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25/06/2019 | FRANCE | N°18VE03858

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 25 juin 2019, 18VE03858


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du PREFET DU VAL-D'OISE du 13 février 2018 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement no 1802567 du 26 octobre 2018, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté attaqué.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée

le 22 novembre 2018, le PREFET DU VAL-D'OISE demande à la Cour d'annuler le jugement du Tribunal administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise l'annulation de l'arrêté du PREFET DU VAL-D'OISE du 13 février 2018 lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement no 1802567 du 26 octobre 2018, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté attaqué.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 novembre 2018, le PREFET DU VAL-D'OISE demande à la Cour d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Le PREFET DU VAL-D'OISE soutient que l'arrêté du 13 février 2018 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M. A...n'a pas été pris en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée à M. A...qui n'a produit aucune observation.

........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations ;

- le décret n° 2010-230 du 5 mars 2010 portant publication de l'accord relatif à la gestion concertée des flux migratoires et au codéveloppement entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Bénin (ensemble cinq annexes), signé à Cotonou le 28 novembre 2007 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Méry a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le PREFET DU VAL-D'OISE relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 13 février 2018 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M.A..., ressortissant béninois, né le 30 octobre 1982, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur le moyen d'annulation retenu par le Tribunal :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M.A..., qui soutient être entré sur le territoire français au mois de février 2016, ne justifie pas de sa résidence habituelle en France depuis cette date. En outre, au 13 février 2018, date de la décision attaquée, son mariage avec une ressortissante française est récent, celui-ci ayant été célébré le 19 juin 2017, et la communauté de vie entre M. A...et son épouse, selon l'attestation établie par les intéressés le 15 janvier 2018, n'est pas antérieure au mois de janvier 2017, et donc d'une durée d'un peu plus d'un an seulement à la date de l'arrêté du PREFET DU VAL-D'OISE. Par ailleurs, l'intéressé, qui ne démontre ainsi pas l'existence de liens intenses, stables et anciens en France, ne conteste pas que vivent au Bénin, son pays d'origine, ses parents, et ses frères et soeurs. Dans ces conditions, M.A..., qui a vécu la majeure partie de sa vie au Bénin et ne fait valoir aucun élément au soutien de son insertion en France autre que son mariage, n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France par rapport aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par l'arrêté du PREFET DU VAL-D'OISE du 13 février 2018 ne peut être accueilli.

4. Il résulte de ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 13 février 2018 refusant la délivrance d'un titre de séjour à M.A..., l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination.

5. Il appartient toutefois à la Cour, saisie de l'ensemble du litige, par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soutenus par M. A...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Sur les moyens de la demande de M.A..., dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel :

En ce qui concerne la compétence de l'auteur de l'arrêté en litige :

6. La décision de refus de titre de séjour, la décision portant obligation de quitter le territoire français et la décision fixant le pays de renvoi du 13 février 2018, ont été signées par MmeD..., chef du bureau du contentieux des étrangers, qui disposait d'une délégation de signature à cet effet, consentie par un arrêté du PREFET DU VAL-D'OISE

n° 18-010 en date du 5 février 2018, publié le même jour au recueil n° 6 des actes administratifs de l'État dans le Val-d'Oise. Dès lors, le moyen tiré de ce que les décisions attaquées auraient été signées par une autorité incompétente manque en fait.

En ce qui concerne la légalité de la décision de refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui [...] restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

8. La décision de refus de titre de séjour attaquée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles le préfet s'est fondé. Concernant la situation personnelle de l'intéressé, qui a effectué une demande de titre de séjour sur le fondement du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la décision de refus de titre de séjour retient notamment qu'il s'est marié le 19 juin 2017 avec une ressortissante française, qu'il a, par ailleurs, des attaches familiales dans son pays d'origine où résident sa mère et sa fratrie. La décision attaquée relève également que l'intéressé ne justifie ni d'un visa de long séjour ni d'une entrée régulière en France. En outre, le PREFET DU VAL-D'OISE a motivé sa décision au regard de l'application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en indiquant que l'intéressé ne peut bénéficier d'une régularisation pour un motif exceptionnel ou une considération humanitaire en se fondant sur les conditions de vie en France de l'intéressé et la durée de sa résidence sur le territoire national. En conséquence, la décision de refus de titre de séjour répond aux exigences de motivation posées par les dispositions précitées du code des relations entre le public et l'administration. La décision de refus de séjour étant suffisamment motivée, la décision obligeant M. A...à quitter le territoire français, dont la motivation se confond avec la première dans le cas où, comme en l'espèce, il est refusé la délivrance d'un titre de séjour, est également suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision de refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, il ne ressort d'aucune des pièces versées au dossier ni des termes de l'arrêté attaqué, tels qu'ils ont été exposés au point précédent, que le PREFET DU

VAL-D'OISE n'aurait pas, avant de rejeter la demande de titre de séjour présentée par

M. A...et de l'obliger à quitter le territoire français, procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé, ou bien qu'il se serait cru en compétence liée pour rejeter la demande qui lui avait été présentée.

