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08/12/2020 | FRANCE | N°18VE01950

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 08 décembre 2020, 18VE01950


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) PREMIUM ENERGY a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de cette période et, d'autre part, de mettre à la charge de l'État

la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice admini...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) PREMIUM ENERGY a demandé au Tribunal administratif de Montreuil, d'une part, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de cotisations sur la valeur ajoutée des entreprises auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2012 et 2013, ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de cette période et, d'autre part, de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1701960 du 9 avril 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 11 juin et 23 décembre 2018, régularisé le 22 novembre 2020 après la clôture de l'instruction, la SAS PREMIUM ENERGY, représentée par Mes Pieranti et Rubio, avocats, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer les décharges sollicitées à concurrence d'une somme, en droits et intérêts, de 111 531 euros ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les impositions supplémentaires ont été établies à l'issue d'une procédure irrégulière, méconnaissant l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, l'instruction des postes du 11 mai 1990 et la doctrine référencée BOI-CF-IOR-10-30-20140227 § 140, la proposition de rectification ne lui ayant pas été notifiée avant la mise en recouvrement des impositions supplémentaires ;

- s'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, le service a, à tort, refusé le droit à récupération de la taxe sur la valeur ajoutée sur les avoirs alors qu'ils correspondent à des opérations économiques réelles, c'est-à-dire au remboursement des frais relatifs au raccordement au réseau ERDF qu'elle supporte ;

- il a également, à tort, refusé la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à des factures regardées comme des factures de complaisance alors qu'il n'apporte pas la preuve qu'elles ne correspondent pas à l'exécution de prestations de services délivrées par l'EURL B... Global ;

- s'agissant des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés, le service l'a, à tort, assujetti à de telles cotisations à raison de l'incidence financière résultant de rappels de taxe sur la valeur ajoutée résultant de l'application d'un taux de 7% et non de 20% ;

- le service a, à tort, remis en cause la déductibilité de charges regardées comme somptuaires dès lors qu'il a, dans le même temps, estimé que si celles-ci pouvaient être admises en déduction, elles auraient dû être inscrites au compte " charge constatée d'avance " pour être admises en déduction l'exercice suivant ;

- le service a, à tort, remis en cause la déduction d'une charge afférente à des prestations fournies par la société Call Center.fr alors qu'il ne démontre pas en quoi elle n'aurait pas été son véritable fournisseur et que les déclarations de la société domiciliaire de la société Call Center.fr ne peuvent suffire à caractériser une facture frauduleuse ;

- le service a, à tort, assorti les redressements afférents à l'application d'un taux erroné de taxe sur la valeur ajoutée de pénalités pour manquement délibéré en retenant une méthode erronée pour caractériser l'élément intentionnel, alors qu'il s'agit d'erreurs accidentelles, résultant d'un défaut de paramétrage de son logiciel et qui sont de faible ampleur ;

- il a, également à tort, assorti les redressements afférents aux factures de l'EURL B... Global de telles pénalités ainsi que de l'amende de 50 % prévue par l'article 1737 du code général des impôts, en l'absence de manquement délibéré et dès lors que les rappels, en droits, ne sont pas fondés ;

- il a, de nouveau à tort, mis à sa charge des pénalités pour manoeuvres frauduleuses, s'agissant des redressements afférents aux factures de la société Call Center.fr, sans démontrer qu'elle aurait agi sciemment et mis en place des procédés destinés à égarer le service ou à restreindre son pouvoir de contrôle.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS PREMIUM ENERGY, qui exerce une activité de travaux d'installation d'équipements thermiques et de climatisation, a fait l'objet d'une procédure de vérification de comptabilité sur la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013 à l'issue de laquelle le service a procédé à des rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée, d'impôt sur les sociétés et de cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. Par la présente requête, la société fait appel du jugement du 9 avril 2018 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits en pénalités, des impositions supplémentaires qui lui ont, en conséquence, été assignées.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". La régularité de la procédure contradictoire d'imposition exige notamment que les redressements que le service des impôts se propose d'apporter aux bases d'imposition déclarées soient notifiés au contribuable par un document qui en précise les motifs de manière à mettre l'intéressé en état de pouvoir formuler des observations ou de faire connaître son acceptation. En cas de contestation sur ce point, il incombe à l'administration d'établir qu'une notification de redressements a été régulièrement adressée au contribuable. La preuve dont elle a ainsi la charge peut notamment résulter d'une attestation du bureau distributeur établissant la délivrance du pli par le préposé postal.

