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06/06/2019 | FRANCE | N°17VE02321

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 06 juin 2019, 17VE02321


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande du 15 novembre 2016 tendant au versement de l'indemnité journalière d'absence temporaire.

Par une ordonnance n° 1701711 du 1er juin 2017, la présidente du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 juillet 2017 et le 25 février 2019, M. A..

., représenté par Me Chéneau, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler cette ordonnance ;

2°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au Tribunal administratif de Versailles d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande du 15 novembre 2016 tendant au versement de l'indemnité journalière d'absence temporaire.

Par une ordonnance n° 1701711 du 1er juin 2017, la présidente du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 19 juillet 2017 et le 25 février 2019, M. A..., représenté par Me Chéneau, avocat, demande à la Cour :

1° d'annuler cette ordonnance ;

2° d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a rejeté sa demande du 15 novembre 2016 tendant au versement de l'indemnité journalière d'absence temporaire ainsi que la décision expresse du 21 septembre 2018 ;

3° de condamner l'Etat à lui verser la somme correspondante de 1 034 euros, cette somme portant intérêts et capitalisation des intérêts ;

4° de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. A...soutient que :

- l'ordonnance contestée est irrégulière, son recours n'étant pas tardif ;

- la décision implicite de rejet litigieuse est entachée d'un défaut de motivation, faute pour le ministre de l'intérieur d'avoir répondu à sa demande de communication des motifs ;

- la décision méconnaît les dispositions du décret n° 61-1066 du 26 septembre 1961 instituant une indemnité journalière d'absence temporaire en faveur des personnels des compagnies républicaines de sécurité se déplaçant en unité ou fraction d'unité dans les départements métropolitains et les départements d'outre-mer.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le décret n° 61-1066 du 26 septembre 1961 ;

- l'arrêté du 29 juin 2015 fixant le taux de l'indemnité journalière d'absence temporaire des personnels des compagnies républicaines de sécurité et des militaires de la gendarmerie se déplaçant en unité ou en fraction d'unité en métropole et outre-mer ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bouzar,

- les conclusions de Mme Rollet-Perraud, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., brigadier-chef de la police nationale affecté à la compagnie républicaine de sécurité (CRS) n° 1 de Vélizy-Villacoublay et exerçant les fonctions de musicien-saxophoniste à la " Musique de la police nationale ", a demandé au ministre de l'intérieur par courrier du 13 novembre 2015 le bénéfice de l'indemnité journalière d'absence temporaire prévue par le décret du 26 septembre 1961 instituant une indemnité journalière d'absence temporaire en faveur des personnels des compagnies républicaines de sécurité se déplaçant en unité ou fraction d'unité dans les départements métropolitains et les départements d'outre-mer, au titre des années 2011 à 2015. En raison du silence gardé par le ministre sur sa demande, reçue le 18 novembre 2015, une décision implicite de rejet est née le 18 janvier 2016. Par un nouveau courrier du 15 novembre 2016 reçu le 16 novembre, M. A...a demandé une nouvelle fois au ministre de l'intérieur le bénéfice de l'indemnité journalière d'absence temporaire, au titre des années 2011 à 2016 ainsi que le versement de la somme correspondante de 1 034 euros, avec intérêts. Une décision implicite de rejet est née le 16 janvier 2017. M. A...a demandé le 11 mars 2017 au Tribunal administratif de Versailles l'annulation de cette décision du 16 janvier 2017. Par une ordonnance du 1er juin 2017 dont M. A...relève appel, la présidente du Tribunal administratif de Versailles a rejeté sa demande.

