Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société But International a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la réduction de la cotisation de contribution économique territoriale à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2013 à hauteur de 918 450 euros.
Par un jugement n° 1502122 du 2 juin 2016, le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé cette réduction.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés respectivement le 21 juillet et le 19 octobre 2016, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS demande à la Cour :
1° d'annuler les articles 1 et 2 de ce jugement du Tribunal administratif de Montreuil ;
2° de remettre à la charge de la société But International la contribution économique territoriale de l'année 2013 à concurrence de la réduction prononcée par le tribunal et d'ordonner la restitution par la société But International des frais versés par l'Etat sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement entrepris est entaché d'un défaut de motivation en ce qui concerne l'extension du dispositif d'allégement de la contribution économique territoriale en cas d'opérations de restructuration interne ;
- il fait une inexacte application des dispositions de l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts en admettant une transmission du dégrèvement à une société absorbante à la suite d'une restructuration ;
- la disparition de la redevable de la contribution en litige par absorption entraîne un changement de contribuable ;
- le transfert de la qualité de contribuable prévu dans la décision du Conseil d'État du 11 juillet 2014 n° 377999 n'est pas transposable à un litige relatif à la contribution économique territoriale.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Soyez,
- et les conclusions de M. Errera, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Le 31 décembre 2010, la société But International a absorbé la société But France, laquelle avait elle-même absorbé, en janvier 2010, plusieurs de ses filiales directes et indirectes, à savoir les sociétés But Exploitation, Européenne de Diffusion, Sodico, Modimm, La Maison Verte et Maine Confort. Sur le fondement du 1er alinéa de l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts qui prévoit un dégrèvement transitoire pour atténuer les conséquences de la substitution par la contribution économique territoriale de la taxe professionnelle à partir du 1er janvier 2010, la société But International a sollicité le 28 novembre 2014, au titre de l'année 2013, un dégrèvement de 953 343 euros, correspondant à 25 % du dégrèvement transitoire qui lui a été accordé en 2010, tant en son nom propre qu'au nom des sociétés absorbées. L'administration a prononcé un dégrèvement de 34 893 euros au titre de l'année 2013, correspondant à 25 % des dégrèvements accordés à la société But International en son nom propre au titre de l'année 2010. Le Tribunal administratif de Montreuil a prononcé la décharge totale de la somme sollicitée par la contribuable, à hauteur de 918 450 euros, par un jugement en date du 2 juin 2016, dont le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS relève appel.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des motifs du jugement attaqué qu'il énonce explicitement les raisons pour lesquelles les premiers juges ont estimé que le dispositif d'allégement prévu au 1er alinéa de l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts pouvait bénéficier à une société, au nom de ses filiales, alors même qu'elle les aurait absorbées par une restructuration interne intervenue en 2010. Ainsi le moyen tiré du défaut de motivation du jugement doit être écarté.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
3. D'une part, l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts, dans sa rédaction issue de l'article 2 de la loi du 30 décembre 2009 de finances pour 2010, dispose que : " Sur demande du contribuable effectuée dans le délai légal de réclamation prévu pour la cotisation foncière des entreprises, la somme de la contribution économique territoriale, des taxes pour frais de chambres de commerce et d'industrie et pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat et de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux due par l'entreprise au titre des années 2010 à 2013 fait l'objet d'un dégrèvement lorsque cette somme, due au titre de l'année 2010, est supérieure de 500 € et de 10% à la somme des cotisations de taxe professionnelle et des taxes pour frais de chambres de commerce et d'industrie et pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat qui auraient été dues au titre de 2010 en application du présent code en vigueur au 31 décembre 2009 ". Et : " Le dégrèvement s'applique sur la différence entre : / - la somme de la contribution économique territoriale, des taxes pour frais de