10. En troisième lieu, aux termes du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : [...] 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français ; ". L'article L. 313-2 du même code dispose que : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, la première délivrance de la carte de séjour temporaire et celle de la carte de séjour pluriannuelle mentionnée aux articles L. 313-20, L. 313-21, L. 313-23 et L. 313-24 sont subordonnées à la production par l'étranger du visa de long séjour mentionné aux 1° ou 2° de l'article L. 311-1. ". En vertu de l'article L. 211-2-1 du même code : " Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour. ".

11. M. A...fait valoir qu'il remplit toutes les conditions de délivrance d'un titre de séjour en application du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile cité au point précédent. Toutefois, la délivrance d'un titre de séjour en application de ces dispositions est subordonnée à la production d'un visa de long séjour, et la délivrance d'un tel visa ne peut se faire que dans l'hypothèse d'une entrée régulière en France. Le PREFET DU VAL-D'OISE produit un document extrait du système Visabio indiquant que le visa de court séjour délivré à M. A...le 16 février 2016 à Cotonou, et valable à compter de cette date jusqu'au 28 février suivant, a été annulé le 22 février 2016. Ce document n'est pas contesté par M.A..., qui se borne à affirmer qu'il est entré régulièrement sur le territoire français le 16 février 2016, alors que son passeport mentionne qu'il est sorti le 19 février du Bénin. Dès lors, l'intéressé, qui n'établit pas la date de son entrée en France, ne justifiant pas d'une entrée régulière sur le territoire national, n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de titre de séjour aurait été prise en méconnaissance du 4° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par conséquent, M. A...n'est pas non plus fondé à soutenir que le PREFET DU VAL-D'OISE ne pouvait prendre à son encontre une décision portant obligation de quitter le territoire français, dès lors qu'il ne démontre pas qu'il remplit les conditions de délivrance d'un titre de séjour de plein droit.

12. En quatrième et dernier lieu, et pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 du présent arrêt, le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de la décision de refus de titre de séjour et de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de M. A...ne peut être accueilli.

13. Il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à demander l'annulation de la décision de refus de titre de séjour attaquée et de la décision portant obligation de quitter le territoire français qui l'accompagne.

En ce qui concerne la légalité de la décision fixant le pays de destination :

14. En premier lieu, M. A...soutient que les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ont été méconnues par le préfet qui ne l'a pas mis en mesure de présenter des observations avant de prendre la décision litigieuse. Toutefois, les dispositions de l'article

L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile déterminent l'ensemble des règles de procédures administrative et contentieuse auxquelles sont soumises les décisions portant obligation de quitter le territoire français ainsi que les décisions qui l'accompagnent, telle la décision fixant le pays de destination. Par suite, l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 devenu l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, ne saurait être utilement invoqué à l'encontre de la décision litigieuse. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté.

15. En second lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. ". Et l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ".

16. M. A...fait valoir que sa vie est menacée en cas de retour dans son pays d'origine, le Bénin. Toutefois, en se bornant à une affirmation dénuée de toute précision concernant ses craintes, M. A...ne met pas le juge en mesure d'apprécier le bien-fondé de son moyen. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la violation des stipulations de l'article 3 de les convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales par la décision fixant le pays de destination ne peuvent être accueillis.

En ce qui concerne la légalité de la décision de refus d'un délai de départ volontaire :

17. L'arrêté attaqué du PREFET DU VAL-D'OISE octroie un délai de départ volontaire de trente jours à M. A...pour quitter le territoire français. Dès lors, les moyens soutenus par ce dernier à l'encontre de la décision lui refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire sont inopérants et ne peuvent qu'être écartés.

18. Il résulte de tout ce qui précède que le PREFET DU VAL-D'OISE est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 13 février 2018 par lequel il a refusé la délivrance d'un titre de séjour à

M.A..., l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, et fixé le pays de destination.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement no 1802567 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du

26 octobre 2018 est annulé.

Article 2 : La demande de M. A...est rejetée.

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N° 18VE03858


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18VE03858
Date de la décision : 25/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme MUNOZ-PAUZIES
Rapporteur ?: Mme Fabienne MERY
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-06-25;18ve03858 ?
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