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18/06/2019 | FRANCE | N°18VE01980

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 3ème chambre, 18 juin 2019, 18VE01980


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 28 avril 2018 par lequel le PRÉFET DE L'YONNE l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays dont il a la nationalité comme pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1804032 du 4 mai 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté.>
Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 juin 2018, le PRÉFET DE L'Y...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil l'annulation de l'arrêté du 28 avril 2018 par lequel le PRÉFET DE L'YONNE l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a désigné le pays dont il a la nationalité comme pays de renvoi et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1804032 du 4 mai 2018, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 juin 2018, le PRÉFET DE L'YONNE, représenté par Me Claisse, avocat, demande à la Cour d'annuler ce jugement.

Il soutient que le magistrat désigné a commis une erreur de droit en jugeant qu'il aurait méconnu les dispositions des articles L. 741-1, L. 743-1 et L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en édictant une obligation de quitter le territoire français sans que l'administration se soit préalablement prononcée sur la demande d'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile de M. A...

La requête a été communiquée à M.A..., les 24 et 31 juillet 2018, qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Deroc,

- et les observations de Me Brière, avocat du PRÉFET DE L'YONNE.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 28 avril 2018, le PRÉFET DE L'YONNE a obligé M.A..., ressortissant serbe né le 5 novembre 1974 à Bela Crkva (Serbie), à quitter le territoire français sans délai, lui a assigné un pays de destination et a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. Le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a annulé cette décision, par un jugement du 4 mai 2018, motif pris d'un défaut d'examen préalable de la demande de M. A... d'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile. Par la présente requête, le PRÉFET DE L'YONNE relève appel de ce jugement.

2. Aux termes de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente, qui enregistre sa demande (...) / (...) / Lorsque l'enregistrement de sa demande d'asile a été effectué, l'étranger se voit remettre une attestation de demande d'asile (...) / La délivrance de cette attestation (...) ne peut être refusée que dans les cas prévus aux 5° et 6° de l'article L. 743-2. / Cette attestation n'est pas délivrée à l'étranger qui demande l'asile à la frontière ou en rétention. ". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. ". Aux termes de l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : (...) / 5° L'étranger présente une nouvelle demande de réexamen après le rejet définitif d'une première demande de réexamen / (...) ".

3. Ces dispositions ont pour effet d'obliger l'autorité de police à transmettre au préfet, et ce dernier à enregistrer, une demande d'admission au séjour lorsqu'un étranger, à l'occasion de son interpellation, formule une demande d'asile. Hors les cas visés tant à l'article L. 556-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile concernant l'hypothèse d'un ressortissant étranger placé en rétention, qu'aux 5° et 6° de l'article L. 743-2 du même code, le préfet saisi d'une demande d'asile est ainsi tenu de délivrer au demandeur l'attestation mentionnée à l'article L. 741-1 précité de ce code. Il résulte, en outre, de ces dispositions que le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et, le cas échéant, de celle de la Cour nationale du droit d'asile. Par voie de conséquence et contrairement à ce que fait valoir le PRÉFET DE L'YONNE, les dispositions précitées font obstacle à ce que le préfet fasse usage des pouvoirs que lui confère le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en matière d'éloignement des étrangers en situation irrégulière tant que l'étranger, demandeur d'asile, bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français.

4. Il ressort des pièces du dossier et, notamment, du procès-verbal de l'audition par les services de police de M. A...le 28 avril 2018 à la suite de son interpellation, que ce dernier a indiqué être entré en France depuis cinq ans et demi environ, n'avoir effectué aucune démarche auprès des autorités françaises pour obtenir un titre de séjour, excepté s'être rendu en 2011 à la préfecture à Nice, mais a précisé, à deux reprises et de manière non équivoque, vouloir demander l'asile et avoir, à cette fin, " demandé à Nice des documents " et " à Béziers, il y a deux ou trois ans ". Ainsi, compte tenu de ses déclarations, M. A...avait le droit de se maintenir sur le territoire français le temps nécessaire à l'enregistrement de sa demande d'asile et à l'examen de cette demande. Par suite, en obligeant, par l'arrêté attaqué du même jour, l'intéressé à quitter le territoire français sans délai à destination de son pays d'origine et en lui interdisant tout retour sur le territoire français pendant une durée de deux ans, sans prendre en compte sa demande d'asile, mais en se fondant, notamment, sur la circonstance que l'intéressé est " démuni de tout document d'identité ou de circulation en cours de validité ", qu'il " n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour de plein droit en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " et que " sa situation ne présente aucune circonstance exceptionnelle ou humanitaire permettant d'y déroger ", le PRÉFET DE L'YONNE a commis une erreur de droit.

5. Il résulte de tout ce qui précède que le PRÉFET DE L'YONNE n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Montreuil a annulé son arrêté du 28 avril 2018.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du PRÉFET DE L'YONNE est rejetée.

3

N° 18VE01980


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01980
Date de la décision : 18/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BRESSE
Rapporteur ?: Mme Muriel DEROC
Rapporteur public ?: Mme RIBEIRO-MENGOLI
Avocat(s) : SCP CLAISSE ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 25/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-06-18;18ve01980 ?
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