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29/12/2020 | FRANCE | N°18VE02579

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 29 décembre 2020, 18VE02579


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par six requêtes, Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles :

- d'annuler les arrêtés du 28 juillet et du 2 septembre 2014 par lesquels le maire de la commune de Montlhéry a, d'une part, retiré l'arrêté du 6 juin 2014 par lequel il l'avait placée en congé longue maladie, d'autre part, l'a placée en disponibilité d'office jusqu'au 7 octobre 2014, ainsi que les arrêtés du maire des 7 octobre 2014, 26 juin et 14 décembre 2015 et 19 janvier 2017 prolongeant cette mise en disp

onibilité ;

- d'annuler le titre exécutoire du 10 décembre 2014 par lequel la comm...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par six requêtes, Mme C... D... a demandé au tribunal administratif de Versailles :

- d'annuler les arrêtés du 28 juillet et du 2 septembre 2014 par lesquels le maire de la commune de Montlhéry a, d'une part, retiré l'arrêté du 6 juin 2014 par lequel il l'avait placée en congé longue maladie, d'autre part, l'a placée en disponibilité d'office jusqu'au 7 octobre 2014, ainsi que les arrêtés du maire des 7 octobre 2014, 26 juin et 14 décembre 2015 et 19 janvier 2017 prolongeant cette mise en disponibilité ;

- d'annuler le titre exécutoire du 10 décembre 2014 par lequel la commune de Monthléry a mis à sa charge une somme de 6 649,61 euros au titre des traitements indûment perçus du fait de son placement en congé longue maladie par arrêté du 6 juin 2014, du fait du retrait de cet arrêté le 28 juillet 2014 ;

- d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2016 par lequel le maire de Montlhéry a refusé de regarder comme imputable au service l'affection dont elle souffre ;

- en conséquence de l'annulation de l'arrêté du 28 juillet 2014, d'enjoindre à la commune de rétablir son plein traitement sur la période concernée dans le délai de quinze jours suivant la date de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 300 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de l'indemniser à hauteur de son plein traitement pour la période concernée ;

- en conséquence de l'annulation de l'arrêté du 6 septembre 2016, d'enjoindre à la commune de Montlhéry de la placer dans une position correspondant à sa situation dans un délai de trois semaines suivant la date de notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

- de condamner la commune de Montlhéry à lui verser une somme de 15 000 euros en réparation de son préjudice moral et de ses troubles dans ses conditions d'existence nés de l'illégalité des 28 juillet et 2 septembre 2014 et du titre exécutoire.

Par un jugement n°1407171, 1500283, 1507476, 1601381, 1607251 et 1701731 du 25 mai 2018, le tribunal administratif de Versailles a annulé l'ensemble des décisions attaquées, prononcé la décharge du paiement de la somme de 6 649,61 euros mise à sa charge par le titre exécutoire du 10 décembre 2014, enjoint à la commune de Montlhéry de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme D... à compter du 4 août 2013 et de tirer les conséquences financières du placement illégal de Mme D... à mi- traitement depuis le 8 avril 2013, mis à la charge de la commune le versement d'une somme de 3000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions de la requête, ainsi que les conclusions présentées par la commune, tendant à ce que soit ordonné une expertise.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 25 juillet 2018, la commune de Montlhéry, représentée par Me Bineteau, avocat, demande à la cour :

1° à titre principal, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Versailles ;

2° à titre subsidiaire, de le réformer en tant qu'il a fait droit aux conclusions à fin d'annulation de chaque décision, aux conclusions à fin d'injonction et en décharge et en ce qu'il a mis à sa charge le versement d'une somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles ;

3° à titre infiniment subsidiaire, d'ordonner avant dire droit une expertise médicale ;

4° de mettre à la charge de Mme D..., le versement d'une somme de 6 000 euros au titre des frais irrépétibles.

Elle soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement attaqué :

- pour ce qui concerne la requête n°1500283, dirigée contre l'arrêté du 7 octobre 2014 et le titre exécutoire du 10 décembre 2014, le tribunal n'a pas statué sur la fin de non recevoir tirée de l'irrecevabilité de certaines conclusions, en ce qu'elles se rapportaient à un litige distinct ;

- les premiers juges ont statué infra petita sur sa requête n°1407171, sans tenir compte des arguments relatifs à l'article 25 du décret du 30 juillet 1987 ;

- le jugement est aussi entaché d'une contradiction de motifs en son point 12, dès lors que les premiers juges ont estimé qu'elle ne contestait pas les avis des médecins experts et que ce faisant, ils n'ont pas ordonné d'expertise, alors qu'elle a contesté l'imputabilité au service de la pathologie de Mme D....

