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08/12/2020 | FRANCE | N°18VE02724

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 08 décembre 2020, 18VE02724


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la même période.

Par une ordonnance du 25 février 2018, le président de la section du contentieux du Conseil d'État, sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, a trans

mis cette demande au Tribunal administratif de Montreuil.

Par un jugement n°1742931...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la même période.

Par une ordonnance du 25 février 2018, le président de la section du contentieux du Conseil d'État, sur le fondement de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, a transmis cette demande au Tribunal administratif de Montreuil.

Par un jugement n°1742931 du 14 juin 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 août 2018, M. A..., représentée par Me Dorascenzi, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement du 14 juin 2018 ;

2° de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige ;

3° de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors qu'il n'a pas statué sur le moyen tiré de ce qu'en matière de taxe sur la valeur ajoutée, l'administration ne pouvait lui reprocher l'absence de déclaration et le taxer d'office qu'à compter du mois suivant le dépassement du seuil de chiffre d'affaires prévu, et non au titre de l'année entière ;

- la durée de la vérification de comptabilité ne pouvait régulièrement être portée à 6 mois en application du 4° de l'article L.52 du livre des procédures fiscales dès lors qu'il n'était pas astreint aux obligations comptables et fiscales des contribuables relevant d'un régime réel d'imposition ;

- les procédures de taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée et d'évaluation d'office en matière de bénéfice industriels et commerciaux ont été irrégulièrement mises en oeuvre, dès lors d'une part, que c'est à tort que le service a remis en cause le régime des micro-entreprises et celui de la franchise de base de taxe sur la valeur ajoutée, et d'autre part, que la sortie de ces régime ne pouvait être effective qu'à compter de l'année 2011 en matière de taxe sur la valeur ajoutée et 2012 en matière de bénéfice industriels et commerciaux ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. Huon, rapporteur public ;

Considérant ce qui suit :

1. M. A... exerce depuis 2009 une activité professionnelle de prestataire de services consistant en la location d'engins avec chauffeur. Il s'est placé sous le régime des auto-entrepreneurs en matière de bénéfices industriels et commerciaux, sur le fondement de l'article 50-0 du code général des impôts, et de la franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée, sur le fondement de l'article 293 B du même code. A l'issue d'un premier contrôle sur pièces au titre de l'année 2010, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été mis à sa charge, ultérieurement dégrevés. Il a ensuite fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012, à la suite de laquelle des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, ainsi que des majorations correspondantes, lui ont été notifiés, respectivement selon la procédure d'évaluation d'office sur le fondement de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales et de la procédure de taxation d'office en application du 3° de l'article L. 66 du même livre. M. A... fait appel du jugement du 14 juin 2018 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions.

En ce qui concerne la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des termes du jugement attaqué que, statuant sur le régime d'imposition applicable, le tribunal a relevé que le montant non contesté hors taxes des prestations facturées par M. A... s'élevait pour l'année 2010 à 42 054,75 euros, et en a déduit que, contrairement à ce qu'il soutenait, le requérant ne pouvait être regardé comme relevant des régimes d'imposition des articles 293 B et 50-0 du code général des impôts, et ce, à compter du 1er janvier 2011. Ce faisant, le tribunal a implicitement mais nécessairement écarté le moyen, qu'il a mentionné dans ses visas, tiré de ce que l'administration ne pouvait lui reprocher l'absence de déclaration et le taxer d'office qu'à compter du mois suivant le dépassement du seuil de chiffre d'affaires prévu, et non au titre de l'année entière. Dès lors, contrairement à ce que soutient M. A..., le tribunal n'a pas omis de répondre à ce moyen.

En ce qui concerne la régularité de la mise en oeuvre des procédures d'imposition d'office :

3. D'une part, s'agissant du régime de franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée, le I de l'article 293 B du code général des impôts prévoit, dans sa rédaction applicable : " : " I. Pour leurs livraisons de biens et leurs prestations de services, les assujettis établis en France (...) bénéficient d'une franchise qui les dispense du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée, lorsqu'ils n'ont pas réalisé : 1° Un chiffre d'affaires supérieur à : a) 81 500 € l'année civile précédente ; b) Ou 89 600 € l'année civile précédente, lorsque le chiffre d'affaires de la pénultième année n'a pas excédé le montant mentionné au a ; 2° Et un chiffre d'affaires afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, supérieur à : a) 32 600 € l'année civile précédente ; b) Ou 34 600 € l'année civile précédente, lorsque la pénultième année il n'a pas excédé le montant mentionné au a. ". Le 1 du II de ce même article prévoit que : " Le I cesse de s'appliquer : a) Aux assujettis dont le chiffre d'affaires de l'année en cours dépasse le montant mentionné au b du 1° du I ; b) Ou à ceux dont le chiffre d'affaires de l'année en cours afférent à des prestations de services, hors ventes à consommer sur place et prestations d'hébergement, dépasse le montant mentionné au b du 2° du I. 2. Les assujettis visés au 1 deviennent redevables de la taxe sur la valeur ajoutée pour les prestations de services et les livraisons de biens effectuées à compter du premier jour du mois au cours duquel ces chiffres d'affaires sont dépassés. (...) ". Par ailleurs, l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable prévoit : " Sont taxés d'office : (...) 3° aux taxes sur le chiffre d'affaires, les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes ". Enfin, l'article 242 sexies de l'annexe II du code général des impôts prévoit : " Les entreprises placées sous le régime simplifié souscrivent chaque année, au plus tard le deuxième jour ouvré suivant le 1er mai la déclaration mentionnée au 3 de l'article 287 du code général des impôts suivant le modèle prescrit par l'administration. (...) ".

