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24/09/2020 | FRANCE | N°18VE01757

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 24 septembre 2020, 18VE01757


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme E... C... ont demandé au Tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler la décision du 29 janvier 2015 par laquelle le maire de Corbeil-Essonnes a fait non-opposition à la déclaration préalable de M. F... B..., ensemble la décision implicite par laquelle le maire de Corbeil-Essonnes a rejeté leur recours gracieux, d'autre part, de mettre à la charge de la commune de Corbeil-Essonnes le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrativ

e.

Par un jugement n° 1506352 du 22 mars 2018, le Tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme E... C... ont demandé au Tribunal administratif de Versailles, d'une part, d'annuler la décision du 29 janvier 2015 par laquelle le maire de Corbeil-Essonnes a fait non-opposition à la déclaration préalable de M. F... B..., ensemble la décision implicite par laquelle le maire de Corbeil-Essonnes a rejeté leur recours gracieux, d'autre part, de mettre à la charge de la commune de Corbeil-Essonnes le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1506352 du 22 mars 2018, le Tribunal administratif de Versailles a annulé les décisions attaquées et mis à la charge de M. et Mme B... et de la commune de Corbeil-Essonnes le versement d'une somme de 1000 euros chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, des mémoires et des pièces complémentaires enregistrés les 21 mai et 12 juin 2018, 5 juin 2019 et 13 mai 2020, M. F... H... B... et Mme G... B..., représentés par la SCP Cohen Hyest, avocat, demandent à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande de M. et Mme C... ;

3° de condamner solidairement M. et Mme C... à leur verser une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la demande de première instance était irrecevable, en raison de sa tardiveté ;

- la demande de première instance est mal fondée, dès lors que les travaux respectent les dispositions de l'article UH7 du plan local d'urbanisme.

.....................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de Mme Margerit, rapporteur public,

- et les observations de Me A... pour la commune de Corbeil-Essonnes.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... a déposé le 24 décembre 2014 auprès des services de la mairie de Corbeil-Essonnes une déclaration préalable tendant à la surélévation de 1,20 mètre de son abri de jardin situé sur son terrain sis au n° 38 de la route de Lisses et l'installation d'une nouvelle toiture. Par arrêté du 29 janvier 2015 le maire de Corbeil-Essonnes a décidé de ne pas s'opposer à ces travaux. Le 26 mai 2015, M. et Mme C..., voisins du pétitionnaire, ont formé un recours gracieux contre cette décision, rejeté implicitement par une décision née du silence de l'administration le 27 juillet 2015. M. et Mme C... ont saisi le Tribunal administratif de Versailles d'une demande tendant à l'annulation de la décision du 29 janvier 2015 par laquelle le maire de Corbeil-Essonnes a fait non-opposition à la déclaration préalable de M. B..., ensemble la décision implicite par laquelle le maire de Corbeil-Essonnes a rejeté leur recours gracieux. Par un jugement n° 1506352 du 22 mars 2018, le Tribunal administratif de Versailles a annulé les décisions attaquées et mis à la charge des époux B... et de la commune de Corbeil-Essonnes le versement d'une somme de 1 000 euros chacun au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. M. et Mme B... relèvent appel de ce jugement.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R. 424-15 ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention (...) de la déclaration préalable doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté ou dès la date à laquelle (...) la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquis et pendant toute la durée du chantier. (...) ". Aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un (...) permis de construire (...), le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation (...). L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif ".

3. En premier lieu, M. et Mme B... ainsi que la commune de Corbeil-Essonnes soutiennent que la demande présentée par M. et Mme C... en première instance était tardive, dès lors que le panneau d'affichage de la déclaration préalable a été affiché sur le terrain pendant une période continue de deux mois à compter du mois de février 2015 et que celui-ci était visible depuis la voie publique. Toutefois, les dix attestations produites par les appelants, établies postérieurement la date du recours par des voisins ou des proches, dont certaines se bornent à déclarer que le panneau était affiché en février 2015, alors que d'autres indiquent qu'il était présent de février 2015 jusqu'à la " fin de l'année ", sont contredites par trois attestations versées au dossier par M. et Mme C... et sont insuffisamment précises et circonstanciées pour constituer un commencement de preuve de la continuité de l'affichage depuis le mois de février 2015. Par suite, M. et Mme B... et la commune de Corbeil-Essonnes ne sont pas fondés à soutenir que la requête de première instance aurait été irrecevable.

