La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/02/2020 | FRANCE | N°17VE01933

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 25 février 2020, 17VE01933


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société CIRA a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 12 janvier 2015 par laquelle le directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a suspendu la mise sur le marché, la mise en service, l'exportation et la distribution des produits Infocament et WAAVES jusqu'à leur mise en conformité à la réglementation.

Par un jugement n°1501966 du 20 avril 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa dem

ande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en rectification d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société CIRA a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler la décision du 12 janvier 2015 par laquelle le directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a suspendu la mise sur le marché, la mise en service, l'exportation et la distribution des produits Infocament et WAAVES jusqu'à leur mise en conformité à la réglementation.

Par un jugement n°1501966 du 20 avril 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en rectification d'erreur matérielle enregistrés les 19 et 20 juin 2017, la société CIRA, représentée par Me O'Mahony, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement en tant qu'il concerne la qualification du produit WAAVES ;

2° d'annuler la décision du 12 janvier 2015 du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé en tant qu'elle a suspendu la mise sur le marché, la mise en service, l'exportation et la distribution du produit WAAVES jusqu'à sa mise en conformité à la réglementation ;

3° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le format WAAVES ne devrait pas être qualifié de dispositif médical ; WAAVES est un format d'images et non un logiciel d'imagerie qui n'englobe pas l'affichage ; contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, Infocament ne pourrait lire et enregistrer d'autres formats d'images et les images au format WAAVES ne pourraient être lues ou stockées sur d'autres supports ; le tribunal a eu une interprétation erronée de la notion de diagnostic mentionnée dans les documents relatifs à WAAVES ; les images encodées au format WAAVES ne réalisent en aucun cas un diagnostic direct ; toutefois, la qualité de l'image encodée au format WAAVES est optimale pour permettre au professionnel de santé de réaliser un diagnostic fiable ; le tribunal a eu une mauvaise compréhension de la notion de diagnostic revendiquée en attribuant à WAAVES une finalité de diagnostic direct.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive 93/42/CEE du Conseil du 14 juin 1993 ;

- l'arrêt du 7 décembre 2017 de la Cour de justice de l'Union européenne rendu dans l'affaire " Syndicat national de l'industrie des technologies médicales (SNITEM) et société Philips France c/ France ", C-329/16 ;

- le code de la santé publique ;

- l'arrêté du 15 mars 2010 modifiant l'arrêté du 20 avril 2006 fixant les règles de classification des dispositifs médicaux, pris en application de l'article R. 5211-7 du code de la santé publique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Bruno-Salel, rapporteur public,

- et les observations de Me A... pour l'ANSM.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision en date du 12 janvier 2015, le directeur général de l'ANSM a suspendu la mise sur le marché, la mise en service, l'exportation et la distribution du logiciel Infocament et du module intégré de compression d'images au format WAAVES jusqu'à leur mise en conformité à la réglementation. La société CIRA a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler cette décision. Par un jugement n° 1501966 du 20 avril 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. La société CIRA relève appel de ce jugement en tant qu'il concerne la qualification du format WAAVES.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 5211-1 du code de la santé publique : " On entend par dispositif médical tout instrument, appareil, équipement, matière, produit, à l'exception des produits d'origine humaine, ou autre article utilisé seul ou en association, y compris les accessoires et logiciels nécessaires au bon fonctionnement de celui-ci, destiné par le fabricant à être utilisé chez l'homme à des fins médicales et dont l'action principale voulue n'est pas obtenue par des moyens pharmacologiques ou immunologiques ni par métabolisme, mais dont la fonction peut être assistée par de tels moyens. Constitue également un dispositif médical le logiciel destiné par le fabricant à être utilisé spécifiquement à des fins diagnostiques ou thérapeutiques. (...) ". Aux termes de l'article L. 5211-3 de ce code : " Les dispositifs médicaux ne peuvent être importés, mis sur le marché, mis en service ou utilisés, s'ils n'ont reçu, au préalable, un certificat attestant leurs performances ainsi que leur conformité à des exigences essentielles concernant la sécurité et la santé des patients, des utilisateurs et des tiers./ La certification de conformité est établie, selon la classe dont relève le dispositif, soit par le fabricant lui-même, soit par un organisme désigné à cet effet par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ou par l'autorité compétente d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou partie à l'accord sur l'Espace économique européen (....) ". Aux termes de l'article R. 5211-1 du même code : " (...) Ces dispositifs sont destinés à être utilisés à des fins : 1° De diagnostic, de prévention, de contrôle, de traitement ou d'atténuation d'une maladie ; 2° De diagnostic, de contrôle, de traitement, d'atténuation ou de compensation d'une blessure ou d'un handicap ; 3° D'étude, de remplacement ou de modification de l'anatomie ou d'un processus physiologique ; 4° De maîtrise de la conception. ". Aux termes de l'article R. 5211-7 du même code : " Pour l'application du présent titre, les dispositifs médicaux autres que les dispositifs médicaux implantables actifs sont répartis en quatre classes dénommées classe I, classe II a, classe II b et classe III. L'appartenance d'un dispositif à l'une ou l'autre de ces classes est déterminée conformément aux règles de classification définies, sur proposition du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, par arrêté du ministre chargé de la santé. Ces règles tiennent compte de la dangerosité des dispositifs médicaux quant à leur destination ". Aux termes de l'article 1.4 de l'annexe I de l'arrêté du 20 avril 2006 modifié par l'arrêté du 15 mars 2010 susvisé : " (...) Tout logiciel autonome est considéré comme un dispositif médical actif. ". Aux termes de l'article 3.2 de l'annexe II du même arrêté : " Les dispositifs actifs destinés au diagnostic font partie de la classe II a : (...) - s'ils sont destinés à permettre un diagnostic (...) ".