3. Pour justifier de la distribution de la proposition de rectification, datée du 9 juillet 2015, des redressements en litige, l'administration fiscale produit deux attestations datées des 14 septembre et 16 octobre 2015 du service clientèle de la branche services-courrier-colis de l'établissement du Pré-Saint-Gervais PDC1 de la Poste selon lesquelles le pli n° 2C09153969318 a été distribué le 17 juillet 2018, ainsi qu'une copie d'un bordereau de distribution n° TL2323 daté du 17 juillet 2015 attestant de la distribution du pli, ce même jour, à la SAS PREMIUM ENERGY et comprenant une signature à la ligne 68 dans la rubrique " signature sur la preuve de distribution + AR ". Si la société requérante fait valoir que cette signature ne serait pas celle d'une personne ayant qualité pour recevoir cette notification mais serait celle du préposé des postes, elle n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations en se bornant à souligner les différences entre cette signature et celle de son gérant, alors que la case renseignée du bordereau de distribution a vocation à être renseignée par le destinataire du pli. Elle ne produit pas non plus, alors que cela lui incombe et non à l'administration comme elle le soutient, la liste des personnes autres que son gérant qui, en l'absence de toute habilitation, auraient néanmoins eu qualité pour signer de tels avis. Elle n'établit donc pas que le signataire de l'avis n'avait pas qualité pour recevoir le pli dont il s'agit. Par ailleurs la circonstance que ni les attestations, ni le bordereau de distribution produits ne feraient état d'une " date de présentation " mentionnée de façon distincte de celle de remise du pli, en méconnaissance de l'instruction des Postes du 11 mai 1990, n'est, en tout état de cause, pas de nature à remettre en cause le caractère probant de la " preuve de distribution " de la lettre adressée au siège de la société requérante. L'administration apporte ainsi la preuve que la SAS PREMIUM ENERGY a été mise à même de prendre connaissance de ce pli recommandé et que la proposition de rectification du 9 juillet 2015 lui a été régulièrement notifiée le 17 juillet suivant avant l'expiration du délai de reprise. Par suite, la SAS PREMIUM ENERGY n'est pas fondée à soutenir que l'administration n'a pas suivi la procédure prévue par les dispositions précitées de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales.

4. Par ailleurs, à supposer même que la SAS PREMIUM ENERGY puisse être regardée comme se prévalant, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la méconnaissance de la doctrine administrative référencée BOI-CF-IOR-10-30-20140227 § 140 du 27 février 2014, voire de l'instruction des Postes du 11 mai 1990 susmentionnée, elle ne saurait en tout état de cause utilement invoquer la doctrine administrative, au soutien d'un moyen tiré de l'irrégularité de la procédure d'imposition.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

5. En premier lieu, aux termes de l'article 267 du code général des impôts : " (...) II. Ne sont pas à comprendre dans la base d'imposition : / 1° Les escomptes de caisse, remises, rabais, ristournes et autres réduction de prix consenties directement aux clients (...) ", de l'article 271 : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / (...) / 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance / (...) " et de l'article 289 de ce code : " I. - (...) / 5. Tout document ou message qui modifie la facture initiale, émise en application de cet article, et qui fait référence à la facture initiale de façon spécifique et non équivoque est assimilé à une facture. Il doit comporter l'ensemble des mentions prévues au II. / II. - Un décret en Conseil d'Etat fixe les mentions obligatoires qui doivent figurer sur les factures. Ce décret détermine notamment les éléments d'identification des parties, les données concernant les biens livrés ou les services rendus et celles relatives à la détermination de la taxe sur la valeur ajoutée. (...) ". L'article 242 nonies A de l'annexe II au même code, codifiant le décret mentionné au II de l'article 289 précité, énumère, outre le nom complet et l'adresse de l'assujetti et de son client, les mentions obligatoires qui doivent figurer sur les factures.

