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08/10/2020 | FRANCE | N°17VE02937

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 08 octobre 2020, 17VE02937


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de condamner le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil à lui payer les sommes de 40 000 euros au titre de son préjudice corporel, 30 000 euros au titre de son préjudice d'agrément, 75 euros au titre de frais médicaux, 30 000 euros au titre de son préjudice moral, 40 000 euros au titre de la violation de l'obligation de sécurité, 5 000 euros au titre de retards de paiement de salaire, 20 000 euros au titre du préju

dice subi du fait d'agissements de harcèlement moral et 500 euros au titre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... E... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de condamner le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil à lui payer les sommes de 40 000 euros au titre de son préjudice corporel, 30 000 euros au titre de son préjudice d'agrément, 75 euros au titre de frais médicaux, 30 000 euros au titre de son préjudice moral, 40 000 euros au titre de la violation de l'obligation de sécurité, 5 000 euros au titre de retards de paiement de salaire, 20 000 euros au titre du préjudice subi du fait d'agissements de harcèlement moral et 500 euros au titre de la majoration de son impôt sur le revenu, de mettre à la charge du Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil les dépens, ainsi qu'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et de prononcer l'exécution forcée du jugement.

Par un jugement n° 1603203 du 13 juillet 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a condamné le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil à verser à Mme E... la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice, et mis à sa charge la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés respectivement le 14 septembre 2017, le

5 mars 2020, le 17 mars 2020 et le 31 mars 2020, Mme E..., représentée par Me Dalmas, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement en tant qu'il a limité la condamnation du Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil à la somme de 3 000 euros ;

2° de condamner le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil à lui verser la somme totale de 165 575 euros en réparation de ses préjudices ;

4° de rejeter les conclusions présentées par le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil ;

5° de mettre à la charge du Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- après avoir été placée en congé de grave maladie du 24 juillet 2006 au 3 novembre 2009 en raison d'un cancer, elle a subi, à compter de sa reprise et jusqu'en 2015, des agissements répétés de harcèlement moral de la part de ses supérieurs hiérarchiques ; ces agissements se sont caractérisés par des atteintes répétées à son intégrité physique et psychologique ; l'administration a ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- l'administration a par ailleurs méconnu son obligation de résultat en matière de santé au travail, laquelle résulte des dispositions de l'article 2-1 du décret du 28 mai 1982, des articles L. 1152-4 et L. 4121-1 du code du travail, et des énonciations de la circulaire du ministre de la fonction publique du 9 août 2011 ; l'administration a également commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- en lui versant avec six ans de retard les rémunérations auxquelles elle avait droit au titre des années 2006 et 2007 et pour les mois ayant suivi la fin de son congé de grave maladie, l'administration a violé les dispositions de l'article 13 du décret du 17 janvier 1986 et commis ainsi une autre faute de nature à engager sa responsabilité ;

- le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil doit être condamné à lui verser les sommes de 40 000 euros au titre de son préjudice corporel, 30 000 euros au titre de son préjudice d'agrément, 75 euros au titre de frais médicaux, 30 000 euros au titre de son préjudice moral, 40 000 euros au titre de la violation de l'obligation de sécurité, 5 000 euros au titre d'arriérés de rémunération, 20 000 euros au titre du harcèlement moral, et 500 euros au titre de la majoration de son impôt sur le revenu.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de l'éducation ;

- le code du travail ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 82-453 du 28 mai 1982 ;

- le décret n° 84-38 du 18 janvier 1984 ;

- le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Clot, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., substituant Me A..., pour le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil.

Considérant ce qui suit :

1. Mme E..., née le 29 mars 1956, a été recrutée par contrat le 27 février 2003 par le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) de Créteil afin d'exercer les fonctions de cuisinière. Après avoir été placée en congé de grave maladie à compter du 24 juillet 2006, elle a été affectée à un poste de serveuse-caissière dans l'unité de gestion des restaurants universitaires de Saint-Denis le 1er décembre 2009. Mme E..., qui a été victime de cinq accidents du travail entre le 2 décembre 2009 et le 20 décembre 2013, a été placée en congé de maladie à plusieurs reprises. Par un courrier du 12 octobre 2015, l'intéressée a demandé au CROUS de Créteil l'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de la dégradation de ses conditions de travail et de faits de harcèlement moral. Cette demande a fait l'objet d'une décision de rejet le 12 novembre suivant. Mme E... relève appel du jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 13 juillet 2017 en tant qu'il a limité la condamnation du CROUS de Créteil à la somme de 3 000 euros, et demande qu'il soit condamné à lui verser la somme totale de 165 575 euros en réparation de ses préjudices.

