Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'arrêté du 2 avril 2018 pour lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours vers un pays où il est légalement admissible et d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour.
Par un jugement n° 1803705 du 26 juin 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 9 novembre 2018, et des pièces complémentaires, enregistrées les 6 décembre 2018 et 21 janvier 2019, M. A..., représenté par Me Diawara, avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement ;
2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'avis rendu par le médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) n'est pas régulier, faute de se prononcer sur tous les points ; par suite, l'arrêté attaqué est " privé de fondement " ;
- les décisions attaquées sont entachées d'une " erreur manifeste d'appréciation " au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est dépourvue de fondement.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle à 25% par une décision du 19 octobre 2018.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant ivoirien né le 19 juillet 1973 à Akoupé (Côte d'Ivoire), est entré en France le 20 avril 2009. Il a été titulaire d'une carte de séjour temporaire en tant qu'étranger malade valable du 21 décembre 2015 au 20 décembre 2016 avant de solliciter le renouvellement de cette carte de séjour le 31 janvier 2017. Par un arrêté du 2 avril 2018, le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a refusé ce renouvellement et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par la présente requête, M. A... fait appel du jugement du 26 juin 2018 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant refus de renouvellement d'une carte de séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version applicable à l'arrêté en litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". L'article R. 313-22 du même code dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ".
3. M. A... soutient que la décision lui refusant le renouvellement d'une carte de séjour temporaire sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été prise au terme d'une procédure irrégulière, faute pour le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) de ne pas s'être prononcé sur l'ensemble des questions qui lui étaient soumises. Toutefois, il ressort des termes de l'arrêté en litige que le collège des médecins a indiqué, dans son avis du
11 octobre 2017, que " l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entrainer, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité, et que son état de santé peut lui permettre de voyager sans risque vers le pays d'origine ". Ainsi, les médecins de l'OFII, qui au vu de leurs conclusions médicales sur l'état de santé de M. A... ont estimé qu'un défaut de soins ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, n'avaient pas à répondre à l'ensemble des autres questions posées, notamment sur l'existence d'une possibilité de prise en charge médicale dans le pays d'origine, ont rendu un avis suffisamment motivé pour permettre au préfet de la Seine-Saint-Denis de statuer sur la demande de carte de séjour qui lui était soumise par l'intéressé. Par suite, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.
4. Pour soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'une nouvelle carte de séjour pour raison de santé serait entachée d'une erreur d'appréciation, M. A... produit plusieurs certificats médicaux. Toutefois, les deux certificats rédigés par un médecin de l'Assistance publique hôpitaux de Paris, qui, au demeurant, sont postérieurs à l'arrêté en litige, décrivent avec précision les différentes affections dont souffrent M. A... et font état d'un suivi médical régulier mais non rapproché. Ils attestent également que le défaut de prise en charge pourrait avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité " sur le long terme " en indiquant seulement que la prise en charge médicale dans le pays de l'intéressé ne serait pas " optimale ". Le requérant produit également un certificat établi en janvier 2019 par un médecin exerçant à Abidjan qui, s'il recommande une chirurgie, n'indique pas que celle-ci ne serait pas réalisable en Côte d'Ivoire. Dans ces conditions, faute pour ces éléments de contredire l'avis du collège des médecins de l'OFII quant à l'absence de conséquences d'une exceptionnelle gravité découlant d'un éventuel défaut de soin, le moyen tiré de l'erreur d'appréciation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
6. Si M. A... soutient que ses attaches familiales se situent désormais en France où il est bien intégré notamment sur le plan professionnel, l'intéressé produit seulement trois bulletins de salaire, comme agent de propreté puis comme agent de sécurité, attestant d'un niveau de rémunération irrégulier. Il ne dispose pas d'un logement à son nom, alors qu'il n'est pas contesté qu'il réside en France depuis 2009. Le requérant indique ne plus avoir de famille en Côte d'Ivoire sans toutefois apporter de précision quant à cette allégation alors que l'arrêté en litige mentionne que ses deux enfants vivent toujours dans son pays d'origine. Il résulte de ces éléments que la décision portant refus de délivrance d'une carte de séjour ne porte pas au respect de la vie privée et familiale de M. A... une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
7. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
8. Au soutien du moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, M. A... allègue encourir un risque de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine en raison de l'instabilité qui règne en Côte d'Ivoire et de la demande de reconnaissance du statut de réfugié qu'il aurait formée en France. Toutefois, ces éléments sont sans incidence sur la légalité de la décision portant sur la délivrance d'une carte de séjour pour raison de santé qui ne fixe pas par elle-même le pays de destination.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. En premier lieu, en l'absence d'illégalité de la décision refusant à M. A... la délivrance d'une carte de séjour de temporaire, la décision distincte portant obligation de quitter le territoire français n'est pas dépourvue de fondement.
10. En deuxième lieu, le requérant ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au soutien de la contestation qu'il forme à l'égard de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
11. En troisième lieu, pour les mêmes motifs de fait que ceux exposés au point 6., la décision portant obligation de quitter le territoire français ne porte pas au respect de la vie privée et familiale de M. A... une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise.
12. Enfin, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant en tant qu'il est dirigé contre la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français qui ne fixe pas par elle-même le pays de destination.
Sur la décision fixant le pays de destination :
13. Les allégations selon lesquelles M. A... encourrait un risque de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine en raison de l'instabilité qui règne en Côte d'Ivoire et en raison de la demande de reconnaissance du statut de réfugié qu'il aurait formée en France sont, pour les premières, dénuées de toute précision sur les risques encourus à titre personnel et, pour les secondes, dépourvues de tout élément justificatif. Par conséquent, le moyen tiré de la violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'il présente à fin d'injonction sous astreinte, ainsi que celles tendant à ce que soit mis à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du
10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être également rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
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N° 18VE03735