Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de condamner l'Assistance publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) à lui verser une somme de 8 764 026,02 euros, majorée des intérêts au taux légal à compter du dépôt de la requête, en réparation des préjudices subis du fait de ses interventions chirurgicales réalisées le 10 janvier 2007 à l'hôpital Raymond Poincaré et le 22 janvier 2008 à l'hôpital Cochin.
La caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Paris a demandé la condamnation de l'AP-HP à lui verser une somme de 69 436,26 euros, sous réserve des prestations non connues à ce jour et des frais capitalisés en cours de chiffrage, majorés des intérêts au taux légal à compter de l'enregistrement de sa première demande et à ce que l'indemnité forfaitaire de gestion qui s'élève à 1 047 euros soit également mise à la charge de l'AP-HP.
Par un jugement n° 1400858 du 8 juillet 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'AP-HP à verser à Mme C... la somme de 244 941,67 euros, assortie des intérêts légaux, et rejeté les conclusions de la CPAM de Paris.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête enregistrée le 5 août 2016 sous le n° 16VE02586, la caisse primaire d'assurance maladie de Paris, représentée par Me D..., demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement du 8 juillet 2016 en ce qu'il a rejeté la demande de la CPAM ;
2° de condamner l'AP-HP à lui verser a minima la somme de 9 379,67 euros assortie des intérêts légaux à compter du 18 mars 2015 ;
3° de condamner l'AP-HP à lui verser l'indemnité forfaitaire de gestion de 1 047 euros ;
4° de mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Elle soutient que :
- elle a versé diverses prestations dans l'intérêt de Mme C... pour un montant de 69 436,26 euros ;
- le tribunal a mal appliqué les principes de l'indemnisation des dommages corporels confondant les dépenses de santé actuelles et futures, antérieures à la consolidation, ou postérieures ;
- ainsi pour les dépenses de santé actuelle, elle doit récupérer 70% des 13 399,52 euros versés, soit la somme de 9 379,67 euros ;
- pour les dépenses de santé futures, les sommes sont intégralement absorbées par la victime au regard de son droit de préférence.
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II. Par une requête enregistrée le 8 septembre 2016 sous le n° 16VE02890 et un mémoire en réplique enregistré le 8 juillet 2019, Mme A... C... représentée par la SELARL Coubris, C... et associés, avocats, demande à la Cour :
1° d'infirmer le jugement du 8 juillet 2016 en ce qu'il a retenu un taux de perte de chance de 70% et non la responsabilité entière de l'AP-HP ;
2° de condamner l'AP-HP à l'indemniser intégralement des préjudices subis, soit une somme totale de 11 851 270,41 euros et d'assortir les sommes demandées des intérêts légaux à compter de la saisine du tribunal administratif ;
3° à titre subsidiaire condamner l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à réparer les préjudices subis ;
4° mettre à la charge de l'AP-HP une somme de 4 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.
