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27/05/2020 | FRANCE | N°18VE01683

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 27 mai 2020, 18VE01683


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 2 mai 2016 par laquelle le maire de la commune de Sarcelles lui a demandé de payer une somme, d'un montant s'élevant à 63 216,12 euros, au titre des travaux qu'elle a dû entreprendre à la suite de l'arrêté de péril du 19 novembre 2015 concernant sa propriété située 16 chemin des lavandières, d'annuler les trois titres exécutoires émanant du trésorier de la commune, n°s 2391 à 2393 du 16 mars 2016 lui réclamant

le versement de sommes s'élevant respectivement à 22 987,68 euros, 34 481 euros e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 2 mai 2016 par laquelle le maire de la commune de Sarcelles lui a demandé de payer une somme, d'un montant s'élevant à 63 216,12 euros, au titre des travaux qu'elle a dû entreprendre à la suite de l'arrêté de péril du 19 novembre 2015 concernant sa propriété située 16 chemin des lavandières, d'annuler les trois titres exécutoires émanant du trésorier de la commune, n°s 2391 à 2393 du 16 mars 2016 lui réclamant le versement de sommes s'élevant respectivement à 22 987,68 euros, 34 481 euros et 5 746,92 euros TTC, de mettre à la charge de la commune une somme s'élevant à 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, à titre subsidiaire, de désigner par jugement avant dire droit un expert aux fins de se prononcer sur l'utilité des travaux exécutés d'office par la société Bepox, d'analyser les factures de cette société et les devis établis par ses soins, de se prononcer sur le caractère excessif et disproportionné des sommes réclamées par la commune et d'établir un chiffrage raisonnable du coût des travaux exécutés d'office par la commune .

Par un jugement n° 1606363 du 6 mars 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé la décision du maire de Sarcelles du 2 mai 2016 ainsi que les trois titres exécutoires émis par le trésorier de la commune n°s 2391 à 2393 du 16 mars 2016 en tant qu'ils imposent le versement d'une somme supérieure à 43 216,12 euros et a rejeté le surplus de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 4 mai 2018, la commune de Sarcelles, représentée par la société d'avocats Claisse et Associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de rejeter la demande de M. A... ;

3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- les sommes mentionnées sur le titre exécutoire doivent correspondre à celles figurant sur les factures et non les devis contrairement à ce qu'a retenu le tribunal ;

- le montant facturé n'est pas excessif car les étaiements d'urgence étaient nécessaires ;

- les devis fournis par M. A... sont postérieurs à plus de six mois de l'arrêté de péril et n'ont pas été validés par l'expert judiciaire.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la construction et de l'habitation ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, d'exposer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- les observations de Me C..., pour la commune de Sarcelles,

- et les observations de Me F..., pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. Le maire de Sarcelles a, par un courrier du 2 mai 2016, adressé à M. A... trois avis de sommes à payer pour un montant total de 63 216,12 euros TTC, correspondant aux travaux qu'elle a fait exécuter d'office pour remédier au péril imminent constaté par arrêté municipal du 19 novembre 2015, résultant des travaux réalisés par M. A... sur sa propriété. Le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, par un jugement du 6 mars 2018, partiellement annulé la lettre du 2 mai 2016 et les trois avis de sommes à payer en tant qu'ils imposent le versement d'une somme supérieure à 43 216,12 euros. La commune de Sarcelles fait appel de ce jugement. Par la voie de l'appel incident, M. A... demande la décharge de l'obligation de payer la somme due à hauteur de 40 000 euros.

I. L'appel principal :

I.1. En ce qui concerne la lettre du 2 mai 2016 :

2. La lettre du 2 mai 2016 par laquelle le maire de Sarcelles a, d'une part, informé M. A... que l'exécution d'office par la commune des travaux visant à mettre fin au péril imminent constaté par arrêté municipal n° 2015-1940 du 19 novembre 2015 a coûté 63 216,12 euros TTC, et, d'autre part, transmis les trois avis de sommes à payer correspondants à cette somme, constitue une mesure préparatoire de ces avis. Elle n'est pas susceptible de recours. La commune est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a partiellement annulé cette lettre.

