La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/11/2020 | FRANCE | N°18VE01990

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 24 novembre 2020, 18VE01990


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) DINADIS a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012, et de mettre à la charge de l'État la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1600613 du 11 avril 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
>Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2018, la SA DINADIS...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société anonyme (SA) DINADIS a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012, et de mettre à la charge de l'État la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1600613 du 11 avril 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 juin 2018, la SA DINADIS, représentée par Me B..., avocate, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge, en droits et intérêts de retard, des impositions contestées, à concurrence de 72 606 euros ;

3° de mettre à la charge de l'État la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les rappels contestés ont été établis à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, alors que des questions de fait se posaient ;

- l'avis de mise en recouvrement est irrégulier, faute de se référer à la réponse de l'administrateur des finances publiques du 15 décembre 2014, mentionnant une baisse des rappels mis à sa charge ;

- le service a, à tort, estimé que les frais d'affranchissement devaient être considérés comme l'accessoire indispensable des prestations qu'elle fournit, entrant dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée en application du 2° du I de l'article 267 du code général des impôts, alors que cette pratique est marginale et exceptionnelle, que ces frais ont été engagés au nom et pour le compte du client conformément au 2° du II du même article, qu'elle justifie d'une exacte reddition des comptes et qu'aucune rémunération propre n'a été perçue sur ces frais.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public

Une note en délibérée présentée pour la SA DINADIS par Me B..., avocate, a été enregistrée les 10 et 12 novembre 2020.

Considérant ce qui suit :

1. La SA DINADIS, qui exerce une activité de stockage, de logistique et de conditionnement de marchandises destinées à être livrées sur le territoire national, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 à l'issue de laquelle des rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée ont été mis à sa charge à raison de la refacturation de frais d'affranchissement sur le fondement, en dernier lieu, du 1° de l'article 266 et du 2° du I de l'article 267 du code général des impôts, base légale retenue par le service à l'occasion du rejet de sa réclamation préalable et confirmée depuis lors. La SA DINADIS fait appel du jugement du 11 avril 2018 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 59 du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) " et aux termes de l'article L. 59 A du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " I. - La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : / 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; / (...) / 4° Sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 7° de l'article 257 du même code. (...) / II.- Dans les domaines mentionnés au I, la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit. ". Les dispositions du 1º du I de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales n'attribuent compétence à la commission départementale, en matière de taxes sur la valeur ajoutée, que lorsque le désaccord entre l'administration et le redevable porte sur le montant du chiffre d'affaires.

3. La SA DINADIS soutient que la procédure suivie à son égard a été irrégulière du fait qu'elle a été indûment privée de la possibilité de voir soumis à l'examen de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires le différend qui l'oppose à l'administration alors que celui-ci a notamment trait à des questions de fait. Toutefois, la remise en cause d'un régime d'exonération dans lequel une entreprise s'est placée, tel que celui prévu par le 2° du II de l'article 267 du code général des impôts, a trait au principe même de l'imposition de ces opérations et donc au chiffre d'affaires taxable et non au montant du chiffre d'affaires réalisé mentionné au 1° du I de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales. Une telle question ne relève dès lors pas de la compétence de la commission départementale alors même que sa solution dépendrait de l'appréciation de questions de fait. Dès lors, la SA DINADIS n'est pas fondée à se prévaloir d'une irrégularité de procédure. Sont sans incidence, à cet égard, la circonstance que l'intéressée a été, à tort, informée de sa faculté de demander la saisine de cette commission tout comme celle que le vérificateur aurait pris acte de sa demande en ce sens.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 256 du livre des procédures fiscales : " Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public compétent à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n'a pas été effectué à la date d'exigibilité. (...) " et aux termes de l'article R. 256-1 du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " L'avis de mise en recouvrement prévu à l'article 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis. (...) / Lorsque l'avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l'article L. 57 ou à la notification prévue à l'article L 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l'informant d'une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications. (...) ".

5. La SA DINADIS soutient que l'avis de mise en recouvrement du 31 décembre 2014 qui lui a été adressé est entaché d'irrégularité en ce qu'il se réfère à la proposition de rectification du 3 juillet 2014 qui, outre les rappels contestés, visait un second chef de rectification et mentionnait des conséquences financières résultant de ces deux chefs de redressement d'un montant total de 180 368 euros, et omet de faire état de la réponse de l'administrateur des finances publiques du 15 décembre 2014, mentionnant une baisse des rappels mis à sa charge, du fait de l'abandon du second chef de rectification, à hauteur d'un montant correspondant à celui qui a été finalement mis en recouvrement, soit 72 606 euros. Elle indique également et sans être contestée ne pas avoir reçu notification de ce dernier document avant la mise en recouvrement des impositions. Toutefois, en l'espèce, dès lors que, par le courrier du 15 décembre 2014, le service a abandonné l'un des deux chefs de redressements et qu'il était donc aisément possible au contribuable de faire le lien entre la somme mise en recouvrement et les redressements afférents à l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des frais d'affranchissement, qui faisait l'objet d'une rubrique et d'un chiffrage distincts dans la proposition de rectification, et d'en déduire que seuls demeuraient en cause ces rappels sur frais d'affranchissement, l'omission avancée n'a pas privé l'intéressée de la possibilité de contester utilement les montants mis en recouvrement, ainsi que le révèlent d'ailleurs expressément les termes mêmes de sa réclamation préalable du 18 juin 2015 rappelant que le second chef de rectification avait été abandonné à la suite de l'entretien avec l'interlocuteur départemental, occasionnant ainsi une diminution des rappels à hauteur de 110 672 euros.

