2019, la réalité de son entrée en France, en dernier lieu, à cette date, ne peut être regardée comme établie par cette pièce produite tardivement qui contredit ses déclarations précédentes. Par suite, M. A..., qui ne bénéficiait plus à la date de l'arrêté contesté de la liberté de circulation dans l'espace Schengen pendant trois mois attachée à son titre de séjour italien, pouvait légalement faire l'objet d'une décision l'obligeant à quitter le territoire en application des dispositions citées au point 5.

7. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". En application de ces stipulations, il appartient à l'autorité administrative qui envisage de refuser l'admission au séjour et d'éloigner un ressortissant étranger en situation irrégulière d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise.

8. M. A... ne justifie d'aucune attache familiale en France, ni de ses conditions de séjour. Célibataire sans enfant, il a déclaré être sans profession, n'avoir aucune ressource, et être hébergé à titre gratuit chez un cousin. Dans ces circonstances, l'arrêté litigieux n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Pour les mêmes motifs, il n'est pas entaché d'une erreur manifeste.

Sur la légalité de la décision portant refus de délai de départ volontaire :

9. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers te du droit d'asile : " (...) l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce (...) qu'il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ".

10. M. A..., qui avait fait l'objet d'une précédente décision l'obligeant à quitter le territoire prise à son encontre le 1er février 2017, suite au refus d'asile qui lui avait été opposé par les autorités françaises, fait valoir qu'il demeure de manière stable et habituelle rue Théroigne de Méricourt à Paris. Toutefois l'attestation produite, qui mentionne qu'il est hébergé à cette adresse depuis le 12 décembre 2019, soit une date postérieure à la décision contestée, n'est pas de nature à établir qu'en lui refusant le bénéfice d'un délai de départ volontaire, le préfet a fait une inexacte application de ces dispositions.

11. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Il s'ensuit que la requête doit être rejetée, y compris, en tout état de cause, ses conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

2

N° 19VE04222


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19VE04222
Date de la décision : 12/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

15-05-045-03 Communautés européennes et Union européenne. Règles applicables.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Odile DORION
Rapporteur public ?: M. MET
Avocat(s) : HARIR

Origine de la décision
Date de l'import : 27/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2021-01-12;19ve04222 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award