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09/07/2020 | FRANCE | N°20VE01239

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 09 juillet 2020, 20VE01239


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer son admission provisoire à l'aide juridictionnelle, d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2020 par lequel le PREFET DES YVELINES a décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile, d'enjoindre au PREFET DES YVELINES d'enregistrer sa demande d'asile sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application d

es articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de prononcer son admission provisoire à l'aide juridictionnelle, d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2020 par lequel le PREFET DES YVELINES a décidé son transfert aux autorités italiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile, d'enjoindre au PREFET DES YVELINES d'enregistrer sa demande d'asile sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par un jugement n° 2000574 du 19 février 2020, le magistrat désigné par la présidente du Tribunal administratif de Versailles a admis, à titre provisoire, M. D... au bénéfice de l'aide juridictionnelle, a annulé cet arrêté, a enjoint au PREFET DES YVELINES de procéder au réexamen de la situation de M. D... dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, a mis à la charge de l'État la somme de 800 euros à verser à Me F... en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2020, le PREFET DES YVELINES, représenté par Me B..., avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande de M. D....

Il soutient que :

- le premier juge a, à tort, retenu l'existence d'une méconnaissance du droit à l'information prévu à l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 du fait de la remise des brochures A et B en langue française, alors, d'une part, que l'intimé doit être regardé comme comprenant suffisamment cette langue et, d'autre part, que l'entretien a permis de s'assurer qu'il comprenait les informations comprises dans les brochures ;

- les autres moyens soulevés devant le premier juge ne sont pas fondés.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, modifié par le règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 ;

- le règlement (UE) n° 603/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les observations de Me E... substituant Me B..., avocate du PREFET DES YVELINES.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., ressortissant ivoirien né le 24 février 1998 à Agboville (Côte d'Ivoire), est entré irrégulièrement sur le territoire français et a sollicité son admission au séjour au titre de l'asile le 12 novembre 2019. La consultation des fichiers Visabio et Eurodac a révélé que l'intéressé avait, le 3 mai 2017, déposé une demande d'asile en Italie. Saisies par le PREFET DES YVELINES le 17 décembre 2019, les autorités italiennes ont implicitement accepté, le 1er janvier suivant, de reprendre en charge M. D.... Par un arrêté du 7 janvier 2020, le PREFET DES YVELINES a décidé du transfert de l'intéressé vers l'Italie. Par une requête enregistrée le 10 mai 2020, il fait appel du jugement du 19 février 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a notamment annulé cet arrêté.

2. Pour annuler la décision de transfert de M. D... aux autorités italiennes, le premier juge a estimé que cette décision avait été prise à l'issue d'une procédure méconnaissant l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013. Pour retenir ce moyen, le premier juge s'est fondé, d'une part, sur le fait que l'intéressé s'était vu remettre la brochure A " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de l'analyse de ma demande ' ", la brochure B " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' " ainsi que le guide du demandeur d'asile, en langue française, alors qu'il ne comprend et ne s'exprime qu'en langue dioula et, d'autre part, sur le fait que l'intervention d'un interprète en langue dioula au cours de l'entretien n'était pas à elle seule de nature à établir que cet interprète aurait restitué à M. D... l'ensemble des informations contenues dans ces brochures, en l'absence de toute mention en ce sens sur les copies des brochures produites en défense ou dans le compte rendu d'entretien individuel à l'occasion duquel ces brochures ont été remises.

3. Aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement (...) / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. (...)3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. / (...). ". Aux termes de l'article 5 de ce même règlement : " 1. Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4. (...) / 4. L'entretien individuel est mené dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend et dans laquelle il est capable de communiquer. Si nécessaire, les États membres ont recours à un interprète capable d'assurer une bonne communication entre le demandeur et la personne qui mène l'entretien individuel. (...) / 5. L'entretien individuel a lieu dans des conditions garantissant dûment la confidentialité. Il est mené par une personne qualifiée en vertu du droit national (...) 6. L'Etat membres qui mène l'entretien rédige un résumé qui contient au moins les principales informations fournies par le demandeur lors de l'entretien (...) L'Etat membre veille à ce que le demandeur (...) ait accès en temps utile au résumé ". Aux termes de l'article L. 111-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsqu'un étranger fait l'objet d'une mesure (...) de transfert vers l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile et qu'il ne parle pas le français, il indique au début de la procédure une langue qu'il comprend. Il indique également s'il sait lire. Ces informations sont mentionnées sur la décision (...) de transfert (...). Ces mentions font foi sauf preuve contraire. La langue que l'étranger a déclaré comprendre est utilisée jusqu'à la fin de la procédure. Si l'étranger refuse d'indiquer une langue qu'il comprend, la langue utilisée est le français. " et l'article L. 111-8 du même code dispose que : " Lorsqu'il est prévu aux livres II, V et VI et à l'article L. 742-3 du présent code qu'une décision ou qu'une information doit être communiquée à un étranger dans une langue qu'il comprend, cette information peut se faire soit au moyen de formulaires écrits, soit par l'intermédiaire d'un interprète. L'assistance de l'interprète est obligatoire si l'étranger ne parle pas le français et qu'il ne sait pas lire. / En cas de nécessité, l'assistance de l'interprète peut se faire par l'intermédiaire de moyens de télécommunication. Dans une telle hypothèse, il ne peut être fait appel qu'à un interprète inscrit sur l'une des listes mentionnées à l'article L. 111-9 ou à un organisme d'interprétariat et de traduction agréé par l'administration. Le nom et les coordonnées de l'interprète ainsi que le jour et la langue utilisée sont indiqués par écrit à l'étranger ".

