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10/03/2020 | FRANCE | N°16VE03670

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 10 mars 2020, 16VE03670


Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Distrilap a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite du 3 juillet 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 15 janvier 2015 de l'inspecteur du travail ayant refusé le licenciement pour faute de Mme G... C... E..., ensemble cette dernière décision.

Par un jugement n°1507931 du 18 octobre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.<

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Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 décembre 2016, et ...

Vu la procédure suivante :

Procédure antérieure :

La société Distrilap a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite du 3 juillet 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 15 janvier 2015 de l'inspecteur du travail ayant refusé le licenciement pour faute de Mme G... C... E..., ensemble cette dernière décision.

Par un jugement n°1507931 du 18 octobre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 décembre 2016, et un mémoire complémentaire enregistré le 13 janvier 2017, la société Distrilap, représentée par Me Gatineau, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler la décision implicite du 3 juillet 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 15 janvier 2015 de l'inspecteur du travail ayant refusé le licenciement pour faute de Mme C... E..., ensemble cette dernière décision ;

3° d'enjoindre au ministre du travail d'autoriser le licenciement de Mme C... E... ;

4° de mettre à la charge de Mme C...-E... la somme de 4 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

-le jugement est entaché d'irrégularité dès lors qu'il n'est pas signé ;

- la société n'a pas méconnu la procédure de l'article R. 2421-10 CT qui impose que la demande d'autorisation de licenciement soit accompagnée du PV de la réunion du CE ;

-le jugement est entaché d'erreur de droit, de dénaturation et d'erreur dans la qualification juridique des faits, pour avoir apprécié, à l'intérieur de chaque grief et non globalement, si les faits étaient d'une gravité suffisante ;

- aucun des griefs faits à Mme C... E... n'était infondé.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- et les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... E... exerce depuis le 27 aout 2001 les fonctions d'employée administrative et commerciale, et, à ce titre, selon avenant à son contrat de travail, elle exerce depuis le 1er octobre 2011, les fonctions d'adjointe responsable administrative, en charge de la gestion du service encaissement au sein de l'établissement Lapeyre d'Aubervilliers. Elle est chargée dans ce cadre de la gestion du " périmètre gestion caisse " et de " l'animation de l'équipe caisse ", comprenant quatre hôtesses de caisse et Mme A..., avec qui elle partage par ailleurs les fonctions d'hôtesse de caisse, partageant de ce fait la gestion de sa propre caisse avec cette dernière. La société Distrilap a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler la décision implicite du 3 juillet 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 15 janvier 2015 de l'inspecteur du travail ayant refusé le licenciement pour faute de Mme C... E..., ensemble cette dernière décision. Par un jugement n°1507931 du 18 octobre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. La société Distrilap relève régulièrement appel de ce jugement.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué que le moyen tiré de ce que ce jugement serait irrégulier faute de comporter les signatures prévues par l'article R. 741-7 du code de justice administrative manque en fait. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée aux parties ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut qu'intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail. Lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives exercées ou avec leur appartenance syndicale. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi, et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu du l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du contrat dont il est investi.

4. La société Distrilap a fondé sa demande d'autorisation de licenciement sur trois motifs, tirés de négligences fautives tant dans sa mission de supervision des caisses que dans sa mission d'hôtesse de caisse, ainsi que sur des fausses déclarations s'agissant du fonds de caisse du coffre destiné à alimenter les caisses des hôtesses et sur la disparition de certaines pièces comptables.

S'agissant du premier grief, tiré du défaut de supervision des caisses des hôtesses et du contrôle du fonctionnement de la caisse sanitaire :

5. Plusieurs écarts ont été constatés le 10 octobre 2014 entre les inventaires individuels et les inventaires récapitulatifs de plusieurs caisses, ce dont attestent M. D..., contrôleur opérationnel pour l'Ile-de-France, et Mlle B..., responsable des ressources humaines pour l'Ile-de-France. De plus, alors que la caisse sanitaire a été supprimée à compter du mois de novembre 2013, Mme C... E... a persisté signer des documents s'y rapportant. De tels agissements étaient révélateurs de fautes dans la conduite de ses fonctions d'encadrement.

6. Pour soutenir que Mme C... E... ne veillait pas au respect de la procédure interne Sipro et validait par sa signature des documents entachés de graves irrégularités, la société requérante fait valoir que 35 inventaires individuels ne portaient pas la signature des hôtesses de caisse, que 15 ne comportaient pas le visa d'un responsable, que 17 inventaires récapitulatifs n'étaient pas signés, et que 48 n'étaient pas signés, un étant même recensé manquant. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que chacune des irrégularités susmentionnées ait été commise. Seuls sont établis des écarts constatés et non justifiés, d'un montant de 100 euros, entre l'inventaire individuel de la caisse de Mme C... E... du 22 septembre 2014 et l'inventaire récapitulatif, et entre le solde et le comptage du jour du 10 octobre 2014, signé par Mme C... E... et Mme A....

7. Par ailleurs, il est constant que Mme C... E... signait des règlements de factures entachés d'anomalie pour 38 d'entre eux sur une période de trois mois comprise entre juillet et septembre 2014. La salariée, alors qu'elle était responsable de l'édition de ces états journaliers, n'a pas pris de mesure correctrice. Une telle carence dans ses fonctions de supervision était fautive.

Sur le deuxième grief, tiré de fausses déclarations s'agissant du fonds de caisse du coffre destiné à alimenter les caisses des hôtesses :

8. Il n'est pas contesté que les comptages de l'inventaire individuel du coffre réalisés et signés par Mme C... E... ne réapparaissent pas dans l'inventaire récapitulatif. Toutefois, la société Distrilap n'établit pas ces écarts auraient résulté de fausses déclarations.

Sur le troisième grief, tiré de la disparition de certaines pièces comptables :

9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que la disparition de la quasi-totalité des rouleaux de caisse de l'année 2014 et de nombreux avoirs archivés, ainsi que des altérations portées sur plusieurs inventaires récapitulatifs aurait été imputable à Mme C... E....

10. Il en résulte que les manquements constatés, qui constituent des défaillances dans l'encadrement de l'activité des caisses qu'il lui appartenait de superviser, sont fautifs. Toutefois, et ainsi qu'il a été dit tant par l'inspecteur du travail, le ministre puis les premiers juges, de telles défaillances, dont il n'est pas établi qu'elles auraient été frauduleuses, ne sont pas, compte tenu de l'ancienneté de la salariée dans ses fonctions, de l'absence de faute dans l'exercice de ses fonctions antérieures, de la durée limitée dans laquelle elles ont été commises, et de la faible importance des sommes concernées, d'une gravité suffisante pour justifier la mesure de licenciement projetée.

11. Enfin, il ressort des termes mêmes du point 11 du jugement attaqué, qui mentionne que " les fautes reprochées à Mme C... E... ne présentent pas, prises séparément et dans leur ensemble, une gravité suffisante ", que le tribunal, a apprécié si globalement, les faits pris dans leur ensemble, étaient d'une gravité suffisante.

12. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que, par le jugement du 18 octobre 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du 3 juillet 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle a rejeté son recours hiérarchique dirigé contre la décision du 15 janvier 2015 de l'inspecteur du travail ayant refusé le licenciement pour faute de Mme C... E....

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme C... E..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société Distrilap demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société Distrilap est rejetée.

2

N°16VE03670


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE03670
Date de la décision : 10/03/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Diane MARGERIT
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : SCP GATINEAU FATTACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 18/04/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-03-10;16ve03670 ?
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