Vu la procédure suivante :
Procédure antérieure :
M. D... B... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision du 20 octobre 2016 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, après avoir retiré la décision implicite de rejet née le 26 août 2016 et annulé la décision de l'inspecteur du travail du 11 mars 2016, accordé l'autorisation de transfert de son contrat de travail à la société B2K sollicitée par la société Distrilap.
Par un jugement n° 1609978 du 27 juin 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 24 août 2017, M. D... B..., représenté par Me Basile, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement du 27 juin 2017 ;
2° d'annuler la décision du 20 octobre 2016 par laquelle le ministre du travail de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, après avoir retiré la décision implicite de rejet née le 26 août 2016 et annulé la décision de l'inspecteur du travail du
11 mars 2016, accordé l'autorisation de transfert de son contrat de travail à la société B2K sollicitée par la société Distrilap ;
3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le transfert de son contrat de travail à la société B2K ne satisfait pas aux conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail car il y a situation de co-emploi ;
- l'acte attaqué est entaché de discrimination en raison de ses activités syndicales.
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code du travail ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public,
- et les observations de Me A... pour la société Distrilap.
Considérant ce qui suit :
1. La société Distrilap, qui a pour activité principale, dans le cadre de contrats de mandat d'intérêt commun avec la société Lapeyre, l'exploitation et la gestion des 81 magasins de cette enseigne, a mis en oeuvre un mouvement de réorganisation et de cession de magasins à partir de 2013. Après avoir cédé des magasins et des points de vente à des sociétés mandataires indépendantes en 2013 et 2014, elle a procédé à l'information et à la consultation du comité central d'entreprise et en vue de céder les magasins de Grigny, de la Croix Blanche, des Ulis, de Reims et de Charleville à des sociétés mandataires indépendantes, dont la société B2K. A la suite de la consultation du comité centrale d'entreprise et du comité d'établissement n° 8 ainsi que du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, la société Distrilap a cédé par convention du 29 décembre 2015 son contrat de mandat d'exploitation des magasins de Reims et Charleville-Mézières à la société B2K. La cession a eu pour conséquence le transfert des contrats de travail de 18 salariés du magasin de Reims, dont M. B..., et de 4 salariés du point de vente de Charleville-Mézières. S'agissant du contrat de travail de M. B..., vendeur service depuis 2007, salarié protégé en sa qualité de délégué du personnel, délégué syndical CGT, membre titulaire du comité central d'entreprise et du comité d'établissement n° 8 ainsi que du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail, la société Distrilap a demandé l'autorisation de transfert de son contrat de travail à l'inspecteur du travail, qui a donné, après enquête contradictoire, son autorisation au transfert du contrat de travail le 11 mars 2016. M. B... ayant saisi, le 20 avril 2016, le ministre chargé du travail d'un recours hiérarchique contre cette décision auquel il n'a d'abord pas répondu expressément, avant, cependant, le 20 octobre 2016, que celui-ci ne répondre expressément par une décision portant retrait de sa décision implicite de rejet, annulation de la décision de l'inspecteur du travail et autorisation du transfert du contrat de travail de M. D... B..., celui-ci a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler cette décision ministérielle du 20 octobre 2016. Par un jugement du 27 juin 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. M. B... relève régulièrement appel de ce jugement.
2. Aux termes de l'article L. 1224-1 du code du travail : " Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise. ". Aux termes de l'article L. 2414-1 de ce code : " Le transfert d'un salarié compris dans un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement par application de l'article L. 1224-1 ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail lorsqu' il est investi de l'un des mandats suivants : 1° Délégué syndical et ancien délégué syndical ayant exercé ses fonctions pendant au moins un an ; 2° Délégué du personnel (...) " . Aux termes du 1er alinéa de l'article L. 2421-9 du même code : " Lorsque l'inspecteur du travail est saisi d'une demande d'autorisation de transfert, en application de l'article L. 2414-1, à l'occasion d'un transfert partiel d'entreprise ou d'établissement, il s'assure que le salarié ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire. ".
