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15/10/2019 | FRANCE | N°17VE02361

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 15 octobre 2019, 17VE02361


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) CENTRE TAXIS SERVICES a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 août 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1504045 du 23 mai 2017, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en répliq

ue, enregistrés les 21 juillet 2017 et 17 janvier 2018, la société par actions simplifiée (SAS) CENTRE ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) CENTRE TAXIS SERVICES a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 août 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1504045 du 23 mai 2017, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 juillet 2017 et 17 janvier 2018, la société par actions simplifiée (SAS) CENTRE TAXIS SERVICES, représentée par

Me Andres, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de prononcer la décharge, en droits, pénalités et intérêts de retard, sollicitée ;

3° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4° de condamner l'Etat aux entiers dépens.

Elle soutient que l'administration fiscale a, à tort, remis en cause l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue au I de l'article 262 ter du code général des impôts pour les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de l'Union européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie, alors qu'elle justifie de la réalité de l'expédition hors de France des véhicules, que l'absence de validité des numéros d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée ne justifie pas une telle remise en cause et qu'il ne saurait être valablement soutenu qu'elle ne pouvait ignorer sa participation à un " circuit frauduleux ".

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de M. Huon, rapporteur public

Considérant ce qui suit :

1. La SAS CENTRE TAXIS SERVICES exerce une activité de transport de voyageurs par taxi, de location de véhicules de tourismes neufs pour le compte de clients artisans-taxis et de revente de ces véhicules lorsque ceux-ci sont usagés. Elle a, à ce titre, déduit la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé l'achat de ses véhicules et placé la revente de ces mêmes véhicules usagés à différents acheteurs situés dans différents pays de l'Union européenne sous le régime d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée des livraisons intracommunautaires prévu par les dispositions du 1° du I. de l'article 262 ter du même code. A l'issue d'une vérification de comptabilité portant en matière de taxe sur la valeur ajoutée sur la période du 1er janvier 2009 au 31 août 2012, le service a notamment remis en cause le bénéfice du régime susmentionné d'exonération de taxe sur la valeur ajoutée pour la vente de plus de cent-cinquante véhicules usagés à une dizaine de clients basés dans l'Union européenne au cours des années 2009, 2010, 2011 et 2012. Les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en résultant pour chacune des périodes concernées ont été assortis des intérêts de retard et de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts. La SAS CENTRE TAXIS SERVICES fait appel du jugement du 23 mai 2017 par lequel le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et majorations.

2. Aux termes de l'article 256 du code général des impôts : " I. Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens (...) effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel. / II. 1° Est considéré comme livraison d'un bien, le transfert du pouvoir de disposer d'un bien meuble corporel comme un propriétaire (...). ". Aux termes de l'article 256 bis du même code : " I. 1° Sont également soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les acquisitions intracommunautaires de biens meubles corporels effectuées à titre onéreux par un assujetti agissant en tant que tel ou par une personne morale non assujettie lorsque le vendeur est un assujetti agissant en tant que tel et qui ne bénéficie pas dans son Etat du régime particulier de franchise des petites entreprises. / (...) / 3° Est considérée comme acquisition intracommunautaire l'obtention du pouvoir de disposer comme un propriétaire d'un bien meuble corporel expédié ou transporté en France par le vendeur, par l'acquéreur ou pour leur compte, à destination de l'acquéreur à partir d'un autre Etat membre de la Communauté européenne. ". Selon l'article 258 de ce code : " I. - Le lieu de livraison de biens meubles corporels est réputé se situer en France lorsque le bien se trouve en France : / (...) / c) Lors de la mise à disposition de l'acquéreur, en l'absence d'expédition ou de transport ; / (...) ". Aux termes de l'article 262 ter du même code : " I. Sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée : / 1° les livraisons de biens expédiés ou transportés sur le territoire d'un autre Etat membre de la Communauté européenne à destination d'un autre assujetti ou d'une personne morale non assujettie. L'exonération ne s'applique pas lorsqu'il est démontré que le fournisseur savait ou ne pouvait ignorer que le destinataire présumé de l'expédition ou du transport n'avait pas d'activité réelle. (...) ". Il résulte de ces dernières dispositions que l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée des livraisons intracommunautaires de biens est notamment subordonnée à la condition, d'une part, que l'acquéreur desdits biens soit assujetti à cette taxe ou ait la qualité de personne morale non assujettie et ne bénéficiant pas, dans l'Etat membre dans lequel elle est établie, d'un régime dérogatoire l'autorisant à ne pas soumettre à la taxe ses acquisitions intracommunautaires, et, d'autre part, que le bien ait été expédié ou transporté hors de France par le vendeur, par l'acquéreur ou par un tiers pour leur compte, à destination d'un autre Etat membre.