4. D'autre part, s'agissant du régime d'imposition des micro-entreprises, le 1 de l'article 50-0 du code général des impôts prévoit, dans sa rédaction applicable : " Les entreprises dont le chiffre d'affaires annuel, ajusté s'il y a lieu au prorata du temps d'exploitation au cours de l'année civile, n'excède pas 81 500 € hors taxes s'il s'agit d'entreprises dont le commerce principal est de vendre des marchandises, objets, fournitures et denrées à emporter ou à consommer sur place (...) ou 32 600 € hors taxes s'il s'agit d'autres entreprises, sont soumises au régime défini au présent article pour l'imposition de leurs bénéfices. (...) ". Le 2 du même article prévoit que : " Sont exclus de ce régime : b. Les contribuables qui ne bénéficient pas des dispositions du I (1) de l'article 293 B. Cette exclusion prend effet à compter du 1er janvier de l'année de leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée... ". Par ailleurs, l'article L. 73 du livre des procédures fiscales prévoit : " Peuvent être évalués d'office : 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales, ou des revenus d'exploitations agricoles imposables selon un régime de bénéfice réel, lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; (...) Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2°. ". Enfin, l'article L.68 de ce livre prévoit : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. (...) ".

5. Il résulte de l'instruction et notamment de la proposition de rectification du 12 décembre 2014, qui ne se borne pas sur ce point à se référer à celle du 16 décembre 2013, que l'administration a constaté que le montant hors taxes des prestations facturées par M. A... s'élevait pour l'année 2010 à 42 054,75 euros. Ce montant excédant les seuils prévus aux a et b du 2 du I de l'article 293 B précité, il s'ensuit que M. A... n'était plus éligible au régime de la franchise en base pour l'année 2011 et était, par conséquent, exclu du bénéfice du régime des micro-entreprises en matière de bénéfices industriels et commerciaux, et ce, à compter du 1er janvier de l'année de son assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, et non l'année suivante, ainsi qu'il est soutenu, sans que le service n'ait d'ailleurs à vérifier le montant des recettes et le dépassement du seuil au titre de l'année 2011, première année de la vérification de comptabilité. M. A... relevait ainsi de plein droit, à compter du 1er janvier 2011, du régime simplifié d'imposition, régi par l'article 302 septies A bis du code général des impôts et était astreint, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, au dépôt de déclarations annuelles modèle CA12. Il est, toutefois, constant que les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée de M. A..., relatives à la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2011 et à la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012, ont été transmises non signées par courriel le 16 mai 2014, soit au-delà des délais légaux prévus par l'article 242 sexies de l'annexe II au code général des impôts précité. Par, suite, M. A... pouvait régulièrement être taxé d'office à la taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2011 et 2012, sur le fondement des dispositions du 3° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales. En matière d'impôt sur le revenu, la perte de la franchise en base de taxe sur la valeur ajoutée entraînant l'exclusion du régime des micro-entreprises, M. A... était également tenu de souscrire, au titre des années 2011 et 2012, les déclarations annuelles de résultats en matière de bénéfices industriels et commerciaux, ce qu'il n'a fait que le 16 mai 2014, par courriel, plus de trente jours après la mise en demeure qui lui avait été remise en main propres par le service le 31 janvier 2014. C'est, par suite, à bon droit que l'administration a fait application de la procédure d'évaluation d'office fondée sur le 1° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'irrégulière mise en oeuvre des procédures d'imposition d'office doit être écarté.

En ce qui concerne le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales :

6. L'article L. 52 du livre des procédures fiscales prévoit : " I. - Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; (...) 4° En cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité. Dans ce cas, la vérification sur place ne peut s'étendre sur une durée supérieure à six mois. (...) ". Par ailleurs, l'article 53 A du code général des impôts prévoit : " Sous réserve des dispositions de l'article 302 septies A bis, les contribuables, autres que ceux soumis au régime défini à l'article 50-0, sont tenus de souscrire chaque année (...) une déclaration permettant de déterminer et de contrôler le résultat imposable de l'année ou de l'exercice précédent. (...) ". Enfin, l'article 54 de ce code prévoit : " Les contribuables mentionnés à l'article 53 A sont tenus de représenter à toute réquisition de l'administration tous documents comptables, inventaires, copies de lettres, pièces de recettes et de dépenses de nature à justifier l'exactitude des résultats indiqués dans leur déclaration. (...) ".

7. Il résulte de l'instruction que, faisant application de la possibilité ouverte, en cas de graves irrégularités privant de valeur probante la comptabilité, par le 4° du I de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, l'administration a porté la durée de la vérification de comptabilité de trois à six mois et en a informé M. A..., par courrier du 31 juillet 2014. Si l'appelant, qui ne conteste pas l'existence des différentes irrégularités relevées par le service, tenant à l'absence de comptabilisation de certaines factures, à l'absence de nombreux justificatifs de recettes, à des anomalies dans la numérotation des factures et à l'absence de relevés bancaires, fait valoir qu'il n'était pas soumis aux obligations déclaratives et comptables prévues par l'article 53 A du code général des impôts, dès lors qu'il relevait du régime défini à l'article 50-0 du code général des impôts, il résulte de ce qui a été dit au point 6 que tel n'était pas le cas. Par suite, le moyen tiré de ce que la durée de la vérification de comptabilité ne pouvait régulièrement être portée à six mois doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter également les conclusions qu'il a présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

2

N° 18VE02724


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE02724
Date de la décision : 08/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-09-01 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Calcul de la taxe. Taux.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Isabelle DANIELIAN
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : SARL DORASCENZI-FENART ; SARL DORASCENZI-FENART ; SARL DORASCENZI-FENART

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-12-08;18ve02724 ?
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