S'agissant de la décision du 28 juillet 2014 :

- elle pouvait retirer la décision du 6 juin 2014, en raison de son illégalité ;

- la commune ne pouvait placer l'intéressée en congé de longue maladie, dès lors que le comité médical n'avait été saisi ni par la commune, en vertu de l'article 24 du décret du 30 juillet 1987, ni par l'agent, en application de l'article 25 du même décret ;

- le vice dans la saisine du comité médical n'entache pas le déroulé d'une procédure, mais porte sur un droit exercé par l'agent ou la collectivité ;

- ce vice a, en tout état de cause, eu une incidence sur le sens de la décision, dès lors qu'elle se serait cru liée par l'avis du comité médical.

S'agissant de l'arrêté du 6 septembre 2016 :

- l'avis de la commission de réforme ne lie pas le maire ;

- le lien de causalité direct entre la pathologie psychiatrique de Mme D... et le service, n'est pas démontré.

S'agissant la décision du 2 septembre 2014 de placement en disponibilité d'office et les décisions des 7 octobre 2014, 26 juin et 14 décembre 2015 et 19 janvier 2017 prolongeant cette mise en disponibilité subséquentes de prolongation de ce placement :

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en subordonnant l'invitation au reclassement faite en même temps que la décision de retrait, à la réponse au recours gracieux formé par l'agent le 2 août 2014 ;

- Mme D... n'a pas donné suite à l'invitation à présenter une demande de reclassement qui lui a été faite.

S'agissant du titre de recette du 10 décembre 2014 :

- le titre de recette n'est pas entaché d'illégalité, dès lors que les décisions de retrait du 28 juillet 2014 et la décision du 6 septembre 2016 ne sont elles-mêmes pas entachées d'illégalité.

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n°2003-1306 du 26 décembre 2003 ;

- le décret n°87-602 du 30 juillet 1987 ;

- le décret n°86-68 du 13 janvier 1986 ;

- le décret n°85-1054 du 30 septembre 1985 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteur public,

- et les observations de Me A... pour la commune de Montlhéry.

