Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société INGENIERIE POUR UN ENVIRONNEMENT TECHNIQUE INNOVANT (IETI) a demandé au Tribunal administratif de Montreuil :
- sous le n°1412053, d'une part, d'annuler le titre de recette du 21 octobre 2014 par lequel la commune de Saint-Ouen lui a demandé le remboursement de la somme de 50 791,93 euros à la suite de l'annulation du marché conclu le 10 janvier 2013 par le jugement n°1303517 du Tribunal administratif de Montreuil du 18 février 2014 et, par voie de conséquence, la lettre de relance et d'ordonner la décharge de la somme de 50 791,93 euros et, d'autre part, de condamner la commune de Saint-Ouen au paiement de la somme de 83 653,40 euros TTC en réparation du préjudice subi du fait de la nullité de ce marché ;
- sous le n°1505903, de condamner la commune de Saint-Ouen au paiement de la somme de 83 653,40 euros TTC en réparation du préjudice subi du fait de l'illégalité du marché conclu le 10 janvier 2013 et annulé par le jugement n°1303517 du Tribunal administratif de Montreuil.
Par un jugement n°1412053-1505903 du 26 avril 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé le titre exécutoire du 21 octobre 2014, déchargé la société IETI du paiement de la somme de 50 791,93 euros et rejeté le surplus des conclusions de ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement le 24 juin 2016 et le 20 septembre 2017, la société IETI, représentée par Me C..., avocat, demande à la Cour :
1° d'annuler ce jugement en tant qu'il rejette ses conclusions indemnitaires ;
2° avant dire droit, de désigner un expert avec pour mission de déterminer le préjudice qu'elle a subi dans le cadre de l'exécution du marché, en ce compris l'ensemble des dépenses exposées, des coûts supportés et des gains manqués du fait de l'arrêt des prestations ainsi que la perte de tout bénéfice ;
3° de condamner la commune de Saint-Ouen à lui verser la somme de 83 653,40 euros TTC ;
4° de mettre à la charge de la commune de Saint-Ouen la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé en méconnaissance de l'article L. 9 du code de justice administrative ; en effet, si le juge peut rejeter implicitement des conclusions à fin d'instruction, tel ne peut être le cas lorsque ce rejet implicite entache le jugement de contradiction ; en l'espèce, dès lors que le tribunal administratif a estimé qu'elle ne justifiait pas de la réalité de son préjudice, il lui appartenait de motiver le rejet de la demande d'expertise ; en outre, les éléments de preuve qu'elle a versés au dossier justifiaient que le tribunal diligente une expertise sur le fondement de l'article R. 621-1 du code de justice administrative aux fins de déterminer la certitude et la consistance de son préjudice ; en rejetant ses conclusions sans désigner un expert, le tribunal a entaché sa décision de contradiction de motifs et d'erreur de droit ;
- le tribunal administratif a commis une erreur de droit en jugeant que les études qu'elle a réalisées n'étaient pas utiles à la commune de Saint-Ouen dès lors qu'il n'était pas établi que l'abandon du projet résultait du contenu de ces études ; en effet, les études réalisées ont bien contribué à la décision de la commune qui a renoncé au projet tel qu'il ressortait de ces études réceptionnées sans réserves conformément à son programme ; la délibération du conseil municipal du 7 avril 2015 a été prise plus d'un an après l'annulation du marché, lequel a été poursuivi entre-temps, ce qui témoigne de ce que la commune ne souhaitait plus réaliser le projet tel qu'il résultait des études réalisées par l'exposante ;
- la charge de la preuve du caractère utile pour la commune des dépenses qu'elle a exposées ne lui incombait pas ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que les paiements de la commune de Saint-Ouen étaient de nature à couvrir l'ensemble des dépenses utiles exposées dès lors que les acomptes ne peuvent les couvrir intégralement ; les frais exposés s'élèvent à 73 434,40 euros TTC et il convient d'ajouter à cette somme des honoraires d'avocats pour un montant de 3 600 euros, dont elle établit le lien direct avec l'annulation du marché ;
- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé que la commune n'était pas intégralement responsable du préjudice subi ; en effet, ainsi que l'a jugé la Cour dans son arrêt du 22 octobre 2015, le respect de l'enveloppe financière prévisionnelle n'était pas un critère de régularité de l'offre mais l'un des critères d'évaluation des offres ; elle n'a donc commis aucune faute en déposant une offre d'un montant supérieur à l'enveloppe ; la Cour n'est pas liée, dans la présente instance, par le jugement devenu définitif du Tribunal administratif de Montreuil du 18 février 2014 dès lors qu'il n'y a pas identité de parties, de cause et d'objet ; de plus, la commune est la seule responsable de la nullité du marché dès lors qu'elle s'est partiellement désistée de ses conclusions d'appel dans le seul but de faire confirmer la nullité du marché jugée par le Tribunal administratif de Montreuil ;
- c'est à tort que le tribunal, qui a pourtant estimé que la commune avait commis une faute en poursuivant l'exécution du marché après son annulation, a écarté le préjudice subi pour les années 2014 et 2015 au titre des prestations postérieures à l'annulation du marché et n'ayant pas donné lieu à factures ; en rejetant les chefs de préjudice aux motifs qu'ils étaient insuffisamment justifiés ou que leur lien avec la faute de la commune ne serait pas démontré, le tribunal a commis des erreurs d'appréciation et de qualification des faits ;
- s'agissant des gains futurs, c'est à tort que les premiers juges ont écarté le taux de marge de 42%, alors que sur ce type de marché, la rentabilité est obtenue en phase d'exécution du marché et non en phase de conception ; le taux de marge est celui de la phase d'exécution ; compte tenu du prix restant à payer, d'un montant de 15 708,60 euros, et du coût qu'elle aurait supporté, évalué à 9 089,60 euros, la somme à retenir au titre des gains perdus est de 6 619 euros ; le montant total de l'indemnisation est donc de 83 653,40 euros TTC ;
- les conclusions incidentes présentées par la commune de Saint-Ouen sont irrecevables puisque le dispositif du jugement contesté lui est favorable ; elles sont également irrecevables en ce qu'elles soulèvent un litige distinct, l'appel principal portant sur les conclusions indemnitaires et les conclusions incidentes portant sur le partage de responsabilité.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des marchés publics ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- les conclusions de M. Ablard, rapporteur public,
- les observations de Me D..., substituant Me C..., pour la société IETI, et les observations de Me B..., pour la commune de Saint-Ouen.
Considérant ce qui suit :
1. Par un marché signé le 10 janvier 2013, la commune de Saint-Ouen a confié la maîtrise d'oeuvre de l'opération de regroupement de ses services dans un bâtiment situé aux 11-15 et 19 de la rue des Rosiers à un groupement constitué des sociétés Bigeault, Taïeb et associés, mandataire, EPDC, MEBI, INGENIERIE POUR UN ENVIRONNEMENT TECHNIQUE INNOVANT (IETI), Claude Mathieu associés et Orfea. Saisi par la société Architecture Workshop 2, qui estimait avoir été irrégulièrement évincée de l'attribution de ce marché, le Tribunal administratif de Montreuil a, par un jugement du 18 février 2014, annulé le marché et condamné la commune de Saint-Ouen à verser à la société Architecture Workshop 2 la somme de 82 511,85 euros HT en réparation des préjudices résultant de son éviction. La commune a relevé appel de ce jugement et, en cours d'instance, a émis des titres exécutoires, en date du 21 octobre 2014, à l'encontre des membres du groupement de maîtrise d'oeuvre aux fins de recouvrer les sommes versées en exécution du marché annulé, puis s'est désistée de ses conclusions à fin d'annulation de l'article 