Elle soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges n'ont pas retenu de faute de l'AP-HP dans l'indication opératoire de l'intervention du 22 janvier 2008 et qu'ils ont retenu un taux de perte de chance de 70% ;
- les propos alarmistes des chirurgiens l'ont décidée à se faire opérer alors qu'elle ne ressentait plus de gêne ou de douleur ; la faute dans l'indication opératoire de l'intervention du 10 janvier 2007 a été retenu à bon droit ; il existait en outre d'autres alternatives thérapeutiques ;
- c'est à bon droit que le tribunal a retenu une faute dans le geste opératoire du 10 janvier 2007 ;
- la complication opératoire n'a pas été diagnostiquée ;
- c'est à bon droit que le tribunal a retenu une faute dans le geste opératoire lors de l'intervention du 22 janvier 2008 ;
- compte tenu de son état antérieur, le chirurgien aurait dû être particulièrement prudent dans son geste opératoire ; le tribunal aurait dû retenir une faute à ce titre ;
- son état antérieur latent, non évolutif, n'aurait pas dû être pris en compte pour limiter le taux de perte de chance à 70% ;
- c'est à bon droit que le tribunal a retenu un défaut d'information à l'origine d'une perte de chance de se soustraire aux opérations pratiquées et d'un préjudice d'impréparation ;
- la nécessité de porter des chaussures orthopédiques est devenue impérieuse à compter de l'intervention de janvier 2007 alors qu'elle n'en portait pas auparavant ;
- c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu comme préjudice l'assistance d'une tierce personne ;
- c'est à tort qu'il a été considéré qu'elle n'apportait pas la preuve de l'étendue de la perte définitive de revenus futurs ; elle se trouve dans l'incapacité de travailler ;
- les dépenses de santé doivent être réévaluées ;
- un véhicule adapté est nécessaire à son état ;
- l'incidence professionnelle de son état de santé doit être indemnisé ;
- l'ensemble des préjudices extra patrimoniaux est à revaloriser.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- l'arrêté du 27 décembre 2019 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme B...,
- et les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Les requêtes ci-dessus visées n° 16VE02586 et n° 16VE02890 sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
2. Par la requête n° 16VE02586, la CPAM de Paris demande à la Cour d'infirmer le jugement n° 1400858 du 8 juillet 2016 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise en ce qu'il a rejeté sa demande de condamnation de l'AP-HP à lui verser une indemnité de 69 436,26 euros représentant les prestations diverses versées dans l'intérêt de Mme C..., ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion.
3. Par la requête n° 16VE02890, Mme C... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a condamné l'AP-HP à lui verser une indemnité de 244 941,67 euros.
Sur l'appel de Mme C... :
4. Mme C... est née en 1980 avec une malformation du membre inférieur droit avec raccourcissement de ce membre et anomalie anatomique au niveau du genou droit. En 1986, elle a été opérée pour allonger le tibia droit, puis en 1990, sur l'avant-pied pour équilibrer la cheville, en 1993, pour freiner la croissance du fémur droit. Il en est résulté un pied droit en position de valgus et un genu valgum. Elle a ressenti en 2005 des douleurs au genou droit et a consulté le professeur Judet de l'hôpital Raymond Poincaré de Garches, qui a imputé ces douleurs à la position de la cheville droite et préconisé une opération pour la redresser. Il a ainsi réalisé une ostéotomie du tibia droit le 10 janvier 2007, suivie, pour remédier à la situation résultant de cette opération, d'une seconde intervention le 22 janvier 2008 réalisée par le professeur Tomeno, de l'hôpital Cochin consistant en une ostéotomie du calcanéum et une ostéotomie du médio-pied. Mme C... qui souffre de douleurs et conserve des séquelles de ces opérations a saisi d'une demande d'indemnisation la CRCI d'Ile-de-France qui a diligenté deux expertises, et émis un avis favorable à l'indemnisation de Mme C.... L'AP-HP n'ayant pas suivi cet avis, Mme C... a saisi le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise qui par jugement du 8 juillet 2016 dont elle relève appel, a condamné l'AP-HP à verser à Mme C... une somme de 244 941,67 euros.
Sur les fautes du service hospitalier :
Sur le défaut d'information :
5. Aux termes de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique : " Toute personne a le droit d'être informée sur son état de santé. Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu'ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus. Lorsque, postérieurement à l'exécution des investigations, traitements ou actions de prévention, des risques nouveaux sont identifiés, la personne concernée doit en être informée, sauf en cas d'impossibilité de la retrouver. / Cette information incombe à tout professionnel de santé dans le cadre de ses compétences et dans le respect des règles professionnelles qui lui sont applicables. Seules l'urgence ou l'impossibilité d'informer peuvent l'en dispenser. / (...) En cas de litige, il appartient au professionnel ou à l'établissement de santé d'apporter la preuve que l'information a été délivrée à l'intéressé dans les conditions prévues au présent article. Cette preuve peut être apportée par tout moyen. ". En application de ces dispositions, doivent être portés à la connaissance du patient, préalablement au recueil de son consentement à l'accomplissement d'un acte médical, les risques connus de cet acte qui soit présentent une fréquence statistique significative, quelle que soit leur gravité, soit revêtent le caractère de risque grave, quelle que soit leur fréquence. Un manquement des médecins à leur obligation d'information engage la responsabilité de l'hôpital et n'entraîne pour le patient que la perte de chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé.
