Vu les procédures suivantes :
Procédure contentieuse antérieure :
Les syndicats SUD FPA Solidaires et CGT-AFPA, M. AM... O..., M. BC... AW..., Mme AP... F..., M. BB... AO..., M. AZ... AC..., M. A... AX..., M. BE... P..., Mme M... Q..., M. D... R..., Mme Z... S..., Mme AL... T..., M. BH...-S... BD..., Mme AU... AQ..., M. AH... U..., M. AR... H..., M. AH... I..., Mme AS... BG..., M. AE... V..., Mme AJ... X..., M. AI... J..., M. AA... AF..., Mme AB... Y..., M. AN... K..., M. AA... AT..., M. AZ... B..., Mme AY... N..., M. G... AV..., M. W... C... et Mme L... E... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 13 décembre 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale de l'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes.
Par un jugement n° 2001959 du 23 juillet 2020, le tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision.
Procédures devant la Cour :
I. Sous le n° 20VE02478, par une requête enregistrée le 24 septembre 2020 et un mémoire en réplique enregistré le 5 novembre 2020, l'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), représentée par Me Mathurin, avocat, demande à la cour :
1° d'annuler ce jugement et de confirmer la décision d'homologation du 13 décembre 2019 ;
2° de mettre à la charge des syndicats SUD FPA Solidaires et CGT-AFPA le versement de la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
3° de condamner solidairement les syndicats SUD FPA Solidaires et CGT-AFPA aux éventuels dépens.
L'AFPA soutient que :
- sur la légalité des catégories professionnelles définies dans le document unilatéral : la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) ne doit refuser l'homologation que s'il apparaît que les catégories ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations étrangères à la nature des fonctions exercées ou si une ou plusieurs catégories ont été créées uniquement dans le but de cibler certains salariés, afin de faciliter leur licenciement pour un motif inhérent à leur personne ; au cas d'espèce, les catégories d'emploi ont été clairement définies dans le cadre du PSE et ces catégories d'emploi n'ont pas été définies sur des considérations liées directement à l'organisation actuelle et future de l'AFPA ; la DIRECCTE d'Ile-de-France n'a pas commis d'erreur d'appréciation dans le contrôle des catégories professionnelles ;
- sur la légalité de la décision d'homologation au regard des obligations de prévention en matière de santé et de sécurité de l'AFPA : dans le cadre d'une procédure de licenciements économiques, le respect par l'employeur de ses obligations en matière de santé et de sécurité relève du contrôle de l'autorité administrative, puis du juge administratif ; ce contrôle s'opère au travers de la régularité du contenu du document unilatéral et de la consultation des instances représentatives du personnel ; la DIRECCTE d'Ile-de-France n'a en l'espèce commis aucune erreur de droit dans sa décision d'homologation ; les informations transmises aux instances représentatives du personnel et contrôlées par la DIRECCTE démontraient que l'AFPA avait respecté son obligation de prévention en matière de santé et de sécurité des salariés et apporté des éléments d'information précis sur des mesures de prévention adéquates ;
- les autres moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.
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II. Sous le n° 20VE02492, par une requête enregistrée le 25 septembre 2020, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion demande à la cour d'annuler ce jugement et de confirmer la décision d'homologation du 13 décembre 2019.
La ministre soutient que :
- sur la légalité des catégories professionnelles : le jugement du tribunal administratif de Montreuil est entaché d'un défaut de motivation, d'une erreur de droit, en ce qu'il a mal interprété les dispositions légales telles que précisées par la jurisprudence du Conseil d'Etat, d'une erreur de fait, en ce qu'il n'a pas tenu compte des informations apportées en défense et qui permettaient d'établir que les catégories professionnelles n'avaient pas été déterminées sur des considérations étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune ;
- sur le respect par l'employeur de son obligation en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs : le jugement du tribunal administratif de Montreuil est entaché d'un défaut de motivation, d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation.
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Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code du travail ;
l'ordonnance n° 20171386 du 22 septembre 2017 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Coudert,
- les conclusions de Mme Grossholz, rapporteur public,
- et les observations de Me Maturin pour l'AFPA, de Mme BA... et de Mme BF... pour la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, et de Me Krivine pour les syndicats SUD FPA Solidaires et CGT-AFPA et autres.
