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09/06/2020 | FRANCE | N°18VE03299

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 09 juin 2020, 18VE03299


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS BABOU a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur les revenus distribués établie au titre des exercices clos les 31 décembre 2014, 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016.

Par une ordonnance n° 1706412 du 28 août 2018, le président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins de décharge présentées par la SAS BAB

OU et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SAS BABOU a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur les revenus distribués établie au titre des exercices clos les 31 décembre 2014, 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016.

Par une ordonnance n° 1706412 du 28 août 2018, le président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins de décharge présentées par la SAS BABOU et rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 septembre 2018, la SAS BABOU, représentée par Me A..., doit être regardée comme demandant à la Cour :

1° d'annuler cette ordonnance en tant qu'elle a constaté un non-lieu à statuer sur ses conclusions aux fins de décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur les revenus distribués établie au titre de l'exercices clos le 31 décembre 2014 ;

2° de prononcer la décharge de l'imposition correspondante ;

3°de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le Tribunal administratif de Montreuil s'est mépris sur l'étendue du litige en ayant omis de statuer sur les conclusions aux fins de décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur les revenus distribués établie au titre de l'exercices clos le 31 décembre 2014 pour un montant de 766 680 euros et versée en décembre 2013 ;

- la réclamation du 27 décembre 2016 n'est pas tardive s'agissant de la contribution susmentionnée ;

- compte tenu des effets que le Conseil constitutionnel a entendu conféré à la déclaration d'inconstitutionnalité n° 2007-660 QPC du 6 octobre 2017, sa demande de restitution est fondée.

Vu l'ordonnance attaquée.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Beaujard, président,

- et les conclusions de Mme Méry, rapporteur public,

Considérant ce qui suit :

1. La SAS BABOU s'est acquittée de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés au titre des revenus distribués, prévue à l'article 235 ter ZCA du code général des impôts, au titre des exercices clos les 31 décembre 2014, 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016, respectivement acquittées le 13 décembre 2013 pour un montant de 766 680 euros, le 11 septembre 2014 pour un montant de 358 230 euros, et le 14 septembre 2015 pour un montant de 316 920 euros. Par une réclamation en date du 27 décembre 2016, notifiée le 30 décembre 2016, la SAS BABOU a demandé à l'administration fiscale la restitution de ces contributions ainsi acquittées. Cette demande a été implicitement rejetée. La SAS BABOU a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la restitution de ces impositions. En application de la décision du Conseil constitutionnel n° 2007-660 QPC du 6 octobre 2017 ayant déclaré l'inconstitutionnalité de l'article 235 ter ZCA dans sa rédaction issue de la loi du 29 décembre 2015, l'administration fiscale a admis la restitution de la contribution acquittée en 2014 et 2015 au titre des exercices clos les 31 décembre 2015 et 31 décembre 2016, mais a maintenu sa décision de rejet de la demande de restitution de la contribution acquittée en 2013 au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2014 pour cause de forclusion. Par une ordonnance du 28 août 2017, le président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil constaté un non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins de décharge présentées par la SAS BABOU et rejeté le surplus des conclusions de la demande. Par la présente requête, la SAS BABOU doit être regardée comme demandant l'annulation de cette ordonnance en tant qu'elle a constaté un non-lieu à statuer sur ses conclusions aux fins de décharge de la contribution acquittée en 2013 au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2014 pour un montant de 766 680 euros.

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Le président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil a considéré que les conclusions de la SAS BABOU tendant à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur le revenus distribués établie au titre de l'exercices clos le 31 décembre 2014 pour un montant de 766 680 euros et versée en décembre 2013 étaient devenues sans objet au motif que par une décision du 22 mars 2018 postérieure à l'introduction de la demande de première instance, le délégué chargé de la direction des grandes entreprises a prononcé la restitution des cotisations de contributions additionnelles à l'impôt sur les sociétés à hauteur de 675 150 euros au titre des années 2014 et 2015 soit la totalité des impositions en litige. Par suite, la SAS BABOU est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la demande dont ils étaient saisis était devenue sans objet et ont constaté qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur ces conclusions. L'ordonnance en date du 28 août 2018 doit, dès lors, être annulée en tant qu'elles statuent sur ces conclusions.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions présentées par la SAS BABOU devant le Tribunal administratif de Montreuil et tendant à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur les revenus distribués établie au titre de l'exercices clos le 31 décembre 2014 pour un montant de 766 680 euros et versée en décembre 2013.

