La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/12/2019 | FRANCE | N°16VE02707

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 19 décembre 2019, 16VE02707


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- sous le n° 1301234, de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées (EHPAD) " Madeleine Verdier ", à lui verser, à titre principal, la somme de 15 575,56 euros pour la reconstitution partielle de sa carrière, la somme de 15 500 euros correspondant à ses traitements relatifs à la période allant du mois de mai 2012 au mois de janvier 2013, majorée des cotisations patronales à compter du 13 août 2009, 300 euros

au titre des intérêts échus, ou à défaut une indemnité équivalente et la somme de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise :

- sous le n° 1301234, de condamner l'établissement d'hébergement pour personnes âgées (EHPAD) " Madeleine Verdier ", à lui verser, à titre principal, la somme de 15 575,56 euros pour la reconstitution partielle de sa carrière, la somme de 15 500 euros correspondant à ses traitements relatifs à la période allant du mois de mai 2012 au mois de janvier 2013, majorée des cotisations patronales à compter du 13 août 2009, 300 euros au titre des intérêts échus, ou à défaut une indemnité équivalente et la somme de 2 000 euros en réparation des préjudices financiers et moraux subis ;

- sous le n° 1400723, de condamner cet EHPAD à lui verser les sommes de 30 000 euros et 38 500 euros, respectivement, au titre de ses préjudices financier et moral découlant de l'illégalité de la sanction de révocation prononcée à son encontre le 13 août 2009 ainsi que, à titre subsidiaire, " la régularisation du paiement des cotisations sociales ".

Par un jugement n° 1301234 et n° 1400723 du 20 juin 2016, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrée les 17 août 2016, 11 mai 2018 et 12 novembre 2019, M. C..., représenté par Me A..., avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de condamner l'EHPAD " Madeleine Verdier " à lui verser :

- le complément de traitement, évalué à 6 000 euros, correspondant au traitement non versé au cours de la période allant du 20 août au 20 décembre 2012, majoré des sommes dues au titre des cotisations patronales, et 300 euros au titre des intérêts échus ;

- 2000 euros en réparation des préjudices financiers et moraux subis du fait de l'absence de régularisation de ces paiements ;

- 30 000 euros au titre de son préjudice financier ;

- 38 500 euros au titre de son préjudice moral ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat les entiers dépens ainsi que la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C... soutient que :

- les premiers juges ont omis de répondre aux conclusions tendant au paiement des salaires qu'il n'a pas perçus en raison de sa révocation illégale ;

- c'est à tort que les premiers juges ont retenu l'absence de demande préalable adressée à l'EHPAD pour le paiement de la somme de 15 500 euros représentant le demi-traitement dont il a été privé entre les mois de mai 2012 et janvier 2013 ;

- les fautes qui lui sont reprochées reposent sur des faits inexacts ;

- elles ne peuvent pas justifier l'absence de versement de sa rémunération.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Danielian, rapporteur public,

- et les observations de Me A... pour M. C... et de Me E... pour l'EHPAD " Madeleine Verdier ".

Considérant ce qui suit :

1. M. C... fait appel du jugement du 20 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes tendant à la condamnation de l'EHPAD " Madeleine Verdier ", situé à Montrouge (Hauts-de-Seine), à lui rembourser des pertes de salaires et à lui réparer les préjudices imputables à sa révocation prononcée le 13 août 2009, annulée par le jugement devenu définitif du tribunal administratif de Versailles n ° 0909274 du 10 mai 2012.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ".

3. En premier lieu, dans sa demande présentée sous le n° 1301234, M. C... avait sollicité du tribunal administratif de Cergy-Pontoise la condamnation de l'EHPAD Madeleine Verdier à lui verser la somme de 15 500 euros au titre des traitements dont il a été privé de mai 2012 à janvier 2013, majorée des cotisations patronales et de 300 euros pour les intérêts échus, ainsi que la somme de 2 000 euros de préjudices financier et moral. Le tribunal administratif a rejeté ses conclusions comme irrecevables, faute d'avoir été précédées d'une réclamation préalable. Par suite, le moyen tiré de ce que les premiers juges auraient omis de statuer sur ces conclusions indemnitaires doit être écarté.

4. En second lieu, M. C... soutient que par trois courriers datés des 28 mai 2012, 12 juin et 3 septembre 2013, il avait demandé à l'EHPAD " Madeleine Verdier ", de lui verser la somme de 15 500 euros exposée au point précédent.

5. Il résulte toutefois de l'instruction, d'une part, que par le courrier du 28 mai 2012, M. C... a demandé dans quels délais et selon quelles modalités l'EHPAD entendait exécuter le jugement n° 0909274 du 10 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Versailles a, d'une part, annulé la décision du 13 août 2009 le révoquant, et d'autre part, enjoint à l'EHPAD de le réintégrer dans ses fonctions et de procéder à la reconstitution de sa carrière. Cette simple demande d'information ne peut être regardée comme constituant une demande préalable d'indemnisation. D'autre part, par le courrier du 12 juin 2013, M. C... a soutenu que la décision de révocation annulée par le tribunal administratif de Versailles lui avait causé divers préjudices et a demandé à ce titre à l'EHPAD de lui verser les sommes de 20 000 euros au titre des cotisations salariales qu'il aura à verser, de 30 000 euros au titre de l'écart entre les salaires qu'il aurait dû percevoir s'il n'avait pas été révoqué, les indemnités qu'il a perçues de Pôle Emploi, ainsi que 38 500 euros de préjudice moral. Le rejet de cette demande a été contesté par M. C... dans le cadre de l'instance présentée au tribunal administratif de Cergy-Pontoise enregistrée sous le n° 1400723. Ce courrier du 12 juin 2013 ne contient aucune demande tendant à ce que l'EHPAD rembourse au requérant la somme de 15 500 euros correspondant au demi-traitement dont il affirme avoir été privé par la décision du 1er août 2012 devenue définitive, au terme de laquelle le directeur de l'EHPAD l'a réintégré dans ses fonctions à compter du 13 août 2009, l'a suspendu de ses fonctions et a procédé à une retenue égale à la moitié de sa rémunération à compter du dixième jour suivant sa notification. Enfin, le courrier adressé par M. C... le 3 septembre 2013 se présente comme un simple renouvellement de sa demande préalable du 12 juin 2013.