Considérant ce qui suit :
1. L'Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA) a engagé, en octobre 2018, un projet de réorganisation de ses activités comportant un plan de licenciement collectif. Un plan de sauvegarde de l'emploi, portant sur l'unité économique et sociale AFPA, composée de l'établissement public à caractère industriel et commercial AFPA et de deux sociétés par actions simplifiées unipersonnelles, AFPA Accès à l'Emploi et AFPA Entreprises, a en conséquence été élaboré. A l'issue des procédures de consultation des instances représentatives du personnel, une demande d'homologation du plan de sauvegarde de l'emploi a été adressée le 29 novembre 2019 à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, et de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) d'Ile-de-France. Par une décision du 13 décembre 2019, le directeur régional a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale AFPA. L'AFPA et la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion relèvent appel du jugement du 23 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision d'homologation.
Sur la jonction :
2. Les requêtes de l'AFPA et de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion sont dirigées contre un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a donc lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur la régularité du jugement :
3. Si la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion soutient que le jugement attaqué du tribunal administratif de Montreuil est insuffisamment motivé, il ressort de l'examen du jugement que ce moyen manque en fait et doit, par suite, être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Il ressort de l'examen du jugement attaqué que, pour annuler la décision du 13 décembre 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale de l'AFPA, le tribunal administratif de Montreuil s'est fondé sur les motifs tirés, d'une part, des erreurs de droit et d'appréciation dont cette décision est entachée pour avoir confirmé la légalité des catégories professionnelles définies par l'AFPA et, d'autre part, de l'erreur de droit dont cette décision est entachée pour ne pas avoir vérifié le caractère suffisant des mesures d'évaluation et de prévention des risques en matière de sécurité et de santé physique et mentale des salariés, prévues par l'AFPA.
En ce qui concerne la définition des catégories professionnelles concernées par le licenciement :
5. Aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en oeuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-24-1 du même code : " Dans les entreprises de cinquante salariés et plus, un accord collectif peut déterminer le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63 ainsi que les modalités de consultation du comité d'entreprise et de mise en oeuvre des licenciements. (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-24-2 du même code : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233-63. / Il peut également porter sur : / 1° Les modalités d'information et de consultation du comité d'entreprise (...) ; / 2° La pondération et le périmètre d'application des critères d'ordre des licenciements mentionnés à l'article L. 1233-5 ; / 3° Le calendrier des licenciements ; / 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées ; / 5° Les modalités de mise en oeuvre des mesures de formation, d'adaptation et de reclassement prévues aux articles L. 1233-4 et L. 1233-4-1 ". Enfin l'article L. 1233-57-3 du même code prévoit qu'en l'absence d'accord collectif, ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation comité d'entreprise et, le cas échéant, du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail et de l'instance de coordination mentionnée à l'article L. 4616-1, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1. (...) ".
6. En vertu de ces dispositions, il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles mentionnées au 4° de l'article L. 1233-24-2 cité ci-dessus, de se prononcer, sous le contrôle du juge administratif, sur la légalité de ces catégories professionnelles. A ce titre, elle doit s'assurer, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d'information et de consultation ainsi que des justifications qu'il appartient à l'employeur de fournir, de ce que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur, l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée.
7. Il ressort des pièces des dossiers que, pour regrouper les différents postes occupés par ses salariés au sein de catégories professionnelles, l'AFPA a distingué les métiers de formateurs des métiers liés aux fonctions " support ". S'agissant des premiers, l'analyse des formations a été faite pour chaque champ professionnel et dès lors que 50 % des compétences attendues étaient communes, les formateurs concernés ont été regroupés au sein de la même catégorie. S'agissant des métiers " support ", les regroupements ont été réalisés à partir de l'analyse des fiches emploi, de la formation initiale et/ou des compétences requises ainsi que du positionnement dans l'organisation et la hiérarchie. Ces travaux, corrigés pendant la procédure d'information et de consultation des instances représentatives du personnel, ont conduit à la définition de 326 catégories professionnelles dont 173 pour les fonctions de formateurs et 153 pour les fonctions " support ". Cette méthode exposée lors de la réunion du comité central d'entreprise le 29 novembre 2018, adaptée selon le type de métiers, est conforme aux principes énoncés au point 6 et vise à regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune.
8. Si les intimés font valoir que l'observatoire des compétences dont la direction de l'AFPA avait annoncé en 2015 la création dans le cadre de la mise en oeuvre de la gestion prévisionnelle des emplois, des compétences et des carrières, n'a jamais été mis en place, cette circonstance ne faisait cependant pas obstacle à ce que l'AFPA puisse regrouper les différents postes occupés par ses salariés au sein de catégories professionnelles définies conformément aux principes énoncés précédemment. En outre, s'il est également allégué que, s'agissant des métiers de formateurs, les ingénieurs de formation de la direction de l'ingénierie, de la formation et de la qualité ont dû déterminer le périmètre des compétences des formateurs dans des délais particulièrement contraints, cette circonstance ne permet pas davantage, en elle-même, de remettre en cause le bien-fondé des catégories définies par l'AFPA dès lors qu'il ressort des pièces des dossiers que les critères qui devaient guider leur analyse reposaient bien sur les domaines de compétences de ces formateurs.
