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28/01/2020 | FRANCE | N°18VE01234

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 28 janvier 2020, 18VE01234


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise, à titre principal, d'une part, d'annuler l'arrêté du 22 mars 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1703780 du 5 octobre 2017, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12

avril 2018, Mme C..., représentée par Me Baouz, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise, à titre principal, d'une part, d'annuler l'arrêté du 22 mars 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1703780 du 5 octobre 2017, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 avril 2018, Mme C..., représentée par Me Baouz, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de délivrance d'un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de

200 euros par jour de retard ;

4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation ;

- il est également entaché d'un défaut d'examen sérieux et complet de sa situation personnelle ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation au regard des dispositions du 11° de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation au regard des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté attaqué a été pris au terme d'une procédure irrégulière, en l'absence d'avis du médecin de l'agence régionale de santé, en méconnaissance des articles L. 313-11 11° et

R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration ;

- il est entaché d'un défaut d'examen sérieux et complet de sa situation personnelle ;

- il est entaché d'une insuffisance de motivation en droit au regard des articles

L. 313-11 11° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'une erreur d'appréciation au regard des stipulations des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant refus de titre de séjour et celle portant obligation de quitter le territoire sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation de leurs conséquences sur la situation de l'appelante.

La demande d'admission au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale déposée par

Mme C... a été rejetée par une décision du 1er mars 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., née le 20 mai 1978 à Kinshasa (République Démocratique du Congo), fait appel du jugement du 5 octobre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du

22 mars 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé son pays de destination.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Mme C... fait valoir que le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise aurait entaché son jugement d'une insuffisance de motivation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et d'un défaut d'examen complet et sérieux de sa situation, au regard de sa prise en charge médicale.

3. Toutefois, d'une part, il ressort des pièces du dossier que la requérante n'a soulevé en première instance aucun moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par conséquent, le moyen tiré de ce qu'il serait irrégulier, faute d'avoir été motivé sur ce point, ne peut qu'être écarté.

4. D'autre part, il ressort des termes du jugement que celui-ci rappelle la situation médicale de l'intéressée et précise les raisons pour lesquelles le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas fondé. Dans ces conditions, et alors même qu'ils n'ont pas évoqué l'absence d'avis rendu par l'agence régionale de santé, dont au demeurant le bien-fondé n'a pas été contesté devant eux, les juges de première instance ont procédé à un examen complet des éléments qui leur étaient soumis par l'intéressée. Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de la situation de Mme C... doit être écarté.

5. Enfin, si Mme C... soutient que le jugement attaqué est entaché d'erreurs d'appréciation ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ces griefs, qui ont trait au bien-fondé du raisonnement suivi par les premiers juges, sont sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

6. Aux termes de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté en litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. (...) ". L'article R. 313-22 du même code, dans sa version applicable au 14 octobre 2016, jour du dépôt de la demande de titre de séjour par l'intéressée, dispose : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration : " Lorsqu'une demande adressée à l'administration est incomplète, celle-ci indique au demandeur les pièces et informations manquantes exigées par les textes législatifs et réglementaires en vigueur. Elle fixe un délai pour la réception de ces pièces et informations. ".

7. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées que le préfet, saisi d'une demande de titre de séjour présentée par un étranger qui se prévaut de son état de santé, est tenu de recueillir préalablement à sa décision l'avis du médecin de l'agence régionale de santé. Le préfet peut toutefois se dispenser de cette formalité substantielle dans l'hypothèse où le médecin de l'agence régionale de santé s'est trouvé dans l'impossibilité de se prononcer sur l'état de santé du demandeur, faute pour ce dernier d'avoir fourni les éléments d'information suffisants permettant au médecin d'émettre un avis.