1er du jugement du 18 février 2014 annulant le marché. Par un arrêt du 22 octobre 2015, la Cour a, notamment, donné acte de ce désistement, annulé l'article 2 du jugement condamnant la commune de Saint-Ouen à indemniser la société Architecture Workshop 2 et rejeté les conclusions indemnitaires de cette société au motif qu'elle ne démontrait pas avoir été privée d'une chance sérieuse d'emporter le marché. La société IETI a demandé au Tribunal administratif de Montreuil d'annuler le titre exécutoire n°2437 du 21 octobre 2014 par lequel la commune de Saint-Ouen lui a demandé de rembourser la somme de 50 791,93 euros versée en application du marché et de condamner la commune à lui verser la somme 83 653,40 euros TTC en réparation du préjudice subi du fait de la nullité de ce marché. Elle relève appel du jugement du 26 avril 2016 en tant que le tribunal administratif, après avoir annulé le titre exécutoire du 21 octobre 2014 et l'avoir déchargée du paiement de la somme correspondante, a rejeté ses conclusions à fin d'indemnisation des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de l'annulation du marché du 10 janvier 2013.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort de l'examen du jugement attaqué que le tribunal administratif n'a pas rejeté les conclusions indemnitaires de la société requérante au motif qu'elle n'apportait pas d'éléments lui permettant d'évaluer le préjudice résultant pour elle de l'annulation du marché du 10 janvier 2013 mais a estimé qu'il disposait d'éléments suffisants pour évaluer ce préjudice. Par suite, la société IETI n'est pas fondée à soutenir que le tribunal aurait méconnu son office en refusant de faire droit à ses conclusions tendant à ce qu'une expertise soit diligentée afin de déterminer la totalité des dépenses exposées par elle pour l'exécution du marché et l'ensemble des préjudices subis du fait de l'arrêt des prestations. Par ailleurs, dès lors qu'il ressort des motifs du jugement contesté que le tribunal, qui a rappelé que la société IETI supportait la charge de la preuve et a indiqué qu'il retenait au titre des dépenses exposées celles qui avaient été facturées et payées par la collectivité, s'est estimé suffisamment informé pour évaluer le préjudice de la requérante, il doit être regardé comme ayant implicitement écarté la demande d'expertise comme étant sans intérêt pour la solution du litige. Dans ces conditions, la circonstance qu'il n'a pas expressément rejeté cette demande n'est pas de nature à entacher son jugement d'irrégularité.
Sur l'enrichissement sans cause :
3. le cocontractant de l'administration dont le contrat est entaché de nullité peut formuler une demande d'indemnité fondée sur l'enrichissement sans cause qui serait résulté pour l'administration des études, travaux et autres prestations qu'il a exécutés. Il est fondé en ce cas à réclamer le remboursement de celles de ses dépenses qui ont été utiles à l'administration. Si la consistance des prestations fournies s'évalue au moment où elles ont été exécutées, leur utilité pour l'administration doit être appréciée par le juge administratif à la date à laquelle il statue en tenant compte éventuellement de l'évolution des travaux ou du projet depuis leur exécution. Par suite, l'abandon du projet faisant directement l'objet des études fournies est de nature à priver les dépenses engagées par le cocontractant de toute utilité pour l'administration, à l'exception du cas où cet abandon est justifié par des difficultés révélées par ces études. La circonstance que cet abandon serait motivé par des considérations étrangères à l'intérêt général, si elle est susceptible le cas échéant d'engager la responsabilité de la collectivité sur le terrain de la faute, est sans incidence sur l'absence de droit à indemnité du cocontractant au titre de l'enrichissement sans cause. De même, est sans incidence le fait que ces dépenses aient été engagées en vue d'assurer une complète exécution du contrat déclaré nul.
