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14/10/2020 | FRANCE | N°19VE00194

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 14 octobre 2020, 19VE00194


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... A... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 à 2014 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1748336 du 6 décembre 2018, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 janvier 2019 et 2 janvier 202

0, M. et Mme A..., représentés par Me C..., avocat, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... A... ont demandé au tribunal administratif de Montreuil la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 à 2014 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1748336 du 6 décembre 2018, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 18 janvier 2019 et 2 janvier 2020, M. et Mme A..., représentés par Me C..., avocat, demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 à 2014 et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée, en tant qu'elle n'explicite pas les motifs pour lesquels le vérificateur a retenu un taux forfaitaire pour déterminer l'utilisation à titre privative du véhicule de type Chevrolet Camaro acquis en crédit-bail en 2012 par la société LYD, dont M. A... est le gérant et unique associé ;

- l'administration fiscale n'apporte pas la preuve qui lui incombe que ce véhicule a partiellement fait l'objet d'une utilisation à titre personnel ;

- la location de leur appartement situé au Lavandou a été rendue impossible en raison des inondations survenues le 14 décembre 2012 ;

- ils se prévalent, sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, de la position formellement prise par le vérificateur sur la réalité de la location et du montant des loyers perçus en 2013 et 2014.

....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Illouz, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., pour M. et Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme A... font appel du jugement du tribunal administratif de Montreuil du 6 décembre 2018 rejetant leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2012 à 2014.

Sur les rectifications en matière de revenus de capitaux mobiliers :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ". Aux termes de l'article R. 57-1 du même code : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée (...) ".

3. Il résulte des termes mêmes de la proposition de rectification du 21 septembre 2016, qu'au titre des années 2013 et 2014, le vérificateur a considéré que la société Lyd, qui a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, avait mis à disposition de M. A..., son gérant et associé unique - pour son usage personnel - un véhicule Chevrolet Camaro qu'elle avait acquis en crédit-bail en 2012. La proposition de rectification précise que cet avantage revêt un caractère occulte au sens du c de l'article 111 du code général des impôts et est imposable entre les mains du bénéficiaire à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers. L'évaluation de cet avantage est précisée dans la proposition de rectification du 23 juin 2016, qui avait été adressée à la société Lyd et annexée à celle notifiée à M. et Mme A.... Cette proposition de rectification mentionne que le vérificateur a retenu la méthode d'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale et détaille cette méthode, qui consiste à évaluer l'avantage annuel, pour les véhicules loués à 40% du coût global annuel comprenant les frais de location, d'entretien, d'assurance et de carburant, plafonné au montant de l'avantage calculé lorsque l'employeur est propriétaire du véhicule, soit 12% du prix d'achat TTC. Puis il est précisé dans cette proposition de rectification que compte tenu du prix d'achat de 49 300 euros mentionné dans le crédit-bail, le plafond s'établit à 5 916 euros et que le taux de 40 % appliqué au coût global annuel conduit à un montant supérieur à ce plafond. Il est alors indiqué que la valeur annuelle de l'avantage est estimée à 5 916 euros pour chacune des années 2013 et 2014.

4. Il résulte de ce qui précède que pour ce chef de redressement tenant à la rectification des revenus de capitaux mobiliers de M. et Mme A..., la proposition de rectification du 21 septembre 2016 comporte la désignation de l'impôt concerné, les années d'imposition, la base d'imposition et énonce les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés et comporte suffisamment de précisions pour permettre aux requérants de formuler utilement leurs observations. Le moyen tiré de ce que pour ce chef de redressement, la proposition de rectification serait insuffisamment motivée doit, par suite, être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : (...) c. Les rémunérations et avantages occultes (...) ". Doivent être imposées comme avantages occultes mentionnés au c de l'article 111 précité les dépenses effectivement exposées et concourant au financement d'un avantage en nature qui n'a pas été explicitement inscrit en comptabilité, en méconnaissance des dispositions de l'article 54 bis du même code. M. et Mme A... ayant présenté des observations en réponse aux rectifications qui leur ont été notifiées par la proposition de rectification du 21 septembre 2016, dans le délai de trente jours dont il n'est pas contesté par le ministre qu'il a été régulièrement prolongé, la charge de la preuve de la réalité et du montant des distributions en litige incombe au ministre, en vertu de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales.

6. D'une part, en relevant notamment que le kilométrage annuel du véhicule Chevrolet ne se justifie pas par les seuls déplacements de personnalités du pub " l'Irlandais " géré par la société Lyd vers le Zénith de Lille, que le chiffre d'affaires généré par la salle réservée dans le pub aux personnalités est inférieur aux charges directes du véhicule et que M. A... a reconnu lui-même avoir utilisé ce véhicule à des fins personnelles pour un trajet vers le sud de la France, le ministre établit l'existence d'un avantage en nature financé par la société Lyd au profit de son gérant. En se bornant, sans le justifier, que le véhicule sert également pour des aller-retours quotidiens entre le pub et le Zénith d'une part et les villes de Bondus et de Villeneuve-d'Ascq d'autre part, où résident les personnalités fréquentant le pub, M. et Mme A..., qui par ailleurs ne contestent pas avoir utilisé le véhicule Chevrolet pour un déplacement privé dans le sud de la France, n'apportent aucun élément de nature à contredire ceux relevés par le ministre. Il est en outre constant que le financement de cet avantage en nature n'a pas été inscrit dans la comptabilité de la société Lyd. C'est par suite à bon droit que l'administration a qualifié cet avantage " de rémunérations ou avantages occultes " au sens du c de l'article 111 du code général des impôts.