4. En deuxième lieu, d'une part, l'exercice par un tiers d'un recours administratif ou contentieux contre un permis de construire montre qu'il a connaissance de cette décision et a pour effet de faire courir à son égard le délai de recours contentieux, alors même que la publicité concernant ce permis n'aurait pas satisfait aux exigences prévues par l'article A. 424-17 du code de l'urbanisme. D'autre part, si les dispositions citées ci-dessus de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ne font pas obstacle à ce que la personne intéressée forme, en respectant les formalités de notification propres à ce recours, un recours contentieux dans le délai de recours de droit commun, il résulte de ces mêmes dispositions qu'à défaut de l'accomplissement des formalités de notification qu'elles prévoient, un recours administratif dirigé contre un permis de construire ne proroge pas le délai de recours contentieux.

5. La commune de Corbeil-Essonnes soutient que la demande de première instance était tardive, dès lors qu'en formant un recours gracieux le 26 mai 2015, M. et Mme C... auraient manifesté leur connaissance acquise, et que dès lors qu'ils n'auraient pas notifié leur recours gracieux au bénéficiaire de la déclaration préalable, ce recours n'aurait pas prorogé le délai de recours contentieux. Toutefois, il ressort du mémoire en défense produit par M. et Mme B... en première instance qu'ils ont reconnu avoir reçu notification du recours gracieux le 26 mai 2015 et ont, au demeurant, produit à l'appui de leur mémoire le courrier de notification comportant une copie intégrale de ce recours, en pièce jointe. Par suite, le recours gracieux formé par les époux C..., rejeté par une décision implicite née le 27 juillet 2015, a prorogé le délai de recours contentieux de deux mois. La requête ayant été enregistrée au greffe du Tribunal administratif de Versailles le 24 septembre 2015, la commune de Corbeil-Essonnes n'est pas fondée à soutenir qu'elle était irrecevable en raison de sa tardiveté.

Sur le motif d'annulation retenu en première instance :

6. L'article UH 7 du plan local d'urbanisme de la commune de Corbeil-Essonnes prévoit que : " (...) II. Les constructions annexes (garages, abris de jardins...) (...) Lorsqu'une construction annexe est implantée en recul par rapport à la limite séparative, la marge de recul est égale à la hauteur de la façade avec un minimum de 2,5 mètres mesuré au droit de la construction. (...) " . Il résulte de ces dispositions que la distance d'implantation d'une annexe existante implantée en recul doit être au moins égale à la hauteur de la façade qui fait face à la limite séparative, avec un minimum de 2,5 mètres dans l'hypothèse où cette façade serait elle-même d'une hauteur inférieure à 2,5 mètres. Si M. et Mme B..., ainsi que la commune de Corbeil-Essonnes, font valoir que la limite séparative ne se situe pas dans la ligne d'implantation du grillage séparatif, lequel est implanté en retrait, les pièces qu'ils présentent et, notamment, diverses photographies, ne sont pas de nature à établir le bien-fondé de leurs allégations, alors que M. B... a clairement précisé à l'appui de sa déclaration préalable de travaux que son annexe était implantée à 3 mètres de la limite séparative. Il ressort, en outre, des pièces du dossier que les travaux de surélévation de l'annexe augmentent la hauteur initiale de sa façade de 2,05 mètres à 3,25 mètres, alors que cette annexe est implantée à 3 mètres de la limite séparative. Par suite, si les premiers juges ont commis une erreur matérielle en retenant, à tort, une hauteur de 3,50 mètres, au lieu de 3,25 mètres, le Tribunal administratif a jugé à bon droit que la décision de non-opposition à déclaration préalable a méconnu les dispositions citées ci-dessus de l'article UH7 du plan local d'urbanisme de la commune de Corbeil-Essonnes.

Sur les conclusions d'appel incident présentées par M. et Mme C... :

7. Aux termes de l'article R. 431-36 du code de l'urbanisme, alors applicables : " Le dossier joint à la déclaration comprend : (..) b) Un plan de masse coté dans les trois dimensions lorsque le projet a pour effet de créer une construction ou de modifier le volume d'une construction existante ; (..) Il est complété, s'il y a lieu, par les documents mentionnés aux a et b de l'article R. 431-10, aux articles R. 431-14 à R. 431-15, aux b et g de l'article R. 431-16 et aux articles R. 431-18, R. 431-18-1, R. 431-21, R. 431-25 et R. 431-31 à R. 431-33. ". Aux termes de l'article R431-10 du même code : " Le projet architectural comprend également (...) d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse ".

