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09/06/2020 | FRANCE | N°18VE00531

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 09 juin 2020, 18VE00531


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision en date du 21 juillet 2016 par laquelle le chef de service adjoint à l'aide sociale à l'enfance a prononcé son licenciement, et la décision en date du 18 novembre 2016 par laquelle le président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1702307 en date du 12 décembre 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de Mme A....

Procédure dev

ant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 février 2018 et 14 oct...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision en date du 21 juillet 2016 par laquelle le chef de service adjoint à l'aide sociale à l'enfance a prononcé son licenciement, et la décision en date du 18 novembre 2016 par laquelle le président du Conseil départemental de Seine-Saint-Denis a rejeté son recours gracieux.

Par un jugement n° 1702307 en date du 12 décembre 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de Mme A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 12 février 2018 et 14 octobre 2019, Mme A..., représentée par Me Minier Maugendre, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement attaqué ;

2° d'annuler les décisions des 21 juillet et 18 novembre 2016 ;

3° de mettre à la charge du département de la Seine-Saint-Denis la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Mme A... soutient que :

- le jugement de première instance est irrégulier au motif que le Tribunal administratif de Montreuil a opéré une substitution de base légale sans la mettre en mesure de présenter ses observations ;

- les article L. 423-32 et L. 423-35 du code de l'action social et des familles ainsi que les articles L. 1232-2, L. 1232-3, L. 1232-4 et R. 1232-1 du code du travail ont été méconnus en raison de l'absence de convocation régulière à un entretien préalable, que les motifs de la décision ne lui ont pas été exposés et qu'elle n'a pas pu présenter ses observations ;

- les décisions attaquées sont entachées d'une erreur de droit car l'administration ne démontre pas ne plus avoir d'enfant à lui confier ;

- les décisions sont entachées de détournement de pouvoir ;

- les décisions sont entachées d'erreur de fait, son accompagnement professionnel n'a pas été suffisant et les manquements reprochés sont inexacts ;

- les décisions sont entachées d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Beaujard, président ;

- les conclusions de Mme Méry, rapporteur public,

- et les observations de Me Brière, avocat du département de Seine-Saint-Denis.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., assistante familiale agréée depuis le 19 juillet 2013 par le département du Val d'Oise a été recrutée le 13 mars 2015 par le département de Seine-Saint-Denis. Elle s'est vu confier une fratrie de deux enfants, âgés de 8 et 12 ans, du 29 avril 2015 au 1er avril 2016 jusqu'à l'intervention d'une décision du juge aux affaires familiales décidant du retour des enfants dans leur famille d'origine. Le 21 juillet 2016, il a été notifiée à Mme A... une décision de licenciement pour défaut d'enfant à lui confier depuis plus de quatre mois sur le fondement de l'article L. 423-32 du code de l'action sociale et des familles, décision confirmée sur recours gracieux le 18 novembre 2016. Mme A... relève appel du jugement du 12 décembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Mme A... reproche au Tribunal administratif de Montreuil d'avoir opéré une substitution de base légale sans l'avoir mise en mesure de présenter ses observations. Les premiers juges n'étaient cependant tenus de provoquer des observations de la part de la requérante que si le moyen n'était pas soulevé devant eux. Il ressort des pièces du dossier, et notamment des écritures en défense de première instance du département, que celui-ci avait expressément demandé que les décisions attaquées soient regardées comme fondées sur les dispositions de l'article L.423-10 du code de l'aide sociale et des familles, relatives au licenciement pour motif réel et sérieux, et non sur celles de l'article L.423-32, relatives au licenciement pour absence d'enfants à confier à l'assistant familial. La circonstance que le département ait, de manière inappropriée, qualifié le moyen de substitution de motifs ne faisait pas obstacle à ce que le Tribunal administratif, auquel il appartenait de requalifier un moyen improprement formulé, lui donne sa portée exacte en le qualifiant de substitution de base légale. Il n'a, ce faisant, privé M. A..., d'aucune garantie, l'intéressée ayant été régulièrement convoquée à un entretien préliminaire à laquelle elle a pu se préparer utilement, les décisions attaquées formulant clairement les motifs qui les sous-tendent, notamment au regard des fautes qui sont reprochée à l'intéressée.

