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05/11/2019 | FRANCE | N°18VE01240

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 05 novembre 2019, 18VE01240


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATIONS a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'ordonner le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2016 pour un montant de 22 524 euros.

Par un jugement n° 1706756 du 13 février 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de la société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATIONS.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 avril 2018

, la société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATIONS, représentée par Me A... B..., du cabinet Fidal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATIONS a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'ordonner le remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2016 pour un montant de 22 524 euros.

Par un jugement n° 1706756 du 13 février 2018, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté la demande de la société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATIONS.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 12 avril 2018, la société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATIONS, représentée par Me A... B..., du cabinet Fidal, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° d'ordonner le remboursement de ce crédit de taxe sur la valeur ajoutée ;

3° et de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son activité qui porte sur des évènements d'entreprise, ne saurait être assimilée à celle d'une agence de voyage, les voyages et hébergements n'étant que l'accessoire de sa prestation complexe ;

- le refus de remboursement méconnaît les dispositions pertinentes du code général des impôts, telles qu'interprétées par les doctrines BOI-TVA-SECT-60-20120912 et BOI-TVA-CHAMP-

20-50-30-20170301 ;

- l'administration ne peut se déjuger de la position qu'elle a prise explicitement en 2009 sur le régime fiscal applicable, et qu'elle a confirmée par les remboursements ultérieurs de crédit de taxe sur la valeur ajoutée ;

- elle bénéficie en France d'un régime moins favorable que dans les autres Etats membres, qui remboursent ses crédits de taxe sur la valeur ajoutée ;

- à titre subsidiaire, la société n'ayant pas d'établissement stable dans l'Union européenne, elle ne saurait sans erreur sur le champ d'application de la loi, être soumise au régime dit de taxe sur la valeur ajoutée sur la marge.

............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le traité instituant la Communauté européenne ;

- la directive 86/560/CEE du Conseil du 17 novembre 1986 relative aux modalités de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée aux assujettis non établis sur le territoire de la Communauté ;

- la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 relative au système commun de taxe sur la valeur ajoutée et la directive 2008/9/CE du Conseil du 12 février 2008 définissant les modalités du remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Beaujard, président-rapporteur ;

- et les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATION, dont le siège est situé en Suisse et qui se prévaut d'une activité d'organisation d'événements pour les entreprises, relève appel du jugement du 13 février 2018, par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant au remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2016, pour un montant de 22 524 euros.

Sur l'application de la loi fiscale :

2. D'une part, aux termes de l'article 242-0 Z quinquies de l'annexe II au code général des impôts : " Est remboursée aux assujettis établis hors de l'Union européenne la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les services qui leur ont été rendus et les biens meubles qu'ils ont acquis ou importés en France au cours de l'année ou du trimestre prévu à l'article 242-0 Z quater dans la mesure où ces biens et services sont utilisés pour la réalisation ou pour les besoins d'opérations visées à l'article 242-0 N. ". Aux termes de l'article 242-0 N de la même annexe : " Un assujetti non établi en France peut obtenir le remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé les biens qui lui ont été livrés ou les services qui lui ont été fournis en France par d'autres assujettis ou ayant grevé l'importation de biens en France, dans la mesure où ces biens et services sont utilisés pour les besoins des opérations suivantes : 1° les opérations dont le lieu d'imposition se situe hors de France mais qui ouvriraient droit à déduction si ce lieu d'imposition était situé en France ; (...) ". L'article 271 de ce code dispose que : " V. Ouvrent droit à déduction dans les mêmes conditions que s'ils étaient soumis à la taxe sur la valeur ajoutée : (...) d) Les opérations non imposables en France réalisées par des assujettis dans la mesure où elles ouvriraient droit à déduction si leur lieu d'imposition se situait en France. Un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités et les limites du remboursement de la taxe déductible au titre de ces opérations; ce décret peut instituer des règles différentes suivant que les assujettis sont domiciliés ou établis dans les Etats membres de la Communauté européenne ou dans d'autres pays ". Aux termes de l'article 266 du même code : " 1. La base d'imposition est constituée : (...) e. Pour les opérations d'entremise effectuées par les agences de voyages et les organisateurs de circuits touristiques, par la différence entre le prix total payé par le client et le prix effectif facturé à l'agence ou à l'organisateur par les entrepreneurs de transports, les hôteliers, les restaurateurs, les entrepreneurs de spectacles et les autres assujettis qui exécutent matériellement les services utilisés par le client ". Enfin, aux termes de l'article 206 de l'annexe II au code même code : " IV. 2. Le coefficient d'admission est nul dans les cas suivants : (...) 9° Pour les biens acquis ou construits ainsi que les services acquis dont la valeur d'achat, de construction ou de livraison à soi-même est prise en compte pour l'application des dispositions (...) du e du 1 ou du sixième alinéa du 2 de l'article 266 du code général des impôts (...) " ;