Sur la responsabilité du Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil :

En ce qui concerne le harcèlement moral :

2. Il appartient à l'agent public qui soutient avoir été victime de faits constitutifs de harcèlement moral, lorsqu'il entend contester le refus opposé par l'administration dont il relève à une demande de protection fonctionnelle fondée sur de tels faits de harcèlement, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles d'en faire présumer l'existence. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile. Pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.

3. Mme E... soutient qu'elle a été victime de faits constitutifs de harcèlement moral de la part de ses supérieurs hiérarchiques directs à compter de sa reprise d'activité le

1er décembre 2009, et ce jusqu'en 2015. Elle fait à cet égard valoir que ces agissements se sont caractérisés par des atteintes répétées à son intégrité physique et psychologique.

Quant aux atteintes à l'intégrité physique de Mme E... :

4. En premier lieu, Mme E... soutient que, lors de sa reprise d'activité le

1er décembre 2009, elle n'a pas été affectée au poste de serveuse-caissière qui lui avait été proposé et qu'elle avait expressément accepté, mais à un poste du " service à la chaîne ", fonction pénible nécessitant une station debout pendant quatre heures, inadaptée à son état de santé. Toutefois, les avis du comité médical dont elle se prévaut, émis les 20 mars 2007 et

25 septembre 2007, se bornaient à préconiser un aménagement de poste " sans port de charges lourdes supérieures à cinq kilos ". Il ne résulte pas de l'instruction que le poste occupé par Mme E... impliquait des tâches contraires à cette préconisation. Aucun élément ne permet d'établir que le poste en cause aurait été inadapté et que son supérieur hiérarchique le lui aurait imposé en connaissance de cause. En outre, la fiche du poste de serveuse-caissière accepté par Mme E... mentionne notamment, au titre des tâches à exécuter, la distribution des plats et des consommations aux usagers. Ainsi, Mme E... n'est pas fondée à soutenir qu'elle a effectué des tâches ne correspondant pas au poste qu'elle avait accepté et contraires à la préconisation du comité médical départemental.

5. En deuxième lieu, si la requérante soutient que, lors des accidents dont elle a été victime les 2 décembre 2009 et 22 juin 2010, elle n'a reçu aucune assistance de la part de son supérieur hiérarchique, elle ne produit aucun élément au soutien de cette allégation. De même, il ne résulte pas de l'instruction que ces deux accidents résulteraient, comme l'affirme la requérante, du caractère prétendument inadapté du poste qui lui a été confié. A cet égard, l'administration fait valoir en défense sans être sérieusement contestée que la chute de Mme E... le 2 décembre 2009 s'explique par le fait que cette dernière, qui ne portait pas les chaussures de service qui lui avaient pourtant été fournies, a glissé sur le sol humide qui venait d'être lavé. De même, si la requérante s'est blessée en brisant une carafe le 22 juin 2010, cette seule circonstance n'est pas de nature à établir le caractère inadapté de son poste.

6. En troisième lieu, la circonstance que la requérante se soit vu confier la tâche, à compter du 12 juillet 2010, de débarrasser les plateaux et de " rempoter les vitrines " n'est pas de nature à établir une quelconque intention punitive de la part de son supérieur hiérarchique.

7. En quatrième lieu, s'il résulte de l'instruction que Mme E... a été victime d'une chute le 21 novembre 2011, laquelle a occasionné une rupture des ligaments croisés de son genou droit, ainsi qu'une lésion du ménisque, nécessitant deux interventions chirurgicales les

30 mars 2012 et 26 mai 2016, elle ne produit aucun élément de nature à établir que cet accident résulterait, comme elle le prétend, d'un état de fatigue consécutif au rangement d'une centaine de chaises qui lui aurait été imposé à la fin du service.

8. En cinquième lieu, si la requérante soutient qu'à la suite de l'accident du

21 novembre 2011, elle a été affectée à la préparation des sandwiches, elle n'établit ni d'ailleurs n'allègue avoir contesté ce changement de poste et a d'ailleurs obtenu, conformément à sa demande, de pouvoir travailler à temps partiel à hauteur de 60 % à compter du 1er octobre 2012. Il n'est pas établi que ce poste aurait entraîné une aggravation de ses problèmes au genou droit et l'apparition de lombalgies. Dans ces conditions, ce changement de poste n'est pas de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.

9. En sixième lieu, si la requérante s'est blessée au pouce avec un couteau le

14 novembre 2013 en préparant des sandwiches, elle ne produit aucun élément de nature à établir que son supérieur hiérarchique se serait abstenu de l'aider, notamment en l'accompagnant à l'infirmerie.

