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16/01/2020 | FRANCE | N°18VE04215

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 16 janvier 2020, 18VE04215


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner la commune de Chatou à lui verser une somme de 60 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2014, en réparation des préjudices résultant du harcèlement moral dont il a été l'objet et de mettre à la charge de la commune de Chatou la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1608902 du 19 octobre 2018, le

Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner la commune de Chatou à lui verser une somme de 60 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2014, en réparation des préjudices résultant du harcèlement moral dont il a été l'objet et de mettre à la charge de la commune de Chatou la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1608902 du 19 octobre 2018, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 décembre 2018, M. A..., représenté par Me Bousquet, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler le jugement n° 1608902 du Tribunal administratif de Versailles ;

2° de condamner la commune de Chatou à lui verser une somme de 60 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2014, en réparation des préjudices résultant du harcèlement moral qu'il a subi ;

3° de mettre à la charge de la commune de Chatou le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- son recours est recevable ;

- le jugement est irrégulier, dès lors que son dernier mémoire en réplique, accompagné de 30 pièces jointes n'a pas été soumis au contradictoire ;

- il a fait l'objet d'un harcèlement moral, eu égard à la falsification de sa notation en 2009, à sa mutation, aux comportements insultants à son égard, à son état de santé et à sa surcharge de travail ;

- la commune produit des lettres établies pour les besoins de la cause ;

- il justifie de préjudices de carrière, moraux et de troubles dans les conditions d'existence.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

- et les observations de Me D... pour la commune de Chatou.

Considérant ce qui suit :

1. M. B... A... a été recruté par la commune de Chatou en qualité d'agent d'entretien stagiaire pour le secteur mobilier urbain à compter du 1er décembre 2001, poste pour lequel il a été titularisé au 1er décembre 2002. A compter du 1er mai 2007, il a occupé les fonctions de responsable du mobilier urbain au grade d'adjoint technique de 2nde classe, puis a été affecté en qualité d'agent de surveillance de la voie publique à compter du 15 novembre 2011. S'estimant victime de faits constitutifs de harcèlement moral, il a, par une lettre du 29 décembre 2014, sollicité du maire de la commune de Chatou la réparation des préjudices qui en résultent. Cette demande a fait l'objet d'une décision implicite de rejet née du silence de l'administration le 1er mars 2015. M. A... a saisi le Tribunal administratif de Versailles d'un recours tendant à la condamnation de la commune de Chatou à lui verser une somme de 60 000 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 31 décembre 2014, en réparation des préjudices résultant de ce harcèlement moral. Par un jugement n° 1608902 du 19 octobre 2018, contre lequel M. A... forme appel, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R.611-1 du code de justice administrative " Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux. ".

3. Il ressort des pièces du dossier qu'alors que l'audience était fixée au 8 octobre 2018, M. A... a produit le 4 octobre 2018, soit quatre jours avant l'audience et presque deux ans après la date d'introduction de la requête, un mémoire en réplique comportant 30 pièces jointes. Toutefois, ni ce mémoire, de même teneur que sa demande, ni les pièces jointes, ne comportaient d'éléments nouveaux nécessitant sa communication à la commune de Chatou. Cependant, il ressort du jugement attaqué que les premiers juges ont rejeté la demande présentée par M. A... en tenant compte de ce dernier mémoire et de ces pièces jointes. Par suite, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier au motif que le caractère contradictoire de la procédure aurait été méconnu.

Sur les conclusions indemnitaires :

4. Aux termes des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligation des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au litige : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. /(...). ".

5. D'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

6. D'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.

7. M. A... soutient faire l'objet de comportements vexatoires émanant de son supérieur hiérarchique au sein de la police municipale et de son administration qui lui nuirait depuis qu'il aurait dénoncé certains comportements de ses collègues. Toutefois, les notes et courriels rédigés par ses soins, ainsi que la seule attestation peu circonstanciée d'un collègue ne suffisent pas à justifier du bien-fondé de ses allégations, lesquelles sont en outre, imprécises quant à la période de harcèlement et aux auteurs de celui-ci. Par ailleurs, s'il soutient qu'il a été lauréat du concours d'adjoint technique de 1ère classe en 2010, mais s'est vu opposer un refus de promotion au grade d'agent de maîtrise, puis s'est trouvé affecté en qualité d'agent de surveillance de la voie publique à compter du 15 novembre 2011, il ressort des pièces qu'il a versées au dossier que tant le refus d'avancement que sa nouvelle affectation, sont justifiés par les fautes qu'il a commises dans l'exercice de ses fonctions de responsable du mobilier urbain. Il ne démontre pas en outre que son nouveau poste auprès de la police municipale constituerait une rétrogradation lui causant un préjudice de carrière ou un changement de situation nécessitant une saisine de la commission administrative paritaire. Enfin, si M. A... soutient que par jugements n° 1005070 et n°1602436 des 20 juillet 2013 et 25 juin 2018, le Tribunal administratif de Versailles a annulé sa notation pour 2009 et a condamné la commune de Chatou à lui verser une somme de 4 135,04 euros en réparation de ses préjudices nés de l'absence de rémunération de travaux supplémentaires, il ne ressort pas de ces jugements que les erreurs de gestion commises par l'employeur public aient été destinées à lui nuire. Aucune des pièces qu'il produit ne permettent d'établir une surcharge de travail comme il le soutient. Enfin, si M. A... établit être atteint de dépression et être en congé pour maladie depuis novembre 2016, son état de santé ne permet pas non plus de faire présumer la situation de harcèlement moral alléguée. Dans ces conditions, M. A... ne peut pas être regardé comme rapportant des éléments de fait suffisants pour permettre de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral de nature à engager la responsabilité de la commune de Chatou.

8. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions indemnitaires. Par suite sa requête doit être rejetée, sans qu'il soit besoin d'en examiner sa recevabilité.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".

10. La commune de Chatou n'étant pas la partie perdante, les conclusions de M. A... tendant à mettre à sa charge une somme en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme à verser à la commune de Chatou en application de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Chatou tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N°18VE04215


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE04215
Date de la décision : 16/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-13-03 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'indemnité.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Marc FREMONT
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : SELARL ROCHE BOUSQUET

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-01-16;18ve04215 ?
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