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04/12/2019 | FRANCE | N°18VE00139

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 04 décembre 2019, 18VE00139


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune du Plessis-Robinson a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 9 juin 2015 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a approuvé le schéma départemental d'accueil des gens du voyage.

Par un jugement n° 1507750 du 10 novembre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 janvier 2018, la commune du Plessis-Robinson, représentée par Me Cazin, avoca

t, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune du Plessis-Robinson a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 9 juin 2015 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a approuvé le schéma départemental d'accueil des gens du voyage.

Par un jugement n° 1507750 du 10 novembre 2017, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 janvier 2018, la commune du Plessis-Robinson, représentée par Me Cazin, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La commune du Plessis-Robinson soutient que :

- aux termes de l'article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales et de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000, l'établissement de coopération intercommunale auquel la compétence en matière d'accueil des gens du voyage a été transférée était seul compétent pour émettre un avis au cours de la phase d'élaboration du schéma départemental ;

- l'exigence d'élaboration conjointe du schéma directeur par le préfet et le président du conseil départemental a été méconnue ;

- la possibilité pour le préfet d'approuver seul le schéma départemental au terme du délai de dix-huit mois prévu par l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000 ne trouve pas à s'appliquer pour une révision du schéma mais seulement pour son adoption initiale ;

- dans le cas où ce délai trouverait à s'appliquer son point de départ est fixé à la notification au président du conseil départemental de la décision initiant la procédure de révision et il n'est pas démontré que cette notification aurait été réalisée ;

- en considération de leur échelle, du nombre d'aires de stationnement réalisées, de leur localisation et de l'allocation des ressources, les schémas départementaux d'accueil des gens du voyage entrent dans le cadre de la directive européenne Plans et Programmes et doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce ;

- l'absence de prise en compte des critères énumérés au II de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000 révèle une erreur de droit commise par le préfet ;

- l'unique critère retenu par le préfet relatif au poids démographique des communes est étranger à la situation des gens du voyage et dès lors non pertinent ;

- le schéma contesté ne détermine pas les aires de grand passage et de grand rassemblement et ne recense pas les terrains mis à la disposition des gens du voyage par leurs employeurs.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la directive 2001/CE/ du 27 juin 2001 ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Bouzar, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes qu'aux termes de l'article 1er de la loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 susvisée, dans sa version applicable au litige : " I. - Les communes participent à l'accueil des personnes dites gens du voyage et dont l'habitat traditionnel est constitué de résidences mobiles. II. - Dans chaque département, au vu d'une évaluation préalable des besoins et de l'offre existante, notamment de la fréquence et de la durée des séjours des gens du voyage, des possibilités de scolarisation des enfants, d'accès aux soins et d'exercice des activités économiques, un schéma départemental prévoit les secteurs géographiques d'implantation des aires permanentes d'accueil et les communes où celles-ci doivent être réalisées. / Les communes de plus de 5 000 habitants figurent obligatoirement au schéma départemental. Il précise la destination des aires permanentes d'accueil et leur capacité. Il définit la nature des actions à caractère social destinées aux gens du voyage qui les fréquentent. / Le schéma départemental détermine les emplacements susceptibles d'être occupés temporairement à l'occasion de rassemblements traditionnels ou occasionnels et définit les conditions dans lesquelles l'Etat intervient pour assurer le bon déroulement de ces rassemblements. (...) III- Le schéma départemental est élaboré par le représentant de l'Etat dans le département et le président du conseil départemental. Après avis du conseil municipal des communes concernées et de la commission consultative prévue au IV, il est approuvé conjointement par le représentant de l'Etat dans le département et le président du conseil départemental dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la présente loi. Passé ce délai, il est approuvé par le représentant de l'Etat dans le département. Il fait l'objet d'une publication. Le schéma départemental est révisé selon la même procédure au moins tous les six ans à compter de sa publication. (...) ".

2. Les dispositions de la loi du 5 juillet 2000 prévoient la consultation du conseil municipal des communes concernées lors de l'élaboration ou de la révision du schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage. Aucun texte législatif ou réglementaire ne prévoit la consultation des établissements publics de coopération intercommunale quand bien même la compétence de mise en oeuvre du schéma départemental leur aurait été transférée par les communes concernées. Par suite, la commune du Plessis-Robinson n'est pas fondée à soutenir que la procédure d'élaboration du schéma départemental contesté n'aurait pas été régulière faute de consultation de l'établissement de coopération intercommunale auquel elle a transféré sa compétence pour mettre en oeuvre ce schéma.

3. Il ressort des pièces du dossier que le président du conseil général des Hauts-de-Seine ou son représentant ont coprésidé avec le préfet du département les trois réunions tenues les 15 novembre 2012, 4 décembre 2013 et 16 décembre 2014 de la commission consultative des gens du voyage. Le préfet des Hauts-de-Seine a transmis le 29 décembre 2014 le projet de schéma révisé au président du conseil général qui lui a fait connaitre que le délai de dix-huit mois à compter de la mise en révision du schéma étant écoulé, il était possible au représentant de l'Etat de signer seul l'arrêté approuvant la révision que lui-même ne souhaitait pas signer. La commune ne saurait valablement soutenir que la procédure de révision n'aurait pas été menée conjointement par le représentant de l'Etat et par le président du conseil général.