8. Mme C... soutient que les dispositions de l'article L. 114-5 du code des relations entre le public et l'administration imposaient au préfet de lui indiquer les pièces manquantes dont la production était indispensable à l'instruction de sa demande. Cependant, d'une part, ces dispositions, qui définissent les conditions dans lesquelles l'autorité administrative doit inviter un demandeur à compléter son dossier en lui fournissant les pièces manquantes indispensables à l'instruction de la demande qui sont en sa possession, ne sont pas applicables à la situation particulière de l'étranger pour l'instruction de sa demande de séjour présentée sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, laquelle est entièrement régie par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. D'autre part, il est constant que le préfet du Val-d'Oise a régulièrement saisi pour avis le médecin de l'agence régionale de santé, lequel n'a pu émettre un avis en raison de l'absence d'éléments médicaux suffisants. Dans ces conditions, dès lors qu'il n'est pas démontré que l'absence de production de ces éléments incomberait à un manquement fautif du préfet, et nonobstant les éléments dont la requérante prétend avoir disposé à l'époque de l'instruction de sa demande mais qu'elle ne conteste pas ne pas avoir produits sans justifier cette absence de production, le moyen tiré du vice de procédure ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, l'arrêté attaqué, pris au visa, notamment, des articles L. 313-11 11° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mentionne les circonstances de fait propres à la situation de Mme C..., notamment l'impossibilité pour le médecin de l'agence régionale de santé de rendre un avis sur la situation médicale de l'intéressée, le fait que sa situation ne relève pas des dispositions de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que son éloignement, eu égard aux éléments relatifs à sa situation personnelle et familiale, ne méconnaît pas les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ainsi, il comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivé.

10. En troisième lieu, il ressort des termes de l'arrêté attaqué que le préfet du

Val-d'Oise a procédé à un examen de la situation administrative, personnelle et familiale de Mme C.... Dès lors, le moyen tiré du défaut d'examen sérieux et complet de la situation doit être écarté en tant qu'il manque en fait.

11. En quatrième lieu, Mme C... soutient que la décision de refus de séjour contestée est intervenue en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle fait l'objet d'un suivi psychiatrique depuis mars 2016 en raison d'un stress post-traumatique en lien avec des violences subies dans son pays et qu'elle souffre d'une affection chronique liée à la thyroïdectomie qu'elle a subie. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si des traitements antidépresseur et anxiolitique sont régulièrement prescrits à l'intéressée depuis mars 2015, la même continuité n'est pas démontrée dans la prescription du traitement à base d'hormones thyroïdiennes laquelle, au demeurant, n'est intervenue que postérieurement à la décision en litige. De même, les différentes attestations médicales qui indiquent que la prise en charge de la requérante n'est pas possible dans son pays d'origine ont toutes été établies postérieurement au refus de titre de séjour opposé à l'intéressée. Dans ces conditions, le préfet du Val-d'Oise n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant à l'intéressée la délivrance du titre de séjour qu'elle sollicitait.

12. En cinquième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article

L. 313-11 (...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ".

13. Les éléments produits par Mme C... concernant les deux pathologies dont elle souffre et les allégations dont elle fait état concernant les violences qu'elle aurait subies dans son pays d'origine, mais qui ne sont corroborées par aucun élément et sont dépourvues de toute précision, ne permettent pas à eux seuls de caractériser des circonstances exceptionnelles ou humanitaires qui auraient dû conduire le préfet du Val-d'Oise à procéder à la régularisation à titre exceptionnel de sa situation sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

14. En sixième et dernier lieu, et pour les mêmes motifs de fait que ceux exposés précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise aurait, en prenant la décision en litige, entaché son appréciation d'une erreur manifeste des conséquences de cette décision sur la situation personnelle de Mme C....

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

15. Pour les mêmes motifs de faits que ceux exposés précédemment, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise aurait commis une erreur manifeste des conséquences de la mesure d'éloignement sur la situation personnelle de la requérante.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

16. Aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales " 1. Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi. (...) " et aux termes de l'article 3 de cette même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ".

17. Si Mme C... soutient que son état de santé rend impossible son retour en République démocratique du Congo, elle ne l'établit toutefois pas, ainsi qu'il a été dit au point 11. ci-dessus. Par ailleurs, l'intéressée ne fait valoir aucune crainte pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine, où résident notamment ses trois enfants. Il suit de là que le moyen tiré de la violation des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui n'est en tout état de cause opérant qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doit être écarté.

18. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 22 mars 2017 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour et l'obligeant à quitter le territoire. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

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N° 18VE01234


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01234
Date de la décision : 28/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LIVENAIS
Rapporteur ?: Mme Marie-Gaëlle BONFILS
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : BAOUZ

Origine de la décision
Date de l'import : 04/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-01-28;18ve01234 ?
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