6. En troisième lieu, pour solliciter, devant le juge d'appel, la décharge des rappels mis à sa charge à raison de la refacturation de frais d'affranchissement, la SA DINADIS se prévaut des seules dispositions du II de l'article 267 du code général des impôts selon lesquelles " (...) Ne sont pas à comprendre dans la base d'imposition : / (...) / 2° Les sommes remboursées aux intermédiaires, autres que les agences de voyage et organisateurs de circuits touristiques, qui effectuent des dépenses au nom et pour le compte de leurs commettants dans la mesure où ces intermédiaires rendent compte à leurs commettants, portent ces dépenses dans leur comptabilité dans des comptes de passage, et justifient auprès de l'administration des impôts de la nature ou du montant exact de ces débours. (...) " en faisant valoir que de tels frais refacturés constitueraient en réalité des débours et non des frais accessoires au service rendu par la société devant être inclus dans les bases d'imposition à la taxe sur la valeur ajoutée en application du 2° du I du même article 267.

7. Il résulte de ces dispositions que les frais accessoires au service rendu que le prestataire répercute sur son client ne peuvent être exclus de la base imposable à la taxe sur la valeur ajoutée que si le prestataire les répercute sans marge sur son client, s'il démontre que ces frais ont été engagés au nom et pour le compte du client, ont donné lieu à une reddition des comptes, sont inscrits en comptabilité dans un compte de passage et sont justifiés dans leur nature ou leur montant exact auprès de l'administration des impôts.

8. Toutefois et d'une part, aux termes de l'article 394-1 du plan comptable général, issu du règlement n° 99-03 du 29 avril 1999 du comité de la réglementation comptable, dans sa rédaction alors applicable : " Les opérations traitées par l'entité pour le compte de tiers en qualité de mandataire sont comptabilisées dans un compte de tiers. Seule la rémunération de l'entité est comptabilisée dans le résultat./ Les opérations traitées, pour le compte de tiers, au nom de l'entité, sont inscrites selon leur nature dans les charges et les produits de l'entité. " et aux termes de l'article 38 quater de l'annexe III au code général des impôts : " Les entreprises doivent respecter les définitions édictées par le plan comptable général, sous réserve que celles-ci ne soient pas incompatibles avec les règles applicables pour l'assiette de l'impôt ".

9. Il n'est pas contesté que, comme l'ont relevé les premiers juges, les frais d'affranchissement refacturés ont été comptabilisés par la SA DINADIS dans un compte de transfert de charges et non dans des comptes de tiers, comme ils auraient dû l'être s'il s'était agi d'opérations traitées en qualité de mandataire. Il n'est d'ailleurs ni établi, ni même allégué, que ce mode de comptabilisation aurait permis, en l'espèce, de rapprocher les frais exposés pour un client du montant qui lui est refacturé.

10. D'autre part et au surplus, contrairement à ce que soutient la SA DINADIS, l'envoi régulier, par l'intéressée, de la grille tarifaire en vigueur, faisant apparaître les prix des affranchissements selon le poids et la volumétrie des envois, tels que pratiqués par La Poste, la signature par le client du bon de commande correspondant, distinguant le prix de la prestation de service du coût des affranchissements, l'établissement d'un devis pour chaque prestation envisagée chiffrant distinctement le tarif des affranchissements de la prestation de service et l'émission de bons de commande ne permettent pas, à eux seuls, d'établir l'existence d'un mandat entre la SA DINADIS et son client, même tacite, impliquant que les frais d'affranchissement ont été engagés, par la première, au nom et pour le compte du second et étaient ainsi constitutifs de débours.

11. Dans ces conditions, la SA DINADIS, ne saurait se prévaloir du 2° du II de l'article 267 du code général des impôts pour demander la décharge des rappels contestés.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la SA DINADIS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SA DINADIS est rejetée.

2

N° 18VE01990


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01990
Date de la décision : 24/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET OBADIA

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-11-24;18ve01990 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award