6. En soutenant que la requérante a bénéficié d'au moins quatre consultations auprès de deux médecins avant l'opération du 10 janvier 2007, l'AP-HP ne rapporte pas la preuve qui lui incombe que Mme C... a bénéficié d'une information claire notamment sur les risques liés aux opérations subies. Par suite, l'AP-HP a manqué à son obligation d'information qui résulte des dispositions de l'article L. 1111-2 du code de la santé publique.
Sur les fautes médicales :
En ce qui concerne l'indication opératoire du 10 janvier 2007 :
7. Il résulte de l'instruction que le professeur Judet, à qui le Dr Paillard avait adressé Mme C... pour l'examen de son pied et de sa cheville, a imputé les douleurs au genou droit dont elle souffrait au valgus de l'arrière-pied droit et a proposé en conséquence de redresser l'axe de la cheville en réalisant une ostéotomie, par addition, du fait de l'inégalité de longueur. Le professeur Tomeno, également consulté par la requérante, après hésitation, a confirmé l'indication de cette opération.
8. Il résulte des rapports d'expertise du Dr Serwier en date du 7 février 2011, et des docteurs Toullec et Istria en date du 25 février 2013 que l'explication mécanique des douleurs au genou droit était plausible. Toutefois, compte tenu de l'absence de douleur à la cheville, d'une mobilité de l'arrière-pied droit en dépit du valgus, des traitements alternatifs auraient pu être envisagés à moyen terme, d'autant plus que l'opération était susceptible d'entraîner des effets indésirables sur une cheville présentant des signes d'arthrose débutante du fait de l'hyperpression de cette zone résultant de l'ostéotomie. Dans ces conditions, en préconisant une telle opération, au surplus sans s'assurer au préalable que la surface articulaire interne de la cheville pouvait supporter une telle opération, les médecins ont commis une faute dans l'indication opératoire.
En ce qui concerne le déroulement de l'opération du 10 janvier 2007 :
9. L'évolution post-opératoire de cette ostéotomie supra-malléolaire par addition tibiale, a mis en évidence une fracture de la charnière interne et une bascule de l'épiphyse tibiale, entraînant avec la correction du valgus, une mise en charge d'une surface articulaire arthrosique, laquelle n'a pas été diagnostiquée ni traitée immédiatement. Si la bascule épiphysaire ne résulte pas nécessairement d'un acte fautif mais peut relever de complications prévisibles, l'absence d'ostéosynthèse a été un facteur favorisant ce déplacement, lequel en outre n'a pas été traité à temps lors du suivi post-opératoire. L'absence de diagnostic des complications opératoires, et par conséquent de traitement adapté constituent des fautes de nature à engager la responsabilité du service hospitalier.
En ce qui concerne l'indication opératoire du 22 janvier 2008 :
10. Il résulte de l'instruction que l'opération subie le 10 janvier 2007 n'a entraîné qu'une correction incomplète du valgus de l'arrière-pied et Mme C... s'est plainte de douleurs à la cheville postérieurement à cette opération. Le professeur Tomeno a alors décidé de pratiquer une ostéotomie du calcanéum pour tenter de réaxer l'arrière du pied en y ajoutant une ostéotomie du médio-pied pour éviter un risque de supination de l'avant-pied. Le rapport d'expertise des docteurs Toullec et Istria considèrent cette intervention comme tout-à-fait acceptable en dépit du risque de pincement antéro-interne. Dans ces conditions, cette intervention chirurgicale n'apparaissant pas inadaptée, aucune faute du service hospitalier ne peut être retenu à ce titre.