Une note en délibéré présentée pour la commune de Montlhéry a été enregistrée le 16 décembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., agent public territorial de la commune de Montlhéry depuis 1998 et titularisée depuis 2002 au grade d'agent du patrimoine de 2ème classe stagiaire, a été affectée auprès de la maison du patrimoine de la commune. Durant son second congé de maternité, elle a sollicité une demande d'aménagement des horaires et un passage en temps partiel à 80%. Néanmoins, par courrier du 6 décembre 2012, la collectivité lui a accordé cette réduction des heures de travail, tout en rejetant sa demande de modification des conditions de travail, avant de décider de l'affecter, par courrier du 28 décembre 2012, au service de la population de la commune. Cette nouvelle affectation a été contestée par Mme D... les 10 janvier et 22 avril 2013, mais confirmée par le maire le 31 mai 2013. Mme D... a alors saisi le tribunal administratif de Versailles qui a annulé cette décision de mutation d'office par un jugement n° 1305321 du 8 mars 2016.En parallèle, Mme D... a présenté des arrêts maladie à compter du mois de février 2013 et a reçu un courrier du 21 mars 2013 l'invitant à se présenter à une visite médicale de reprise. Par un certificat médical en date du 4 avril 2013, la médecine du travail a considéré qu'elle était inapte à la reprise de ses fonctions. Par la suite, le comité médical, saisi les 23 juillet 2013 et 10 février 2014 par la commune de Montlhéry, a rendu un avis le 22 mai 2014, tendant à octroyer à Mme D... le bénéfice d'un congé de longue maladie d'un an à compter du 8 avril 2013, prolongé de six mois en congé de longue durée à son expiration. Le maire de la commune de Montlhéry a, conformément à cet avis, placé Mme D... en congé longue maladie à plein traitement du 8 avril 2013 au 7 avril 2014 et en congé de longue durée du 8 avril au 7 octobre 2014, par un arrêté du 6 juin 2014. Cependant, par un arrêté du 28 juillet 2014, le maire de cette commune a procédé au retrait de l'arrêté du 6 juin 2014, en plaçant Mme D... à demi-traitement et en 'l'invitant, par ailleurs, à présenter une demande reclassement en vue de sa mise en disponibilité d'office. Par un recours gracieux du 2 août 2014, Mme D... a contesté cette mesure, mais celui-ci était rejeté par le maire par courrier du 3 septembre 2014. Par un arrêté du 2 septembre 2014, le maire de la commune de Montlhéry a placé Mme D... en disponibilité d'office jusqu'au 7 octobre 2014. Ce placement a été, par la suite, prolongé à plusieurs reprises, notamment par des décisions des 7 octobre 2014, 26 juin 2015, 14 décembre 2015 et 19 janvier 2017. Par ailleurs, le 29 septembre 2014, la commune lui a indiqué son intention de lui opposer un titre exécutoire, afin de récupérer les parts de salaires indument perçues. Par un recours gracieux formé le 24 octobre 2014, Mme D... a contesté la décision de prolongation en disponibilité du 7 octobre et a présenté ses observations en vue de l'édiction de ce titre. Néanmoins, par un titre exécutoire du 10 décembre 2014 la commune de Montlhéry a mis à sa charge le versement d'une somme de 6 649,61 euros au titre des traitements indûment perçus du fait de son placement en congé longue maladie par l'arrêté du 6 juin 2014, qui a été retiré par arrêté du 28 juillet 2014. Par deux décisions du 8 janvier 2015, le maire a rejeté son recours gracieux et décidé la prolongation de sa mise en disponibilité d'office. Enfin, nonobstant l'avis favorable de la commission de réforme du 31 mars 2016, le maire a décidé le 6 septembre 2016, de ne pas reconnaître l'imputabilité de sa pathologie au service. Par un jugement un jugement n°1407171, 1500283, 1507476, 160138, 1607251 et 1701731, dont la commune relève appel, le tribunal administratif de Versailles a fait partiellement droit aux six requêtes présentées par Mme D... en annulant l'ensemble des décisions attaquées, en prononçant la décharge du paiement de la somme de 6 649,61 euros mise à sa charge par le titre exécutoire du 10 décembre 2014, en enjoignant à la commune de Montlhéry de reconnaître l'imputabilité au service de la pathologie de Mme D... à compter du 4 août 2013 et de tirer les conséquences financières du placement illégal de Mme D... à mi- traitement depuis le 8 avril 2013, en mettant à sa charge le versement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et en rejetant le surplus des conclusions, ainsi que les conclusions présentées en défense, tendant à ce que soit ordonnée une expertise.

Sur la régularité du jugement :

2. En premier lieu, la commune de Montlhéry fait valoir que, s'agissant de l'instance n°1500283 dirigées initialement contre le titre exécutoire du 10 décembre 2014 et la décision du 7 octobre 2014 de renouvellement de la mise en disponibilité d'office de Mme D..., les premiers juges n'ont pas répondu à sa fin de non recevoir, soulevée dans son mémoire du 10 novembre 2016, tirée de ce que les conclusions à fin d'annulation présentées par Mme D..., aux termes de ses mémoires complémentaires et dirigées contre les arrêtés des 8 janvier et 26 juin 2015, ainsi que la décision implicite à intervenir sur sa demande présentée le 11 mai 2015, étaient irrecevables, dès lors que ces conclusions relèvent d'un litige distinct. Toutefois, il ressort des pièces du dossier qu'en cours d'instruction, une demande de mémoire récapitulatif fondée sur les dispositions de l'article R. 611-8-1 du code de justice administrative a été présentée à Mme D... et que cette mesure d'instruction indiquait que les conclusions et les moyens non repris dans ce mémoire, devaient être regardés comme abandonnés. Par un mémoire récapitulatif, enregistré le 31 janvier 2018, Mme D... a limité ses conclusions à fin d'annulation aux seules décisions des 7 octobre et du 10 décembre 2014 en abandonnant, ainsi ses conclusions dirigées contre les arrêtés des 8 janvier et 26 juin 2015, ainsi que la décision implicite à intervenir sur sa demande présentée le 11 mai 2015. Par suite, le moyen doit être écarté.

