Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La SARL Salam a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 20 mai 2015 par laquelle le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à sa charge, d'une part, la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et, d'autre part, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour des montants respectifs de 52 650 euros et de 6 372 euros, ainsi que la décision du 9 juillet 2015 rejetant son recours gracieux dirigé contre cette première décision.
Par un jugement n° 1601948 du 21 décembre 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 21 février 2019, la SARL Salam, représentée par Me Sfez, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de faire droit à sa demande de première instance ;
3° de mettre à la charge de l'OFII la somme de 2 500 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision attaquée est insuffisamment motivée ;
- la décision attaquée est entachée d'erreur de droit pour avoir estimé que l'absence de sanction pénale était sans incidence sur le bien-fondé des sanctions litigieuses.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code du travail ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport deMme Lepetit-Collin,
- et les conclusions de Mme Grossholz, rapporteur public,
Considérant ce qui suit :
1. A l'occasion d'un contrôle effectué le 14 octobre 2014 dans les locaux de l'établissement de la SARL Salam, exerçant une activité de boulangerie-pâtisserie dans la commune de Colombes (Hauts-de-Seine), les services de l'inspection du travail, assistés par les services de la division de lutte contre le travail illégal de l'Union du recouvrement de la sécurité sociale et des allocations familiales (URSSAF) ont constaté la présence, en situation de travail, de trois ressortissants marocains non autorisés à exercer une activité salariée en France. Par décision du 20 mai 2015, le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) a mis à la charge de la société, d'une part, la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail et, d'autre part, la contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine prévue à l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, pour des montants respectifs de 52 650 euros et de 6 372 euros. La SARL Salam relève appel du jugement du 21 décembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande dirigée contre cette décision ainsi que contre celle en date du 9 juillet 2015 par laquelle le directeur général de l'OFII a rejeté son recours.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. En premier lieu, le moyen tenant à l'insuffisance de motivation de la décision attaquée, présenté pour la première fois postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux, alors que la demande n'était assortie que de moyens de légalité interne est irrecevable.
3. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 8251-1 du code du travail : " Nul ne peut, directement ou indirectement, embaucher, conserver à son service ou employer pour quelque durée que ce soit un étranger non muni du titre l'autorisant à exercer une activité salariée en France ". L'article L. 5221-8 du même code dispose que : " L'employeur s'assure auprès des administrations territorialement compétentes de l'existence du titre autorisant l'étranger à exercer une activité salariée en France, sauf si cet étranger est inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi tenue par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 ". Aux termes de l'article L. 8253-1 du même code : " Sans préjudice des poursuites judiciaires pouvant être intentées à son encontre, l'employeur qui a employé un travailleur étranger en méconnaissance des dispositions du premier alinéa de l'article L. 8251-1 acquitte, pour chaque travailleur étranger non autorisé à travailler, une contribution spéciale (...) ". Aux termes de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées à son encontre et de la contribution spéciale prévue à l'article L. 8253-1 du code du travail, l'employeur qui aura occupé un travailleur étranger en situation de séjour irrégulier acquittera une contribution forfaitaire représentative des frais de réacheminement de l'étranger dans son pays d'origine (...) ".
4. II résulte des dispositions précitées de l'article L. 8253-1 du code du travail et de l'article L. 626-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les contributions qu'ils prévoient ont pour objet de sanctionner les faits d'emploi d'un travailleur étranger séjournant irrégulièrement sur le territoire français ou démuni de titre l'autorisant à exercer une activité salariée, sans qu'un élément intentionnel soit nécessaire à la caractérisation du manquement. Toutefois, un employeur ne saurait être sanctionné sur le fondement de ces dispositions lorsque tout à la fois, d'une part, et sauf à ce que le salarié ait justifié avoir la nationalité française, il s'est acquitté des obligations qui lui incombent en vertu de l'article L. 5221-8 du code du travail et que, d'autre part, il n'était pas en mesure de savoir que les documents qui lui étaient présentés revêtaient un caractère frauduleux ou procédaient d'une usurpation d'identité.
5. Ainsi qu'il a été rappelé, il est reproché à la société appelante d'avoir employé trois ressortissants étrangers dépourvus de titre les autorisant à travailler en France. La SARL Salam conteste la matérialité des faits qui lui sont reprochés et se prévaut de sa bonne foi. Si la société soutient que M. D... aurait présenté une carte nationale d'identité lors de son embauche, il résulte toutefois de l'instruction, et notamment des déclarations circonstanciées de l'intéressé, retranscrites dans l'extrait de procès-verbal établi à l'issue du contrôle de police effectué le 14 octobre 2014, que le salarié a présenté la copie d'un titre de séjour falsifié qu'il indique avoir perdu depuis lors. En produisant dans le dernier état de ses écritures d'appel, une photocopie d'une carte nationale d'identité, alors que l'existence de ce document n'a jamais été évoquée auparavant, la société requérante n'établit ni avoir embauché M. D... au vu de ce document, ni avoir procédé aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article L. 5221-8 du code du travail, ni l'absence de matérialité de l'infraction constatée. De même s'agissant de l'emploi de M. A... B..., la société soutient que le salarié a présenté la photocopie d'une carte nationale d'identité dont elle ne pouvait suspecter la falsification. Toutefois, en se contentant de cette copie sans exiger la production du document original, la société n'a pas procédé aux diligences lui permettant de s'assurer que la copie présentée ne revêtait pas un caractère frauduleux. La circonstance que la société ait procédé aux déclarations uniques d'embauches pour ces deux salariés est donc sans incidence sur le bien-fondé des contributions en litige à raison de leur emploi. Enfin, si la société soutient que M. C... n'était pas salarié mais stagiaire en formation depuis deux mois dans sa société au jour du contrôle, il résulte de l'instruction que, lors de son audition par les services de police, M. C... a déclaré travailler pour le compte de la société requérante depuis le mois d'août 2013, tous les jours de huit heures à dix-sept heures et être rémunéré en espèces chaque mois. Les attestations manuscrites produites au dossier, rédigées de la main d'autres salariées de la société et attestant de ce que M. C... serait " entré dans l'entreprise " en qualité de stagiaire pour y apprendre le métier de boulanger ne sont pas de nature à établir l'erreur de fait alléguée. Par suite, la société ne pouvant se prévaloir de sa bonne foi, les moyens tirés de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation dont la décision attaquée serait entachée doivent être écartés.
6. En dernier lieu, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 9 de leur jugement, qui sont suffisamment circonstanciés et qui ne sont pas critiqués en appel, d'écarter le moyen tiré de l'absence de sanction pénale prise à l'encontre de la société requérante.
Sur les frais liés au litige :
7. L'OFII n'étant pas partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par la SARL Salam au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société SARL Salam une somme de 1 500 euros à verser à l'OFII au titre des frais qu'il a exposés, non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de la SARL Salam est rejetée.
Article 2 : La SARL Salam versera à l'Office français de l'immigration et de l'intégration une somme de 1 500 (mille cinq cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions présentées par l'Office français de l'immigration et de l'intégration est rejeté.
N° 19VE00641 2