En ce qui concerne le déroulement de l'opération du 22 janvier 2008 :
11. Il résulte de l'instruction que cette opération a généré une remontée de la grosse tubérosité et que les agrafes d'ostéosynthèse de l'ostéotomie du médio-pied son mal positionnées. Toutefois les experts précisent que cela ne relève pas d'un défaut technique mais de la réalisation d'un accident médical non fautif favorisé par l'état antérieur, lequel a été pris en compte par le chirurgien en décidant d'ajouter une ostéotomie du médio-pied pour éviter une autre déformation. Il ne résulte par ailleurs pas de l'instruction que le chirurgien aurait commis une imprudence dans le geste opératoire. Dans ces conditions, aucune faute susceptible d'engager la responsabilité de l'AP-HP ne peut être retenue dans le geste opératoire du 22 janvier 2008.
12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que l'AP-HP a commis des fautes en n'informant pas Mme C... des risques des deux interventions qu'elle a subies, en prescrivant l'indication opératoire de l'ostéotomie supra malléolaire d'addition tibiale du 10 janvier 2007, en la réalisant sans ostéosynthèse et sans diagnostiquer à l'issue la bascule épiphysaire tibiale.
Sur le taux de perte de chance :
13. L'état antérieur de la requérante, qui présentait une inégalité des membres inférieurs, un valgum de l'arrière pied-droit, une arthrose tibio-tarsienne débutante, et une agénésie du croisé antérieur du genou, ne peut être regardé comme étant stabilisé au regard des diverses consultations médicales de la requérante et des opérations subies avant 2007. Compte tenu de cet état antérieur, il y a lieu de fixer le taux de perte de chance résultant des fautes commises par l'AP-HP à 70%.
Sur l'évaluation des préjudices :
14. Il résulte du rapport d'expertise que l'état de santé de Mme C... a été considéré comme consolidé au 15 juillet 2010 alors qu'elle était âgée de 30 ans et quatre mois.
Sur les dépenses de santé actuelles :
15. Mme C... produit une facture de 400 euros de la clinique Victor Hugo à Paris relative à une opération de mai 2010 pour ablation des agrafes. Toutefois, cette opération nécessaire pour enlever les agrafes résultant de l'opération du 22 janvier 2008 est sans lien avec les fautes retenues de l'AP-HP. Il en est de même de la facture de frais de transport en ambulance de 28,95 euros pour un trajet effectué le 25 janvier 2008.
16. Mme C... justifie de deux consultations chez un psychologue en raison de son mal être consécutif à son préjudice, pour un montant global de 100 euros, ainsi que de séances de sophrologie pour un montant de 216 euros. En revanche les experts n'ayant pas retenu la nécessité pour l'avenir de séances d'ostéopathie ou de sophrologie, il n'y a pas lieu d'allouer une indemnité supplémentaire à ce titre.
17. Concernant le matériel, Mme C... justifie de la prescription d'une attelle le 8 avril 2008, et de son coût pour un montant de 62,20 euros. Pour les chaussures orthopédiques, si une prescription existait déjà dès le 20 octobre 2005 de chaussures à tiges montantes et à coin pronateur de l'ARP et soutien de la voûte plantaire, la requérante soutient qu'elles n'étaient cependant pas obligatoires et ne produit de factures de chaussures orthopédiques qu'à partir d'avril 2007. Les experts ont retenu la nécessité de porter des chaussures orthopédiques ad vitam à la suite des opérations pratiquées depuis janvier 2007. En revanche, il ne résulte pas de l'instruction que le port de bottes orthopédiques lui aurait été prescrit. Le reste à charge pour la confection annuelle de telles chaussures après déduction de la prise en charge par la sécurité sociale, doit être fixé à la somme de 2 805,35 euros correspondant au reste à charge figurant sur la facture d'avril 2007. Le montant des dépenses liées à l'achat annuel de chaussures orthopédiques s'élève ainsi à la somme de 39 274,90 euros jusqu'au présent arrêt.
18. Le total des dépenses de santé actuelles engagées par Mme C... s'élève ainsi à la somme de 39 653,10 euros. Le montant des dépenses de santé actuelles de la CPAM s'élève à la somme non contestée de 13 399,52 euros. La perte de chance de subir le préjudice étant de 70%, le préjudice indemnisable s'élève à 70% de la somme de 53 052,62 euros, soit la somme de 37 136,83 euros qu'il convient d'attribuer par préférence à Mme C..., donc intégralement, conformément aux dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.