4. Il résulte des dispositions précitées de la loi du 5 juillet 2000 que le représentant de l'Etat était compétent pour approuver seul le schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage passé le délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi. Les dispositions précitées précisent que la même procédure est applicable à la révision dudit schéma. Ainsi, le préfet des Hauts de Seine était compétent pour signer seul l'arrêté d'approbation du schéma départemental révisé passé le délai de dix-huit mois à compter de sa mise en révision. Par suite, le moyen tiré du défaut d'approbation conjointe du schéma par le représentant de l'Etat et par le président du conseil général doit être écarté.

5. Aux termes de l'article 3 de la directive du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 relative à l'évaluation des incidences de certains plans et programmes sur l'environnement : " 1. Une évaluation environnementale est effectuée, conformément aux articles 4 à 9, pour les plans et programmes visés aux paragraphes 2, 3 et 4 susceptibles d'avoir des incidences notables sur l'environnement. / 2. Sous réserve du paragraphe 3, une évaluation environnementale est effectuée pour tous les plans et programmes : / a) qui sont élaborés pour les secteurs de l'agriculture, de la sylviculture, de la pêche, de l'énergie, de l'industrie, des transports, de la gestion des déchets, de la gestion de l'eau, des télécommunications, du tourisme, de l'aménagement du territoire urbain et rural ou de l'affectation des sols et qui définissent le cadre dans lequel la mise en oeuvre des projets énumérés aux annexes I et II de la directive 85/337/CEE pourra être autorisée à l'avenir ; / ou b) pour lesquels, étant donné les incidences qu'ils sont susceptibles d'avoir sur des sites, une évaluation est requise en vertu des articles 6 et 7 de la directive 92/43/CEE. (...) ".

6. D'une part, la directive du Parlement européen et du Conseil du 27 juin 2001 a été notamment transposée par l'ordonnance du 3 juin 2004, deux décrets du 27 mai 2005 et un décret du 18 avril 2006 et ne peut donc plus être invoquée par la commune du Plessis-Robinson. D'autre part, le schéma départemental d'accueil et d'habitat de gens du voyage n'appartient pas à la catégorie des plans et programmes énumérés par l'article 3-2 précité de la directive du 27 juin 2001. Eu égard à la circonstance qu'un schéma départemental d'accueil et d'habitat de gens du voyage se borne, selon les termes de la loi, à prévoir les secteurs géographiques d'implantation des aires permanentes d'accueil et les communes sur le territoire desquelles celles-ci doivent être réalisées sans définir le cadre dans lequel des projets pourront être autorisés ni les modalités ni les conditions de leur mise en oeuvre, un tel schéma ne saurait être regardé comme un plan ou programme susceptible d'avoir une incidence environnementale au sens de la directive précitée. Par suite, la commune du Plessis-Robinson n'est pas fondée à soutenir que le législateur ou l'autorité investie du pouvoir réglementaire aurait transposé de façon erronée ou incomplète la directive susmentionné en ne prévoyant pas que l'adoption ou la révision d'un tel schéma soit précédée d'une évaluation environnementale.

7. Il résulte du II de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000 précité que le schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage doit être défini en fonction de l'évaluation des besoins et de l'offre existante, de la fréquence et de la durée des séjours, des possibilités de scolarisation des enfants et d'exercice des activités économiques. Il ressort des termes mêmes du schéma départemental contesté que le département des Hauts-de-Seine, d'une superficie réduite, est totalement urbanisé et ne présente aucune disparité en matière de capacité d'accueil dans les établissements scolaires, d'accès aux soins ou aux activités économiques et que pour ces raisons, l'implantation des aires d'accueil a été décidée en fonction de l'importance démographique de chaque commune concernée. La commune du Plessis-Robinson n'est dès lors pas fondée à soutenir que le schéma départemental n'aurait pas pris en compte les critères définis par la loi du 5 juillet 2000.

8. Il ressort du schéma départemental d'accueil et d'habitat des gens du voyage litigieux qu'il n'a pas prévu la création d'aires de grands passage ou de grands rassemblements pourtant prévues par le II de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000. Nonobstant les particularités géographiques du département des Hauts-de-Seine et l'avis rendu par l'union régionale des associations représentant les gens du voyage aux termes duquel ce type d'aires doit prioritairement être aménagé dans les départements de la grande couronne parisienne, la méconnaissance du II de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000 est de nature à entraîner l'annulation de l'arrêté préfectoral litigieux dans cette mesure.

9. La commune du Plessis-Robinson ne démontre pas que des terrains mis à disposition par les employeurs existeraient dans le département des Hauts de Seine. Par suite, elle ne peut valablement soutenir que le schéma serait illégal faute d'avoir recensé dans son annexe 5 de tels terrains.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la commune du Plessis-Robinson est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande en tant qu'elle concerne l'absence de création des aires prévues au II de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000. Le surplus de ses conclusions à fin d'annulation du jugement et de l'arrêté attaqués doivent être rejetés. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté en date du 9 juin 2015 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a approuvé le schéma départemental d'accueil des gens du voyage est annulé en tant qu'il n'a pas prévu les aires visées au II de l'article 1er de la loi du 5 juillet 2000.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la commune du Plessis-Robinson est rejeté.

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N° 18VE00139


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE00139
Date de la décision : 04/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02 Collectivités territoriales. Commune.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: Mme Sophie COLRAT
Rapporteur public ?: M. BOUZAR
Avocat(s) : BUES ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-12-04;18ve00139 ?
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