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21/01/2020 | FRANCE | N°19VE01663

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 21 janvier 2020, 19VE01663


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 9 août 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1808768 du 11 avril 2019, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 mai 2019,

M. E..., représenté par Me Msika, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement du 11 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 9 août 2018 par lequel le préfet du Val-d'Oise lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence, lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1808768 du 11 avril 2019, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 mai 2019, M. E..., représenté par Me Msika, avocat, demande à la cour :

1° d'annuler ce jugement du 11 avril 2019 et l'arrêté du 9 août 2018 ;

2° d'enjoindre au préfet du Val d'Oise de lui délivrer un certificat de résidence algérien dans un délai de 15 jours sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

3 ° de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté est entaché de détournement de pouvoir dès lors que l'existence d'une délégation publiée n'est pas établie, ainsi que l'absence ou l'empêchement du préfet ;

- l'arrêté est entaché d'erreur de droit dès lors que le préfet a examiné les conditions nécessaires pour un renouvellement de certificat de résidence et non pour la délivrance d'un premier certificat pour lequel la condition de maintien de la vie commune n'est pas exigée ;

- le préfet n'a pas examiné sa demande de certificat de résidence au titre des articles 6 et 7 de l'accord franco-algérien, alors qu'il a produit des pièces relatives à son activité professionnelle ;

- il n'a pas été invité à présenter des observations écrites ou orales ni avant le refus de certificat ni avant l'obligation de quitter le territoire ;

- l'obligation de quitter le territoire est illégale du fait de la transposition tardive de la directive n°2008/115/CE du 16 décembre 2008 et de l'absence de délai de départ volontaire ;

- le refus de certificat de résidence est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la directive n°2008/115/CE du 16 décembre 2008 ;

- l'accord franco algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... E..., de nationalité algérienne, a demandé la délivrance d'un certificat de résidence algérien sur le fondement des stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien ci-dessus visé. Par arrêté du 9 août 2018 le préfet du Val-d'Oise a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours. M. E... relève régulièrement appel du jugement du 11 avril 2019 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté de demande d'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, il y a lieu par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte. Par ailleurs, contrairement à ce que soutient le requérant en appel, il n'appartient pas à l'administration de faire la preuve de l'absence ou de l'empêchement du préfet du Val-d'Oise. Le moyen tiré du détournement de pouvoir au motif de l'incompétence du signataire de l'acte, doit, par suite être également écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union ". Aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre ; (...) ". Ces stipulations s'adressent non pas aux Etats membres, mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de leur violation par une autorité d'un Etat membre est inopérant.

4. Il résulte toutefois de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union. Ce droit implique ainsi que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision refusant un titre de séjour ou portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne. En l'espèce, M. E... a été à même lorsqu'il a présenté sa demande de certificat de résidence, de préciser les motifs susceptibles de justifier que lui soit accordé ce certificat de résidence, et de produire les éléments susceptibles de venir à son soutien, voire de s'informer des conséquences d'un éventuel refus opposé à sa demande. Enfin, il lui était loisible, tant que sa demande était en cours d'instruction, de faire valoir des observations écrites complémentaires, au besoin en faisant état de nouveaux éléments, ou de demander, auprès de l'autorité préfectorale, un entretien afin d'apporter oralement les précisions et compléments d'information qu'il jugeait utiles. Ainsi, la seule circonstance que le préfet du Val-d'Oise n'ait pas invité M. E... à formuler des observations sur sa situation personnelle avant de prendre l'arrêté attaqué, n'est pas de nature à entacher d'illégalité l'arrêté attaqué.

