Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... D... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010, et des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1606060 du 27 septembre 2018, le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise a rejeté la demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 29 novembre 2018, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° de prononcer la décharge des impositions correspondantes ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement attaqué a omis de statuer sur le moyen tiré de ce que les pénalités mises à sa charge ne sont pas fondées ;
- la procédure d'imposition est irrégulière, dès lors que l'administration fiscale n'a pas répondu aux observations qu'il a formulées à la suite de la proposition de rectification en date du 22 mai 2012 ; l'administration fiscale n'est pas fondée à considérer qu'il a tacitement accepté les rehaussements mis à sa charge, dès lors qu'il les a contestés dans le délai de trente jours suivant la réception de la proposition de rectification en date du 22 mai 2012 ; son refus pur et simple constitue une observation au sens de la doctrine administrative 13 L-1514 n° 25 du 1er juillet 2002 reprise au BOFIP BOI-CF-IOR-10-50 §320 et §360 du 4 février 2015;
- l'administration fiscale a réintégré à tort dans ses revenus imposables au titre des années 2009 et 2010, dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, des sommes provenant de la société à responsabilité limitée (SARL) " Auto Expert " sans apporter la preuve que ces sommes lui ont été distribuées ; le compte litigieux est un compte-courant collectif ;
- les pénalités mises à sa charge ne sont pas fondées ; elles méconnaissent l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Vu le jugement attaqué.
.................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- les articles 7 et 12 de l'ordonnance n° 2020-305 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée par les ordonnances
n° 2020-405 du 8 avril 2020, n° 2020-427 du 15 avril 2020 et n° 2020-558 du 13 mai 2020 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
En application de l'article 7 de l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020, les parties ont été régulièrement informées de la tenue d'une audience partiellement dématérialisée.
Ont été entendus au cours de l'audience publique partiellement dématérialisée :
- le rapport de Mme A... via un moyen de télécommunication audiovisuelle,
- et les conclusions de Mme Méry, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue de la vérification de la comptabilité de la SARL Auto Expert, l'administration a notifié à M. D..., associé minoritaire de cette société, selon la procédure contradictoire, des rectifications en matière d'impôt sur le revenu au titre des années 2009 et 2010 dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, à raison de revenus regardés comme distribués entre ses mains sur le fondement des dispositions du a. de l'article 111 du code général des impôts, ainsi que des contributions sociales et pénalités correspondantes. M. D... a formé une réclamation préalable le 30 décembre 2015 qui a été rejetée par une décision en date du 21 avril 2016. Il a contesté devant le Tribunal administratif de
Cergy-Pontoise les suppléments d'impôt sur le revenu auxquels il a ainsi été assujetti au titre des années 2009 et 2010. Par la présente requête, M. D... relève appel de du jugement du 27 septembre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions susmentionnées.
Sur la régularité du jugement en litige :
2. A l'appui de sa demande, M. D... soutenait notamment que les pénalités qui lui étaient infligées n'étaient pas fondées. Le tribunal ne s'est pas prononcé sur ces conclusions bien qu'il les ait visées. Il s'ensuit que le jugement en date du 27 septembre 2018 doit être annulé comme irrégulier en ce qui les pénalités correspondant aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. D... a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.
3. Il y a lieu par suite de statuer par la voie de l'effet dévolutif de l'appel sur les conclusions de M. D... tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales susmentionnées et par la voie de l'évocation sur les conclusions relatives aux pénalités.
Sur les conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales :
4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation / Sur demande du contribuable reçue par l'administration avant l'expiration du délai mentionné à l'article L. 11, ce délai est prorogé de trente jours. (...) Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. ". Aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales, dans sa version applicable au litige : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) ".
5. Il résulte de l'instruction, ainsi que l'ont relevé les premiers juges, que, par un courrier du 20 juin 2012, faisant suite à la proposition de rectification en date du 22 mai 2012, M. D... a fait part de son " refus d'accepter, en l'état, l'ensemble des rectifications et pénalités proposées " et demandé la prorogation de trente jours du délai qui lui était imparti pour présenter ses observations. L'administration, par un courrier en date du 25 juin 2012, a prorogé le délai de réponse imparti à M. D... jusqu'au 29 juillet 2012, à la suite de quoi il est constant que M. D... n'a formulé aucune observation dans le délai qui lui était imparti.
6. Lorsqu'un contribuable demandant, en réponse à la proposition de rectification, que soit noté à titre conservatoire son refus des rectifications envisagées, et bien qu'il n'ait pas communiqué à l'administration les motifs de ce refus dans le délai prévu par l'article R. 57-1 du livre des procédures fiscales, il ne peut être considéré comme ayant accepté les rectifications en litige. Par suite, à défaut de répondre aux observations du contribuable, l'administration entache la procédure suivie d'irrégularité. Il y a cependant lieu de rechercher si cette irrégularité a en l'espèce privé le contribuable d'une garantie.