4. Il résulte de l'instruction que la commune de Saint-Ouen, par une délibération de son conseil municipal du 7 avril 2015, a décidé d'arrêter définitivement le projet de regroupement de ses services au sein d'un lieu unique aux 11-15 et 19 de la rue des Rosiers. Cette délibération vise le jugement du 18 février 2014 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a annulé le marché de maîtrise d'oeuvre du 10 janvier 2013. Si elle a été adoptée plus d'un an après ce jugement, et si d'autres motifs selon la société requérante ont pu également conduire la commune à renoncer à ce projet, il ne résulte pas de l'instruction que l'abandon du projet de relocalisation des services municipaux ait eu pour origine des difficultés révélées par les résultats des études produites par le groupement de maîtrise d'oeuvre, alors même que ces études ont été réceptionnées et payées par la commune. Par suite, l'abandon du projet a privé les dépenses engagées par la société requérante de toute utilité pour l'administration. Dans ces conditions, la société IETI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif a rejeté ses conclusions indemnitaires fondées sur l'enrichissement sans cause de la collectivité.
Sur la responsabilité pour faute :
5. Dans le cas où la nullité du contrat résulte d'une faute de l'administration, le cocontractant peut, sous réserve du partage de responsabilités découlant le cas échéant de ses propres fautes, prétendre à la réparation du dommage imputable à la faute de l'administration. A ce titre, il peut demander le paiement des sommes correspondant aux dépenses exposées par lui pour l'exécution du contrat et aux gains dont il a été effectivement privé par sa nullité, notamment le bénéfice auquel il pouvait prétendre. Saisi d'une demande d'indemnité sur ce fondement, il appartient au juge d'apprécier si le préjudice allégué présente un caractère certain et s'il existe un lien de causalité direct entre la faute de l'administration et le préjudice.
En ce qui concerne les responsabilités :
6. Par le jugement du 18 février 2014, le Tribunal administratif de Montreuil a annulé le marché conclu entre la commune de Saint-Ouen et le groupement de maîtrise d'oeuvre aux motifs, d'une part, que le jury du concours aurait dû exclure du classement l'offre de ce groupement dès lors qu'elle dépassait de près de 2,5 millions d'euros HT l'enveloppe prévisionnelle prévue par le règlement du concours et, d'autre part, que le jury avait classé les offres sur le seul critère du parti architectural sans noter l'ensemble des critères, ni procéder à leur pondération.
7. En premier lieu, en admettant que la commune de Saint-Ouen ait entendu soutenir que ces manquements aux règles de mise en concurrence ont eu une incidence déterminante sur l'attribution du marché au titulaire, elle n'apporte aucune précision à l'appui de cette affirmation alors qu'il résulte de l'instruction que trois candidats ont été invités à présenter une offre et que l'offre de la société Architecture workshop 2, compte tenu de ce qu'elle était sous-évaluée, doit être regardée comme dépassant également l'enveloppe prévisionnelle prévue par le règlement du concours. Dans ces conditions, elle n'est pas fondée à soutenir que le préjudice de la société requérante serait sans lien direct avec la faute qu'elle a commise en attribuant le marché en méconnaissance des règles de passation. En outre, en procédant, à l'issue de la procédure de passation en cause et de la conclusion du contrat, à l'exécution, sous sa direction, des prestations prévues par ce contrat et en poursuivant en partie cette exécution après l'annulation du contrat, la commune de Saint-Ouen a commis une faute de nature à engager sa responsabilité, et qui présente un lien direct avec le préjudice de la société requérante constitué, d'une part, des dépenses exposées pour la réalisation des prestations prévues au contrat, et, d'autre part, des gains dont elle a été privée.