3. Il résulte de ces dispositions, qui assurent, en droit français, la transposition de la directive n° 93/42/CEE du Conseil du 14 juin 1993 relative aux dispositifs médicaux, qu'un matériel informatique et un logiciel conçus pour être associés à une fonction de diagnostic médical chez l'homme doivent être regardés comme un dispositif médical et que leur utilisation est alors subordonnée à la détention par son fabricant d'un certificat de conformité établi, selon sa classe, soit par lui-même, soit par un organisme tiers agréé.

4. Tel n'est en revanche pas le cas, comme l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne dans son arrêt du 7 décembre 2017, " Syndicat national de l'industrie des technologies médicales (SNITEM) et société Philips France c/ France " (C-329/16, point 26), d'un logiciel qui, tout en ayant vocation à être utilisé dans un contexte médical, a pour finalité unique d'archiver, de collecter et de transmettre des données, comme un logiciel de stockage des données médicales du patient, un logiciel dont la fonction est limitée à indiquer au médecin traitant le nom du médicament générique associé à celui qu'il envisage de prescrire ou encore un logiciel destiné à faire état des contre-indications mentionnées par le fabricant de ce médicament dans sa notice d'utilisation.

5. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que WAAVES est un format d'images qui permet la compression de fichiers, notamment de fichiers d'imagerie médicale. La société CIRA le présente ainsi comme une solution performante de compression, efficace en termes d'exploitation. WAAVES contribue donc à un diagnostic plus performant au sens où son utilisation réduit le temps de transmission des fichiers à travers les réseaux et participe à la rapidité de diagnostic. Toutefois, ainsi que le soutient la société CIRA, WAAVES ne constitue pas un logiciel d'imagerie dès lors qu'il convient d'utiliser un visualisateur, c'est-à-dire un logiciel capable de lire un fichier de données et d'afficher les données sous forme d'images pour visualiser ces dernières. Ce module est d'ailleurs compris dans le dispositif plus global Infocament auquel WAAVES a été intégré par la société CIRA au même titre que tous les programmes nécessaires au fonctionnement d'Infocament, soit les modules de protection, de compression des données, d'affichage des images et de gravage. Ainsi, le logiciel WAAVES constitue un dispositif dont les fonctionnalités sont limitées à la compression, au stockage et la transmission de données nécessaires à un diagnostic sans qu'il n'effectue aucune action sur ces données, ni ne participe de manière active au diagnostic. Ce logiciel ne peut donc être regardé comme un dispositif médical au sens des dispositions du code de la santé publique citées au point 2.

6. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, la société CIRA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 12 janvier 2015 du directeur général de l'ANSM en tant qu'elle a suspendu la mise sur le marché, la mise en service, l'exportation et la distribution du produit WAAVES jusqu'à sa mise en conformité à la réglementation applicable aux dispositifs médicaux de classe IIa et à demander l'annulation du jugement dans cette mesure.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions, au demeurant dirigées contre l'Etat, présentées par la société CIRA sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font par ailleurs obstacle à ce que soit mis à la charge de la requérante, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'ANSM demande au même titre.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1501966 du 20 avril 2017 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé en tant qu'il rejette les conclusions de la société CIRA tendant à l'annulation de la décision du 12 janvier 2015 du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé en tant qu'elle a suspendu la mise sur le marché, la mise en service, l'exportation et la distribution du produit WAAVES jusqu'à sa mise en conformité à la réglementation applicable aux dispositifs médicaux de classe IIa.

Article 2 : La décision du 12 janvier 2015 du directeur général de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé est annulée en tant qu'elle a suspendu la mise sur le marché, la mise en service, l'exportation et la distribution du produit WAAVES jusqu'à sa mise en conformité à la réglementation applicable aux dispositifs médicaux de classe IIa.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la société CIRA est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N° 17VE01933 5


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE01933
Date de la décision : 25/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

61-04-01-05 Santé publique. Pharmacie. Produits pharmaceutiques. Dispositifs médicaux.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Hélène LEPETIT-COLLIN
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : O'MAHONY

Origine de la décision
Date de l'import : 10/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-02-25;17ve01933 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award