I.2. En ce qui concerne les trois titres exécutoires émis par le trésorier de la commune le 16 mars 2016 :

3. Aux termes de l'article L. 511-3 du code de la construction et de l'habitation : " En cas de péril imminent, le maire, après avertissement adressé au propriétaire, demande à la juridiction administrative compétente la nomination d'un expert qui, dans les vingt-quatre heures qui suivent sa nomination, examine les bâtiments, dresse constat de l'état des bâtiments mitoyens et propose des mesures de nature à mettre fin à l'imminence du péril s'il la constate. / Si le rapport de l'expert conclut à l'existence d'un péril grave et imminent, le maire ordonne les mesures provisoires nécessaires pour garantir la sécurité, notamment, l'évacuation de l'immeuble. / Dans le cas où ces mesures n'auraient pas été exécutées dans le délai imparti, le maire les fait exécuter d'office. En ce cas, le maire agit en lieu et place des propriétaires, pour leur compte et à leurs frais. / Si les mesures ont à la fois conjuré l'imminence du danger et mis fin durablement au péril, le maire, sur le rapport d'un homme de l'art, prend acte de leur réalisation et de leur date d'achèvement. / Si elles n'ont pas mis fin durablement au péril, le maire poursuit la procédure dans les conditions prévues à l'article L. 511-2 ". Aux termes de l'article L. 511-4 du même code : " Les frais de toute nature, avancés par la commune lorsqu'elle s'est substituée aux propriétaires ou copropriétaires défaillants, en application des dispositions des articles L. 511-2 et L. 511-3, sont recouvrés comme en matière de contributions directes. (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que M. A..., propriétaire d'une parcelle de terrain sur la commune de Sarcelles, a réalisé des travaux d'affouillement ayant fragilisé les constructions voisines. Le maire de Sarcelles a, par un arrêté n° 2015-1940 du 19 novembre 2015, constaté l'existence d'un péril imminent et a mis en demeure M. A... de réaliser les travaux détaillés dans cet arrêté. Après avoir constaté que les travaux réalisés ne mettaient pas fin au péril, le maire a de nouveau mis en demeure M. A..., de reprendre toutes mesures utiles à la levée de ce péril, le 4 décembre 2015, ce à quoi s'est engagé l'intéressé par courrier du 5 décembre 2015. Par un arrêté n° 2015-2107 du 11 décembre 2015, le maire, après avoir constaté que le péril demeurait, a demandé à M. A... d'arrêter immédiatement les travaux en cours et a décidé de procéder d'office, à la charge de M. A..., aux travaux nécessaires pour mettre fin à ce péril. Ces travaux ont été exécutés par l'entreprise Bepox pour un montant total de 63 216,12 euros TTC. Par l'arrêté n° 2016-493 du 11 avril 2016, le maire de la commune a procédé à la mainlevée des prescriptions contenues dans l'arrêté du 19 novembre 2015.

5. Il résulte en outre du rapport de l'expertise prescrit par ordonnance du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 10 novembre 2015, que les travaux réalisés par M. A... ont provoqué un état d'instabilité des terres, lesquelles ne sont plus maintenues, conduisant à un risque de décompression et de chute des constructions avoisinantes. Le rapport conclut à la mise en place de toutes mesures appropriées pour le maintien des terres. D'autre part, le rapport de vérification technique réalisé par la société Copreste, daté du 3 décembre 2015, précise que les terrassements réalisés par M. A... ont mis à nu les fondations des maisons mitoyennes en mettant en cause leur pérennité. La société Copreste a prescrit la réalisation, dans les plus brefs délais, de parois périphériques en béton armé, ainsi que la réalisation d'un butonnage provisoire puis définitif.