9. Les syndicats et salariés font également valoir que la définition des catégories professionnelles, notamment celles des formateurs " F3 ", aurait été faite de manière différente selon les zones d'emploi. Toutefois le libellé d'emploi dont s'agit, propre aux formateurs, est lié à leur degré d'expertise et non au champ professionnel dans lequel ils interviennent sur la base duquel ils ont été à bon droit rattachés par l'AFPA à une catégorie d'emploi. De même, les fonctions de " directeur groupe 1 ", " manager ", " responsable de projet " ou " pilotage " ont été réparties au sein de catégories professionnelles différentes, définies en fonction des champs de compétence des intéressés et de leur niveau de responsabilité. Enfin, la circonstance qu'un même libellé de poste peut figurer dans plusieurs catégories professionnelles, ne permet pas de considérer que l'AFPA ne se serait pas fondée sur les fonctions réellement exercées par les salariés. Ainsi, il ne ressort pas des pièces des dossiers que les catégories professionnelles auraient été définies par l'AFPA de manière différente selon les zones d'emploi ou en fonction de l'organisation actuelle ou future de l'entreprise.
10. L'AFPA et la ministre chargée du travail contestent ensuite que certaines des catégories professionnelles définies auraient été trop larges, ainsi que le font valoir les intimés, notamment celle de l'" assistanat de formation " ou encore, celles d'" accompagnement ", de " conseils bénéficiaires " ou encore de " direction générale ". Il ne ressort toutefois pas des pièces des dossiers que les catégories ainsi définies par l'AFPA résulteraient de la mise en oeuvre d'une méthode erronée dans son principe. En particulier, s'agissant de la catégorie " assistanat de formation ", si celle-ci, qui comporte 580 postes, est composée à la fois des postes d'assistant technique, d'assistant sourcing, d'assistant commercial et d'assistant de gestion, il ressort des éléments produits par l'AFPA que ces postes d'assistants requièrent, au-delà de quelques spécificités, des compétences génériques et formations initiales proches permettant à leurs titulaires d'exécuter les tâches administratives qui leur sont confiées. Ainsi, le regroupement de ces différents postes dans la catégorie " assistanat de formation " n'apparaît pas erronée au regard des principes devant guider la définition des catégories professionnelles, alors même que l'une des finalités de la réorganisation envisagée de l'AFPA consistait à regrouper les quatre types de postes précédemment mentionnés, cette circonstance ne remettant pas en cause la permutabilité de ces postes entre eux. S'agissant des autres catégories mentionnées par les intimés, à supposer même que certains postes auraient été rattachés de façon inappropriée aux catégories ainsi définies, cette circonstance ne traduit pas, en l'espèce, la mise en oeuvre, par l'employeur, d'une méthode erronée pour définir les catégories professionnelles.
11. Si, par ailleurs, les intimés relèvent, ainsi que le faisait le rapport du 14 février 2019 de l'expert du comité central d'entreprise, que de nombreuses catégories du plan de sauvegarde de l'emploi de l'AFPA ne comportent qu'un ou très peu de salariés, présentant ainsi un risque de ciblage lors du licenciement, ils ne critiquent pas sérieusement la pertinence de ces catégories à défaut, par exemple, de préciser à quelle autre catégorie d'emploi les postes concernés pouvaient être rattachés. En outre, ils ne soutiennent pas davantage et n'apportent aucun élément permettant de considérer que la définition de ces catégories étroites n'aurait eu d'autre but que de permettre le licenciement de certains salariés.
12. Par suite, il ne ressort pas des pièces des dossiers que les catégories professionnelles concernées par le licenciement auraient été déterminées par l'AFPA en se fondant sur des considérations qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, notamment en fonction de l'organisation actuelle et future de l'unité économique et sociale. En outre, il ne ressort pas des pièces des dossiers qu'une ou plusieurs catégories professionnelles auraient été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée.
13. Il résulte de ce qui précède que l'AFPA et la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion sont fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont accueilli le moyen tiré des erreurs de droit et d'appréciation dont la décision d'homologation du 13 décembre 2019 est entachée pour avoir confirmé la légalité des catégories professionnelles définies par l'AFPA.
