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24/11/2020 | FRANCE | N°18VE02383

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 24 novembre 2020, 18VE02383


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. L'EURL RVO a demandé au Tribunal administratif de Versailles le remboursement des crédits de taxe sur la valeur ajoutée, d'un montant de 20 000 euros et de 35 000 euros, au titre respectivement des mois de mai et de juin 2013, assortis des intérêts moratoires.

II. L'EURL RVO a demandé au Tribunal administratif de Versailles le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée, d'un montant de 20 000 euros, au titre du mois de septembre 2013, assorti des intérêts moratoires.

III. L'EUR

L RVO a demandé au Tribunal administratif de Versailles la décharge, en droits, majo...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I. L'EURL RVO a demandé au Tribunal administratif de Versailles le remboursement des crédits de taxe sur la valeur ajoutée, d'un montant de 20 000 euros et de 35 000 euros, au titre respectivement des mois de mai et de juin 2013, assortis des intérêts moratoires.

II. L'EURL RVO a demandé au Tribunal administratif de Versailles le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée, d'un montant de 20 000 euros, au titre du mois de septembre 2013, assorti des intérêts moratoires.

III. L'EURL RVO a demandé au Tribunal administratif de Versailles la décharge, en droits, majorations et intérêts de retard, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge, pour un montant global de 27 424 euros, au titre de la période comprise entre le 1er mars 2012 et le 31 juillet 2013.

Par un jugement n° 1507020, 1507070 et 1604819 du 15 mai 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ces demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 juillet 2018, l'EURL RVO doit être regardée comme demandant à la Cour :

1° d'annuler le jugement en tant qu'il a statué sur sa demande tendant au remboursement au titre du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait pour les mois de mai et juin 2013 ;

2° d'annuler la décision du 11 septembre 2015 rejetant sa demande de remboursement au titre du crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle disposait pour les mois de mai et juin 2013 ;

3° d'ordonner le remboursement de ce crédit d'un montant global de 55 000 euros, majoré des intérêts moratoires depuis la date du dépôt de sa demande ;

4° de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'un défaut de motivation, d'une part, quant à l'absence de faits constatés au titre de la période du 1er août 2013 au 31 décembre 2013 justifiant les rappels de taxe sur la valeur ajoutée de cette période, et, d'autre part, sur le constat que les faits visés par la proposition de rectification du 15 septembre 2015 avaient déjà fait l'objet d'un redressement dans le cadre de la proposition de rectification du 6 mars 2014 ;

- les dispositions du I de l'article 262 du code général des impôts et du d) de l'article 74 de l'annexe III au code général des impôts ne sauraient lui être opposées, la preuve du paiement des marchandises par les clients en cas d'exportations réalisées par l'acheteur ou pour son compte n'étant qu'un élément de preuve subsidiaire de la réalité des exportations, par rapport aux conditions prévues au c) de ce même article, et donc non requis dès lors qu'elle dispose des éléments attestant de la réalité des exportations réalisées au titre de la période du 1er août 2013 au 31 décembre 2013 ;

- les rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er août 2013 au 31 décembre 2013 sont injustifiés car ils recouvrent ceux déjà visés dans la proposition de rectification du 6 mars 2014 ;

- l'absence de sincérité des déclarations d'exportation concernant les 13 exportations en litige n'est pas établie ;