Sur la légalité des décisions attaquées :

En ce qui concerne la légalité externe :

3. En premier lieu, pour motiver sa décision, le département de la Seine-Saint-Denis a retenu l'inadéquation dans l'accueil d'un nourrisson, en développant sa position, des dysfonctionnements et des manquements dans la prise en charge des enfants d'âge primaire confiés, le non accompagnement d'un enfant à l'école, à plusieurs reprises sur la période d'accueil de l'enfant du 29 avril 2015 au 1er avril 2016, la sollicitation régulière d'un enfant confié âgée de 12 ans pour aller chercher son frère de 8 ans à l'école, l'incapacité à s'adapter aux carences majeures d'enfants à qui il faut apprendre notamment les règles d'hygiène élémentaire, l'exclusion des enfants du temps de repas en famille, des exigences éducatives inappropriées vis-à-vis des difficultés des enfants, enfin une absence d'empathie avérée face aux difficultés rencontrées par les enfants accueillis. Ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation manque en fait.

4. En second lieu, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que l'administration n'ait pas procédé à un examen préalable et sérieux de la situation de Mme A....

En ce qui concerne la légalité interne :

5. Aux termes de l'article L. 423-10 du code de l'action sociale et des familles : " L'employeur qui envisage, pour un motif réel et sérieux, de licencier un assistant maternel ou un assistant familial qu'il emploie depuis trois mois au moins convoque celui-ci et le reçoit en entretien dans les conditions prévues aux articles L. 1232-2 à L. 1232-4 du code du travail. Au cours de l'entretien, l'employeur est tenu d'indiquer le ou les motifs de la décision envisagée et de recueillir les explications du salarié. "

6. En premier lieu, les décisions attaquées étant fondées, ainsi qu'il a été dit, sur les dispositions de l'article L.423-10 du code de l'action et des familles, qui concerne le licenciement pour motif réel et sérieux, et non sur celles de l'article L.423-32, relatives au licenciement pour absence d'enfants à confier à l'assistant familial, le moyen tiré de la violation des dispositions de l'article L.432-32 est en tout état de cause inopérant. Il en va de même du moyen tiré du détournement de pouvoir, fondé sur le fait que le motif réel du licenciement ne serait pas l'absence d'enfants à confier à Mme A... pendant une durée de plus de quatre mois.

7. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le motif de la décision tiré l'inadéquation dans l'accueil d'un nourrisson a été reconnu exact par la requérante, de même que ceux tirés du non-accompagnement d'un enfant à l'école à plusieurs reprises, de la sollicitation d'un enfant pour aller chercher son petit frère à l'école, de l'incapacité de s'adapter aux carences majeures des enfants en matières d'hygiène, de l'exclusions des enfants du temps de repas en famille et des exigences éducatives inappropriées. Si Mme A... apporte des justificatifs correspondant à chacun de ces reproches, ces justificatifs, s'ils pourront être examinés au stade de la qualification des faits, sont sans influence sur la matérialité de ceux-ci. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.

8. En dernier lieu, s'il ressort des pièces du dossier que les enfants confiés à Mme A... présentaient de graves carences affectives, cette circonstance résulte de la nature même des tâches confiées à des assistants familiaux, Mme A... ayant d'ailleurs perçu en contrepartie une majoration pour sujétions spéciales. Alors qu'elle a connu de graves difficultés dans l'accueil des enfants dès le début de sa mission, en avril 2015, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle ait sollicité l'aide des services compétents du département avant novembre 2015. En dépit de l'aide qui lui a été accordée, des insuffisances professionnelles ont été relevées par les rapports concordant et circonstanciés des éducatrices et des puéricultrices du département. Dans les circonstances de l'espèce, le département de la Seine-Saint-Denis n'a entaché ses décisions d'aucune erreur d'appréciation.

9. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du Tribunal administratif de Montreuil du 12 décembre 2017. Les conclusions de sa requête doivent être rejetées, y compris les conclusions portant su l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

N° 18VE00531 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE00531
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Patrice BEAUJARD
Rapporteur public ?: Mme AVENTINO-MARTIN
Avocat(s) : MINIER MAUGENDRE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-06-09;18ve00531 ?
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