5. En troisième lieu, aux termes des stipulations de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour (...) a) Au ressortissant algérien, marié depuis au moins un an avec un ressortissant de nationalité française, dans les mêmes conditions que celles prévues à l'article 6 nouveau 2) et au dernier alinéa de ce même article (...) ". Aux termes des stipulations de l'article 6 du même accord : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit (...) 2) au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2) ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux (...) ". Il résulte de ces stipulations, que tant le premier renouvellement du certificat de résidence d'un an en qualité de conjoint de français que l'obtention d'un premier certificat de résidence valable dix ans en cette même qualité sont subordonnés à une communauté de vie effective entre les époux.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. E... a demandé la délivrance d'un certificat de résidence algérien d'une durée de dix ans en tant que conjoint d'un ressortissant français. La circonstance que le préfet du Val-d'Oise a indiqué, à tort, dans l'arrêt attaqué que M. E... a demandé le " renouvellement " d'un certificat de résidence délivré sur le fondement du a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien alors qu'il s'agissait d'une première délivrance, n'est pas constitutive d'une erreur de droit, dès lors que le préfet du Val-d'Oise a régulièrement fait application des conditions prévues par ces stipulations en vue d'une première délivrance d'un certificat de résidence d'une durée de dix ans, lesquelles exigent une communauté de vie effective entre le requérant et son épouse. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. E... aurait demandé la délivrance d'un certificat de résidence algérien sur un autre fondement que sur le b) de l'article 7 de l'accord franco-algérien. Par suite, le requérant ne peut utilement invoquer la méconnaissance des stipulations du a) ou du c) de cet article. Par suite, les moyens tirés de l'erreur de droit et du défaut d'examen de sa situation personnelle doivent être écartés.

7. En quatrième lieu, M. E..., né en Algérie, le 28 août 1991, fait valoir qu'il a épousé en France Mme B..., ressortissante française, le 25 juillet 2015 et qu'il est entré sur le territoire français le 9 novembre 2015. Pour rejeter la demande du certificat de résidence algérien sollicité, le préfet du Val-d'Oise a relevé l'absence de communauté de vie effective entre les époux en se fondant, d'une part, sur une lettre de Mme B..., en date du 15 janvier 2017, saisissant le procureur de la République d'une demande d'annulation de son mariage sur le fondement de l'article 180 du code civil au motif que ce mariage n'a pas été consenti librement car son époux souhaitait avant tout obtenir la nationalité française. Le préfet s'est fondé, d'autre part, sur une enquête réalisée, au domicile des parents de Mme C..., où le couple a déclaré résider, par les services de police le 18 mai 2018, soit près de 18 mois après le courrier adressé au procureur de la République, et faisant état des déclarations réitérées de Mme B... selon lesquelles M. E... ne réside plus à cette adresse mais à Paris, à une adresse qu'elle ignore et qu'elle souhaite divorcer au motif que M. E... ne s'est marié que dans le but d'obtenir sa régularisation. Les documents produits par M. E... pour contester l'absence de communauté de vie entre époux, à savoir un avis d'imposition et deux déclarations de revenus, un certificat d'inscription au répertoire des entreprises et des établissements (SIRENE) en date du 17 octobre 2017 de son entreprise de livraison de repas à domicile, deux déclarations de chiffre d'affaires pour les mois d'avril et de septembre 2018 de cette entreprise, ainsi qu'un contrat de travail signé le 7 décembre 2015 avec la société Kalis, des attestations émanant de Mme B..., mère de son épouse, d'un collègue de travail ainsi que d'une connaissance du couple, toutes postérieures à la date de l'arrêté attaqué, ainsi qu'un relevé bancaire relatif à un compte commun, postérieur à la date de cet arrêté, ne revêtent pas de caractère suffisamment probants. Par conséquent, compte tenu de la faiblesse des pièces établissant la réalité de la vie commune à la date de l'arrêté attaqué et des déclarations de Mme C... qui, par deux fois, à dix-huit mois d'intervalle, a dénoncé auprès d'autorités différentes le comportement de son époux, en prenant l'arrêté attaqué, le préfet du Val-d'Oise n'a pas méconnu les stipulations de l'article 6 ni du a) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, et n'a pas entaché son appréciation d'une erreur manifeste de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

8. En dernier lieu, l'arrêté attaqué accorde un délai de départ volontaire de trente jours au requérant pour quitter le territoire, contrairement à ce qu'il soutient. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles 7 et 8 de la directive du 16 décembre 2008 manque ainsi en fait.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 9 août 2018 du préfet du Val-d'Oise. Par voie de conséquence, les conclusions à fin d'injonction de M. E... et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

2

N° 19VE01663


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19VE01663
Date de la décision : 21/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BROTONS
Rapporteur ?: Mme Anne-Catherine LE GARS
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : SCP GUILLEMIN et MSIKA

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-01-21;19ve01663 ?
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