- en tout état de cause, aucune falsification de la preuve de l'exportation présentée par les acheteurs ne peut lui être imputée conformément à la jurisprudence communautaire qui consacre les principes de sécurité juridique, de proportionnalité et de protection de la confiance légitime, le fournisseur ne pouvant être tenu responsable de la fraude commise par le seul acheteur.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. L'EURL RVO, qui exerce une activité de commerce de véhicules automobiles, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er mars 2012 au 31 juillet 2013, au terme de laquelle l'administration a, d'une part, remis en cause des crédits de taxe sur la valeur ajoutée dont l'EURL RVO disposait à concurrence de la somme globale de 55 000 euros au titre des mois de mai et juin 2013 et, d'autre part, par une proposition de rectification du 6 mars 2014, notifié des rappels de taxe sur la valeur ajoutée, en droits, majorations et intérêts de retard, pour un montant global de 27 424 euros mis en recouvrement le 15 septembre 2015, et correspondant à la taxe sur la valeur ajoutée pour l'exportation de véhicules en dehors du territoire de l'Union européenne. A la suite de cette vérification de comptabilité, l'EURL RVO a, en outre, fait l'objet d'un contrôle sur pièces portant sur la période comprise entre le 1er août 2013 et le 31 décembre 2013, à l'issue duquel l'administration a notifié à la société de nouveaux rappels de taxe sur la valeur ajoutée, en droits, majorations et intérêts de retard, au titre de la période comprise entre le 1er août et le 31 décembre 2013. Par la requête susvisée, l'EURL RVO fait appel du jugement du 15 mai 2018 en tant que le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant au remboursement de ses crédits de taxe sur la valeur ajoutée au titre des mois de mai et juin 2013, d'un montant global de 55 000 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'EURL RVO soutient que le jugement est entaché d'irrégularité pour avoir omis de répondre à deux de ses moyens tirés, d'une part, de ce que les faits visés par la proposition de rectification du 15 septembre 2015 avaient déjà fait l'objet d'un redressement dans le cadre de la proposition de rectification du 6 mars 2014, et, d'autre part, de ce que les faits reprochés au titre de la période du 1er août et le 31 décembre 2013 n'étaient pas établis. Toutefois, dès lors que ces moyens se rapportent à une période autre que celle comportant les mois de mai et juin 2013 dont les crédits de taxe sur la valeur ajoutée sont seuls en litige dans la présente requête, ils sont inopérants de sorte que le tribunal n'avait pas à y répondre.

Sur le droit au remboursement des crédits de taxe sur la valeur ajoutée en litige :