Sur les dépenses de santé futures :
19. Il y a lieu de condamner l'AP-HP à rembourser à Mme C... 70% du montant des dépenses de santé exposées et restant à sa charge pour des chaussures orthopédiques, dans la limite d'un renouvellement annuel, sur justificatifs et au fur et à mesure de leur engagement. Il n'y a pas lieu d'accorder à ce titre une somme capitalisée à Mme C....
Sur les autres préjudices temporaires :
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
20. Concernant l'assistance par tierce personne, alors même que les experts n'ont pas retenu la nécessité d'une telle aide, le besoin d'une telle assistance peut être admis compte tenu du plâtrage de la cheville, à raison de 4 heures par semaine pendant le mois suivant chacune des hospitalisations, pour un montant, après application du taux de perte de chance de 70%, de 504 euros.
21. La perte de gains professionnels actuels alléguée n'est pas établie en raison des capacités et diplôme de Mme C..., auparavant employée dans un grand cabinet d'audit, qui lui permettent d'exercer des professions sédentaires de bureau de haut niveau, la disgrâce physique dont elle se plaint ne constituant pas un handicap. Elle ne justifie pas davantage d'une perte de revenus pour la période antérieure à son licenciement du 5 octobre 2007 et ne fournit pas plus en appel qu'en première instance d'élément sur l'éventuelle compensation par son employeur ou un contrat d'assurance, des pertes de revenus liées à ses arrêts de travail, opposé dans le jugement attaqué. Quant à son licenciement, il ne résulte pas de l'instruction qu'il serait lié à son état de santé ou à ses difficultés à se déplacer mais à son refus d'accepter un autre poste proposé par son employeur.
En ce qui concerne les préjudices extra patrimoniaux :
22. En fixant l'indemnité réparant le déficit fonctionnel temporaire sur la base de 400 euros mensuel, les premiers juges n'ont pas fait une évaluation erronée de ce chef de préjudice. Il y a lieu par suite de confirmer la somme de 120 euros accordée après application du taux de perte de chance retenu pour les périodes d'hospitalisation du 9 au 14 janvier 2007, du 21 au 25 janvier 2008, et le 7 mai 2010.
23. Le tribunal a justement estimé le préjudice lié aux souffrances endurées évalué à 4/7 et au préjudice esthétique évalué à 3,5/7 en prenant en compte les doléances de Mme C..., et en fixant les indemnités réparatrices respectivement à 5 500 euros et à 3 500 euros après application du taux de perte de chance de 70%.
Sur les autres préjudices permanents :
En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :
24. Si Mme C... soutient que son périmètre de marche est désormais limité à 200 mètres, qu'elle a dû renoncer à la moto et qu'elle a dorénavant besoin d'un véhicule adapté en raison de la raideur de sa cheville, et demande à ce titre une somme de 279 657,67 euros, la nécessité d'un tel véhicule, d'ailleurs non retenue pas les experts, n'est pas établie. Dans ces conditions, ce chef de préjudice ne peut être retenu.
25. Les pertes de gains professionnels futurs alléguées pour la somme de 9 741 809,78 euros ne peuvent être regardées comme étant en lien avec l'état de santé de la requérante résultant des opérations subies dès lors, ainsi qu'il a été dit au point 21 du présent arrêt, que le licenciement intervenu le 5 octobre 2007 ne l'est pas.
26. Concernant l'incidence professionnelle de l'état de santé de Mme C... qui ne peut exercer qu'une profession sédentaire et souffre de son image, les premiers juges ont justement apprécié ce chef de préjudice en fixant l'indemnité réparatrice à la somme de 20 000 euros après application du taux de perte de chance de 70%.
27. Le besoin d'une assistance permanente par une tierce personne, au demeurant non retenu par les experts, n'est pas justifié au regard des séquelles des interventions réalisées consistant en un mauvais positionnement du pied et une raideur de la cheville. Ce chef de préjudice ne peut par suite être retenu.