6. Devant le tribunal administratif, l'EHPAD " Madeleine Verdier " a, à titre principal, invoqué l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires de M. C... présentées dans le cadre de l'instance enregistrée sous le n° 1301234, à défaut d'une réclamation préalable ayant lié le contentieux et n'a défendu au fond qu'à titre subsidiaire. M. C... ne soutient ni même n'allège avoir régularisé ses conclusions en déposant une demande préalable en cours d'instance. Il en résulte qu'en accueillant la fin de non-recevoir opposée à titre principal par l'EHPAD à l'encontre de ces conclusions indemnitaires, le tribunal administratif n'a pas entaché son jugement attaqué d'irrégularité.

Sur les conclusions indemnitaires :

7. En premier lieu, il résulte de ce qui a été précédemment exposé que le contentieux n'étant pas lié, les conclusions de M. C... tendant au versement de la somme, ramenée à 6 000 euros à hauteur d'appel, du demi-traitement dont il affirme avoir été privé du 20 août au 20 décembre 2012, majoré des cotisations patronales et de 300 euros au titre des intérêts échus, ainsi qu'au versement de la somme de 2 000 euros au titre du préjudice moral et financier qu'il affirme avoir subi faute de régularisation de ces paiements, ne sont pas recevables.

8. En second lieu, en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre. Sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité.

9. Par un premier jugement du 10 mai 2012 devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles a annulé la décision du 13 août 2009 révoquant M. C... aux motifs tirés de ce que l'intéressé n'avait pas été préalablement informé de la possibilité d'obtenir la communication de son dossier individuel et de ce que l'EHPAD n'établissait pas l'avoir convoqué au moins quinze jours avant la réunion du conseil de discipline. Cette décision de révocation était motivée par l'utilisation à des fins personnelles des moyens matériels et humains de l'établissement, l'utilisation frauduleuse de la délégation de signature, des faits de pression, d'intimidations et de manipulations d'agents, l'inexécution ou l'exécution insuffisante de ses fonctions de directeur des ressources humaines, des immixtions en dehors des fonctions confiées, dans tous les secteurs et les dossiers de l'EHPAD. M. C... conteste les griefs ainsi retenus à son encontre en faisant valoir que les poursuites disciplinaires diligentées dont il a fait l'objet résultent d'une initiative de l'ancien directeur de l'EHPAD, en représailles aux dénonciations faites par l'intéressé d'agissements déplacés de ce directeur, lui-même suspendu au mois de juin 2009, puis révoqué. Il soutient en outre que son dossier disciplinaire contient de faux témoignages, qu'auparavant il avait toujours été bien noté, et que les procédures pénales diligentées contre lui ont été accélérées pour éviter qu'il ne soit réintégré.

10. Il résulte toutefois de l'instruction, ainsi que le relève l'EHPAD, que par un second jugement du 20 juin 2016 devenu définitif, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise, saisi par M. C... d'un recours en annulation de la décision du 1er février 2013 le révoquant de ses fonctions à raison des faits précités, a retenu leur matérialité en écartant tous les arguments invoqués par l'intéressé selon lesquels ces faits reposeraient sur de faux témoignages et des affirmations erronées. En outre, par un jugement définitif rendu le 11 janvier 2013, la chambre correctionnelle près le tribunal de grande instance de Nanterre a reconnu M. C... coupable de faits d'abus de biens sociaux commis entre le 1er août 2007 et le 1er août 2009. L'intéressé n'apporte en appel aucun élément nouveau de nature à remettre en cause l'appréciation ainsi portée sur son comportement. De tels faits, eu égard à leur gravité et compte tenu des fonctions de directeur des ressources humaines de l'intéressé, étaient de nature à justifier une sanction de révocation. En conséquence, les préjudices dont M. C... demande la réparation en raison de son éviction du service ne peuvent être regardés comme présentant un lien de causalité avec les irrégularités externes sur lesquelles est fondée l'annulation de la sanction de révocation prononcée le 13 août 2009.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'EHPAD " Madeleine Verdier ", qui n'est pas, dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. C..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, en application de ces mêmes dispositions de mettre à la charge de M. C... une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par l'EHPAD " Madeleine Verdier " et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : M. C... versera à l'EHPAD " Madeleine Verdier " une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 16VE02707


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 16VE02707
Date de la décision : 19/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-08-01 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Questions d'ordre général.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Nicolas TRONEL
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : POREE

Origine de la décision
Date de l'import : 07/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-12-19;16ve02707 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award