8. En deuxième lieu, ainsi qu'il vient d'être dit, le Tribunal administratif de Montreuil, par l'article 1er de son jugement du 18 février 2014, devenu définitif, a prononcé l'annulation du marché signé le 10 janvier 2013. L'autorité absolue de chose jugée s'attache non seulement à cet article du dispositif de ce jugement mais également à ceux de ses motifs qui en constituent le support nécessaire. Il suit de là que le motif d'annulation tiré de ce que l'offre du groupement attributaire du marché n'était pas conforme au règlement du concours dès lors qu'elle dépassait l'enveloppe prévisionnelle est revêtu de l'autorité de la chose jugée de sorte que le moyen tiré par la requérante de ce que le respect de cette enveloppe n'était pas un critère de régularité des offres mais l'un des critères de leur évaluation ne peut qu'être écarté. Par suite, la société IETI ne peut utilement se prévaloir de la circonstance que la Cour, dans son arrêt du 22 octobre 2015 statuant sur les droits indemnitaires de la société AW2, candidat évincé, a jugé que cette société, dont l'offre dépassait l'enveloppe prévisionnelle d'un montant limité de 100 000 euros, n'était pas dépourvue de toute chance de se voir attribuer le marché dès lors qu'il résultait du dossier de consultation du marché que le pouvoir adjudicateur n'avait entendu prescrire le respect des enveloppes financières prévisionnelles des travaux que comme l'un des critères de jugement des offres.
9. Enfin, il résulte de l'instruction que le groupement attributaire du marché a présenté une offre d'un montant de 13 200 000 euros HT pour la tranche ferme et d'un montant de 1 500 000 euros HT pour la tranche conditionnelle, alors que l'avis d'appel public à concurrence du marché litigieux, s'il n'était pas dénué de toute ambiguïté, indiquait cependant que l'estimation prévisionnelle des travaux pour la tranche ferme était de 10 700 000 euros HT et que l'article 4 du règlement du concours indiquait que " les enveloppes prévisionnelles sont à considérer comme des enveloppes maximales ". Dans ces conditions, la société IETI n'est pas fondée à soutenir qu'elle n'a commis aucune faute en présentant une offre supérieure de 2 500 000 euros à la limite supérieure prévue par le règlement du concours. Toutefois, la commune de Saint-Ouen qui, d'une part, n'a pas exclu cette offre et en a poursuivi l'examen alors qu'elle ne pouvait ignorer, compte tenu de l'ampleur du dépassement, qu'elle n'était pas conforme au règlement du concours qu'elle avait adopté, d'autre part, a classé les offres sur le seul critère du parti architectural, sans noter l'ensemble des critères, ni procéder à leur pondération, et, enfin, a poursuivi cette exécution après l'annulation du contrat, porte une responsabilité prépondérante dans la réalisation des manquements qui ont conduit à l'annulation du contrat litigieux et aux préjudices dont la requérante demande réparation. Dans les circonstances de l'espèce, il sera fait une juste appréciation des responsabilités de la commune de Saint-Ouen et de la société requérante en les fixant respectivement à 80% et 20%.
10. Il résulte de ce qui précède, d'une part, que la société IETI n'est pas fondée à soutenir que la faute de la commune constitue la seule cause de son préjudice et, d'autre part, que la commune de Saint-Ouen n'est pas fondée à soutenir que, compte tenu de la faute commise par la société, sa part de responsabilité ne saurait dépasser 20%.
En ce qui concerne le préjudice :
11. En premier lieu, il est constant que le groupement de maîtres d'oeuvre a exécuté l'avant-projet sommaire (APS), validé par la commune de Saint-Ouen par l'ordre de service n°1 du 15 mars 2013, l'avant-projet définitif (APD) validé par l'ordre de service n°2 du 1er juillet 2013, et l'étude de projet (PRO) validé par l'ordre de service n°3 du 18 novembre 2013. La société IETI soutient que, compte tenu de la spécificité des marchés de maîtrise d'oeuvre selon laquelle la majeure partie des coûts serait engagée pendant la phase de réalisation des études, elle aurait exposé la somme de 73 434,40 euros TTC pour l'exécution du marché litigieux. Toutefois, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas du document signé par l'expert-comptable de la société requérante, qui atteste du montant global des frais fixes de la société IETI valorisé selon l'arrêté des comptes de l'année 2013, d'une part, que le montant de 73 434,40 euros soit entièrement imputable à l'exécution du marché en cause, et d'autre part, que les prestations facturées et réglées par la commune de Saint-Ouen à hauteur de 50 791,93 euros aient été effectuées à perte par la société requérante, la circonstance que le bénéfice devait être réalisé aux étapes ultérieures de l'exécution du marché n'étant justifiée par aucun élément. Dans ces conditions, la société IETI n'est pas fondée à soutenir que la somme de 73 434,40 euros doit être retenue au ...,93 euros, ne seraient pas représentatives tant des sommes engagées que du gain réalisé au titre des phases déjà exécutées.