3. Aux termes de l'article 262 du code général des impôts, dans sa version applicable au litige : " I. - Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : / 1° les livraisons de biens expédiés ou transportés par le vendeur ou pour son compte, en dehors de la Communauté européenne ainsi que les prestations de services directement liées à l'exportation ; / 2° les livraisons de biens expédiés ou transportés par l'acheteur qui n'est pas établi en France, ou pour son compte, hors de la Communauté européenne, à l'exclusion des biens d'équipement et d'avitaillement des bateaux de plaisance, des avions de tourisme ou de tous autres moyens de transport à usage privé, ainsi que les prestations de services directement liées à l'exportation. (...) ". Aux termes de l'article 74 de l'annexe III du code général des impôts : " 1. Les livraisons réalisées par les assujettis et portant sur des objets ou marchandises exportés sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée à condition : / a. que l'assujetti exportateur, lorsqu'il ne tient pas habituellement une comptabilité permettant de déterminer son chiffre d'affaires, inscrive les envois sur le registre prévu au 3° du I de l'article 286 du code général des impôts ; (...) / c. que l'assujetti exportateur établisse pour chaque envoi une déclaration d'exportation, conforme au modèle donné par l'administration et détienne à l'appui de sa comptabilité ou du registre prévu au a l'exemplaire numéro 3 de la déclaration d'exportation visé par l'autorité douanière compétente, conformément au code des douanes communautaires et ses dispositions d'application. Lorsque la déclaration d'exportation est établie dans le cadre de la procédure électronique telle que prévue par le règlement (CEE) n° 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992 modifié établissant le code des douanes communautaires et les textes pris pour son application, il produit la certification de sortie délivrée par le bureau d'exportation. Toutefois, lorsque la sortie du territoire communautaire effectuée à partir de la France est réalisée par l'entremise d'un intermédiaire agissant au nom et pour le compte d'autrui désigné comme expéditeur des biens sur la déclaration d'exportation, ou lorsque des opérateurs interviennent dans une livraison commune de marchandises à l'exportation, ou en cas de groupage, les assujettis exportateurs qui ne figurent pas dans la rubrique exportateur de la déclaration en douane mettent à l'appui de leur comptabilité ou du registre prévu au a un exemplaire de leurs factures visées par la personne habilitée ou autorisée à déclarer en douane et annotées des références permettant d'identifier la déclaration en douane correspondante. / Lorsque l'intermédiaire est habilité ou autorisé à déclarer en douanes et a obtenu de l'administration des douanes et droits indirects un agrément spécifique à la procédure du dédouanement des envois express, l'assujetti exportateur met à l'appui de sa comptabilité ou du registre prévu au a le document comportant tous les éléments d'information requis par l'administration, qui lui a été remis par cet intermédiaire. / d. que, dans les cas où l'assujetti exportateur ne produit pas les justificatifs prévus au c et, à l'exclusion des opérations mentionnées aux quatrième à huitième alinéas du I de l'article 262 du code général des impôts, il mette à l'appui de sa comptabilité ou du registre mentionné au a l'un des éléments de preuve alternatifs ci-après, pour justifier de la sortie des biens expédiés vers un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, un territoire mentionné au 1° de l'article 256-0 du code général des impôts ou un département d'outre-mer : / 1° La déclaration en douane authentifiée par l'administration des douanes du pays de destination finale des biens ou une attestation de cette administration accompagnée, le cas échéant, d'une traduction officielle ; / 2° Tout document de transport des biens vers un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, un territoire mentionné au 1° de l'article 256-0 du code général des impôts ou un département d'outre-mer ou tout document afférent au chargement du moyen de transport qui quitte la Communauté européenne pour se rendre dans le pays ou le territoire de destination finale hors de la Communauté ; / 3° Tout document douanier visé par le service des douanes compétent et utilisé pour la surveillance de l'acheminement des biens vers leur destination finale hors de la Communauté, lorsqu'il s'agit de biens soumis à des contrôles particuliers ; / 4° les documents mentionnés à l'article 302 M du code général des impôts, émis sur support papier ou transmis par voie électronique dans le cadre du système d'informatisation du suivi des mouvements de produits soumis à accises visés par le bureau des douanes du point de sortie de la Communauté ou de tout autre élément de preuve alternatif accepté par l'administration chargée de la surveillance des mouvements de produits soumis à accises ; / 5° Pour tous les produits autres que ceux soumis à accises et lorsqu'il s'agit d'une livraison effectuée dans les conditions prévues au premier alinéa du 2° du I de l'article 262 du code général des impôts, une déclaration du transporteur ou du transitaire qui a pris en charge les biens, accompagnée de la preuve du paiement des biens par le client établi dans un pays n'appartenant pas à la Communauté européenne, un territoire mentionné au 1° de l'article 256-0 du code général des impôts ou un département d'outre-mer. (...) ". Il résulte de la combinaison des dispositions précitées que le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée qu'elles prévoient, à raison des exportations réalisées au profit de clients établis en dehors de la Communauté européenne, est subordonnée à la condition que le contribuable établisse la réalité des opérations d'exportations par la production des pièces justificatives mentionnées ci-dessus.