6. Il résulte enfin de l'instruction que la société Bepox a procédé à la mise en place d'un étaiement pour permettre, ainsi que cela est précisé sous la rubrique " note 1 " de la facture récapitulative du 18 janvier 2016, le maintien, à droite, du pignon du pavillon mitoyen et à gauche, de la clôture. Il est précisé que cet étaiement " est conçu et calculé pour reprendre l'effort de déversement mais pas le poids même du mur. Cet ouvrage devra être complété pour permettre les travaux de consolidation ou de reconstruction ". Il en résulte que cet étaiement a été réalisé pour éviter la chute des constructions avoisinantes. M. A... estime que cet étaiement n'était pas nécessaire, en se prévalant de trois devis. Toutefois, ces devis ne sont pas suffisamment probants dès lors qu'ils ont été établis plusieurs mois après l'exécution des travaux sans qu'il soit possible de déterminer si les entreprises consultées ont tenu compte de l'état du site avant l'intervention de la société Bepox et des prescriptions des rapports d'expertise et de vérification technique. Ainsi, il résulte de l'instruction que l'étaiement réalisé par la société Bepox était nécessaire pour mettre fin au péril. C'est donc à tort que les premiers juges se sont fondés sur l'absence de nécessité de cet étaiement pour annuler partiellement les titres exécutoires émis en tant qu'ils mettaient à la charge de M. A... la somme de 20 000 euros correspondant au montant, arrondi, de la mise en place de cet étaiement.

7. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... à l'encontre de ces titres exécutoires tant en première instance qu'en appel.

3. En premier lieu, le maire de la commune de Sarcelles a, par un arrêté n° 2014-730 du 9 avril 2014, donné délégation à Mme D... B..., conseillère municipale, à effet de signer toutes pièces comptables. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte doit être écarté comme manquant en fait.

4. En second lieu, le moyen tiré de l'indication insuffisante des voies et délais de recours est sans influence sur la légalité des états exécutoires contestés.

II. L'appel incident :

8. M. A... demande par la voie de l'appel incident, la réformation du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise en portant la somme indue à 40 000 euros.

9. En premier lieu, s'il fait valoir que le montant facturé par la société Bepox est excessif, il ne l'établit pas en ne se fondant que sur les trois devis qu'il verse à l'instance, lesquels, ainsi qu'il a été précédemment indiqué, ne sont pas suffisamment probants. En outre, il résulte de l'instruction que la commune avait consulté une seconde entreprise, dont le montant du devis, pour des travaux de même nature, était proche de celui de la société Bepox.

10. En deuxième lieu, il fait valoir que les frais d'échafaudage facturés par la société Bepox sont excessifs. Mais pour les mêmes raisons que celles précédemment exposées, il ne l'établit pas en se fondant sur les trois devis qu'il verse à l'instance.

11. En troisième lieu, il soutient qu'il avait confié la réalisation des notes de calcul à un bureau d'études spécialisées et que celles facturées par la société Bepox sont dès lors inutiles. Toutefois, M. A..., qui ne produit pas ces notes, ne justifie pas de cette allégation en se bornant à produire un contrat de mission de la société AETC Bâtiment non signé par ses soins.

12. En quatrième et dernier lieu, si M. A... critique l'arrêté du 11 décembre 2015 par lequel le maire de la commune de Sarcelles a décidé que les travaux seraient exécutés d'office par la ville, il ne soulève aucun moyen à l'appui de cette critique laquelle doit par suite et en tout état de cause, être écartée.

13. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le moyen tiré de l'insuffisante motivation du jugement attaqué, que la commune de Sarcelles est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a partiellement fait droit à la demande de M. A... en annulant les trois titres exécutoires émis le 16 mars 2016 en tant qu'ils imposent le versement d'une somme supérieure à 43 216,12 euros.

III. Les frais liés au litige :

14. Les dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par M. A... soient mises à la charge de la commune de Sarcelles, qui n'est pas la partie perdante. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... la somme que la commune de Sarcelles demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1606363 du 6 mars 2018 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise et ses conclusions d'appel incident devant la Cour sont rejetées.

Article 3 : Les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 18VE01683 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01683
Date de la décision : 27/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

49-05-001 Police. Polices spéciales.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Nicolas TRONEL
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : LAPLANTE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-05-27;18ve01683 ?
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