8. La circonstance que le dossier de déclaration préalable ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité l'autorisation qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.

9. M. et Mme C... font valoir que les premiers juges ont considéré, à tort, qu'en application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme aucun autre moyen que celui tiré de la violation de l'article UH7 n'était, en l'état du dossier, de nature à fonder l'annulation de la décision attaquée, alors que le moyen tiré de l'incomplétude du dossier de déclaration préalable était fondé. Ils soutiennent que cette demande ne comportait pas le plan masse des constructions en trois dimensions, faisant apparaître les bâtiments existants, avec leurs dimensions et leur emplacement, ce qui aurait fait obstacle à ce que la commune apprécie l'ampleur des travaux et l'apparence architecturale et qu'en outre, le dossier ne comporte pas les photographies permettant de situer le bâtiment dans un environnement proche et lointain. Toutefois, les informations précisées dans le formulaire soumis à la commune, les plans des différentes façades, ainsi que les représentations en trois dimensions, accompagnées d'une photo du bâtiment dans son environnement existant, jointes au formulaire, permettaient à l'administration, eu égard à l'importance et à la nature du projet, de statuer en connaissance de cause sur le projet dont elle était saisie. Par suite, le moyen doit être écarté.

Sur l'application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme :

10. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, (...) estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé par un permis modificatif, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire du permis pourra en demander la régularisation même après l'achèvement des travaux. Le refus par le juge de faire droit à une demande d'annulation partielle est motivé. ".

11. Si la commune de Corbeil-Essonnes fait valoir que la Cour pourrait procéder à la régularisation du projet, dès lors qu'elle démontre spontanément qu'une nouvelle décision de non-opposition à déclaration préalable pourrait être légalement prise au regard des nouvelles dispositions de l'article UH2 du plan local d'urbanisme du 19 octobre 2019, cette circonstance n'est pas de nature à justifier une régularisation devant le juge.

12. Toutefois, l'illégalité relevée au point 6. du présent arrêt, qui n'affecte qu'une partie mineure et identifiée du projet, est susceptible d'être régularisée, sans que soit remise en cause l'économie générale du projet. Il y a lieu, en conséquence, en application des dispositions de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, d'annuler la décision de non opposition à déclaration préalable, en tant seulement que la surélévation autorisée de 1,20 mètre de l'abri de jardin existant, implanté à 3 mètres des limites séparatives, méconnaît de 0,25 mètre les dispositions de l'article UH7 du plan local d'urbanisme et de fixer à deux mois le délai imparti au pétitionnaire pour solliciter la régularisation du projet.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a prononcé l'annulation totale de la décision de non opposition à déclaration préalable, ainsi que de la décision implicite de rejet du recours gracieux de M. et Mme C....

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

15. M. et Mme B... n'étant pas la partie essentiellement perdante, les conclusions de M. et Mme C... tendant à mettre à leur charge une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les conclusions tendant à l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Versailles en tant qu'il n'a fixé le montant des frais irrépétibles qu'à la somme de 1 000 euros ne peuvent qu'être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme C... une somme à verser à M. et Mme B... en application de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du 29 janvier 2015 par laquelle le maire de Corbeil-Essonnes a fait non-opposition à la déclaration préalable de M. F... B... et la décision du 27 juillet 2015 par laquelle cette même autorité a implicitement rejeté le recours gracieux formé par M. et Mme C... sont annulées, en tant que la surélévation autorisée de 1,20 mètre de l'abri de jardin existant, implanté à 3 mètres de limites séparatives, méconnaît de 0,25 mètre les dispositions de l'article UH7 du plan local d'urbanisme.

Article 2 : Le délai accordé à M. et Mme B... pour solliciter la régularisation de leur projet est fixé à deux mois.

Article 3 : Les conclusions en appel incident présentées par M. et Mme C... sont rejetées.

Article 4 : Le jugement n° 1506352 du Tribunal administratif de Versailles du 22 mars 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Les conclusions présentées par M. et Mme B... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Les conclusions présentées par M. et Mme C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 18VE01757 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01757
Date de la décision : 24/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. ALBERTINI
Rapporteur ?: M. Marc FREMONT
Rapporteur public ?: Mme MARGERIT
Avocat(s) : SCP FLOQUET et NOACHOVITCH

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-09-24;18ve01757 ?
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