4. Il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle il décide la réadmission de l'intéressé dans l'État membre responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend. Cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement. Eu égard à la nature de ces informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie.

5. S'il est constant que les brochures A intitulée " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - Quel pays sera responsable de ma demande ' " et B intitulée " Je suis sous procédure Dublin - Qu'est-ce que cela signifie ' ", qui comprennent l'ensemble des informations nécessaires aux demandeurs d'une protection internationale en vertu de l'article 4 du règlement du 26 juin 2013 et figurant à l'annexe X du règlement d'exécution (UE) n° 118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014, lui ont été remises en langue française en l'absence d'une version disponible en langue dioula, l'intéressé faisant d'ailleurs valoir qu'il ne sait ni lire, ni écrire, il est précisé, par une mention manuscrite renseignée sur une attestation datée du 12 novembre 2019, signée de M. D... et sur laquelle le cachet de la préfecture des Yvelines est apposé, que " les brochures A et B avec mon accord m'ont été remises en français " et que " les informations contenues dans celles-ci ont été portées oralement à ma connaissance dans la langue d'audition, conformément à l'article 4 du règlement 604/2013, via : (...) ISM Interprétariat ". D'une part, la délivrance des informations contenues dans les brochures par le truchement d'un interprète ne méconnaît pas les dispositions précitées. D'autre part, l'intéressé n'établit, ni même n'allègue, que les informations nécessaires aux demandeurs d'une protection internationale en vertu de cet article contenues dans ces brochures ne lui ont pas été effectivement et utilement communiquées par l'interprète, alors d'ailleurs que dans le compte rendu de son entretien individuel il a déclaré " avoir compris la procédure engagée à son encontre ". Il en résulte que c'est à tort que le premier juge a estimé que le PREFET DES YVELINES avait méconnu les dispositions de l'article 5 du règlement du 26 juin 2013.

6. Il résulte de ce qui précède que le PREFET DES YVELINES est fondé, pour ce motif, et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre branche du moyen soulevé tirée de ce que l'intéressé devrait être regardé comme comprenant suffisamment la langue française, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement entrepris du 19 février 2020, le magistrat désigné du Tribunal administratif de Versailles a annulé l'arrêté du 7 janvier 2020 pris à l'encontre de M. D....

7. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. D... devant le Tribunal administratif de Versailles.

8. En premier lieu, M. D... soutient que le PREFET DES YVELINES a méconnu l'article 5 précité du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 dès lors qu'il n'est pas établi que son entretien individuel ait été mené par une personne qualifiée en vertu du droit national dans le respect du principe de confidentialité dans la mesure où le résumé de l'entretien ne précise pas quel agent a mené l'entretien, ni s'il a été délégué pour ce faire par le préfet, ni s'il a reçu une formation spéciale en vue de mener ce type d'entretien. Dans cette mesure, il soutient également que le PREFET DES YVELINES a méconnu l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration selon lequel : " Toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées. Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l'anonymat de l'agent est respecté ".