10. En septième lieu, si Mme E..., qui a été victime d'une chute le 20 décembre 2013 à 16 h 45, laquelle a occasionné une blessure au niveau de son poignet droit, fait valoir que cet accident résulte de son état de fatigue à la fin d'une journée de travail de huit heures dont trois heures supplémentaires, elle ne l'établit pas et n'apporte par ailleurs aucun élément de nature à établir qu'elle aurait été soumise à des conditions de travail ne respectant pas les préconisations du comité médical ou celles de son médecin traitant. Il n'est pas établi que la charge de travail de Mme E... lorsqu'elle occupait son poste à temps partiel était identique à celle correspondant à un temps plein et qu'elle aurait pour ce motif demandé avec succès à travailler à 80 % le 4 mars 2013 puis à 100 % le 25 février 2014.

11. En huitième lieu, si la requérante soutient qu'à la suite de l'augmentation, à sa demande, de son temps de travail, de 60 à 80 %, le CROUS de Créteil lui aurait imposé une répartition de son service sur cinq jours hebdomadaires et non quatre comme elle le souhaitait, l'administration fait valoir sans être sérieusement contestée que l'absence d'un agent pendant une journée par semaine n'était pas possible, compte tenu de la nécessité d'assurer la continuité et le bon fonctionnement du service. Dès lors, le refus de permettre à Mme E... d'effectuer son travail sur une semaine de quatre jours n'est pas de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.

12. Enfin, si Mme E... fait valoir qu'elle a fait l'objet d'un licenciement en 2019 en raison d'une inaptitude totale et définitive à l'exercice de ses fonctions, il ne résulte pas de l'instruction que ce licenciement serait la conséquence d'agissements antérieurs constitutifs de harcèlement moral ou qu'il contribuerait lui-même à faire présumer un tel harcèlement.

Quant aux atteintes à l'intégrité psychologique de Mme E... :

13. En premier lieu, si la requérante soutient qu'elle a été durablement exposée à une surveillance excessive, ainsi qu'à des brimades, des moqueries et des propos humiliants, elle n'apporte aucun élément au soutien de cette allégation.

14. En deuxième lieu, il n'est pas établi que Mme E... a constamment rencontré des difficultés pour obtenir des entretiens et communiquer avec sa hiérarchie. Si elle fait valoir que le 29 octobre 2014, le directeur adjoint du CROUS aurait brutalement mis fin à un entretien relatif à sa demande d'aménagement de son temps de travail en lui demandant de sortir de son bureau, cette circonstance, contestée par l'administration, n'est en tout état de cause pas de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral.

15. En troisième lieu, il ne résulte pas de l'instruction qu'un temps de pause lui aurait été refusé après la reprise de son travail à la suite de l'accident du 21 novembre 2011.

16. En quatrième lieu, si la requérante soutient que ses casiers ont été forcés et vidés en 2008 et 2015, pendant ses congés de maladie, sur instruction de sa hiérarchie, elle ne l'établit pas s'agissant de l'année 2008. Si l'administration admet les faits s'agissant de l'année 2015, elle fait valoir que cette intervention était justifiée par la nécessité de procéder à l'inventaire et à l'étiquetage de l'ensemble du linge de tous les agents du service, alors que l'intéressée était durablement placée en congé maladie. En outre, si la requérante soutient que ses effets personnels ont, dans les deux cas, disparu, elle n'établit ni même n'allègue avoir signalé cette disparition ou présenté une quelconque réclamation.

17. Enfin, si Mme E... soutient qu'elle a été affectée à un poste de caissière le

12 novembre 2015 sans bénéficier d'une formation préalable, que son emploi du temps ne lui a été communiqué que le 17 décembre 2015, que son supérieur hiérarchique lui a injustement reproché des erreurs imputables à cette absence de formation, elle n'apporte aucun élément au soutien de ces allégations.

18. Il résulte de ce qui précède que les éléments de fait exposés par

Mme E... ne permettent pas de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que son état de santé s'est dégradé en raison d'un tel harcèlement, alors même qu'elle produit plusieurs certificats médicaux indiquant que ses pathologies seraient en lien avec ses conditions de travail. Par suite, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'exception de prescription quadriennale opposée en défense, ses conclusions tendant à ce que le CROUS de Créteil soit condamné à réparer les préjudices résultant d'un harcèlement moral doivent être rejetées.

En ce qui concerne le manquement aux obligations de santé et de sécurité :

19. Aux termes de l'article 23 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Des conditions d'hygiène et de sécurité de nature à préserver leur santé et leur intégrité physique sont assurées aux fonctionnaires durant leur travail ". Aux termes de l'article 2-1 du décret du 28 mai 1982 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la prévention médicale dans la fonction publique : " Les chefs de service sont chargés, dans la limite de leurs attributions et dans le cadre des délégations qui leur sont consenties, de veiller à la sécurité et à la protection de la santé des agents placés sous leur autorité ". Aux termes de son article 3 : " Dans les administrations et établissements mentionnés à l'article 1er, les règles applicables en matière de santé et de sécurité sont, sous réserve des dispositions du présent décret, celles définies aux livres Ier à V de la quatrième partie du code du travail et par les décrets pris pour leur application (...) ". Aux termes de l'article L. 4121-1 de ce code : " L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1° Des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ; 2° Des actions d'information et de formation ; 3° La mise en place d'une organisation et de moyens adaptés. L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes ". En vertu de ces dispositions, il appartient aux autorités administratives de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et morale de leurs agents.

