La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

16/05/2019 | FRANCE | N°18VE01370

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 16 mai 2019, 18VE01370


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2017 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un certificat de résidence.

Par un jugement n° 1709203 du 20 mars 2018, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa

demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 20 avril 2018 et un m...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 7 septembre 2017 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine a rejeté sa demande de certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un certificat de résidence.

Par un jugement n° 1709203 du 20 mars 2018, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 20 avril 2018 et un mémoire enregistré le 18 avril 2019, M.B..., représenté par Me Mhissen, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer un certificat de résidence dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, et de le munir, dans cette attente, d'une autorisation provisoire de séjour assortie d'une autorisation de travail ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

Sur le refus de certificat de résidence :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- celle-ci a été prise au terme d'une procédure irrégulière, en l'absence de preuve de l'établissement d'un rapport médical par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), de transmission de cet avis au collège des médecins ayant rendu l'avis médical sur lequel le préfet s'est fondé, de régularité de la nomination de ces médecins et de ce que le médecin rapporteur n'aurait pas siégé au sein de ce collège ;

- elle méconnait les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnait également les stipulations de l'article 3 de cette convention, son orientation sexuelle l'exposant à des risques de traitements inhumains et dégradants ;

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

- cette décision est insuffisamment motivée ;

- celle-ci méconnait les stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnait également les stipulations de l'article 3 de cette convention, son orientation sexuelle l'exposant à des risques de traitements inhumains et dégradants ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

- cette décision méconnait les stipulations de l'article 3 de cette convention, son orientation sexuelle l'exposant à des risques de traitements inhumains et dégradants.

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Illouz, conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant algérien né le 7 mai 1984, est entré en France, selon ses déclarations, le 20 mai 2012, et y a été muni d'un premier certificat de résidence sur le fondement des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 14 janvier 2015, le préfet des Yvelines lui a refusé le renouvellement de ce titre et a pris à son encontre une première mesure d'éloignement à l'exécution de laquelle celui-ci s'est soustrait. M. B...a sollicité le 3 mai 2017 auprès des services du préfet des Hauts-de-Seine la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement des mêmes stipulations. Par un arrêté du 7 septembre 2017, le préfet des Hauts-de-Seine a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il était susceptible d'être renvoyé d'office. M. B... relève régulièrement appel du jugement du 20 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. D'une part, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) 7) Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ". Si les stipulations de l'accord franco-algérien régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France, ainsi que les règles concernant la nature et la durée des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf stipulations incompatibles expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour dès lors que ces ressortissants algériens se trouvent dans une situation entrant à la fois dans les dispositions de l'accord et dans celles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

3. D'autre part, aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. (...) ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical visé à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui le suit habituellement ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. (...) Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ".

4. Il ressort des pièces du dossier que le collège des médecins de l'OFII a rendu le 10 août 2017 un avis sur l'état de santé de M. B...dans le cadre de l'instruction de sa demande de certificat de résidence au titre des soins médicaux. Si cet avis mentionne la composition du collège qui en est l'auteur en ce qu'il précise le nom des trois médecins ayant siégé en son sein, il ne fait pas apparaître le nom de l'auteur du rapport médical préalablement rédigé en application des dispositions précitées de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet des Hauts-de-Seine, qui est le seul à détenir les éléments de nature à éclairer la Cour sur l'identité de l'auteur de ce rapport médical, n'a produit aucune observation en réponse au moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées dans la présente instance, ni aucune pièce de nature à révéler cette identité. Dans ces conditions, l'autorité administrative ne met pas la Cour à même d'exercer son contrôle de la régularité de la procédure préalable à l'adoption de l'arrêté attaqué. M. B... est, par suite, fondé à soutenir que cet arrêté a été pris au terme d'une procédure irrégulière.

5. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

6. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué que le préfet s'est fondé sur l'avis du collège des médecins de l'OFII du 10 août 2017, dont il s'est approprié les motifs, pour rejeter la demande de certificat de résidence de M.B.... Cet avis, qui doit être regardé comme ayant été rendu, ainsi qu'il a été dit au point 4, dans des conditions irrégulières, a, dès lors, exercé une influence sur le sens de la décision en litige. En outre, la méconnaissance des dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a, en l'espèce, privé l'intéressé de la garantie qui s'attache à ce que l'avis relatif à sa situation médicale soit rendu par des médecins distincts de celui ayant rédigé le rapport médical relatif à cette situation. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être accueilli.

7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir, par ce moyen soulevé pour la première fois en appel, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Eu égard au motif d'annulation de la décision attaquée ci-dessus retenu, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet des Hauts-de-Seine délivre à M. B... le certificat de résidence sollicité. En revanche, il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre à cette autorité de réexaminer la demande de l'intéressé tendant à la délivrance de ce certificat de résidence dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1709203 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 20 mars 2018 et l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 7 septembre 2017 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Hauts-de-Seine de procéder au réexamen de la demande de certificat de résidence de M. B...dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à M. B...une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

2

N° 18VE01370


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE01370
Date de la décision : 16/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Julien ILLOUZ
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : MHISSEN et ZOUGHEBI ASSOCIEES

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-05-16;18ve01370 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award