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04/02/2020 | FRANCE | N°19VE01376

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 04 février 2020, 19VE01376


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2018 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir ainsi que de le munir, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour.

Par un

jugement n° 1808006 du 29 mars 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté s...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler l'arrêté du 24 octobre 2018 par lequel le préfet de l'Essonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale ", ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir ainsi que de le munir, dans l'attente, d'une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1808006 du 29 mars 2019, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 18 avril 2019, M. C..., représenté par Me A..., avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1808006 du 29 mars 2019 du Tribunal administratif de Versailles ainsi que l'arrêté du préfet de l'Essonne en date du 24 octobre 2018 ;

2° d'enjoindre au préfet de l'Essonne de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'en cas de retour au Maroc il ne pourrait bénéficier d'un accès effectif au traitement dont il a besoin ;

- la décision de refus méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- la décision ne pouvait se fonder sur un motif d'ordre public.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme F...,

- les observations de Me D... substituant Me A... pour M.C....

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant marocain né le 5 septembre 1991, a sollicité, le 21 mars 2017, le renouvellement de son titre de séjour délivré sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 24 octobre 2018, le préfet de l'Essonne a refusé de faire droit à cette demande. M. C... a demandé au Tribunal administratif de Versailles l'annulation de cette décision. Par un jugement du 29 mars 2019 dont M. C... relève appel, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

3. Il résulte des dispositions précitées qu'il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays dont l'étranger est originaire. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine. Si de telles possibilités existent mais que l'étranger fait valoir qu'il ne peut en bénéficier, soit parce qu'elles ne sont pas accessibles à la généralité de la population, eu égard notamment aux coûts du traitement ou à l'absence de modes de prise en charge adaptés, soit parce qu'en dépit de leur accessibilité, des circonstances exceptionnelles tirées des particularités de sa situation personnelle l'empêcheraient d'y accéder effectivement, il appartient à cette même autorité, au vu de l'ensemble des informations dont elle dispose, d'apprécier si l'intéressé peut ou non bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine

4. M. C... est entré en France, en 2009, à l'âge de dix-huit ans en raison d'une insuffisance rénale chronique terminale secondaire à une uropathie malformative avec reflux vésico urétéral. Il a ainsi bénéficié d'une transplantation rénale le 13 mai 2010. Depuis lors, M. C... fait l'objet d'un suivi médical exigeant consistant en des auto-sondages et la nécessité de suivre un traitement immunosuppresseur à vie en complément d'un suivi néphrologique régulier. Selon l'avis du collège des médecins de l'OFII, rendu le 7 janvier 2018, et ainsi qu'en attestent les pièces du dossier, son état nécessite ainsi une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité tant en raison des risques de rejet du greffon que des risques inhérents au traitement immunosuppresseur. Toutefois, au terme de ce même avis, les médecins ont estimé que M. C... pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine.

5. S'agissant, d'une part, de la disponibilité des soins, le traitement médicamenteux dont bénéficie en France M. B... est disponible au Maroc, l'attestation du Dr Ait Oumar, exerçant dans un hôpital de Rabat, qui évoque de manière vague et imprécise une " interruption des médicaments de temps à autre au Maroc " ne suffisant pas à remettre en cause cet état de fait. De même, si le requérant se prévaut d'un devis établi par une pharmacie de la même ville indiquant que certaines catégories de sondes pour auto sondages ne sont pas disponibles, cette mention manuscrite surajoutée sur le document ne saurait être regardée comme revêtant un caractère probant. Si le requérant se prévaut également de deux certificats médicaux récents, le premier, établi le 6 novembre 2018, par un médecin du service de néphrologie-transplantation de l'hôpital Henri Mondor indique qu'une prise en charge " optimale " de M. C... ne peut être effectuée dans son pays d'origine, ce qui n'est pas de nature à remettre en cause la disponibilité des soins au Maroc. Si le second certificat, établi par un chef de service de néphrologie-dialyse de l'hôpital Trousseau le 6 novembre 2018 également, indique que le suivi post transplantation dont le requérant bénéficie en France ne peut s'effectuer son pays d'origine, cette mention est insuffisamment circonstanciée. Enfin si, en avril 2019, le requérant a été victime d'une infection urinaire et a rencontré des complications liées à l'immunosuppression chronique, cette circonstance, au demeurant postérieure à la décision attaquée, a nécessité un suivi rapproché de six mois, sans qu'il apparaisse nécessaire de modifier le suivi médical ou le traitement de fond liés à la transplantation. S'agissant, d'autre part, de l'accessibilité effective à ce traitement au Maroc, si M. C... soutient qu'il ne pourrait y avoir accès compte tenu de son coût financier, il ressort des pièces du dossier et notamment des documents produits par M. C... lui-même que les traitements auxquels l'intéressé est astreint représentent un coût mensuel variant entre 4 400 et 6 000 dirhams. L'intéressé ne démontre pas que ses parents, alors que son père perçoit un salaire mensuel de près de 11 000 dirhams, ne pourraient lui venir en aide en prenant, à tout le moins partiellement, en charge son traitement, ni qu'il ne pourrait bénéficier d'une protection sociale dans son pays, ni même encore qu'il ne pourrait tirer des revenus de son travail dès lors qu'il ressort des pièces du dossier, qu'en dépit de son taux d'invalidité, M. C... a pu effectuer de nombreuses missions d'intérim en France. Il suit de là que c'est à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

7. M. C... fait valoir qu'il réside sur le territoire depuis neuf ans, qu'il vit en couple depuis 2015 avec une jeune française et qu'il n'a plus aucune habitude au Maroc. Toutefois, il ne justifie pas de la communauté de vie qu'il invoque alors même qu'il a déclaré être célibataire dans la fiche relative à sa vie privée et familiale. Par ailleurs, il ne démontre pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où vivent ses parents et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de dix-huit ans. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont écarté le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales.

8. Enfin, si le motif tiré de l'existence d'une menace pour l'ordre public ne pouvait être retenu par le préfet de l'Essonne pour rejeter la demande de titre de séjour présentée devant lui dès lors, notamment, qu'au jour de la décision attaquée M. C... n'avait pas été condamné et que, finalement, le parquet a requis un non-lieu le concernant, le préfet de l'Essonne aurait, s'il n'avait retenu que les motifs tirés de la vie privée et familiale et de l'état de santé de M. C..., pris la même décision à l'égard de ce dernier.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé pas à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté 24 octobre 2018 du préfet de l'Essonne. Sa requête d'appel doit, par suite, dans toutes ses conclusions, être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

N° 19VE01376 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE01376
Date de la décision : 04/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Hélène LEPETIT-COLLIN
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : LANDON

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-02-04;19ve01376 ?
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