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02/07/2020 | FRANCE | N°19VE02397

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 5ème chambre, 02 juillet 2020, 19VE02397


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du ministre de la défense en date du 26 août 2013 prononçant sa radiation des cadres du ministère de la défense à compter du 21 novembre 2013.

Par un jugement n° 1400739 du 10 mai 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé cette décision.

Par un arrêt n° 16VE02056 du 12 avril 2018, la Cour a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par M. A... devant le Tribunal

administratif de Cergy-Pontoise ainsi que ses conclusions d'appel.

Par une décision n° 421458 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du ministre de la défense en date du 26 août 2013 prononçant sa radiation des cadres du ministère de la défense à compter du 21 novembre 2013.

Par un jugement n° 1400739 du 10 mai 2016, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé cette décision.

Par un arrêt n° 16VE02056 du 12 avril 2018, la Cour a annulé ce jugement et rejeté la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ainsi que ses conclusions d'appel.

Par une décision n° 421458 du 28 juin 2019, le Conseil d'Etat a, sur pourvoi de M. A..., annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 juillet 2016 et, après cassation et renvoi, par un mémoire enregistré le 9 décembre 2019, le ministre de la défense demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement ;

2° de rejeter la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier ; le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a procédé à une requalification erronée de la décision attaquée et d'un moyen en méconnaissant le principe du contradictoire ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la décision contestée constituait une mesure de licenciement alors qu'il s'agit d'une mesure de non-renouvellement de contrat ; la décision est justifiée par la manière de servir de l'agent et par l'intérêt du service ;

- les fonctions exercées par M. A... ont évolué durant les deux contrats successifs.

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Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la défense ;

- la loi n° 1984-16 du 11 janvier 1984 modifiée, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique d'Etat ;

- la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée ;

- l'arrêté du 4 mai 1988 relatif aux modalités de recrutement et de rémunération des agents sur contrat du ministère de la défense dans les services de la direction générale de l'armement qui n'ont pas un caractère industriel ou commercial ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- et les conclusions de M. Cabon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a été recruté par la direction générale de l'armement du ministère de la défense par contrat à durée déterminée pour une durée trois ans en qualité de technicien TCT/DGA (niveau II) afin d'exercer les fonctions de spécialiste gestionnaire de projets. Le 21 novembre 2007, M. A... a démissionné et signé le même jour un contrat à durée déterminée pour une durée trois ans en qualité d'ingénieur cadre ICT (niveau I) pour exercer les fonctions de spécialiste gestionnaire de projets confirmé. Ce contrat a été renouvelé pour une nouvelle durée de trois ans. Par un arrêté du 26 août 2013, le ministre de la défense a procédé à la radiation des cadres de M. A... à compter du 21 novembre 2013. Par un jugement du 10 mai 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cette décision. Sur appel du ministre, par un arrêt du 12 avril 2018, la Cour a annulé ce jugement et rejeté la demande de M. A.... Sur pourvoi de ce dernier, le Conseil d'Etat a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la Cour par une décision du 28 juin 2019.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article 8 de la loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 alors en vigueur : " A la date de publication de la présente loi, la transformation de son contrat en contrat à durée indéterminée est obligatoirement proposée à l'agent contractuel, employé par l'État, l'un de ses établissements publics ou un établissement public local d'enseignement sur le fondement du dernier alinéa de l'article 3 ou des articles 4 ou 6 de la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 précitée dans sa rédaction antérieure à celle résultant de la présente loi, qui se trouve en fonction ou bénéficie d'un congé prévu par le décret pris en application de l'article 7 de la même loi./ Le droit défini au premier alinéa du présent article est subordonné à une durée de services publics effectifs, accomplis auprès du même département ministériel, de la même autorité publique ou du même établissement public, au moins égale à six années au cours des huit années précédant la publication de la présente loi (J.O. du 13 mars 2012).( ...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'à la date de publication des dispositions précitées de l'article 8 de la loi du 12 mars 2012 au Journal officiel du 13 mars 2012, M. A..., recruté le 1er février 2007, présentait une durée de services publics effectifs de cinq ans, un mois et treize jours et ne remplissait donc pas la condition de six années posée par les dispositions citées ci-dessus. Dans ces conditions, le ministre de la défense est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a jugé que l'arrêté avait été pris en méconnaissance de l'article 8 de la loi du 12 mars 2012.