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que si la proposition de rectification du 6 mars 2014 indique qu'il n'existe aucune preuve d'un virement international en provenance d'un client acquéreur pour les véhicules qui auraient été exportés en Tunisie et en Ukraine au cours de la période du 1er janvier au 31 juillet 2013, l'administration constate préalablement que les ventes de ces véhicules n'étaient pas enregistrées dans l'application Delta AV. Au cours des opérations de vérification, le service a constaté qu'il n'existait aucun mandat entre la société requérante et un intermédiaire, chargé de l'acheminement de ces véhicules jusqu'au pays destinataire. L'administration a également relevé que les contrats de vente mentionnent des acquéreurs, personnes physiques, domiciliés en dehors de la Communauté européenne, dont aucun n'a réglé le prix de vente du véhicule, les règlements ayant quasiment tous eu lieu au moyen de chèques émanant de sociétés ayant leur siège en France, dont certains portent sur le règlement de plusieurs véhicules, ou en espèces. A supposer même que les déclarations d'exportation aient été produites au cours de la procédure de vérification ou au cours de la procédure d'imposition, il résulte de l'instruction, et notamment de l'analyse réalisée par le service des douanes et qui a été produite en première instance, que ces documents ne présentent pas un caractère authentique permettant d'attester de la sortie du territoire des véhicules. Ainsi, l'administration a fondé sa décision, à titre principal, sur l'absence de preuve de la réalité des exportations, et uniquement, à titre subsidiaire, sur l'absence de preuve d'un paiement par les acheteurs établis en dehors de l'Union européenne. Dans ces conditions, le moyen tiré de la violation des dispositions du I de l'article 262 du code général des impôts et du d) de l'article 74 de l'annexe III au même code doit être écarté.

5. En deuxième lieu, l'EURL RVO ne saurait utilement se prévaloir au soutien de sa critique des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été notifiés par la proposition de rectification du 6 mars 2014, du fait que les rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er août 2013 au 31 décembre 2013 ne seraient pas justifiés ou feraient double emploi avec les cotisations de taxe sur la valeur ajoutée déjà mises à sa charge, dès lors que ces rappels portent sur une période postérieure aux crédits de taxe en litige dans la présente requête.

6. En troisième lieu, l'EURL RVO conteste l'absence de sincérité des déclarations d'exportation concernant les exportations de treize véhicules. Si elle a produit la liste des véhicules négociés en mai et juin 2013 dont l'exportation ne figure pas dans l'application Delta AV ainsi que les déclarations d'exportation correspondantes, nonobstant le moment où ces éléments ont été mis en débat, il résulte de l'instruction, en particulier de l'analyse des tampons effectuée par le service des douanes dont le contenu a été porté à la connaissance de l'intéressée avant la mise en recouvrement des impositions, que les cachets figurant sur ces déclarations sont des faux. Dès lors, le moyen doit en tout état de cause être écarté.

7. En dernier lieu, si l'EURL RVO soutient qu'elle a demandé des règlements par chèques correspondant aux montants de taxe sur la valeur ajoutée dans l'attente d'obtenir les justificatifs de sortie du territoire des marchandises par les acquéreurs, il est constant qu'elle n'avait conclu aucun contrat avec un intermédiaire chargé de l'acheminement des véhicules jusqu'au pays destinataire et, qu'alors qu'elle était habilitée à consulter le fichier d'exportation des douanes DELTA AV, via le site PRO DOUANE, elle n'a pas cherché à s'assurer de la réalité de la sortie du territoire des véhicules vendus, alors que ceux-ci n'ont jamais été réglés par les clients établis à l'étranger mais par des sociétés ayant leur siège et leur activité en France, par chèques ou espèces. Dans ces conditions, et à supposer même qu'elle n'aurait pas été en mesure de constater le caractère falsifié des déclarations d'exportation, l'EURL RVO ne peut être regardée comme ayant mis en oeuvre les diligences nécessaires d'un commerçant avisé pour s'assurer que les conditions de l'exonération de la taxe sur la valeur ajoutée étaient réunies. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des principes de sécurité juridique, de proportionnalité et de protection de la confiance légitime doit être écarté.

8. Il résulte de ce qui précède que l'EURL RVO n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions qu'elle a présentées tendant au versement d'intérêts moratoires sur le fondement de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'EURL RVO est rejetée.

2

N° 18VE02383


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE02383
Date de la décision : 24/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-08-03-06 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Liquidation de la taxe. Déductions. Remboursements de TVA.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : SELARL TAXLENS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-11-24;18ve02383 ?
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