9. Il ressort des pièces du dossier, notamment du résumé de l'entretien individuel ainsi que de l'attestation susmentionnée, que M. D... a bénéficié d'un entretien individuel, réalisé à la préfecture des Yvelines le 12 novembre 2019, qui s'est déroulé en dioula, langue que le requérant a déclaré comprendre, par l'intermédiaire d'un interprète. Il a, à cette occasion, apporté des réponses claires et précises, notamment quant à sa situation familiale et à son parcours depuis son entrée dans l'Union européenne. Par ailleurs, cet entretien a été mené, dans les locaux de la préfecture des Yvelines, par un agent titulaire de celle-ci. De plus, aucune disposition du règlement (UE) n° 604/2013 n'implique que cet agent mentionne son nom, son prénom, sa signature ou sa qualité sur la fiche relatant l'entretien ou sur l'attestation signée de l'intéressé à cette occasion, qui ne sauraient, en outre, être regardées comme des correspondances au sens de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par ailleurs, aucun élément du dossier n'établit que cet agent n'aurait pas été qualifié en vertu du droit national, alors que ce dernier est d'ailleurs présenté comme tel dans l'attestation susmentionnée, ce qu'aucun élément du dossier ne permet de mettre en doute. Il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'agent de la préfecture qui a mené l'entretien n'aurait pas été mandaté à cet effet après avoir bénéficié d'une formation appropriée. Si, en vertu de l'article R. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet est l'autorité compétente pour procéder à la détermination de l'État responsable de l'examen d'une demande d'asile, ces dispositions ne font pas obstacle à ce que l'entretien individuel requis pour l'application de l'article 5 précité soit mené par un agent de la préfecture, qui, n'étant pas le signataire de la décision de transfert déterminant l'État responsable de l'examen de la demande d'asile, n'avait pas à bénéficier d'une délégation de signature du préfet pour procéder à cet entretien. Il ne ressort pas non plus des pièces du dossier que l'entretien n'aurait pas eu lieu dans les conditions de confidentialité requises. Enfin, un résumé de l'entretien a été rédigé. Il en résulte qu'il ne ressort donc pas des pièces du dossier que le requérant aurait été privé d'une garantie prévue par les dispositions du 5. de l'article 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013. M. D... n'est donc pas fondé à soutenir que le PREFET DES YVELINES aurait méconnu les dispositions précitées.

10. En second lieu, M. D... soutient que les autorités italiennes n'ont pas été saisies d'une demande de reprise en charge à son sujet dans le délai de deux mois imparti par l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013.

11. D'une part, l'article 21 du règlement (UE) n° 604/2013 précité dispose que : " 1. L'État membre auprès duquel une demande de protection internationale a été introduite et qui estime qu'un autre État membre est responsable de l'examen de cette demande peut, dans les plus brefs délais et, en tout état de cause, dans un délai de trois mois à compter de la date de l'introduction de la demande au sens de l'article 20, paragraphe 2, requérir cet autre État membre aux fins de prise en charge du demandeur. / Nonobstant le premier alinéa, en cas de résultat positif ("hit") Eurodac avec des données enregistrées en vertu de l'article 14 du règlement (UE) no 603/2013, la requête est envoyée dans un délai de deux mois à compter de la réception de ce résultat positif en vertu de l'article 15, paragraphe 2, dudit règlement. / Si la requête aux fins de prise en charge d'un demandeur n'est pas formulée dans les délais fixés par le premier et le deuxième alinéa, la responsabilité de l'examen de la demande de protection internationale incombe à l'État membre auprès duquel la demande a été introduite. / 2. L'État membre requérant peut solliciter une réponse en urgence dans les cas où la demande de protection internationale a été introduite à la suite d'un refus d'entrée ou de séjour, d'une arrestation pour séjour irrégulier ou de la signification ou de l'exécution d'une mesure d'éloignement. / La requête indique les raisons qui justifient une réponse urgente et le délai dans lequel une réponse est attendue. Ce délai est d'au moins une semaine. / 3. Dans les cas visés aux paragraphes 1 et 2, la requête aux fins de prise en charge par un autre État membre est présentée à l'aide d'un formulaire type et comprend les éléments de preuve ou indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, et/ou les autres éléments pertinents tirés de la déclaration du demandeur qui permettent aux autorités de l'État membre requis de vérifier s'il est responsable au regard des critères définis dans le présent règlement. / La Commission adopte, par voie d'actes d'exécution, des conditions uniformes pour l'établissement et la présentation des requêtes aux fins de prise en charge. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2. ". L'article 23 du même règlement énonce que : " 1. Lorsqu'un État membre auprès duquel une personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), a introduit une nouvelle demande de protection internationale estime qu'un autre État membre est responsable conformément à l'article 20, paragraphe 5, et à l'article 18, paragraphe 1, point b), c) ou d), il peut requérir cet autre État membre aux fins de reprise en charge de cette personne. / (...) 4. Une requête aux fins de reprise en charge est présentée à l'aide d'un formulaire type et comprend des éléments de preuve ou des indices tels que décrits dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, et/ou des éléments pertinents tirés des déclarations de la personne concernée, qui permettent aux autorités de l'État membre requis de vérifier s'il est responsable au regard des critères définis dans le présent règlement. / (...) ". Enfin, l'article 25 de ce règlement prévoit que : " 1. L'État membre requis procède aux vérifications nécessaires et statue sur la requête aux fins de reprise en charge de la personne concernée aussi rapidement que possible et en tout état de cause dans un délai n'excédant pas un mois à compter de la date de réception de la requête. Lorsque la requête est fondée sur des données obtenues par le système Eurodac, ce délai est réduit à deux semaines. / 2. L'absence de réponse à l'expiration du délai d'un mois ou du délai de deux semaines mentionnés au paragraphe 1 équivaut à l'acceptation de la requête, et entraîne l'obligation de reprendre en charge la personne concernée, y compris l'obligation d'assurer une bonne organisation de son arrivée ".