3. En second lieu, la commune de Montlhéry fait valoir que, s'agissant du recours n°1407171, les premiers juges ont statué infra petita, sans tenir compte de ses arguments en défense relatifs à l'article 25 du décret du 30 juillet 1987. Toutefois, il ressort des points 5. à 9. du jugement attaqué, qui, notamment, citent les articles 24 et 25 de ce décret, rappellent la teneur de la combinaison de ces dispositions et précisent l'analyse des premiers juges qui en découlent, que le tribunal administratif de Versailles a nécessairement examiné l'ensemble des arguments invoqués en défense. Par suite, le moyen doit aussi être écarté.

4. En troisième lieu, la commune de Montlhéry fait valoir que le jugement attaqué serait entaché d'une contradiction de motif en son point 12, dès lors que les premiers juges ont estimé qu'elle ne contestait pas les avis des médecins experts et que ce faisant, ils n'ont pas ordonné d'expertise, alors qu'elle a contesté l'imputabilité au service de la pathologie de Mme D.... Toutefois, il résulte de ce point 12. que, d'une part, les premiers juges ont pris en considération la contestation par la commune tant de l'existence de la pathologie dont souffre Mme D..., que du lien de causalité entretenu avec le service et d'autre part, qu'ils ont nécessairement considéré que les pièces du dossier suffisaient à trancher ces questions posées par le litige, sans avoir recours à une expertise. Par suite, le moyen doit également être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

S'agissant de la décision du 28 mai 2014 retirant l'arrêté du 6 juin 2014 plaçant Mme D... en congé longue maladie à plein traitement du 8 avril 2013 au 7 avril 2014 et en congé de longue durée du 8 avril au 7 octobre 2014 :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée : " Le fonctionnaire en activité a droit (...) ;2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le bénéfice de ces dispositions est subordonné à la transmission par le fonctionnaire, à son administration, de l'avis d'arrêt de travail justifiant du bien-fondé du congé de maladie, dans un délai et selon les sanctions prévus en application de l'article 58.Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite, à l'exception des blessures ou des maladies contractées ou aggravées en service, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident, même après la date de radiation des cadres pour mise à la retraite. Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. La collectivité est subrogée dans les droits éventuels du fonctionnaire victime d'un accident provoqué par un tiers jusqu'à concurrence du montant des charges qu'elle a supportées ou supporte du fait de cet accident. Elle est admise à poursuivre directement contre le responsable du dommage ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées audit fonctionnaire pendant la période d'indisponibilité de celui-ci par dérogation aux dispositions de l'article 2 de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques ;3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Le fonctionnaire qui a obtenu un congé de longue maladie ne peut bénéficier d'un autre congé de cette nature s'il n'a pas auparavant repris l'exercice de ses fonctions pendant un an. Les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas du 2° du présent article sont applicables aux congés de longue maladie ;4° A un congé de longue durée, en cas de tuberculose, maladie mentale, affection cancéreuse, poliomyélite ou déficit immunitaire grave et acquis, de trois ans à plein traitement et de deux ans à demi-traitement. Le fonctionnaire conserve ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence (...) ".

6. En deuxième lieu, les articles 24 et 25 du décret du 30 juillet 1987 susvisé prévoient que le placement en congé longue maladie prévu au 3° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 peut intervenir, soit à la demande de la collectivité territoriale, soit à la demande de l'agent. L'article 24 dispose ainsi que " Lorsque l'autorité territoriale estime, au vu d'une attestation médicale ou sur le rapport des supérieurs d'un fonctionnaire, que celui-ci se trouve dans la situation prévue à l'article 57 (3° ou 4°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée, elle peut provoquer l'examen médical de l'intéressé dans les conditions prévues aux alinéas 3 et suivants de l'article 25 ci-dessous. Un rapport écrit du médecin du service de médecine professionnelle et préventive attaché à la collectivité ou établissement dont relève le fonctionnaire concerné doit figurer au dossier ". L'article 25 dispose pour sa part que " Pour bénéficier d'un congé de longue maladie ou de longue durée le fonctionnaire en position d'activité, ou son représentant légal, doit adresser à l'autorité territoriale une demande appuyée d'un certificat de son médecin traitant spécifiant qu'il est susceptible de bénéficier des dispositions de l'article 57 (3° ou 4°) de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 susvisée. Le médecin traitant adresse directement au secrétaire du comité médical compétent un résumé de ses observations et les pièces justificatives qui peuvent être prescrites dans certains cas par l'arrêté visé à l'article 39 du présent décret. Au vu de ces pièces, le secrétaire du comité médical fait procéder à la contre-visite du demandeur par un médecin agréé compétent pour l'affection en cause. Le dossier est ensuite soumis au comité médical. Si le médecin agréé qui a procédé à la contre-visite ne siège pas au comité médical, il peut être entendu par celui-ci. L'avis du comité médical est transmis à l'autorité territoriale qui, en cas de contestation de sa part ou du fonctionnaire intéressé, le soumet pour avis au comité médical supérieur visé à l'article 5 du présent décret ".

