Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... C... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté en date du 10 octobre 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours.
Par un jugement n° 1902737 du 16 septembre 2019, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés les 16 octobre et 17 décembre 2019, Mme C..., représentée par Me Ngounou, avocat, demande à la Cour :
1° de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;
2° d'annuler ce jugement ;
3° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
4° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de réexaminer sa situation, dans le délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
5° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme C... soutient que :
- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;
- il n'est pas démontré que le médecin qui a rédigé le rapport relatif à son état de santé n'a pas siégé au sein du collège de médecins de l'ARS ayant rendu un avis sur son cas et que ce collège était régulièrement composé ;
- elle n'a pas bénéficié du droit à être entendue reconnu par les principes généraux du droit de l'Union européenne ;
- l'arrêté litigieux ne vise par la convention franco-camerounaise du 24 janvier 1994 et est donc privé de base légale ;
- elle souffre de troubles psychiatriques qui ne peuvent être pris en charge dans son pays d'origine ;
- elle justifie sa présence en France depuis 2016 et remplit ainsi les conditions pour être régularisée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- la convention entre la République française et la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Yaoundé le 24 janvier 1994 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C..., ressortissante camerounaise, relève appel du jugement du 16 septembre 2019 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 octobre 2018 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français.
2. Dans la mesure où Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par la décision du 19 juin 2020 susvisée, il n'y a pas lieu de statuer sur ses conclusions tendant à l'allocation de cette aide.
3. Il ressort des termes de la décision attaquée que celle-ci précise les considérations de fait et de droit qui la fondent, permettant à l'intéressé d'en contester utilement le bien-fondé. Elle est ainsi suffisamment motivée conformément aux exigences du code des relations entre le public et l'administration.
4. Aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, laquelle, en vertu du premier alinéa du paragraphe 1 de l'article 6 du traité sur l'Union européenne, a la même valeur juridique que les traités : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Aux termes du paragraphe 1 de l'article 51 de la charte : " Les dispositions de la présente Charte s'adressent aux institutions, organes et organismes de l'Union dans le respect du principe de subsidiarité, ainsi qu'aux Etats membres uniquement lorsqu'ils mettent en oeuvre le droit de l'Union. (...) ". Si les dispositions de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, ainsi que le rappelle la Cour de justice de l'Union européenne notamment dans son arrêt du 5 novembre 2014, Mukarabega, aff. C-166-13, ne sont pas en elles-mêmes invocables par un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement telle qu'une obligation de quitter le territoire français, celui-ci peut néanmoins utilement faire valoir que le principe général du droit de l'Union, relatif au respect des droits de la défense, imposait qu'il soit préalablement entendu et mis à même de présenter toute observation utile sur la mesure d'éloignement envisagée.
5. Le droit d'être entendu implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. Toutefois, dans le cas prévu au 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise concomitamment au refus de délivrance d'un titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du refus de titre de séjour. Lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement. A l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande. Il lui appartient, lors du dépôt de cette demande, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur en préfecture, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour, n'impose pas à l'autorité administrative de mettre l'intéressé à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise concomitamment et en conséquence du refus de titre de séjour. En l'espèce, il n'est pas sérieusement allégué que Mme C... aurait sollicité, en vain, un entretien avec les services préfectoraux ni qu'elle aurait été empêchée de présenter ses observations avant que soit prise la décision litigieuse. Par suite, le moyen tiré de ce que son droit à être entendue garanti par le droit européen doit être écarté.
6. La circonstance que l'arrêté en litige ne vise pas la convention entre la République française et la République du Cameroun relative à la circulation et au séjour des personnes, signée à Yaoundé le 24 janvier 1994, dont l'article 11 prévoit que les nationaux camerounais doivent posséder un titre de séjour délivré conformément à la législation française pour tout séjour sur le territoire français devant excéder trois mois, ne prive pas de base légale cet arrêté.
7. Aux termes de l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) ; 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Sous réserve de l'accord de l'étranger et dans le respect des règles de déontologie médicale, les médecins de l'office peuvent demander aux professionnels de santé qui en disposent les informations médicales nécessaires à l'accomplissement de cette mission. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Si le collège de médecins estime dans son avis que les conditions précitées sont réunies, l'autorité administrative ne peut refuser la délivrance du titre de séjour que par une décision spécialement motivée. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. ". Aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. / Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". L'article R. 313-23 du même code dispose : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) /. Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. / (...) / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission par le demandeur des éléments médicaux conformément à la première phrase du premier alinéa. (...) / L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. ".
8. Il résulte des dispositions précitées qu'il appartient à l'autorité administrative de se prononcer sur la demande de titre de séjour présentée en qualité d'étranger malade au vu de l'avis émis par un collège de médecins nommés par le directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Préalablement à l'avis rendu par ce collège d'experts, un rapport médical, relatif à l'état de santé de l'intéressé et établi par un médecin instructeur, doit lui être transmis. Enfin, le médecin instructeur à l'origine de ce rapport médical ne doit pas siéger au sein du collège de médecins qui rend l'avis transmis au préfet.
9. Il ressort des pièces du dossier que le docteur Tran, médecin de l'office précité et auteur du rapport médical au vu duquel le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a émis son avis du 4 janvier 2018 sur la situation de Mme C..., n'a pas siégé au sein de ce collège de médecins, lequel était composé des docteurs Truze, Sebille et Ortega, dans le respect des dispositions précitées de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de l'avis rendu par le collège des médecins de l'OFII du fait de sa composition irrégulière doit être écarté.
10. Il ressort de l'avis rendu le 4 janvier 2018 par le collège des médecins de l'OFII que l'état de santé de Mme C... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais qu'elle peut trouver dans son pays d'origine une offre de soins adaptée à sa pathologie. Si Mme C... soutient souffrir de troubles psychiatriques qui ne pourraient être pris en charge dans son pays d'origine, le Cameroun, cette affirmation est dénuée de précisions suffisantes permettant de remettre en cause l'appréciation portée sur ce point par le collège de médecins consulté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile manque en fait.
11. Si Mme C... se prévaut à l'appui de sa requête des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'a pas fondé sa demande de titre de séjour sur ces dispositions. En outre, l'autorité préfectorale n'était pas tenue d'examiner d'office une telle demande à l'aune de ces dispositions. Par suite, le moyen soulevé est inopérant.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de Mme C... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C... est rejeté.
5
N° 19VE03478