6. Il résulte de l'instruction que la SAS PREMIUM ENERGY demande, en application des articles 256, 267 et 289 du code général des impôts, la récupération de la taxe sur la valeur ajoutée qu'elle a facturée par erreur à ses clients, dès lors qu'elle leur a, par la prise en charge de leurs frais de raccordement au réseau ERDF, accordé une remise au sens du 1° du II de l'article 267 du code général des impôts. Toutefois, il est constant que les notes d'avoirs présentées par la société, malgré la mention du nom des clients et la possibilité de les " rapprocher " dans une certaine mesure des justificatifs émanant d'ERDF et des factures émises, ne comportent pas l'ensemble mentions prévues par les dispositions des articles 289 et 242 nonies A susmentionnés, telles que l'adresse ou la référence à la facture initiale, permettant de justifier le rattachement des remises consenties aux opérations de livraisons concernées et aux montants correspondants. Dans ces conditions et alors même que ces notes d'avoirs correspondraient à des opérations économiques réelles, c'est à bon droit que l'administration fiscale a remis en cause la déduction, par la société requérante, de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur ces avoirs et mis à sa charge, notamment pour ce motif, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée.

7. En second lieu, en vertu des dispositions combinées des articles 271, 272 et 283 du code général des impôts, un contribuable n'est pas en droit de déduire de la taxe sur la valeur ajoutée dont il est redevable à raison de ses propres opérations la taxe mentionnée sur une facture établie à son nom par une personne qui n'est pas le fournisseur réel de la marchandise ou de la prestation effectivement livrée ou exécutée.

8. A l'issue des opérations de vérification, l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à deux factures datées des 15 septembre et 15 octobre 2013 émises par l'EURL B... Global, à laquelle la SAS PREMIUM ENERY aurait fait appel pour réaliser des prestations de " formation commerciale " dans le domaine de l'isolation thermique d'une part, et du solaire, photovoltaïque autoconsommation, dimension de projets et étude de faisabilité d'autre part, pour des montants de 8 132,80 et 6 099,60 euros TTC. Pour regarder les factures litigieuses comme étant de complaisance, l'administration, qui ne conteste pas l'inscription de la société au registre du commerce et leur assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée, fait valoir que ces factures ont été émises par une société ayant eu une durée de vie limitée, immatriculée le 27 février 2013 et liquidée par jugement du 20 mai 2014, dont l'objet social ne comprend pas la formation professionnelle mais l'" achat vente de tout produit réglementé et non réglementé, apporteur d'affaires, prestations de services, prises de rendez-vous ". Elle relève que la vérification sur place de l'EURL B... Global n'a d'ailleurs pas permis de confirmer l'exercice de cette activité. Elle relève également que cette société, qui ne comportait aucun salarié, n'avait pour gérant et unique associé que M. C... B..., né en 1993 et donc âgé d'à peine 20 ans au moment où il aurait rendu des prestations de formation sur deux sujets techniques et totalement différents. Elle souligne la faiblesse de l'expérience de l'EURL B... Global sur le secteur d'activité en cause comparée à celle de la société requérante, faiblesse qu'elle ne pouvait ignorer dès lors que, pour accepter une telle offre de formation, elle devait, en tant que commerçant avisé, s'être au préalable informée de la compétence, qualification et expérience de son prestataire. Elle avance, enfin, que la SAS PREMIUM ENERGY n'a été en mesure de produire, pour justifier de la réalité des prestations, que des feuilles d'émargement des stagiaires présents et le programme des formations dispensées par l'EURL B... Global. L'administration apporte ainsi des éléments suffisants pour établir que les factures en cause ne correspondaient pas à des opérations réelles, faute pour l'EURL B... Global d'avoir pu dispenser de telles formations, ce que la SAS PREMIUM ENERGY, qui connaissait d'ailleurs nécessairement l'identité du prestataire véritable et a sciemment accepté l'utilisation d'un prête-nom, ne pouvait ignorer. En se bornant à relever que le service n'a pas opéré des redressements similaires s'agissant de l'impôt sur les sociétés, à faire valoir qu'elle n'est pas liée économiquement à l'EURL B... Global, à souligner que la valeur probante des pièces produites n'a pas été remise en cause par le service et à indiquer, sans autre explication, que l'âge ne peut être considéré comme le critère unique d'absence ou non de compétence, la SAS PREMIUM ENERGY n'apporte aucune justification utile sur la réalité des opérations en litige. Dans ces conditions, la société requérante, à qui incombe la charge de la preuve en application de l'article R.*194-1 du livre des procédures fiscales à défaut d'avoir présenté des observations dans les trente jours suivant la notification de la proposition de rectification, n'est pas fondée à contester la remise en cause de la déduction de taxe sur la valeur ajoutée afférente à ces factures de complaisance et à demander la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée correspondants.