chambres de commerce et d'industrie et pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat et de l'imposition forfaitaire sur les entreprises de réseaux dues au titre de l'année 2010 ; / - et la somme, majorée de 10 %, des cotisations de taxe professionnelle, de taxes pour frais de chambres de commerce et d'industrie et pour frais de chambres de métiers et de l'artisanat qui auraient été dues au titre de 2010 en application du présent code en vigueur au 31 décembre 2009, à l'exception des coefficients forfaitaires déterminés en application de l'article 1518 bis qui sont, dans tous les cas, ceux fixés au titre de 2010. / Il est égal à un pourcentage de cette différence, fixé à : / - 100 % pour les impositions établies au titre de 2010 ; / - 75 % pour les impositions établies au titre de 2011 ; / - 50 % pour les impositions établies au titre de 2012 ; / - 25 % pour les impositions établies au titre de 2013. ". D'autre part, aux termes de l'article L. 236-3 du code de commerce : " I. - La fusion ou la scission entraîne la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent et la transmission universelle de leur patrimoine aux sociétés bénéficiaires, dans l'état où il se trouve à la date de réalisation définitive de l'opération. Elle entraîne simultanément l'acquisition, par les associés des sociétés qui disparaissent, de la qualité d'associés des sociétés bénéficiaires, dans les conditions déterminées par le contrat de fusion ou de scission. / (...) ".
4. En premier lieu, ces dispositions de l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts, qui instituent un dégrèvement imputé, au titre des années 2010 à 2013, sur les cotisations de contribution économique territoriale mises à la charge du redevable, bénéficient à l'entreprise qui, au 1er janvier de chacune de ces années, a la qualité de redevable de cette contribution. Il en résulte que lorsqu'une société redevable de la contribution économique territoriale au 1er janvier 2010 et satisfaisant, à cette date, aux conditions posées à l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts disparaît par l'effet d'une fusion-absorption, la société absorbante, venant aux droits et obligations de son absorbée, ne peut solliciter le dégrèvement litigieux qu'au titre des années pour lesquelles la société absorbée avait elle-même la qualité de redevable de la contribution économique territoriale. Il suit de là que les dispositions de l'article 1647 C quinquies B faisaient obstacle à ce que la société But International obtienne le bénéfice d'un dégrèvement pour l'année 2013 pour le compte des sociétés qu'elle avait préalablement absorbées, qui n'étaient plus redevables de la contribution au titre de cette année et à l'actif desquelles, avant l'intervention de la fusion, le droit au bénéfice des dégrèvements litigieux n'aurait pu, d'ailleurs, faire l'objet d'aucune inscription. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 1647 C quinquies B du code général des impôts doit être écarté.
5. En second lieu, si les dispositions du paragraphe de la documentation administrative de base référencée 6 E-4-11, n° 44, du 10 mai 2011, traitent des cas de transmission ou de non transmission de dégrèvement transitoire en cas de restructurations intervenues entre 2011 et 2013, la société But International ne saurait en inférer que la doctrine administrative exprimée par cette documentation autorise le transfert à une société absorbante du dégrèvement provisoire relatif à des sociétés qui ont été absorbées avant le 31 décembre 2010. Par suite, cette instruction administrative ne comporte pas d'interprétation différente de celle de la loi fiscale dont il a été fait application.
6. Il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a accordé la réduction de la contribution économique territoriale pour le montant sollicité par la société But International, et à obtenir le rétablissement de cette dernière à l'imposition contestée. Par voie de conséquence, le jugement en cause est annulé en tant qu'il a prononcé la réduction précitée et mis à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par suite, les conclusions de la société But International tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que, en tout état de cause, celles tendant au bénéfice des dépens, doivent également être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La cotisation de contribution économique territoriale dont la réduction a été accordée à la société But International par le Tribunal administratif de Montreuil, au titre de l'année 2013, est remise à sa charge.
Article 2 : Les articles 1 et 2 du jugement du Tribunal administratif de Montreuil n° 1502122 du 2 juin 2016 sont annulés.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la société But International est rejeté.
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N° 16VE02297