3. En vertu des dispositions du code du travail, les salariés protégés bénéficient d'une protection exceptionnelle instituée dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, afin d'éviter que ces salariés ne fassent l'objet de mesures discriminatoires dans le cadre d'une procédure de licenciement ou d'un transfert partiel d'entreprise. Dans ce dernier cas, il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande d'autorisation de transfert sur le fondement de l'article L. 2414-1 du code du travail, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier, d'une part, que sont remplies les conditions prévues à l'article L. 1224-1 du code du travail. Cette dernière disposition, interprétée à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001 susvisée, ne s'applique qu'en cas de transfert par un employeur à un autre employeur d'une entité économique autonome conservant son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise par le nouvel employeur. Constitue une entité économique autonome, un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels permettant l'exercice d'une activité économique qui poursuit un objectif économique propre. Le transfert d'une telle entité ne s'opère que si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un autre exploitant. Il incombe, d'autre part, à l'autorité administrative de s'assurer que le transfert envisagé est dépourvu de lien avec le mandat ou l'appartenance syndicale du salarié transféré et que, ce faisant, celui-ci ne fait pas l'objet d'une mesure discriminatoire.
4. Pour faire obstacle au transfert de son contrat de travail de la société Distrilap à la société B2K, cessionnaire du contrat de mandat d'exploitation, M. B... soutient que les dispositions précitées de l'article L. 1224-1 du code du travail ne trouvent pas à s'appliquer, dans la mesure où, selon lui, il n'y a pas eu transfert d'une entité économique autonome dès lors qu'il aurait été placé en situation de co-emploi entre la société Distrilap et la société Lapeyre, étroitement associée à la gestion de la société Distrilap.
5. M. B... ne saurait utilement soutenir qu'il n'y a pas eu transfert d'une entité économique autonome dès lors qu'il aurait été placé en situation de co-emploi entre la société Distrilap et la société Lapeyre.
6. Il ressort des pièces du dossier que la société Lapeyre, propriétaire et locataire des deux points de vente de Reims et de Charleville-Mézières et propriétaire des produits vendus par la société Distrilap, sa filiale, qui exploite ces établissements par contrat de mandat d'intérêt commun. Il ressort des stipulations du contrat de cession en date du 29 décembre 2015, que, par la cession de son mandat, la société Distrilap cède à la société B2K l'ensemble des droits et obligations attachés au contrat de mandat, ainsi qu'à titre gratuit, les locaux d'exploitation loués ou propriétés de la société Lapeyre, et que le cessionnaire prend à sa charge les contrats de travail avec contributions, les charges sociales, les contrats de fourniture, les contrats de prestations. La cession des éléments corporels et incorporels ainsi que la mise à disposition des personnels, en tant qu'ils forment un ensemble organisé de moyens significatifs, poursuivant un objectif économique propre permettant l'exploitation par une nouvelle société, qui constitue une entité économique autonome, implique que la société Distrilap demande seule l'autorisation du transfert du contrat de travail du salarié protégé à l'inspecteur du travail. La circonstance que la société Lapeyre soit liée par des contrats de mandat d'exploitation avec la société Distrilap ou avec d'autres sociétés est, compte tenu de la mission fixée à la société Distrilap dans l'exercice de son activité, sans incidence sur l'existence d'une entité économique autonome constituée par la société B2K après transfert partiel d'activité. Il en va de même pour la circonstance, à la supposer établie, que des anciens salariés de la société Distrilap, seraient salariés de la société B2K.
7. Si M. B... soutient que seule la société Lapeyre pouvait demander l'autorisation de transfert de son contrat de travail à l'inspecteur du travail, il ressort des pièces du dossier que M. B... n'était pas, avant le transfert partiel d'activité, salarié de la société Lapeyre, ainsi que l'indiquent les fiches de paie et les mandats détenus, mais salarié de la société Distrilap, et que la société Distrilap, compte tenu de la nature de ses liens contractuels avec la société Lapeyre, est distincte de cette dernière et ne peut donc être regardée comme étant une société transparente.
8. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision de transfert de contrat litigieuse aurait été en lien avec le mandat syndical exercé par M. B....
9. Il en résulte que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Montreuil a considéré que les dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail trouvaient, en l'espèce, à s'appliquer.
10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa requête tendant à l'annulation de la décision du 20 octobre 2016 par laquelle le ministre du travail de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, après avoir retiré la décision implicite de rejet née le 26 août 2016 et annulé la décision de l'inspecteur du travail du 11 mars 2016, accordé l'autorisation de transfert de son contrat de travail à la société B2K sollicitée par la société Distrilap.
Sur les conclusions aux fins d'application des disposions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Ces dispositions font obstacle à ce qu'il soit mis à la charge de la société Distrilap, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme demandée par M. B... au titre des frais irrépétibles. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. B... le versement à la société Distrilap d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : M. B... versera à la société Distrilap une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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N° 17VE02767