3. D'autre part, en vertu de dispositions du 2 de l'article 3 de la 13e directive du 17 novembre 1986 relative aux modalités de remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée aux assujettis non établis sur le territoire de la Communauté, le principe du remboursement par l'État membre à tout assujetti qui n'est pas établi sur le territoire de la Communauté de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé des services qui lui sont rendus ou des biens meubles qui lui sont livrés à l'intérieur du pays par d'autres assujettis, ne peut donner lieu à traitement plus favorable que celui qui est appliqué aux assujettis de la Communauté. Et aux termes de l'article 306 de la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006 : " 1. Les Etats membres appliquent un régime particulier de la taxe sur la valeur ajoutée aux opérations des agences de voyages conformément au présent chapitre, dans la mesure où ces agences agissent en leur nom propre à l'égard du voyageur et lorsqu'elles utilisent, pour la réalisation du voyage, des livraisons de biens et des prestations de services d'autres assujettis. Le présent régime particulier n'est pas applicable aux agences de voyages qui agissent uniquement en qualité d'intermédiaire et auxquelles s'applique, pour calculer la base d'imposition, l'article 79, premier alinéa, point c). / 2. 2. Aux fins du présent chapitre, les organisateurs de circuits touristiques sont considérés comme agences de voyages. ". Ces dispositions s'appliquent, conformément à l'article 1er de la directive, pour les prestations de services effectuées à titre onéreux sur le territoire d'un État membre par un assujetti agissant en tant que tel, et quelle que soit la localisation de son siège.

4. Si, en premier lieu, l'objet social stipulé dans les statuts de la société

PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATION a bien trait à l'organisation d'événements pour des entreprises, les factures que la requérante produit attestent exclusivement de séjours en hôtel, de repas dans les restaurants, de loisirs touristiques en France et en Italie, au profit de collaborateurs d'entreprises suisses. Les clients de la société requérante sont dès lors des voyageurs, au sens des dispositions précitées de l'article 306 de la directive du

28 novembre 2006. Faute de toute précision sur l'organisation de séminaires, de congrès, ou de salon, il ne résulte pas de l'instruction que les prestations ainsi facturées soient l'accessoire d'une activité principale d'organisation d'événements d'entreprise. Dans ces conditions, la requérante doit être regardée comme ayant une activité d'agence de tourisme d'entreprise, ainsi que l'ont estimé les premiers juges.

5. S'il n'est pas contesté qu'une entreprise ne disposant pas d'un établissement stable sur le territoire communautaire, ne peut être régie par les dispositions de l'article 266 précité du code général des impôts relatives à la taxe sur la valeur ajoutée à la marge, les dispositions rappelées plus haut du 2 de l'article 3 de la 13ème directive du 17 novembre 1986 ne permettent pas aux Etats membres d'accorder aux assujettis qui sont établis que dans un Etat tiers, de conditions de remboursement plus favorables qu'aux assujettis établis dans l'Union européenne exerçant la même activité. Par suite, l'administration à qui il était loisible de procéder à une substitution de motifs dans la présente espèce, est fondée, pour justifier le rejet de la demande de remboursement présentée par la société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATION, à faire valoir que si la requérante exerçait l'activité décrite plus haut à partir d'un établissement stable sur le territoire de l'Union, elle relèverait du régime de la taxation à la marge et ne pourrait pour cette raison bénéficier en France d'un remboursement d'un crédit de taxe sur la valeur ajoutée grevant les factures de biens et services. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées du code général des impôts, et notamment des articles l'article 242-0 Z quinquies et 242-0 Z quater de l'annexe II au code général des impôts, doit être écarté.

6. En second lieu, si la société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATION soutient que les administrations fiscales des autres Etats membres consentiraient au remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée dont elle se prévaut, cette circonstance, au demeurant non établie par une seule lettre du 5 août 2016 émanant de l'administration allemande et relative à un crédit de taxe sur la valeur ajoutée pour l'année 2015, est sans influence sur le refus de remboursement qui lui a été opposé.

Sur l'interprétation de la loi fiscale :

7. Au terme de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration./(...) / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ". Et aux termes de l'article L.80 B du même livre : " La garantie prévue au premier alinéa de l'article L.80 A est applicable : / 1° Lorsque l'administration a formellement pris position sur l'appréciation d'une situation de fait au regard d'un texte fiscal ; elle se prononce dans un délai de trois mois lorsqu'elle est saisie d'une demande écrite, précise et complète par un redevable de bonne foi " ;

8. Considérant, d'une part, que la société requérante ne saurait se prévaloir, sur le fondement du dernier alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des dispositions du paragraphe 50 du BOI-TVA-SECT-60-20120912, et du paragraphe 390 du

BOI-TVA-CHAMP-20-50-30-20170301, ce dernier étant en tout état de cause postérieur à la décision refusant le remboursement du crédit de taxe en litige, dès lors que ces doctrines ne comportent aucune interprétation différente de la loi fiscale.

9. D'autre part, si la société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATION allègue que l'administration aurait pris explicitement position en faveur du remboursement de crédit de taxe sur la valeur ajoutée résultant de son activité d'organisateur d'événements pour entreprises, suite à une demande de sa part en 2009, elle ne l'établit pas. Si elle soutient que l'administration lui a, depuis lors, toujours remboursé de tels crédits, elle n'en justifie que pour celui afférent à l'année 2013. En tout état de cause, ce remboursement ne saurait davantage être regardé comme une prise de position formelle de l'administration sur sa situation fiscale, au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société PRIVILEGE EVENTS ET COMMUNICATION n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à ce que soit ordonné le remboursement du crédit de taxe sur la valeur ajoutée relatif à l'année 2016. Par voie de conséquence, doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société est rejetée.

2

N°18VE01240


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01240
Date de la décision : 05/11/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: M. Jean-Eric SOYEZ
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : CABINET KPMG AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 12/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-11-05;18ve01240 ?
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