20. D'une part, si Mme E... a été victime de cinq accidents sur son lieu de travail entre 2009 et 2013 et si elle a été placée à plusieurs reprises en congé maladie, il ne résulte pas de l'instruction que cette situation serait imputable à un manquement de l'administration à son obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. D'ailleurs,

Mme E... n'invoque aucun élément précis au soutien de ce moyen.

21. D'autre part, il résulte des dispositions des articles L. 451-1 et suivants du code de la sécurité sociale qu'un agent contractuel de droit public peut demander au juge administratif la réparation par son employeur du préjudice que lui a causé l'accident du travail dont il a été victime, dans la mesure où ce préjudice n'est pas réparé par application du code de la sécurité sociale, lorsque cet accident est dû à la faute intentionnelle de cet employeur ou de l'un de ses préposés. Il peut également exercer une action en réparation de l'ensemble des préjudices résultant de cet accident non couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale, contre son employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, en cas de faute inexcusable de ce dernier, ou contre une personne autre que l'employeur ou ses préposés, conformément aux règles du droit commun, lorsque la lésion dont il a été la victime est imputable à ce tiers.

22. En l'espèce, il n'est pas même allégué que les accidents du travail dont

Mme E... a été victime seraient imputables à une faute intentionnelle ou inexcusable de son employeur.

23. Il résulte de ce qui précède que les conclusions indemnitaires présentées par Mme E... au titre de la violation de l'obligation de sécurité doivent être rejetées. En outre, en l'absence de harcèlement moral et de manquement à l'obligation de sécurité, les conclusions de Mme E... tendant à l'indemnisation de son préjudice corporel, moral et d'agrément doivent être rejetées.

En ce qui concerne les retards dans le versement de la rémunération de

Mme E... :

24. En premier lieu, aux termes de l'article 13 du décret du 17 janvier 1986 relatif aux dispositions générales applicables aux agents contractuels de l'Etat pris pour l'application des articles 7 et 7 bis de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " L'agent non titulaire en activité et comptant au moins trois années de service, atteint d'une affection dûment constatée, le mettant dans l'impossibilité d'exercer son activité, nécessitant un traitement et des soins prolongés et présentant un caractère invalidant et de gravité confirmée bénéficie d'un congé de grave maladie pendant une période maximale de trois ans. Dans cette situation, l'intéressé conserve l'intégralité de son traitement pendant une durée de douze mois. Le traitement est réduit de moitié pendant les vingt-quatre mois suivants. (...) ".

25. Le tribunal a alloué à Mme E... la somme de 3 000 euros en réparation de son préjudice, en retenant que l'intéressée n'a pas perçu l'intégralité de son traitement durant les douze premiers mois de son congé de grave maladie ayant débuté le 24 juillet 2006, mais seulement une somme légèrement supérieure à la moitié de celui-ci et qu'en lui versant le solde de son traitement avec un retard de six ans, le CROUS de Créteil a commis une faute de nature à engager sa responsabilité. A cet égard, si Mme E... demande la somme de 5 000 euros en réparation de ce préjudice, elle n'apporte en appel aucun élément de nature à remettre en cause l'appréciation faite par le tribunal dudit préjudice.

26. En second lieu, Mme E... soutient qu'en ne lui versant une rémunération pour les quatre mois suivant la fin de son congé de grave maladie le 23 juillet 2009 qu'avec six ans de retard, l'administration a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, et demande à ce titre la somme de 20 500 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi. Toutefois, il n'est pas même allégué qu'ayant épuisé son congé pour grave maladie,

Mme E... aurait été placée à tort en congé sans rémunération et que l'administration aurait commis une faute en ne lui permettant pas de reprendre son travail à l'issue de ce congé. Il n'est en tout état de cause pas établi que la négligence de l'administration aurait généré un surcoût d'impôt sur le revenu de 300 euros.

27. Il résulte de tout ce qui précède que Mme E... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a condamné le CROUS de Créteil à lui verser la seule somme de 3 000 euros.

Sur les frais liés au litige :

28. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le CROUS de Créteil, qui n'est pas la partie perdante, verse à la requérante une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le CROUS de Créteil au titre de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête présentée par Mme E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le Centre régional des oeuvres universitaires et scolaires de Créteil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 17VE02937 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02937
Date de la décision : 08/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : M. CAMENEN
Rapporteur ?: M. Thierry ABLARD
Rapporteur public ?: M. CLOT
Avocat(s) : DALMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-10-08;17ve02937 ?
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