7. En troisième lieu, l'article 17 du décret du 30 juillet 1987 susvisé dispose que " Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme. Le paiement du demi-traitement est maintenu, le cas échéant, jusqu'à la date de la décision de reprise de service, de reclassement, de mise en disponibilité ou d'admission à la retraite ". L'article 38 du même décret prévoit que " La mise en disponibilité visée aux articles 17 et 37 du présent décret est prononcée après avis du comité médical " et que " Le renouvellement de la mise en disponibilité est prononcé après avis du comité médical. Toutefois, lors du dernier renouvellement, l'avis est donné par la commission de réforme ". Il résulte de ces dispositions qu'à l'épuisement de ses droits à congés ordinaires, un agent ne peut reprendre le service sans avis favorable du comité médical et qu'en cas d'avis défavorable à la reprise, l'agent est, soit reclassé, soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite en cas d'inaptitude définitive.

8. Enfin, aux termes de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. ". La décision par laquelle une collectivité place un agent en congé de longue maladie ou en congé de longue durée est une décision créatrice de droit.

9. La commune de Montlhéry fait valoir que par son arrêté du 28 juillet 2014, elle a procédé au retrait de la décision du 6 juin 2014 qui était illégale, dès lors qu'elle ne pouvait placer Mme D... en congé de longue maladie, alors que le comité médical n'avait ni été saisi par la commune en vertu de l'article 24 du décret du 30 juillet 1987, ni par l'agent, en application de l'article 25 du même décret. Il ressort, en effet des pièces du dossier et, notamment, du courrier de saisine du comité médical en date du 10 février 2014 et de la décision du 3 septembre 2014 rejetant un recours gracieux formé par Mme D..., que l'autorité administrative a saisi le comité médical sur le fondement de l'article 17 du décret du 30 juillet 1987, dès lors que cet agent avait épuisé ses congés ordinaires. Au demeurant, il résulte des termes de l'avis du comité médical du 22 mai 2014 que si celui-ci a proposé un placement en congé de longue maladie de Mme D... pour une durée d'un an à compter du 8 avril 2013, prolongé de six mois en congé de longue durée à l'expiration de cette période, ce comité s'est également prononcé sur l'aptitude de cet agent à la reprise de ses fonctions, en concluant à une inaptitude temporaire pour une durée de 18 mois. Toutefois, les dispositions précitées ne s'opposent pas à ce qu'un agent ayant épuisé ses droits à congé ordinaire soit placé en congé de longue maladie, puis en congé de longue durée, dès lors que celui-ci n'est pas définitivement inapte à l'exercice de toutes fonctions et que son état de santé répond aux conditions de fond fixées à l'article 57 permettant de bénéficier de ces congés. Par suite, la commune de Montlhéry n'est pas fondée à soutenir qu'elle pouvait procéder au retrait de l'arrêté du 6 juin 2014, en raison de son illégalité. Dans ces conditions, l'appelante n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentée par Mme D... dirigées contre l'arrêté du 28 juillet 2014.

S'agissant de l'arrêté du 6 septembre 2016 de refus d'imputabilité de la maladie de Mme D... au service :

10. Une maladie contractée par un fonctionnaire, ou son aggravation, doit être regardée comme imputable au service si elle présente un lien direct avec l'exercice des fonctions ou avec des conditions de travail de nature à susciter le développement de la maladie en cause, sauf à ce qu'un fait personnel de l'agent ou toute autre circonstance particulière conduisent à détacher la survenance ou l'aggravation de la maladie du service.

11. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, du certificat médical du 4 avril 2013, des avis du comité médical du 22 mai 2014, confirmés par des avis des 27 novembre 2014 et 29 octobre 2015 prolongeant son congé de longue durée, de l'avis de la commission de réforme du 31 mars 2016 et des deux certificats médicaux des 2 avril et 14 mai 2014 que Mme D... souffre d'un syndrome dépressif qui l'a rendu temporairement inapte à la reprise de ses fonctions. Si la commune de Montlhéry ne conteste plus l'existence de cette pathologie, mais fait valoir qu'elle n'entretiendrait aucun lien avec le service, il ressort du certificat médical circonstancié du 14 mai 2014, lequel ne se borne pas seulement à reprendre les propos de Mme D... et de l'avis de la commission de réforme qui considère qu'" il existe un lien direct, certain et unique entre les lésions décrites et les fonctions habituelles de l'agent. Il n'existe pas de pathologie indépendante évoluant pour son compte ni d'état antérieur ", qu'il existe un lien de causalité entre le syndrome dépressif de Mme D... et l'exercice de ses fonctions. En particulier, il ressort des pièces du dossier que ce syndrome entretien un lien avec la mesure prise le 28 décembre 2012 de mutation d'office de l'intéressée auprès du service de la population. Par suite, en admettant même que ce lien de causalité ne soit pas exclusif avec l'exercice par Mme D... de ses fonctions et que l'appelante n'a pas décidé la mutation de Mme D... dans l'intention de lui nuire, la commune de Montlhéry n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, les premiers juges ont annulé l'arrêté du 6 septembre 2016 portant refus d'imputabilité de la maladie de Mme D... au service.

S'agissant du titre de recette du 10 décembre 2014 :

12. Il résulte de l'instruction que le titre de recette en litige met à la charge de Mme D... une somme de 6 649,61 euros correspondant aux traitements indûment perçus entre avril 2013 et juillet 2014, du fait de son placement irrégulier en congé longue maladie par un arrêté du 6 juin 2014, qui a été retiré le 28 juillet 2014. Eu égard à l'illégalité de l'arrêté du 28 juillet 2014, Mme D... doit être regardée comme ayant été placée en congé de longue maladie d'un an à compter du 8 avril 2013, prolongé de six mois en congé de longue durée du 8 avril 2014 au 7 octobre 2014. Par suite, eu égard à l'illégalité de cette décision, ainsi que, au surplus, à l'illégalité de l'arrêté du 6 septembre 2016, la commune de Montlhéry, n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont prononcé la décharge de cette somme.

S'agissant la décision du 2 septembre 2014 de placement en disponibilité d'office et les décisions des 7 octobre 2014, 26 juin et 14 décembre 2015 et 19 janvier 2017 prolongeant cette mise en disponibilité subséquentes de prolongation de ce placement :

13. L'article 19 du décret du 13 janvier 1986 précise que " La mise en disponibilité peut être prononcée d'office à l'expiration des droits statutaires à congés de maladie prévus au premier alinéa du 2°, au premier alinéa du 3° et au 4° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 et s'il ne peut, dans l'immédiat, être procédé au reclassement du fonctionnaire dans les conditions prévues aux articles 81 à 86 de la loi du 26 janvier 1984 ". Aux termes de l'article 81 de la même loi : " Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans les emplois d'un autre cadre d'emploi ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes / Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé ".

14. En vertu de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987, d'une part, le comité médical départemental donne un avis " sur l'octroi et le renouvellement des congés de maladie et la réintégration à l'issue des congés de maladie " et est obligatoirement consulté pour " la mise en disponibilité d'office pour raison de santé et son renouvellement (...) ". L'article 17 du même décret dispose que " Lorsque le fonctionnaire a obtenu pendant une période de douze mois consécutifs des congés de maladie d'une durée totale de douze mois, il ne peut, à l'expiration de sa dernière période de congé, reprendre son service sans l'avis favorable du comité médical. En cas d'avis défavorable, il est soit mis en disponibilité, soit reclassé dans un autre emploi, soit, s'il est reconnu définitivement inapte à l'exercice de tout emploi, admis à la retraite après avis de la commission de réforme ". Aux termes de l'article 37 du même décret " Le fonctionnaire ne pouvant, à l'expiration de la dernière période de congé de longue maladie ou de longue durée attribuable, reprendre son service est soit reclassé (...), soit mis en disponibilité, soit admis à la retraite après avis de la commission de réforme (...) ". L'article 38 du même décret précise que " La mise en disponibilité visée aux articles 17 (...) du présent décret est prononcée après avis du comité médical (...) sur l'inaptitude du fonctionnaire à reprendre ses fonctions (...) Le renouvellement de la mise en disponibilité est prononcé après avis du comité médical (...) ". L'article 1er du décret du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions prévoit par ailleurs que " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial ne lui permet plus d'exercer normalement ses fonctions et que les nécessités du service ne permettent pas d'aménager ses conditions de travail, le fonctionnaire peut être affecté dans un autre emploi de son grade après avis de la commission administrative paritaire / L'autorité territoriale procède à cette affectation après avis (...) du comité médical si un tel congé a été accordé (...) ". Aux termes de l'article 2 du même décret " Lorsque l'état physique d'un fonctionnaire territorial, sans lui interdire d'exercer toute activité, ne lui permet pas d'exercer des fonctions correspondant aux emplois de son grade, l'autorité territoriale (...), après avis du comité médical, invite l'intéressé soit à présenter une demande de détachement dans un emploi d'un autre corps ou cadres d'emplois, soit à demander le bénéfice des modalités de reclassement prévues à l'article 82 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ".