7. D'autre part, pour évaluer la valeur imposable à l'impôt sur le revenu de M. et Mme A... de cet avantage dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, en l'absence de tout élément permettant de déterminer son montant réel, l'administration a fait usage, ainsi qu'il a été exposé au point 3 de la méthode d'évaluation des avantages en nature en vue du calcul des cotisations de sécurité sociale, en retenant, non pas 40 % du coût global annuel du véhicule, comme l'affirment à tort les requérants, mais 12% du prix d'achat TTC, soit une valeur annuelle de l'avantage de 5 916 euros. Pour contester cette valeur, M. et Mme A... relèvent qu'ils possèdent d'autres véhicules personnels pour leur usage privé et que la distance d'un aller-retour vers le sud de la France représente environ 2 000 km, soit 9% du kilométrage total du véhicule Chevrolet sur la période contrôlée. Cependant, d'une part, la possession d'autres véhicules personnels ne suffit pas à démontrer que le ratio de 12 % retenu par l'administration serait erroné. D'autre part, M. et Mme A... ne fournissent aucun justificatif sur la distance qu'ils ont effectivement parcourue lors de leur déplacement vers le sud de la France.

8. Il résulte de ce qui précède que le ministre établit la réalité et le montant des revenus distribués à M. et Mme A... par la société Lyd.

Sur les rectifications en matière de revenus fonciers :

9. En premier lieu, aux termes du II de l'article 15 du code général des impôts : " Les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu. Cette exonération s'applique également aux locaux compris dans des exploitations agricoles et affectés à l'habitation des propriétaires exploitants ". Aux termes de l'article 28 de ce code : " Le revenu net foncier est égal à la différence entre le montant du revenu brut et le total des charges de la propriété ". Le I de l'article 31 de ce code fixe la liste des charges de la propriété déductibles pour la détermination du revenu net. Il résulte de ces dispositions que les charges afférentes aux logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne peuvent pas venir en déduction pour la détermination du revenu foncier compris dans le revenu global soumis à l'impôt sur le revenu. La réserve de jouissance est établie, notamment, par l'accomplissement ou non de diligences ayant pour objet de donner le bien en location. Il appartient donc au propriétaire d'apporter la preuve qu'il a offert à la location pendant l'année en cause le logement resté vacant au titre duquel il demande la déduction de charges foncières et qu'il a pris toutes les dispositions nécessaires pour le louer.

10. Il résulte de l'instruction que M. et Mme A... sont propriétaires d'un appartement situé dans la commune du Lavandou (Var), pour lesquels ils ont déclaré des déficits fonciers que l'administration a remis en cause. Pour justifier le caractère déductible de ces charges, M. et Mme A... ont produit au vérificateur, à sa demande, un contrat de bail. Ce contrat n'est toutefois ni signé, ni daté et est par conséquent dépourvu de valeur probante. Ils ont par ailleurs transmis au vérificateur un tableau faisant état d'un encaissement de loyers les 19 juillet 2013 et 25 juillet 2014, pour des montants de 1 200 euros et 2 000 euros, sans cependant établir la réalité de ces paiements. Enfin, M. et Mme A... soutiennent avoir été dans l'impossibilité de louer de manière durable leur appartement en raison d'une inondation intervenue le 14 décembre 2012, le rendant insalubre. Cependant, s'il est constant que cette inondation a fortement endommagé les berges d'un ruisseau au niveau du jardin de l'appartement de M. et Mme A..., il ne ressort pas du constat d'huissier établi le 3 octobre 2016 à la demande des requérants, qui fait état d'un effondrement partiel du terrain et de fissures sur la terrasse qui se désolidarise du mur de façade ouest, que le logement serait impropre à la location. M. et Mme A... ne produisent par ailleurs aucune pièce émanant du syndic de copropriété ou d'une autorité administrative faisant état d'une interdiction d'habiter ce logement. Dans ces conditions, M. et Mme A... doivent regardés comme ayant conservé au cours des années d'imposition la jouissance de cet appartement. Les déficits fonciers correspondant audit appartement n'étaient par suite, pas déductibles de leurs revenus imposables.

11. En deuxième lieu, eu égard aux règles qui régissent l'invocabilité des interprétations ou des appréciations de l'administration en vertu de ces articles, les contribuables ne sont en droit d'invoquer, sur le fondement du premier alinéa de l'article L. 80 A et sur celui de l'article L. 80 B, lorsque l'administration procède à un rehaussement d'impositions antérieures, que des interprétations et appréciations antérieures à l'imposition primitive, ou sur le fondement du deuxième alinéa de l'article L. 80 A, qu'il s'agisse d'impositions primitives ou supplémentaires, que des interprétations antérieures à l'expiration du délai de déclaration. En l'espèce, les propositions de rectifications des 22 décembre 2015 et 21 septembre 2016 sont postérieures aux délais de déclaration des revenus en litige. Par suite, les opinions que le vérificateur aurait adopté dans ces propositions de rectification conduisant, comme en l'espèce, à des impositions supplémentaires, ne peuvent, en tout état de cause, être invoquées à l'encontre de ces impositions sur le fondement de ces articles.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montreuil a rejeté leur demande.

Sur les frais exposés :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE00194
Date de la décision : 14/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus fonciers.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Nicolas TRONEL
Rapporteur public ?: M. ILLOUZ
Avocat(s) : DELATTRE

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-10-14;19ve00194 ?
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