12. En deuxième lieu, les frais de justice, s'ils ont été exposés en conséquence directe d'une faute de l'administration, sont susceptibles d'être pris en compte dans le préjudice résultant de l'illégalité fautive imputable à l'administration. Toutefois, lorsque l'intéressé a fait valoir devant le juge une demande fondée sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative, le préjudice est intégralement réparé par la décision que prend le juge sur ce fondement. Il n'en va autrement que dans le cas où le demandeur ne pouvait légalement bénéficier de ces dispositions. En l'espèce, d'une part, il ne ressort pas des factures produites par la société requérante qu'elle ait exposé des frais d'avocats distincts des frais de justice et utiles à la résolution du litige, et d'autre part, il résulte de l'instruction que, la société IETI ayant pu bénéficier de ces dispositions durant les diverses instances engagées, les frais exposés pour leur défense ont fait l'objet d'une appréciation d'ensemble dans ce cadre qui exclut toute demande indemnitaire de ce chef sur un autre fondement juridique.
13. Enfin, la société IETI demande à nouveau en appel la somme de 6 619 euros TTC au titre des gains manqués en raison de l'annulation du marché et soutient que cette somme, qui correspond à un taux de marge de 42% sur le montant des prestations restant à réaliser, est justifiée par le fait que le bénéfice aurait dû essentiellement être réalisé dans les phases restant à exécuter du marché, l'essentiel des coûts ayant été engagé durant les phases antérieures. Toutefois, ainsi qu'il a été dit au point 11, il ne résulte pas de l'instruction que les spécificités du marché en cause justifieraient que les coûts effectivement engagés par la société IETI n'aient pas été couverts par les paiements effectués par la commune de Saint-Ouen au titre du règlement des factures émises par la société requérante, et que le taux de marge doive être en conséquence fixé à un niveau aussi élevé sur les prestations restant à exécuter. Eu égard à la nature des prestations en cause et aux taux de marge dans ce secteur d'activité, il sera fait une juste appréciation du manque à gagner de la société requérante en appliquant au montant des prestations restant à réaliser un taux de 10%, soit la somme de 1 500 euros.
14. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que le préjudice global de la société IETI s'élève à 52 291,83 euros TTC. Compte-tenu du partage de responsabilité, la société requérante est seulement fondée à prétendre au paiement d'une somme de 41 833,46 euros. Toutefois, le montant des prestations effectivement réglé par la commune, soit 50 791,93 euros, étant supérieur à cette somme, les conclusions indemnitaires de la société IETI ne peuvent qu'être rejetées.
15. Il résulte de tout ce qui précède, d'une part, que la société IETI n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil, eu égard au partage de responsabilité et au montant des sommes déjà versées par la commune de Saint-Ouen, a rejeté ses conclusions à fin de condamnation de ladite commune et, d'autre part, que les conclusions d'appel incident de la commune de Saint-Ouen doivent être rejetées, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de fin recevoir opposée par la société requérante.
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
16. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Ouen, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme quelconque au titre des frais exposés par la société IETI et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge la société IETI une somme au titre des frais exposés par la commune de Saint-Ouen et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la société IETI est rejetée.
Article 2 : Les conclusions d'appel incident de la commune de Saint-Ouen et ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 16VE01948