4. Il appartient toutefois à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Sur la légalité de la décision contestée et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens :

5. Aux termes de l'article 6 bis de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, dans sa rédaction issue de la loi du 12 mars 2012 : " Tout contrat conclu ou renouvelé en application des mêmes articles 4 et 6 avec un agent qui justifie d'une durée de services publics de six ans dans des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique est conclu, par une décision expresse, pour une durée indéterminée./ La durée de six ans mentionnée au quatrième alinéa du présent article est comptabilisée au titre de l'ensemble des services effectués dans des emplois occupés en application des articles 4, 6, 6 quater, 6 quinquies et 6 sexies. Elle doit avoir été accomplie dans sa totalité auprès du même département ministériel, de la même autorité publique ou du même établissement public. (...) / Lorsqu'un agent atteint l'ancienneté mentionnée aux quatrième à sixième alinéas du présent article avant l'échéance de son contrat en cours, celui-ci est réputé être conclu à durée indéterminée. L'autorité d'emploi lui adresse une proposition d'avenant confirmant cette nouvelle nature du contrat. En cas de refus par l'agent de l'avenant proposé, l'agent est maintenu en fonctions jusqu'au terme du contrat à durée déterminée en cours ". L'article 13 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose, dans sa rédaction issue de la loi du 20 avril 2016 : " Les corps et cadres d'emplois de fonctionnaires sont répartis en trois catégories désignées, dans l'ordre hiérarchique décroissant, par les lettres A, B et C ".

6. Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires ayant conduit à l'adoption de la loi du 12 mars 2012, qu'un agent contractuel de l'Etat peut bénéficier d'un contrat à durée indéterminée lorsqu'il justifie d'une durée de services de six ans, accomplie dans sa totalité auprès du même département ministériel, de la même autorité publique ou du même établissement public, dans des fonctions relevant d'une même catégorie hiérarchique A, B ou C au sens de l'article 13 de la loi du 13 juillet 1983 modifiée. Lorsque les contrats successifs de l'agent mentionnent, s'agissant de l'emploi qu'il occupe, des appellations et références catégorielles différentes, il peut néanmoins bénéficier d'un contrat à durée indéterminée s'il est établi qu'il a en réalité exercé, en dépit des indications figurant sur les contrats, des fonctions identiques pendant la durée de services requise.

7. Il ressort des pièces du dossier que, lors de son recrutement en février 2007 en qualité de technicien TCT/DGA (niveau II), M. A... a été affecté à un poste de " spécialiste gestionnaire de projets " chargé " d'analyser et de suivre le déroulement des contrats afin d'établir les échéanciers financiers des projets " et de contribuer " au reporting du projet par la mise en place d'indicateur et de tableaux de bord de gestion financière des projets ". Le ministre de la défense fait valoir qu'à compter de 2009, la fiche de poste de M. A... mentionne un emploi de " spécialiste gestionnaire de projets confirmé ", qui comporte davantage d'objectifs ainsi qu'une activité secondaire de " spécialiste management et qualité " à hauteur de 20% du poste. Toutefois, il ressort des fiches de poste produites que le descriptif des activités principales du poste n'a jamais été substantiellement modifié de 2007 à 2013, pas plus que le positionnement hiérarchique de M. A... au sein de la sous-direction du management des projets. S'agissant de l'ajout, à compter de l'année 2010 d'une spécialité " spécialiste management et qualité " à hauteur de 20% du poste et qui a inclus des activités annexes de " mise en oeuvre des processus, des méthodes et des outils relevant du management de projet au profit des projets auprès desquels il [M. A...] est rattaché " et d'une mission consistant à proposer " au manager une organisation compte tenu des spécificités du projet, du contexte et des objectifs à atteindre par le manager ", il n'a pas pour effet de modifier dans une mesure importante les missions remplies par M. A... mais constitue une évolution des objectifs assignés à l'intéressé dans le cadre du poste qu'il a occupé durant six années. Par ailleurs, si le ministre souligne les différences en termes d'évolution de carrière que connaissent les titulaires des postes de spécialiste gestionnaire de projets de niveau I et de niveau II, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le contenu du poste occupé par M. A... ait été modifié en novembre 2007 lors de la résiliation du contrat de recrutement en qualité de technicien TCT et la signature du contrat en qualité de cadre ITC. Dans ces conditions, M. A..., qui justifie d'une durée de services publics de six ans dans des fonctions relevant de la même catégorie hiérarchique auprès du ministère de la défense, est fondé à soutenir qu'il remplissait les conditions fixées par l'article 6 bis de la loi du 11 janvier 1984 pour bénéficier d'un contrat à durée indéterminée avant le terme de son dernier contrat et à demander, par suite, l'annulation de la décision du 26 août 2013 par laquelle le ministre de la défense a prononcé sa radiation des cadres du ministère de la défense à compter du 21 novembre 2013.

8. Il résulte de ce qui précède que le ministre de la défense n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué du 10 mai 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé sa décision du 26 août 2013.

Sur les frais liés à l'instance :

9. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. A... d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du ministre de la défense est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera à M. A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

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N° 19VE02397


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE02397
Date de la décision : 02/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires.


Composition du Tribunal
Président : M. OLSON
Rapporteur ?: Mme Jeanne SAUVAGEOT
Rapporteur public ?: M. CABON
Avocat(s) : BOUKHELOUA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-07-02;19ve02397 ?
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