En ce qui concerne les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés :

9. En premier lieu, lorsqu'un contribuable a fait l'objet de rehaussements en matière d'impôt sur les bénéfices et de taxe sur la valeur ajoutée, ses bases d'imposition à l'impôt sur les sociétés peuvent être rehaussées d'un profit sur le Trésor chaque fois que le droit qui lui est ouvert de déduire de ces bases la taxe sur la valeur ajoutée rappelée aboutirait, à défaut de la constatation à due concurrence d'un tel profit, à ce que le contribuable soit imposé à l'impôt sur les sociétés sur une assiette plus réduite que celle sur laquelle il aurait été imposé s'il avait acquitté régulièrement la taxe sur la valeur ajoutée.

10. Il résulte de l'instruction, notamment de la proposition de rectification du 9 juillet 2015, que l'administration a estimé qu'en déduisant indûment la taxe sur la valeur ajoutée relative aux prestations de services facturées par l'EURL B... Global dans les conditions exposées aux points 7. et 8. la SAS PREMIUM ENERGY a réalisé un profit égal au montant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée nette. Sur ce fondement, elle a notifié à la société requérante un rappel en base de 2 333 euros au titre de l'exercice clos en 2013. Si, pour contester la réintégration d'un tel profit dans ses bases d'imposition, la SAS PREMIUM ENERGY se réfère à ses critiques relatives au bien-fondé de la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée afférente à ces prestations facturées par l'EURL B... Global, il résulte de ce qui précède qu'elle n'est pas fondée à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie par voie de conséquence de la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée correspondants. Par ailleurs, elle ne peut utilement se prévaloir de ce que l'erreur commise par le contribuable en appliquant un taux moins élevé que celui qui devait être appliqué ne lui procure aucune créance sur ses clients et qu'elle n'est, par suite, pas de nature à faire naître par elle-même une dette de taxe à l'égard du Trésor, pouvant donner lieu à la réintégration dans les résultats du contribuable d'un profit sur le Trésor d'un montant égal au rappel de taxe sur la valeur ajoutée, le profit réintégré en l'espèce ne provenant pas d'une erreur de taux mais de la remise en cause de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée figurant sur des factures de complaisance.

11. En deuxième lieu, aux termes du 4. de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du ce même code : " Qu'elles soient supportées directement par l'entreprise ou sous forme d'allocations forfaitaires ou de remboursements de frais, sont exclues des charges déductibles pour l'établissement de l'impôt, (...) les charges, à l'exception de celles ayant un caractère social, résultant de l'achat, de la location ou de toute autre opération faite en vue d'obtenir la disposition de résidences de plaisance ou d'agrément, ainsi que de l'entretien de ces résidences ; (...) ". Ces dispositions visent les charges qu'expose une entreprise, fût-ce dans le cadre d'une gestion normale, du fait qu'elle dispose d'une résidence ayant vocation de plaisance ou d'agrément, à laquelle elle conserve ce caractère, et qui ne fait pas l'objet d'une exploitation lucrative spécifique. Par résidence de plaisance ou d'agrément au sens de l'article précité, il y a lieu d'entendre les locaux ayant un caractère notamment de prestige qui, sans être directement affectés à l'accueil des moyens d'exploitation de l'entreprise, sont cependant utilisés par celle-ci dans le cadre normal de son activité, notamment à des fins commerciales ou publicitaires ou qui sont destinés à un tel usage