3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ de l'assujettissement à l'impôt ou, le cas échéant, s'il remplit les conditions légales d'une exonération. S'agissant de la réalité de la livraison d'une marchandise sur le territoire d'un autre Etat membre de l'Union européenne, pour l'application des dispositions de l'article 262 ter du code général des impôts, seul le redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est en mesure de produire les documents afférents au transport de la marchandise, lorsqu'il l'a lui-même assuré, ou tout document de nature à justifier la livraison effective de la marchandise, lorsque le transport a été assuré par l'acquéreur. La SAS CENTRE TAXIS SERVICES ne saurait d'ailleurs utilement se prévaloir, sur ce point, des éventuelles contradictions de l'administration lors du contrôle, telles que ressortant, selon elle, de la lettre du 9 mai 2014 du chef de brigade, dès lors que, sous réserve des garanties prévues pour le contribuable par les articles L. 80 A et L. 80 B du livre des procédures fiscales, la position ou le comportement de l'administration avant la procédure contentieuse, lors de l'instruction de la réclamation ou en cours d'instance devant le juge de l'impôt, quelles que soient leurs évolutions ou contradictions éventuelles, ne peuvent faire obstacle à l'application par le juge de l'impôt de la loi fiscale, dans le cadre des moyens soulevés par chacune des parties et de ceux qu'il est tenu de relever d'office.

4. S'il est constant que la SAS CENTRE TAXIS SERVICES n'a pas déposé les déclarations d'échanges de biens relatives aux années 2009, 2010, 2011 et 2012, prévues par l'article 289 C du code général des impôts et les articles 96 J à M de l'annexe III à ce code, cette société soutient néanmoins pouvoir justifier de l'expédition de chacun des véhicules cédés à destination d'acquéreurs établis dans d'autres Etats de l'Union européenne et fait état, à cette fin, de dossiers propres à chaque cession. Toutefois, ces dossiers consistent seulement en des copies de factures et de certificats de cession des véhicules qui ne justifient pas de l'expédition effective des biens auxquels ils se rapportent. Certaines factures produites ne comportent d'ailleurs pas le numéro intracommunautaire d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée de l'acquéreur, ni l'ensemble d'entre-elles de mention de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée au titre des livraisons intracommunautaires, alors même que ces documents étaient censés permettre l'accomplissement par l'acheteur des formalités administratives, fiscales et douanières du pays de destination. De même, de nombreux certificats de cession produits ne comportent pas le tampon de l'acquéreur ni de signature certaine. En outre, la plupart des véhicules d'occasion prétendument expédiés hors de France au cours de la période du 1er janvier 2009 au

31 août 2012, ont été réglés soit intégralement en espèces, privant, par là même, l'administration de la possibilité de déterminer l'identité et la nationalité de l'acquéreur, soit par chèques bancaires dont les mentions révèlent qu'ils n'ont pas été émis par des acheteurs étrangers mais des personnes établies en France, soit par virements bancaires provenant de tiers dont certains sont également établis en France. Ainsi, la SAS CENTRE TAXIS SERVICES ne produit aucun document de nature à justifier l'expédition effective des véhicules hors de France, alors qu'au surplus les demandes d'assistance administratives internationales concernant plusieurs entreprises clientes de la société requérante, effectuées par le service fiscal français auprès des autorités fiscales italiennes, roumaines, lituaniennes et tchèques, ont fait ressortir que la SAS CENTRE TAXIS SERVICES n'avait eu aucune relation commerciale avec certaines

d'entre-elles et que, pour les autres véhicules concernés, il n'a pas été possible aux services fiscaux consultés de vérifier la livraison de ces marchandises du fait de la défaillance, de l'absence d'activité ou encore de l'inexistence des entreprises concernées.

5. Les conditions de fond pour bénéficier de l'exonération qu'elle réclame n'étant, de la sorte, pas réunies, et alors même que les acquéreurs mentionnés sur les factures de vente produits auraient, à l'exception des sociétés Midnight Madness SRL Cantiniera SRO disposé d'un numéro d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée à la date de réalisation des ventes litigieuses, c'est à bon droit que l'administration a pu, pour ce seul motif et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la connaissance par l'intéressée de sa participation à une fraude fiscale, lui refuser le bénéfice de l'exonération de taxe sur la valeur ajoutée prévue par les dispositions précitées du 1° du I de l'article 262 ter du code général des impôts au titre des ventes de ces véhicules.

6. La SAS CENTRE TAXIS SERVICES ne développe par ailleurs, aucun moyen propre aux pénalités de 40 % pour manquement délibéré que lui a appliquées l'administration, ni aucun moyen relatif aux intérêts de retard.

7. Il résulte de ce qui précède que la SAS CENTRE TAXIS SERVICES n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et tendant à la condamnation de l'Etat aux entiers dépens ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS CENTRE TAXIS SERVICES est rejetée.

4

N° 17VE02361


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02361
Date de la décision : 15/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-06-02-02 Contributions et taxes. Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées. Taxe sur la valeur ajoutée. Exemptions et exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: M. HUON
Avocat(s) : CABINET ARSENE TAXAND

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-10-15;17ve02361 ?
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