La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/01/2020 | FRANCE | N°18VE00318

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 6ème chambre, 16 janvier 2020, 18VE00318


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation des préjudices nés du harcèlement moral qu'elle aurait subi, de mettre à la charge de la commune le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'une somme de 35 euros au titre des frais de timbre.

Par un jugement n°1400454 du 27 novembre 2017, le Tribunal administratif de Ve

rsailles a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... C... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation des préjudices nés du harcèlement moral qu'elle aurait subi, de mettre à la charge de la commune le versement d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'une somme de 35 euros au titre des frais de timbre.

Par un jugement n°1400454 du 27 novembre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 janvier 2018, Mme C..., représentée par Me Baradez, avocat, demande à la Cour :

1° de condamner la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation des préjudices nés du harcèlement moral qu'elle aurait subi ;

2° de mettre à la charge de la commune une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3° de mettre à la charge de la commune le versement d'une somme de 35 euros au titre des frais de timbre.

Elle soutient que :

- elle a fait l'objet d'un harcèlement moral ;

- elle n'a pas été tenue informée de la réorganisation du service et a été destinataire d'ordres contradictoires ;

- elle a fait l'objet d'une mise au placard, ainsi que d'un retrait du pouvoir de signature ;

- ses responsabilité ont été transférées vers un autre agent moins expérimenté ;

- elle a subi des propos humiliants en présence de subordonnés, ainsi que des comportements tendant à l'invectiver, lui couper la parole, et à mettre en doute son honnêteté ;

- elle a fait l'objet d'appropriations de son travail, de manipulations et d'un processus d'isolement ;

- elle a tenté de mettre fin à ses jours et elle souffre de dépression.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de M. Errera, rapporteur public,

-et les observations de Me A... pour la commune de Bretigny-sur-Orge.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... C..., titulaire du grade d'adjoint administratif territorial, a été affectée le 7 novembre 1988 dans les services d'action sociale de la commune de Bretigny-sur-Orge. Après avoir occupé diverses fonctions en lien avec les seniors, elle a été affectée à partir de 2005 sur un poste de responsable du service senior de la commune. Une nouvelle organisation du service troisième âge a été mise en place en 2007 puis en 2008, suite à l'organisation par pôle des services communaux modifiant l'organigramme des services de la commune. Mme C... a tenté de mettre fin à ses jours le 15 novembre 2008. Par la suite, elle a saisi, d'une part, le procureur de la République d'une plainte pour harcèlement le 9 janvier 2009, d'autre part, le maire de la commune de Bretigny-sur-Orge d'une demande de protection fonctionnelle le 15 octobre 2009. Par une décision du 9 décembre 2009, le maire a rejeté sa demande. Le 22 janvier 2014, Mme C... a demandé au Tribunal administratif de Versailles de condamner la commune de Brétigny-sur-Orge à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation des préjudices nés du harcèlement moral qu'elle aurait subi, de mettre à la charge de cette commune une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi qu'une somme de 35 euros au titre des frais de timbre. Par un jugement n°1400454 du 27 novembre 2017, le Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande. Mme C... interjette appel de ce jugement.

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. La commune de Bretigny-sur-Orge soulève une exception d'incompétence de la juridiction administrative en renvoyant à ses écritures de première instance, sans l'étayer de nouveaux arguments. Il y a lieu de rejeter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.

Sur les conclusions indemnitaires et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité des conclusions :

3. Aux termes des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligation des fonctionnaires, dans sa rédaction applicable au litige : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel. / Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ; / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ; / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés. /(...). ". Aux termes des dispositions de l'article 11 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, dans sa rédaction alors applicable : " Les fonctionnaires bénéficient, à l'occasion de leurs fonctions, d'une protection organisée par la collectivité publique dont ils dépendent, conformément aux règles fixées par le code pénal et les lois spéciales. / (...) / La collectivité publique est tenue de protéger les fonctionnaires contre les menaces, violences, voies de fait, injures, diffamations ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion de leurs fonctions, et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté. / (...). ". Ces dispositions établissent à la charge de la collectivité publique et au profit des fonctionnaires, lorsqu'ils ont été victimes d'attaques à l'occasion de leurs fonctions, sans qu'une faute personnelle puisse leur être imputée, une obligation de protection à laquelle il ne peut être dérogé, sous le contrôle du juge, que pour des motifs d'intérêt général. Des agissements répétés de harcèlement moral sont de ceux qui peuvent permettre, à l'agent public qui en est l'objet, d'obtenir la protection fonctionnelle prévue par les dispositions précitées.

4. D'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.

5. D'autre part, pour apprécier si des agissements, dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral, revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral. En revanche, la nature même des agissements en cause exclut, lorsque l'existence d'un harcèlement moral est établie, qu'il puisse être tenu compte du comportement de l'agent qui en a été victime pour atténuer les conséquences dommageables qui en ont résulté pour lui. Le préjudice résultant de ces agissements pour l'agent victime doit alors être intégralement réparé.

6. Mme C... soutient avoir fait l'objet de comportements humiliants, visant à la détruire, assortis d'une perte de responsabilité et d'une affectation dans un bureau isolé, sans moyens matériels. Toutefois, les éléments qu'elle produit, notamment les courriers transmis au procureur de la République, lequel n'a pas donné suite à sa plainte, ainsi que les attestations émanant de trois collègues, qui sont insuffisamment circonstanciées et précises quant aux faits de harcèlement dont elle aurait fait l'objet depuis le mois d'août 2008, ne suffisent pas à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. En outre, il ressort des écritures de l'intéressée, ainsi que des pièces du dossier, et notamment de la pétition du club des anciens du CCAS qu'elle produit, que les relations professionnelles se seraient dégradées en raison du changement d'organisation opéré au cours des années 2007 et 2008 décidé par la collectivité dans l'intérêt du service, sans rapport avec des agissements constitutifs de harcèlement moral. Par ailleurs, si Mme C... a tenté de mettre fin à ses jours et justifie suivre un traitement destiné à lutter contre la dépression, ces éléments ne permettent pas davantage d'établir un fait de harcèlement. Au demeurant, la commission de réforme a, le 29 septembre 2009, émis un avis défavorable à sa demande visant à imputer son état de santé au service. Par suite, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a rejeté ses conclusions indemnitaires. Ces conclusions doivent, par suite, être rejetées, ainsi que par voie de conséquence, les conclusions présentées par l'appelante au titre des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative, comme celles relatives au droit de timbre, en tout état de cause.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par le défendeur :

7. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y pas lieu à cette condamnation ".

8. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme C... une somme à verser à la commune de Brétigny-sur-Orge en application des dispositions de L. 761-1 du code de justice administrative précitées au point 7.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par Mme C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Brétigny-sur-Orge tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

N°18VE00318


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE00318
Date de la décision : 16/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

39-04-02 Marchés et contrats administratifs. Fin des contrats. Résiliation.


Composition du Tribunal
Président : Mme DOUMERGUE
Rapporteur ?: M. Marc FREMONT
Rapporteur public ?: M. ERRERA
Avocat(s) : SELARL BREMARD BARADEZ et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 21/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2020-01-16;18ve00318 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award