Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B... C... ont demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2006, ainsi que des majorations correspondantes.
Par un jugement n ° 1302260 du 14 avril 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, après avoir constaté un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements prononcés en cours d'instance, a rejeté le surplus de cette demande.
Première procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 14 juin 2016 et le 18 avril 2017, M. et Mme C..., représentés par Me Sand, avocat, demandent à la Cour :
1° d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette le surplus de leur demande ;
2° de prononcer la décharge des impositions supplémentaires et des pénalités correspondantes restant en litige à hauteur de 47 412 euros ;
3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'administration fiscale a méconnu l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;
- ils bénéficient de la présomption de versements à caractère familial dès lors que le service vérificateur est en possession des photocopies des chèques correspondant aux sommes litigieuses, indiquant que les sommes provenaient des membres de leur famille et de certains amis ;
- la majoration de 40 % prononcée à leur encontre n'est pas fondée dès lors que l'administration n'apporte pas la preuve de l'élément intentionnel du manquement délibéré prévu à l'article 1729 du code général des impôts.
..................................................................................................
Par un arrêt n° 16VE01807 du 20 juillet 2017, la Cour administrative d'appel de Versailles a annulé le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 14 avril 2016 et prononcé la décharge totale des impositions et pénalités contestées.
Procédure devant le Conseil d'État :
Par une décision n° 414420 du 24 avril 2019, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'action et des comptes publics, a annulé l'arrêt n° 16VE01807 du 20 juillet 2017 et renvoyé devant la Cour le jugement de l'affaire, qui y a été enregistrée sous le n° 19VE01508.
..................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme C... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle au titre des années 2006 et 2007 à la suite duquel l'administration fiscale a réintégré dans leurs bases imposables à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales de l'année 2006 des sommes qu'elle estimait non justifiées, selon la procédure de taxation d'office, appliquée en vertu des dispositions des articles L. 16 et L. 69 du livre des procédures fiscales. Par un jugement n ° 1302260 du 14 avril 2016, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à hauteur des dégrèvements accordés en cours d'instance, a rejeté le surplus de leur demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de cotisations de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2006, ainsi que des pénalités correspondantes. Par un arrêt n° 16VE01807 du 20 juillet 2017, la Cour administrative d'appel de Versailles a, sur appel formé par M. et Mme C..., annulé ce jugement et prononcé la décharge totale des impositions, en droits et pénalités, mises à leur charge. Par sa décision contentieuse n° 414420, le Conseil d'Etat a annulé, pour erreur de droit, cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la Cour.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ". Il incombe à l'administration, quelle que soit la procédure d'imposition mise en oeuvre, et au plus tard avant la mise en recouvrement, d'informer le contribuable dont elle envisage soit de rehausser, soit d'arrêter d'office les bases d'imposition, de l'origine et de la teneur des renseignements obtenus auprès de tiers qu'elle a utilisés pour fonder les impositions, avec une précision suffisante pour permettre à l'intéressé de demander que les documents qui contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent. Lorsque le contribuable en fait la demande à l'administration, celle-ci est tenue de lui communiquer les documents ou copies de documents contenant les renseignements obtenus auprès de tiers qui lui sont opposés.
3. Il résulte de l'instruction que M. et Mme C... ont demandé à l'administration fiscale, sur le fondement de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, de leur communiquer le relevé bancaire du compte n° 00074830701-83 ouvert à leur nom à la banque Scalbert et Dupont CIN, sur lequel s'était fondé le service pour asseoir une partie des impositions litigieuses. En ne leur communiquant qu'une seule page du relevé qu'elle avait obtenu lors de l'exercice de son droit de communication auprès de cette banque, et non l'intégralité de ce document, l'administration a entaché la procédure d'imposition d'irrégularité. Cette irrégularité n'emporte toutefois de conséquences que sur la seule fraction des impositions établie sur la base des renseignements obtenus auprès de la banque Scalbert-Dupont, et demeurant, après dégrèvement prononcé en cours de première instance, en litige, soit la taxation d'un crédit bancaire de 1 000 euros. Ainsi que l'admet d'ailleurs le ministre, les époux C... sont donc fondés à demander la réduction, à raison de cette somme en base, des impositions laissées à leur charge. A cet égard, la circonstance qu'en exécution de l'arrêt n° 16VE01807 rendu par la cour le 20 juillet 2017, l'administration fiscale a dégrevé les intéressés de la totalité des impositions mises à leur charge, en ce compris la taxation du crédit bancaire susmentionné, sans avoir entendu donner un caractère définitif à ce dégrèvement, ne saurait être regardée comme ayant privé d'objet le litige à hauteur de la taxation de la somme correspondante. Les conclusions en non-lieu à statuer présentées par le ministre de l'action et des comptes publics doivent, par suite, être rejetées.
Sur le bien-fondé des impositions :
4. M. et Mme C... se bornent à soutenir que les autres crédits portés sur les comptes qu'ils détiennent dans des établissements du Crédit lyonnais, de BNP Paribas et de la Société générale, imposés comme revenus d'origine indéterminée, correspondent à des prêts familiaux, ce dont ils auraient justifié par la production de copies de chèques et d'attestations. Toutefois, l'administration a déjà admis le bien-fondé de cette argumentation, en prononçant, au cours de la première instance, le dégrèvement des impositions correspondant à ces prêts d'un montant total de 37 710 euros. En l'absence de toute justification relative à l'origine des autres crédits bancaires, M. et Mme C... ne démontrent pas le caractère exagéré des impositions restant à leur charge, alors que, sur ce point, ayant été taxés d'office, la charge de la preuve leur incombe en vertu de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales.
Sur la majoration pour manquement délibéré :
5. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...) ".
6. Pour fonder la majoration pour manquement délibéré assortie aux impositions litigieuses, l'administration relève que les revenus d'origine indéterminée représentent, après le prononcé de dégrèvements en cours de première instance, la somme globale de 102 120 euros, soit plus du double des revenus déclarés par les époux C... au titre de l'année 2006. Elle relève également que les crédits bancaires en cause ont été portés régulièrement au cours de cette année sur les comptes détenus par les requérants. Par conséquent, outre l'importance du montant du manquement en cause qui demeure en dépit des dégrèvements accordés en cours de première instance, le caractère répété des dépôts de sommes d'origine indéterminée établit l'intention délibérée de M. et Mme C... d'éluder l'impôt. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que la majoration litigieuse a été appliquée.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise ne leur a pas accordé la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis à raison de la somme imposée de 1 000 euros rappelée au point 3.
Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ". Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. et Mme C... présentées sur ce fondement.
DÉCIDE :
Article 1er : La base de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles M. et Mme C... ont été assujettis au titre de l'année 2006 est réduite d'une somme de 1 000 euros.
Article 2 : M. et Mme C... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2006 correspondant à cette réduction en base d'imposition.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme C... et le surplus des conclusions du ministre de l'action et des comptes publics sont rejetés.
Article 4 : Le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise n ° 1302260 du 14 avril 2016 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
2
N° 19VE01508