En ce qui concerne les préjudices extra patrimoniaux :
28. Mme C... demande à ce que le taux du déficit fonctionnel permanent soit fixé à 35%. Les rapports d'expertise font état de la raideur du pied, d'une boiterie, de douleurs ressenties et de la perte d'estime de soi. Il y a lieu de retenir un taux de 25% et compte tenu de l'âge de la requérante, 30 ans à la date de la consolidation le 15 juillet 2010, de fixer l'indemnité réparatrice à la somme de 30 000 euros.
29. Concernant le préjudice d'agrément, Mme C... a abandonné la marche et les voyages. Il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en fixant l'indemnité réparatrice à la somme de 7 000 euros.
30. L'évaluation à 3/7 du préjudice esthétique permanent en raison des séquelles visibles et de la boiterie n'est pas sous-estimée, de même que l'indemnité fixée à la somme de 4 000 euros après application du taux de 70%.
31. Le préjudice sexuel allégué résultant des séquelles des opérations n'est pas établi de même que le préjudice d'établissement, lesquels n'ont d'ailleurs pas été retenus par les experts.
32. Il sera fait une juste évaluation du préjudice d'impréparation subi par Mme C... qui n'a pas été informée des risques des opérations réalisées en lui allouant une somme de 2 000 euros à ce titre.
Sur l'appel de la CPAM de Paris :
33. La CPAM de Paris fait valoir ses débours consécutifs aux opérations des 10 janvier 2007 et 22 janvier 2008, pour une somme de 69 436,26 euros réparties entre des dépenses actuelles pour 13 399,52 euros et 56 036,74 euros. Ainsi qu'il a été dit au point 18 du présent arrêt, il n'y a pas lieu de condamner l'AP-HP à verser à la CPAM une somme au titre des dépenses de santé actuelles. En revanche, il y a lieu de condamner l'AP-HP à rembourser à la CPAM de Paris, sur justificatifs et au fur et à mesure de leur engagement, 70% des dépenses liées au renouvellement de chaussures orthopédiques exposées au bénéfice de Mme C....
Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :
34. Aux termes du neuvième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget, en fonction du taux de progression de l'indice des prix à la consommation hors tabac prévu dans le rapport économique, social et financier annexé au projet de loi de finances pour l'année considérée ". L'arrêté du 27 décembre 2019 a fixé à 1 091 euros le montant maximum de l'indemnité régie par ces dispositions.
35. En application de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, il y a lieu de condamner l'AP-HP à verser à la CPAM de Paris la somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
36. Il résulte de tout ce qui précède, qu'outre le remboursement de 70% des dépenses de santé ultérieures liées à l'achat de chaussures orthopédiques, l'indemnité que l'AP-HP est condamnée à verser à Mme C... doit être ramenée à la somme de 109 760,83 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 22 janvier 2014, date de la saisine du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, et qu'il y a lieu de condamner l'AP-HP à rembourser à la CPAM de Paris 70% des frais futurs liés au renouvellement de chaussures orthopédiques de Mme C..., ainsi qu'une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Sur les frais liés au litige :
37. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'AP-HP le versement à Mme C... ou à la CPAM de Paris d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
38. La présente instance n'ayant donné lieu à aucun dépens, les conclusions présentées à ce titre par la CPAM et Mme C... doivent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La somme que l'AP-HP est condamnée à verser à Mme C... est ramenée à 109 760,83 euros, assortie des intérêts légaux à compter du 22 janvier 2014, à laquelle s'ajoute le remboursement des dépenses futures liées à l'achat de chaussures orthopédiques dans les conditions définies au point 19.
Article 2 : L'AP-HP remboursera à la CPAM de Paris 70% des frais exposés pour la prise en charge des chaussures orthopédiques de Mme C..., et versera une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion.
Article 3 : Le surplus des conclusions des requêtes n° 16VE2586 et 16VE2890 y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est rejeté.
Article 4 : Le jugement n° 1400858 du 8 juillet 2016 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
N° 16VE02586 - 16VE02890 2