7. Si M. D... est fondé à soutenir que l'administration ne pouvait considérer qu'il avait accepté tacitement les redressements, cette circonstance est insuffisante pour en déduire qu'il aurait été privé d'une garantie. En l'espèce, ce défaut de réponse ne l'a pas privé de la garantie découlant de la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, en application de l'article L. 59 du même livre, dès lors que le litige opposant le contribuable à l'administration fiscale, relatif à des revenus de capitaux mobiliers, n'entre pas dans la compétence de la commission. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure dont a fait l'objet M. D... en l'absence de réponse de l'administration à ses observations doit être écarté, sans que M. D... ne puisse se prévaloir utilement des dispositions de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, inapplicable à la procédure d'imposition.
8. En second lieu, l'article 111 du code général des impôts prévoit que : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes (...) ". Il résulte de ces dispositions que les sommes inscrites au crédit du compte courant d'un associé ont, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers.
9. En l'espèce, il est constant que M. D... était le détenteur de deux comptes carte utilisés pour les opérations de débit de ce compte. En outre, l'administration produit une attestation de l'expert-comptable de la société qui indique que les dépenses sur le compte litigieux étaient effectuées par M. D..., ainsi que des copies du Grand Livre des comptes retraçant notamment ces opérations. C'est par suite à bon droit que l'administration a considéré que le compte 4671 de la société qui était débiteur fonctionnait comme un compte courant d'associé au profit de M. D.... Si celui-ci fait valoir qu'il n'était qu'associé minoritaire, et qu'il n'était pas le gérant de la société, ces circonstances sont sans incidence sur les conditions de fonctionnement du compte en cause dès lors qu'elles ne peuvent constituer une preuve de ce que les sommes inscrites sur ce compte n'ont pas été mises à sa disposition. Enfin, si M. D... soutient que le compte litigieux était alimenté par d'autres personnes, cette circonstance n'est pas plus de nature à démontrer que les opérations au débit du compte étaient également effectuées par d'autres personnes que lui. Il s'ensuit que les sommes inscrites au crédit de ce compte doivent être regardées comme ayant été appréhendées par M. D..., présentaient le caractère de revenus imposables dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers, et devaient être réintégrée dans le montant des revenus imposables de l'intéressé au titre des années 2009 et 2010 dans cette catégorie.
10. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses conclusions tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.
Sur les conclusions tendant à la décharge des pénalités :
11. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit aux points 4 à 7 que le moyen tiré de l'irrégularité de la procédure dont a fait l'objet M. D... en l'absence de réponse de l'administration à ses observations doit être écarté.
12. En second lieu, aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ;(...) ".
13. Pour établir l'existence d'un manquement délibéré au sens des dispositions du a. de l'article 1729 du code général des impôts, l'administration doit apporter la preuve, d'une part, de l'insuffisance, de l'inexactitude ou du caractère incomplet des déclarations et, d'autre part, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt.
14 D'une part, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que l'inexactitude des déclarations de revenus souscrites par M. D... au titre des années 2009 et 2010 doit être tenue pour établie. D'autre part, le ministre de l'action et des comptes publics fait valoir, sans être contredit, que M. D... ne pouvait ignorer les opérations en litige dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 9, il était détenteur de deux cartes utilisées pour les opérations de débit de ce compte. Le ministre fait valoir que le revenu imposable ainsi reconstitué de l'appelant était 12 fois supérieur à celui qu'il avait initialement déclaré au titre de l'année 2009, et de 23 fois supérieur à celui qu'il avait initialement déclaré au titre de l'année 2010. Au regard de l'ensemble de ces éléments, M. D... ne pouvait pas ignorer l'inexactitude des montants des revenus initialement déclarés. Dès lors, le ministre de l'action et des comptes publics apporte la preuve, qui lui incombe, de l'intention de l'intéressé d'éluder l'impôt. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 paragraphe 1 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
15. Il résulte de ce qui précède que les conclusions de M. D... tendant à la décharge de la majoration prévue par le a. de l'article 1729 du code général des impôts doivent être rejetées
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, une somme au titre des frais exposés par M. D... et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1606060 rendu 27 septembre 2018 par le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé en tant qu'il a omis de statuer sur les conclusions tendant à la décharge des pénalités correspondant aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2009 et 2010.
Article 2 : Les conclusions tendant à la décharge des droits et pénalités correspondant aux cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. D... a été assujetti au titre des années 2009 et 2010 sont rejetées.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. D... est rejeté.
2
N° 18VE03975