Sur les conclusions tendant à la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur les revenus distribués établie au titre de l'exercices clos le 31 décembre 2014 pour un montant de 766 680 euros et versée en décembre 2013 :

4. Aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : " Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause. ". Ainsi que l'a jugé le Conseil constitutionnel, notamment dans ses décisions n° 2010-108 QPC et n° 2010-110 QPC du 25 mars 2011, la déclaration d'inconstitutionnalité doit, en principe, bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration

5. Aux termes des troisième et cinquième alinéas de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales : " Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction ou à la restitution d'impositions indues, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure, révélée par une décision juridictionnelle ou par un avis rendu au contentieux. / (...) / Pour l'application du troisième alinéa, sont considérés comme des décisions juridictionnelles ou des avis rendus au contentieux les décisions du Conseil d'Etat ainsi que les avis rendus en application de l'article L. 113-1 du code de justice administrative, les arrêts de la Cour de cassation ainsi que les avis rendus en application de l'article L. 441-1 du code de l'organisation judiciaire, les arrêts du Tribunal des conflits et les arrêts de la Cour de justice de l'Union européenne se prononçant sur un recours en annulation, sur une action en manquement ou sur une question préjudicielle ". Aux termes de l'article R. 196-1 du même livre : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : (...) b) Du versement de l'impôt contesté lorsque cet impôt n'a pas donné lieu à l'établissement d'un rôle ou à la notification d'un avis de mise en recouvrement ; / c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation. Ne constitue pas un tel événement une décision juridictionnelle ou un avis mentionné aux troisième et cinquième alinéas de l'article L. 190. (...) ".

6. Il résulte de ces dispositions que les décisions du Conseil constitutionnel ne sont pas au nombre des décisions juridictionnelles ou avis mentionnés aux troisième et cinquième alinéas de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales, pour lesquels la deuxième phrase du c) de l'article R. 196-1 écarte la qualification d'événement constituant le point de départ d'un nouveau délai de réclamation. Toutefois, seuls doivent être regardés comme constituant le point de départ de ce délai les événements qui ont une incidence directe sur le principe même de l'imposition, son régime ou son mode de calcul. Une décision par laquelle le Conseil constitutionnel, statuant sur le fondement de l'article 61-1 de la Constitution, déclare inconstitutionnelle une disposition législative ne constitue pas en elle-même un tel événement susceptible d'ouvrir un nouveau délai de réclamation. Il appartient au seul Conseil constitutionnel, lorsque, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, il a déclaré contraire à la Constitution la disposition législative ayant fondé l'imposition litigieuse, de prévoir si, et le cas échéant dans quelles conditions, les effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration sont remis en cause, au regard des règles, notamment de recevabilité, applicables à la date de sa décision.

7. Il résulte de ce qui précède que si le Conseil Constitutionnel a indiqué dans sa décision n° 2017-629 QPC du 19 mai 2017 déclarant contraire à la Constitution le premier alinéa du paragraphe I bis de l'article 1586 quater du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 et a précisé que cette déclaration d'inconstitutionnalité était " applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date, sous réserve du respect des délais et conditions prévus par le livre des procédures fiscales ", et qu'en conséquence, elle s'applique aux réclamations non encore introduites à la date de la décision dans les limites toutefois des délais de prescription, il ne s'en déduit pas pour autant que cette décision a constitué un événement rouvrant le délai de réclamation préalable au sens du c) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales, contrairement à ce que soutient la société requérante.

8. Il résulte de l'instruction que l'administration fiscale a rejeté la réclamation de la SAS BABOU au motif que celle-ci, formée le 26 décembre 2016, était, en application du b) de l'article R. 196-1 du livre des procédures fiscales précité, tardive. Or, la réclamation en cause ayant été formée antérieurement à la publication de la décision du Conseil constitutionnel susmentionnée, cette dernière ne constitue pas un événement de nature à rouvrir le délai général de réclamation prévu le b) de l'article R. 196 du livre des procédures fiscales. En application de ces dernières dispositions, le délai de réclamation était forclos le 31 décembre 2015. Ainsi, contrairement à ce que soutient la SAS BABOU, c'est à bon droit que l'administration fiscale a rejeté sa réclamation pour forclusion.

9. Il résulte de ce qui précède que la SAS BABOU n'est pas fondée à demander la décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur les revenus distribués établie au titre de l'exercices clos le 31 décembre 2014. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : L'ordonnance du président de la 9ème chambre du Tribunal administratif de Montreuil en date du 28 août 2018 est annulée en tant qu'elle constate un non-lieu à statuer sur les conclusions aux fins de décharge de la contribution additionnelle à l'impôt sur les sociétés de 3% sur les revenus distribués établie au titre de l'exercices clos le 31 décembre 2014.

Article 2 : Les conclusions aux fins de décharge de la contribution acquittée en 2013 au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2014 présentée par la SAS BABOU en première instance et le surplus des conclusions de la requête d'appel sont rejetés.

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N° 18VE03299


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE03299
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Prescription.

Contributions et taxes - Règles de procédure contentieuse spéciales - Réclamations au directeur - Délai.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Patrice BEAUJARD
Rapporteur public ?: Mme MERY
Avocat(s) : CABINET FIDAL CLERMONT-FERRAND

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-06-09;18ve03299 ?
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