12. Il résulte de l'instruction que l'administration a remis en cause, sur le fondement du 4. de l'article 39 du code général des impôts la charge de 6 600 euros afférente à la location d'un chalet de luxe à Méribel pendant la saison de sport d'hiver, pour la semaine du 18 au 25 janvier 2014, au motif que cette charge ne revêt aucun caractère social et n'est pas nécessaire à l'objet social de la SAS PREMIUM ENERGY. Contrairement à ce que soutient cette dernière, la seule circonstance que le vérificateur ait, dans la proposition de rectification du 9 juillet 2015, ajouté qu'" en outre, quand bien même cette location aurait été admise en déduction du résultat imposable, la location (...) ne concerne pas l'exercice clos en 2013. Le respect du principe comptable d'indépendance des exercices, et les dispositions de l'article 39-1 du CGI précisées par la documentation administrative, et aurait dû conduire à comptabiliser cette facture en date du 11/12/2013 dans un compte de charges constatées d'avance, pour en neutraliser l'incidence sur le résultat comptable de l'exercice clos en 2013 ", ne révèle aucune contradiction de nature à établir le caractère non somptuaire de la dépense en cause et à remettre en cause le bien-fondé du refus de déduction de cette dépense.

13. En troisième lieu, aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable à l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature (...) ".

14. Il résulte de l'instruction que l'administration a refusé d'admettre en déduction des résultats imposables de l'exercice clos le 31 décembre 2012 de la SAS PREMIUM ENERGY la charge libellée " Call Center.fr " d'un montant de 9 880 euros au motif que la réalité des prestations fournies par la société Call Center.fr, domiciliée à Tunis, n'est pas établie, alors que le président de la société requérante n'a pas été en mesure de révéler l'identité de ses contacts commerciaux au sein de cette dernière, ni les conditions d'entrée en relation d'affaires, qu'il résulte d'une réponse des autorités tunisiennes à une demande d'assistance administrative internationale que la société " n'exerce aucune activité réelle et ce, d'après le responsable de la société domiciliaire. De plus, la société n'a employé aucun salarié depuis la date de sa création et ne possède aucun matériel d'exploitation ", et qu'enfin, au cours de l'exercice en cause, la société requérante a elle-même employé 59 téléopérateurs et 3 superviseurs. La SAS PREMIUM ENERGY, qui se borne à indiquer avoir collaboré avec la société tunisienne, à contester, sur le principe, l'argument selon lequel sa productivité ne reposerait pas sur les rendez-vous dont elle se prévaut avec cette société du seul fait de l'emploi de téléopérateurs, et à faire valoir l'absence de remise en cause du caractère probant et sincère de sa comptabilité, n'apporte cependant aucune justification sur la réalité des prestations invoquées. Dans ces conditions et alors que la charge de la preuve lui incombe en application de l'article R.*194-1 du livre des procédures fiscales, elle n'est pas fondée à contester la réintégration, par l'administration, du montant de ces frais dans ses résultats imposables au titre de l'exercices clos en 2012.

Sur les majorations :

En ce qui concerne les pénalités pour manquement délibéré :

15. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) ". En vertu de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales, la preuve de la mauvaise foi incombe à l'administration en cas de contestation des pénalités. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe à l'administration d'apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.

16. En premier lieu, le ministre de l'action et des comptes publics fait valoir, sans être contredit sur ce point, que l'appelante, a, au titre de l'année 2012, pour onze des quatorze factures relatives à des installations excédant 3 kWc, soumis la pose des panneaux photovoltaïques au taux réduit de réduit de taxe sur la valeur ajoutée et qu'elle a procédé de même, au titre de l'année 2013, pour trente-six des cinquante-sept factures émises, alors même qu'elle ne pouvait ignorer, en sa qualité de professionnel du secteur et dès lors qu'elle a appliqué le taux normal pour certaines des factures émises et pour l'ensemble des ventes de panneaux d'une puissance supérieure à 3 kWc, que ces prestations de pose correspondantes n'ouvraient pas droit à une taxation au taux réduit. L'appelante ne saurait sérieusement soutenir qu'elle aurait été induite en erreur par un défaut de paramétrage de son logiciel de facturation, dont elle ne précise d'ailleurs pas la teneur, alors que l'administration fiscale, non contestée sur ce point, a relevé que la SAS PREMIUM ENERGY, compte tenu de son organisation commerciale, avait une mission de vérification des devis transmis par ses agents commerciaux travaillant en son nom et conservait " la responsabilité de l'édition des factures de vente adressées au client à partir des informations portées sur [ces] devis ". Compte tenu de ces éléments et alors même que, d'une part, les factures litigieuses ne représentaient que 4,6% du nombre total d'installations facturées en 2012 et à peine 20% en 2013, soit des redressements de seulement 1 985 et 23 325 euros, et que, d'autre part, la majorité des installations effectuées par l'intéressée portait sur des panneaux d'une puissance inférieure à 3kWc relevant du taux réduit, l'administration fiscale doit être regardée comme établissant l'existence d'un manquement délibéré de la société requérante, justifiant l'application de la majoration contestée aux redressements correspondants.