En ce qui concerne le respect par l'employeur de son obligation en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs :
14. Dans le cadre d'une réorganisation qui donne lieu à élaboration d'un plan de sauvegarde de l'emploi, il appartient à l'autorité administrative de vérifier le respect, par l'employeur, de ses obligations en matière de prévention des risques pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. A cette fin, elle doit contrôler, dans le cadre de l'article L. 1233-57-3 du code du travail, précédemment cité, tant la régularité de l'information et de la consultation des institutions représentatives du personnel que les mesures auxquelles l'employeur est tenu en application de l'article L. 4121-1 du code du travail au titre des modalités d'application de l'opération projetée.
15. Par ailleurs, si le respect de la règle de motivation prévue à l'article L. 1233-57-4 du code du travail n'implique ni que l'administration prenne explicitement parti sur tous les éléments qu'il lui incombe de contrôler, ni qu'elle retrace dans la motivation de sa décision les étapes de la procédure préalable à son édiction, il lui appartient, toutefois, d'y faire apparaître les éléments essentiels de son examen. Doivent ainsi y figurer ceux relatifs à la régularité de la procédure d'information et de consultation des instances représentatives du personnel, ceux tenant au caractère suffisant des mesures contenues dans le plan au regard des moyens de l'entreprise et, le cas échéant, de l'unité économique et sociale ou du groupe ainsi que, à ce titre, ceux relatifs à la recherche, par l'employeur, des postes de reclassement. En outre, il appartient, le cas échéant, à l'administration d'indiquer dans la motivation de sa décision tout élément sur lequel elle aurait été, en raison des circonstances propres à l'espèce, spécifiquement amenée à porter une appréciation.
16. En l'espèce, le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny, saisi par les instances représentatives du personnel, a, par une ordonnance du 27 juin 2019, ordonné de suspendre le projet de réorganisation jusqu'à ce qu'il ait été procédé à une évaluation précise des risques psychosociaux en lien avec les tâches et charge de travail supplémentaire supportées par les salariés qui n'auront pas été licenciés, et qu'il ait été présenté un plan de prévention de ces risques contenant des mesures de prévention primaires et des mesures garantissant aux salariés des conditions de sécurité et de santé au travail. L'AFPA a alors provisoirement retiré sa demandé d'homologation présentée à l'administration en vue de compléter les documents d'informations requis et d'informer et consulter les représentants du personnel.
17. S'il ressort des pièces des dossiers et notamment des termes de la décision d'homologation du 13 décembre 2019, que l'administration du travail a vérifié le caractère sincère et complet de l'information et de la consultation des instances représentatives du personnel sur le volet de la prévention des risques pour la santé et des conditions de travail, estimant que ces instances avaient pu rendre leur avis " en toute connaissance de cause ", il ne ressort ni des termes de la décision litigieuse, alors que compte tenu de l'action entreprise devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Bobigny, l'administration aurait dû être spécifiquement amenée à porter une appréciation sur ce point, ni des autres pièces des dossiers que l'administration a vérifié, ainsi qu'il lui appartenait de le faire, le caractère suffisant des mesures prises par l'employeur au regard des dispositions de l'article L. 4121-1 du code du travail.
18. Il résulte de ce qui précède que l'AFPA et la ministre chargée de l'emploi ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont accueilli le moyen tiré l'erreur de droit dont la décision d'homologation du 13 décembre 2019 est entachée pour ne pas avoir vérifié le caractère suffisant des mesures d'évaluation et de prévention des risques prévues par l'AFPA.
19. Il résulte des dispositions des articles L. 1235-16 et L. 1235-10 du code du travail que, pour les entreprises qui ne sont pas en redressement ou en liquidation judiciaire, le législateur a attaché à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision d'homologation ou de validation d'un plan de sauvegarde de l'emploi, des effets qui diffèrent selon le motif pour lequel cette annulation est prise. Par suite, lorsque le juge est saisi d'une requête dirigée contre une décision d'homologation ou de validation d'un plan de sauvegarde de l'emploi qui n'est pas en redressement ou en liquidation judiciaire, il doit, si cette requête soulève plusieurs moyens, toujours se prononcer, s'il est soulevé devant lui, sur le moyen tiré de l'absence ou de l'insuffisance du plan, même lorsqu'un autre moyen est de nature à fonder l'annulation de la décision administrative.
20. Aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. / (...) L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises. ". Aux termes de l'article D. 1233-2-1 du même code : " I. - Pour l'application de l'article L. 1233-4, l'employeur adresse des offres de reclassement de manière personnalisée ou communique la liste des offres disponibles aux salariés, et le cas échéant l'actualisation de celle-ci, par tout moyen permettant de conférer date certaine. II. Ces offres écrites précisent : a) L'intitulé du poste et son descriptif ; b) Le nom de l'employeur ; c) La nature du contrat de travail ; d) La localisation du poste ; e) Le niveau de rémunération ; f) La classification du poste. III. - En cas de diffusion d'une liste des offres de reclassement interne, celle-ci comprend les postes disponibles situés sur le territoire national dans l'entreprise et les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie. (...) ".
21. Il revient notamment à l'autorité administrative de s'assurer que le plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi est de nature à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité. L'employeur doit, à cette fin, avoir identifié dans le plan l'ensemble des possibilités de reclassement des salariés dans l'entreprise. En outre, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, l'employeur, seul débiteur de l'obligation de reclassement, doit avoir procédé à une recherche sérieuse des postes disponibles pour un reclassement dans les autres entreprises du groupe. Pour l'ensemble des postes de reclassement ainsi identifiés, l'employeur doit avoir indiqué dans le plan leur nombre, leur nature et leur localisation.
22. D'une part, si les intimés soutiennent que le plan de reclassement élaboré par l'AFPA ne comporterait pas d'information suffisamment précise sur les postes ouverts au reclassement, ce moyen doit être écarté comme manquant en fait, l'annexe II du plan de sauvegarde de l'emploi comportant l'ensemble des postes disponibles avec les informations requises, notamment s'agissant de la localisation des postes et de la rémunération correspondante. Par ailleurs, l'AFPA indique sans être contestée, qu'une plateforme interne permettait en outre aux salariés intéressés d'avoir une description complète du poste. La circonstance que l'observatoire des compétences prévu par le document unilatéral relatif à la gestion prévisionnelle des emplois, des compétences et des carrières de janvier 2015 n'ait pas été mis en place, n'est pas à elle seule de nature à considérer que l'AFPA n'aurait pas été en mesure de proposer à ses salariés des postes de reclassement adaptés à leur profil.
23. D'autre part, ainsi que le soutient l'AFPA, il ne ressort pas des pièces des dossiers que la mobilité interne ait été privilégiée par rapport au reclassement interne, le plan de sauvegarde de l'emploi précisant à l'inverse que " priorité sera donnée aux salariés dont le poste est impacté ". Il ne ressort pas davantage des pièces des dossiers, notamment du contenu du titre 4 de la partie 2 du plan de sauvegarde de l'emploi, que ce dernier n'aurait pas comporté de mesures de formation permettant de faciliter le reclassement interne au contraire de la mobilité interne.
24. Enfin, si les syndicats SUD FPA Solidaires et CGT-AFPA et autres soutiennent que 55 postes créés auraient été pourvus pendant la procédure d'information-consultation, cette circonstance, à la supposer établie, est sans incidence sur la légalité de la décision d'homologation en litige.
25. Il suit de là que le moyen tiré de l'insuffisance des mesures de reclassement soulevé par les intimés doit être écarté.
26. Il résulte de tout ce qui précède que l'AFPA et la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 23 juillet 2020, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 13 décembre 2019 par laquelle le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France a homologué le document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi de l'unité économique et sociale de l'AFPA.
Sur les dépens :
27. Le présent litige n'ayant pas entraîné de dépens, les conclusions présentées à ce titre par l'AFPA doivent être rejetées.
Sur les conclusions aux fins d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
28. Les syndicats SUD FPA Solidaires et CGT-AFPA n'étant pas les parties perdantes dans les présentes instances, les conclusions présentées par l'AFPA au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, dans ces deux instances, ne peuvent être que rejetées. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat au titre de deux instances une somme globale de 2 000 euros à verser à SUD FPA Solidaires, à la CGT-AFPA et aux autres défendeurs au titre des frais qu'ils ont exposés dans les présentes instances et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête n° 20VE02478 de l'AFPA et la requête n° 20VE02492 de la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, sont rejetées.
Article 2 : Les conclusions présentées par l'AFPA dans l'instance n° 20VE02492 tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens et à la condamnation des syndicats SUD FPA Solidaires et CGT-AFPA aux dépens sont rejetées.
Article 3 : L'Etat versera la somme globale de 2 000 euros à SUD FPA Solidaires, à la CGT-AFPA et aux autres défendeurs au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par les syndicats SUD FPA Solidaires et CGT-AFPA et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
N°s 20VE02478, 20VE02492 2