Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, d'une part, d'annuler l'arrêté du 29 août 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit, et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de lui délivrer le titre de séjour sollicité dans le délai d'un mois suivant la notification du jugement sous astreinte de 50 euros par jour de retard et, subsidiairement, de réexaminer sa demande dans le même délai et sous la même astreinte.
Par un jugement n° 1810006 du 22 mars 2019, le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 avril 2019, M. B..., représenté par Me Konate, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler l'arrêté du 29 août 2018 en tant qu'il porte refus de séjour, obligation de quitter le territoire et fixe le pays de destination ;
3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de renouveler son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
5° d'enjoindre au préfet du Val-D'Oise de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en application de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
6° de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision refusant de renouveler son titre de séjour est entachée d'erreurs de fait ; d'une part, il était titulaire d'un contrat de travail à la date de cette décision et jusqu'au
18 octobre 2018 ce dont l'autorité préfectorale était informée ; d'autre part, le seul fait d'être titulaire d'un contrat d'intérim ne saurait fonder une décision de refus au regard des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; enfin, ses droits à l'allocation journalière d'assurance chômage n'arrivaient à terme qu'en août 2019 ;
- elle est également entachée d'erreurs de droit au regard de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans la mesure où il travaillait depuis le mois d'avril 2018 sans que la qualité de son contrat d'intérim puisse valablement lui être opposée ; par ailleurs, il n'a plus perçu d'assurance chômage, non en raison de l'arrivée à terme de ses droits mais du fait de l'expiration de son récépissé de demande de titre de séjour ;
- elle est entachée, comme le jugement, d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- la décision portant fixation du pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation des décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;
- il y a lieu d'ordonner le renouvellement de sa carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., ressortissant bissau-guinéen né le 5 mars 1985 à Biombo (Guinée Bissau) et entré en France le 12 avril 2011, a sollicité le renouvellement de son titre de séjour portant la mention " salarié ". Par un arrêté du 29 août 2018, le préfet du Val-d'Oise a rejeté cette demande, fait obligation à M. B... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit. Par la requête susvisée, M. B... fait appel du jugement du 22 mars 2019 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté en litige :
2. Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable au litige : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : / 1° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée indéterminée, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 du code du travail. Elle porte la mention " salarié ". / La carte de séjour est prolongée d'un an si l'étranger se trouve involontairement privé d'emploi. Lors du renouvellement suivant, s'il est toujours privé d'emploi, il est statué sur son droit au séjour pour une durée équivalente à celle des droits qu'il a acquis à l'allocation d'assurance mentionnée à l'article L. 5422-1 du code du travail ; / 2° Pour l'exercice d'une activité salariée sous contrat de travail à durée déterminée ou dans les cas prévus aux articles L. 1262-1 et L. 1262-2 du même code, dans les conditions prévues à l'article L. 5221-2 dudit code. Cette carte est délivrée pour une durée identique à celle du contrat de travail ou du détachement, dans la limite d'un an. Elle est renouvelée pour une durée identique à celle du contrat de travail ou du détachement. Elle porte la mention " travailleur temporaire " ".
3. D'une part, M. B... établit par divers attestations et bulletins de paie qu'à la date du 29 août 2018, il était embauché par une société d'intérim de la région parisienne en qualité d'ouvrier dans le bâtiment. Son employeur atteste de la qualité du travail et du sérieux de l'intéressé en précisant que la fin de ses missions n'est justifiée que par la situation administrative du requérant. Il est également justifié de l'activité professionnelle constante du requérant dans le secteur du bâtiment, notamment dans des emplois de maçon coffreur, qu'il a occupés auprès de la même société de juillet 2015 à novembre 2016 au cours de contrats à durée déterminée qui ont sans cesse été renouvelés, puis auprès d'une société d'intérim située en Guyane avant d'être de nouveau embauché par son précédent employeur jusqu'en juin 2017 puis par un second employeur à temps complet jusqu'en octobre de la même année. Si à compter de cette date, M. B... a perçu l'allocation d'aide au retour à l'emploi pendant une durée de sept mois, il a de nouveau travaillé d'avril à octobre 2018. D'autre part, il résulte du courrier adressé par Pôle emploi à M. B... le 28 novembre 2017, que ce dernier disposait d'une durée maximale d'indemnisation de 713 jours calendaires. Le requérant n'ayant perçu l'allocation d'aide au retour à l'emploi qu'entre les mois d'octobre 2017 à avril 2018, ainsi que cela résulte des éléments établis au point précédent, le requérant ne se trouvait pas en situation de fin de droits au regard de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à la date de la décision en litige.
4. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir qu'en refusant de renouveler son titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile aux motifs qu'il n'exerçait plus d'activité salariée, ne présentait ni promesse d'embauche, ni contrat de travail et qu'il se trouvait en fin de droits auprès de Pôle emploi depuis le 15 juillet 2018, le préfet du Val-d'Oise a commis une erreur de fait dans l'appréciation de la situation du requérant au regard des dispositions de l'article précité. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour doit être annulée.
5. Il résulte de ce qui précède que les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination prises à l'encontre de M. B... doivent nécessairement être également annulées, par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
6. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " et aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ". Aux termes de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'annulation par le juge de la décision portant obligation de quitter le territoire français implique qu'il soit mis fin aux mesures de surveillance de l'intéressé et que lui soit délivrée une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son droit au séjour. En dehors de cette mesure, l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français, lorsqu'elle n'est pas la conséquence de l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, n'implique aucune mesure d'exécution particulière.
7. Au cas d'espèce, l'annulation de la décision portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français prise à l'encontre de M. B... implique seulement d'une part, le cas échéant, qu'il soit mis fin aux mesures de surveillance dont l'intéressé ferait l'objet et, d'autre part, que, comme il le demande, lui soit délivrée dans un délai de quinze jours une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau, dans un délai de deux mois, examiné sa demande de titre de séjour. Il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à M. B... de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1810006 du 22 mars 2019 du Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise est annulé.
Article 2 : L'arrêté du 29 août 2018 du préfet du Val-d'Oise est annulé.
Article 3 : Il est enjoint au préfet du Val-d'Oise de délivrer à M. B... dans un délai de quinze jours une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que soit à nouveau examinée la demande de titre de séjour de l'intéressé, dans un délai de deux mois.
Article 4 : L'Etat versera à M. B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête présentée par M. B... est rejeté.
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N° 19VE01362