17. En second lieu, d'une part, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les redressements liés aux factures délivrées par l'EURL B... Global sont fondées. D'autre part, dès lors que, ainsi que le fait valoir le ministre de l'action et des comptes publics et qu'il est dit au point 8. du présent arrêt, la SAS PREMIUM ENERGY ne pouvait ignorer le caractère complaisant des factures émises par l'EURL B... Global et a même sciemment accepté l'utilisation d'un prête-nom, c'est à bon droit que l'administration fiscale a pu regarder les manquements correspondants comme procédant du comportement délibéré de la société requérante et mettre à sa charge la majoration de 40 % prévue par le a) de l'article 1729 du code général des impôts précité.

En ce qui concerne les pénalités pour manoeuvres frauduleuses :

18. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / (...) c. 80 % en cas de manoeuvres frauduleuses (...) ".

19. Si la SAS PREMIUM ENERGY conteste l'application de la pénalité de 80% prévue par les dispositions susmentionnées aux redressements afférents aux factures fictives de la société Call Center.fr, il n'est pas contesté que cette pénalité n'a pas été mise en recouvrement. Les conclusions présentées par l'intéressée à ce titre sont donc irrecevables, ainsi que l'oppose le ministre en défense, et ne peuvent qu'être rejetées.

En ce qui concerne l'amende prévue à l'article 1737 du code général des impôts :

20. Aux termes du I de l'article 1737 du code général des impôts : " Entraîne l'application d'une amende égale à 50 % du montant : / 1. Des sommes versées ou reçues, le fait de travestir ou dissimuler l'identité ou l'adresse de ses fournisseurs ou de ses clients, les éléments d'identification mentionnés aux articles 289 et 289 B et aux textes pris pour l'application de ces articles ou de sciemment accepter l'utilisation d'une identité fictive ou d'un prête-nom ". Il résulte de ces dispositions que l'administration peut mettre l'amende ainsi prévue à la charge de la personne qui a délivré la facture ou à la charge de la personne destinataire de la facture si elle établit que la personne concernée a soit travesti ou dissimulé l'identité, l'adresse ou les éléments d'identification de son client ou de son fournisseur, soit accepté l'utilisation, en toute connaissance de cause, d'une identité fictive ou d'un prête-nom.

21. Ainsi qu'il a été exposé au point 8. du présent arrêt, la réalité des prestations de l'EURL B... Global auprès de la SAS PREMIUM ENERGY n'est pas établie, cette dernière, qui connaissait d'ailleurs nécessairement l'identité du prestataire véritable et a sciemment accepté l'utilisation d'un prête-nom, ne pouvant ignorer le caractère complaisant des factures afférentes. Par suite, l'administration qui doit être regardée comme apportant la preuve que la société requérante a sciemment accepté que son prestataire utilise, sur ses factures, un prête-nom, était fondée à appliquer aux montants portés sur ces factures l'amende prévue à l'article 1737 du code général des impôts.

22. Il résulte de tout ce qui précède que la SAS PREMIUM ENERGY n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS PREMIUM ENERGY est rejetée.

2

N° 18VE01950


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01950
Date de la décision : 08/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: M. Patrick BRESSE
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : PIERANTI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-12-08;18ve01950 ?
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