Sur l'irrecevabilité des conclusions nouvelles en appel dirigées contre la décision du 21 septembre 2018 :

2. Il ressort des termes de la décision du 21 septembre 2018 par laquelle le ministre de l'intérieur a expressément rejeté la demande de M. A...qu'il s'est prononcé sur la première demande de l'intéressé en date du 13 novembre 2015, portant sur le bénéfice de l'indemnité journalière d'absence temporaire au titre des années 2011 à 2015. M. A...n'a pas contesté dans le délai de recours contentieux la décision implicite de rejet de cette demande, née le 18 janvier 2016. Par conséquent, M. A...ne saurait soutenir que la décision expresse du 21 septembre 2018 s'est substituée à la décision implicite de rejet du 18 janvier 2016 ou à la seconde décision implicite de rejet du 16 janvier 2017, en tant qu'elle porte sur les années 2011 à 2015. Ses conclusions à fin d'annulation dirigées contre cette décision du 21 décembre 2018, présentées pour la première fois en appel, sont ainsi nouvelles et par suite irrecevables.

En ce qui concerne la régularité de l'ordonnance contestée :

3. Aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, (...) peuvent, par ordonnance : / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ". Pour juger la demande de M. A...tardive, le Tribunal administratif de Versailles a relevé que l'intéressé n'avait pas contesté dans le délai de recours contentieux de deux mois la première décision implicite de rejet née le 18 janvier 2016 et que la seconde décision implicite de rejet née le 16 janvier 2017 était purement confirmative de la première décision, qui était devenue définitive. Il ressort cependant des termes de la seconde demande de M. A...que celle-ci portait non plus sur les années 2011 à 2015 mais sur les années 2011 à 2016. Par suite, M. A...est fondé à soutenir que, ses deux demandes n'ayant pas le même objet, la seconde décision implicite de rejet, en ce qu'elle était relative au bénéfice de l'indemnité journalière d'absence temporaire au titre de l'année 2016, n'était pas confirmative de la première décision. Par conséquent, l'ordonnance attaquée doit être annulée dans cette mesure.

4. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif et devant la Cour, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le ministre de l'intérieur, celle-ci étant dépourvue d'objet.

5. Aux termes de l'article 1er du décret du 26 septembre 1961 instituant une indemnité journalière d'absence temporaire en faveur des personnels des compagnies républicaines de sécurité se déplaçant en unité ou fraction d'unité dans les départements métropolitains et les départements d'outre-mer : " Les fonctionnaires de police des compagnies républicaines de sécurité se déplaçant dans les départements métropolitains et les départements d'outre-mer, en unité complète ou en fraction d'unité de douze hommes ou plus, en dehors de la commune de résidence de l'unité, reçoivent, à l'exclusion de toute indemnité de déplacement, une indemnité journalière d'absence temporaire ". Aux termes de l'article 2 de ce décret : " Cette indemnité est due pour chaque période d'absence de vingt-quatre heures décomptée à partir de l'heure de départ jusqu'à l'heure de retour à la résidence de l'unité. / Elle est due également pour toute période d'absence d'une durée minimum de douze heures consécutives se situant soit à la fin d'un déplacement de plus de vingt-quatre heures, soit à l'intérieur d'un déplacement de moins de vingt-quatre heures ". Enfin, aux termes de l'article 5 de ce même décret : " Le paiement des indemnités prévues par le présent décret est effectué à la fin de l'absence, ou mensuellement et à terme échu, au vu d'états faisant apparaître le lieu de destination de l'unité ou de la fraction d'unité, les dates et heures de départ et de retour à la résidence de l'unité ".

6. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir de former sa conviction sur les points en litige au vu des éléments versés au dossier par les parties. S'il peut écarter des allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées, il ne saurait exiger de l'auteur du recours que ce dernier apporte la preuve des faits qu'il avance. Le cas échéant, il revient au juge, avant de se prononcer sur une requête assortie d'allégations sérieuses non démenties par les éléments produits par l'administration en défense, de mettre en oeuvre ses pouvoirs généraux d'instruction des requêtes et de prendre toutes mesures propres à lui procurer, par les voies de droit, les éléments de nature à lui permettre de former sa conviction, en particulier en exigeant de l'administration compétente la production de tout document susceptible de permettre de vérifier les allégations du demandeur.