12. D'autre part, l'article 2 du règlement d'exécution n°118/2014 de la Commission du 30 janvier 2014 dispose que : " Une requête aux fins de reprise en charge est présentée à l'aide du formulaire type dont le modèle figure à l'annexe III, exposant la nature et les motifs de la requête et les dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil sur lesquelles elle se fonde (...) ". L'article 15 du règlement (CE) n° 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003, dans sa rédaction issue du règlement d'exécution (UE) n°118/2014 précité et applicable à la décision en litige, énonce que : " 1. Les requêtes et les réponses, ainsi que toutes les correspondances écrites entre États membres visant à l'application du règlement (UE) n°604/2013, sont, autant que possible, transmises via le réseau de communication électronique " DubliNet " établi au titre II du présent règlement / (...) / 2. Toute requête, réponse ou correspondance émanant d'un point d'accès national visé à l'article 19 est réputée authentique. / 3. L'accusé de réception émis par le système fait foi de la transmission et de la date et de l'heure de réception de la requête ou de la réponse ".

13. Il ressort des pièces versées au dossier que le résultat positif EURODAC (" hit ") obtenu par les autorités françaises est daté du 12 novembre 2019 et que la demande de reprise en charge de M. D... par les autorités italiennes a été formée le 17 décembre suivant par le réseau de communication " DubliNet ", qui permet des échanges d'informations fiables entre les autorités des États membres de l'Union européenne qui traitent les demandes d'asile. Le PREFET DES YVELINES produit pour en justifier la fiche décadactylaire EURODAC et la copie d'un courrier électronique du 17 décembre 2019 qui constitue la réponse automatique du point d'accès national français, document comportant la référence " FRDUB2 9930332531-780 " qui correspond au numéro attribué à M. D... par la préfecture. En outre, le préfet produit la copie d'un autre courrier électronique du 3 janvier 2020 qui constitue la réponse automatique du point d'accès national français comportant le même numéro de référence et la mention " AI " avec comme pièces jointe un document intitulé " ITA_9930332531_ACORDIMPLICITE2017-2.pdf ", document valant constat d'un accord implicite et confirmation de reconnaissance de la responsabilité des autorités italiennes pour une requête adressée le 17 décembre 2019. Il ne ressort pas des pièces du dossier que, dans le délai d'acquisition d'une décision implicite d'acceptation, l'Italie aurait refusé la reprise en charge du requérant. Une décision implicite d'acceptation de reprise en charge de l'intéressé est donc née en application des dispositions du règlement (UE) n° 604/2013 précité. En effet, les mentions figurant sur ces accusés de réception édités automatiquement par le réseau de communication électronique " DubliNet ", créé précisément dans le but d'authentifier ces démarches, permettent d'établir, conformément aux dispositions citées au point précédent, d'une part, que les autorités italiennes ont bien été saisies d'une demande de reprise en charge concernant M. D... le 17 décembre 2019, et d'autre part, la date à partir de laquelle a commencé à courir le délai d'acquisition d'une décision tacite d'acceptation de reprise en charge du requérant. Ainsi, le moyen tiré du vice de procédure découlant de l'absence de preuve de l'envoi d'une requête de reprise en charge aux autorités italiennes manque en fait et doit, par suite, être écarté.

14. Il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DES YVELINES est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles a notamment annulé l'arrêté attaqué et lui a enjoint de procéder au réexamen de la situation de M. D....

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2000574 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Versailles en date du 19 février 2019 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. D... devant le Tribunal administratif de Versailles est rejetée.

2

N° 20VE01239


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20VE01239
Date de la décision : 09/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-02-02


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : SCP CLAISSE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-07-09;20ve01239 ?
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