15. Il résulte de la combinaison des dispositions précitées, et notamment de l'article 57, cité au point 5. du présent arrêt, des articles 72 et 81 de la loi du 26 janvier 1984, de l'article 37 du décret du 30 juillet 1987 et de l'article 2 du décret du 30 septembre 1985, que lorsqu'un fonctionnaire a été, à l'issue de ses droits statutaires à congé de maladie, reconnu inapte à la reprise des fonctions qu'il occupait antérieurement et alors que, comme c'est le cas en l'espèce, le comité médical ne s'est pas prononcé sur sa capacité à occuper, par voie de réaffectation, de détachement ou de reclassement, un autre emploi, éventuellement dans un autre corps ou un autre grade, l'autorité hiérarchique ne peut placer cet agent en disponibilité d'office, sans l'avoir préalablement invité à présenter, s'il le souhaite, une demande de reclassement. La mise en disponibilité d'office peut alors être prononcée soit en l'absence d'une telle demande, soit si cette dernière ne peut être immédiatement satisfaite.

16. D'une part, il résulte de l'illégalité de l'arrêté du 28 juillet 2014 portant retrait de l'arrêté du 6 juin 2014, qu'ainsi qu'il a été énoncé ci-avant, que Mme D... doit être regardée comme ayant été placée en congé de longue maladie d'un an à compter du 8 avril 2013, prolongé de six mois en congé de longue durée du 8 avril 2014 au 7 octobre 2014. Par suite, elle ne pouvait être placée en disponibilité d'office pendant cette période de congé. Il en résulte que l'arrêté du 2 septembre 2014 est entaché d'erreur de droit.

17. D'autre part, l'illégalité de l'arrêté du 2 septembre 2014 emporte, pas voie de conséquence, l'illégalité de l'ensemble des arrêtés subséquents de prolongation du placement en disponibilité d'office qui ont été pris sur son fondement. En outre et en tout état de cause, il est constant que si la commune a invité Mme D... a présenté une demande de reclassement, cette invitation était contenue dans l'arrêté du 28 juillet 2014 qui était entaché d'illégalité et a été présentée en vue de la placer en disponibilité d'office à une période ou elle ne pouvait pas le décider. Dans ces conditions, la commune de Montlhéry, qui n'a pas réitéré cette invitation par la suite, ne peut également être regardée comme ayant valablement satisfait à l'obligation d'inviter l'agent à présenter une demande reclassement, préalablement à sa mise en disponibilité d'office. Par suite, la commune de Montlhéry n'est pas fondée à se plaindre de ce que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a fait droit aux conclusions à fin d'annulation dirigées contre ces décisions.

18. Il résulte de ce qui précède que la commune de Montlhéry n'est pas donnée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Versailles a fait aux conclusions à fin d'annulation et en décharge et à des conclusions à fin d'injonction, présentées par Mme D.... Par suite, la requête présentée par cette commune doit être rejetée.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

19. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".

20. Mme D... n'étant pas la partie perdante, les conclusions présentées par la commune de Montlhéry tendant à mettre à sa charge une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Montlhéry une somme de 3 000 euros à verser à Mme D... en application de ces mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par la commune de Montlhéry est rejetée.

Article 2 : La commune de Montlhéry versera à Mme D... une somme de 3 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

N° 18VE02579 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE02579
Date de la décision : 29/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Positions - Congés.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties - Garanties et avantages divers - Protection en cas d'accident de service.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Marc FREMONT
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : MPC AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-12-29;18ve02579 ?
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