7. En l'espèce, M. A...fait valoir qu'il a effectué en 2016 deux déplacements avec une fraction de son unité de plus de douze hommes dans le département du Rhône, l'un d'un peu plus de 26h entre le 14 janvier 2016 et le 15 janvier 2016, l'autre d'un peu plus de 27h, entre le 23 juin 2016 et le 24 juin 2016 et produit à l'appui de ses allégations des billets de train, faute d'avoir pu obtenir du ministre de l'intérieur, en dépit d'un avis partiellement favorable de la commission d'accès aux documents administratifs, communication des états faisant apparaître le lieu de destination de l'unité ou de la fraction d'unité, les dates et heures de départ et de retour à la résidence de l'unité de M.A.... En dépit de l'invitation qui lui a été faite par la Cour, le ministre de l'intérieur n'a produit aucun document de nature à vérifier les allégations de M. A.... Dans ces conditions, le motif allégué par ce dernier doit être regardé comme établi. Par suite et sans qu'il soit besoin de statuer sur l'autre moyen de la requête, M. A...est fondé à soutenir que la décision litigieuse, en tant qu'elle rejette sa demande tendant à bénéficier de l'indemnité journalière d'absence temporaire au titre de l'année 2016, est entachée d'une erreur de droit.

Sur les conclusions aux fins de condamnation de l'Etat à verser à M. A...la somme de 1 034 euros, cette somme portant intérêts et capitalisation des intérêts :

8. Aux termes de l'article 2 de l'arrêté du 29 juin 2015 fixant le taux de l'indemnité journalière d'absence temporaire des personnels des compagnies républicaines de sécurité et des militaires de la gendarmerie se déplaçant en unité ou en fraction d'unité en métropole et outre-mer, alors applicable : " I. - Pour les déplacements effectués en métropole, (...) le taux de l'indemnité journalière d'absence temporaire est fixé conformément au tableau suivant : [35 € au titre de l'année 2016] ". Ainsi qu'exposé au point 7, les deux déplacements de plus de 24h effectués en 2016 par M. A...doivent être regardés comme établis. L'indemnité étant due " pour chaque période d'absence de vingt-quatre heures décomptée à partir de l'heure de départ jusqu'à l'heure de retour à la résidence de l'unité " aux termes de l'article 2 précité du décret du 26 septembre 1961, M. A...est fondé à obtenir la somme de 70 euros.

9. Les personnes publiques ne pouvant demander au juge de prononcer des mesures qu'elles ont le pouvoir de prendre, le ministre de l'intérieur n'est pas recevable à demander à la Cour de déduire de cette somme de 70 euros celles perçues par M. A...au titre de l'indemnité de fidélisation prévue par le décret n° 99-1055 du 15 décembre 1999 portant attribution d'une indemnité de fidélisation en secteur difficile aux fonctionnaires actifs de la police nationale.

10. M. A...a droit aux intérêts au taux légal correspondant à la somme de 70 euros à compter du 16 novembre 2016, date de réception de sa demande par le ministre de l'intérieur.

11. La capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond, même si, à cette date, les intérêts sont dus depuis moins d'une année. En ce cas, cette demande ne prend toutefois effet qu'à la date à laquelle, pour la première fois, les intérêts sont dus pour une année entière. La capitalisation des intérêts a été demandée le 11 mars 2017. Il y a lieu de faire droit à cette demande à compter du 16 novembre 2017, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

12. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 1701711 du 1er juin 2017 du Tribunal administratif de Versailles, en tant qu'elle rejette la demande de M. A...tendant à bénéficier de l'indemnité journalière d'absence temporaire au titre de l'année 2016, ainsi que la décision implicite de rejet du 16 janvier 2017 du ministre de l'intérieur relative à cette dernière demande, sont annulées.

Article 2 : L'Etat est condamné à verser à M. A...la somme de 70 euros, cette somme portant intérêts à compter du 16 novembre 2016. Les intérêts échus à la date du 16 novembre 2017 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : L'Etat versera à M. A...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 17VE02321


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02321
Date de la décision : 06/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: M. Mohammed BOUZAR
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : SCP CHENEAU ET PUYBASSET

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-06-06;17ve02321 ?
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