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09/04/2019 | FRANCE | N°18VE03588

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 4ème chambre, 09 avril 2019, 18VE03588


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible comme destination de sa mesure d'éloignement, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise, en application des dispositions des articles L. 911-1 et

L. 911-3 du code de justice administrative, de lui délivrer un titre de séjour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 23 novembre 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible comme destination de sa mesure d'éloignement, d'enjoindre au préfet du Val-d'Oise, en application des dispositions des articles L. 911-1 et L. 911-3 du code de justice administrative, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article

L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, en application des dispositions de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, de réexaminer sa situation et, dans cette attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte.

Par un jugement n° 1712032 du 26 septembre 2018, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du préfet du Val-d'Oise du 23 novembre 2017, a enjoint au préfet du Val-d'Oise de réexaminer la demande de M. B...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour et a mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29 octobre 2018, le préfet du Val-d'Oise demande à la cour d'annuler le jugement n° 1712032 du 26 septembre 2018.

Il soutient que le moyen retenu par le tribunal, tiré de l'absence du nom du médecin qui a établi le rapport médical afin de permettre à l'autorité administrative de s'assurer, préalablement à sa décision, que ce médecin ne siège pas au sein du collège qui rend l'avis et, par suite, de s'assurer de la composition régulière de ce collège, est inopérant puisque de telles prescriptions ne figurent pas dans l'arrêté ministériel du 27 décembre 2016.

.......................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Lepetit-Collin.

Considérant ce qui suit :

1. M.B..., ressortissant marocain, né le 11 juin 1984 et entré sur le territoire français le 9 janvier 2016, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile auprès des services de la préfecture du Val-d'Oise. Par un arrêté en date du 23 novembre 2017, le préfet du Val-d'Oise a refusé la délivrance de ce titre de séjour, a obligé M. B...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays dont il a la nationalité ou tout autre pays dans lequel il serait légalement admissible comme destination de sa mesure d'éloignement. M. B...a sollicité et obtenu du tribunal administratif de Cergy-Pontoise l'annulation de cet arrêté par un jugement n° 1712032 du 26 septembre 2018. Le préfet du Val-d'Oise relève régulièrement appel de ce jugement.

Sur le bien fondé du jugement :

2. Aux termes du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction issue de la loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est, sous réserve d'une menace pour l'ordre public, délivrée de plein droit à " l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé.(...)". Selon l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office (...) transmet son rapport médical au collège de médecins. / Sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le service médical de l'office informe le préfet qu'il a transmis au collège de médecins le rapport médical. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...). ".

3. Enfin, l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".

4. Il ne résulte d'aucune de ces dispositions, non plus que d'aucun principe, que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration devrait porter mention du nom du médecin qui a établi le rapport médical, prévu par l'article

R. 313-22, qui est transmis au collège de médecins de l'Office. Si l'article 6 de l'arrêté du 27 décembre 2016 indique que l'avis mentionne " les éléments de procédure ", cette mention renvoie, ainsi qu'il résulte du modèle d'avis figurant à l'annexe C de l'arrêté, rendu obligatoire par cet article 6, à l'indication que l'étranger a été, ou non, convoqué par le médecin ou par le collège, à celle que des examens complémentaires ont été, ou non, demandés et à celle que l'étranger a été conduit, ou non, à justifier de son identité.

5. Toutefois, il résulte également de la combinaison de ces dispositions que la régularité de la procédure implique, pour respecter les prescriptions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que les documents soumis à l'appréciation du préfet comportent l'avis du collège de médecins et soient établis de manière telle que, lorsqu'il statue sur la demande de titre de séjour, le préfet puisse vérifier que l'avis au regard duquel il se prononce a bien été rendu par un collège de médecins tel que prévu par l'article L. 311-11. L'avis doit, en conséquence, permettre l'identification des médecins dont il émane. L'identification des auteurs de cet avis constitue ainsi une garantie dont la méconnaissance est susceptible d'entacher l'ensemble de la procédure. Il en résulte également que, préalablement à l'avis rendu par ce collège de médecins, un rapport médical, relatif à l'état de santé de l'intéressé et établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), doit lui être transmis et que le médecin ayant établi ce rapport médical ne doit pas siéger au sein du collège de médecins qui rend l'avis transmis au préfet. En cas de contestation devant le juge administratif portant sur ce point, il appartient à l'autorité administrative d'apporter les éléments qui permettent l'identification du médecin qui a rédigé le rapport au vu duquel le collège de médecins a émis son avis et, par suite, le contrôle de la régularité de la composition du collège de médecins.

6. M. B...soutenait en première instance que le nom du médecin qui a établi le rapport sur lequel s'est fondé le collège de médecins n'était pas mentionné dans la décision et qu'il lui était impossible de vérifier que ce médecin ne faisait pas partie de la composition du collège de médecins ayant rendu l'avis sur son dossier. L'avis du collège de médecins du 3 octobre 2017 produit par le préfet du Val-d'Oise ne mentionne pas le nom du médecin qui a établi le rapport médical au vu duquel il a été émis, et ne permet donc pas d'établir que le médecin ayant rédigé le rapport médical ne siégeait pas au sein du collège qui a rendu l'avis. Le préfet du Val-d'Oise, qui détient seul les éléments probants de nature à établir l'identité du médecin ayant établi le rapport médical, s'est abstenu de produire les éléments permettant cette identification, tant en première instance qu'en appel. Dans ces conditions, il y a lieu de tenir le vice de procédure allégué pour établi. Or ce vice a privé M. B...d'une garantie consistant en l'examen de sa situation médicale par un collège de trois médecins distincts du médecin instructeur à l'origine du rapport médical.

7. Par suite, le préfet du Val-d'Oise n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement entrepris, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 24 juillet 2017.

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M.B... :

8. La confirmation du jugement rendu par le tribunal administratif de Cergy-Pontoise n'implique pas la délivrance à M. B...d'un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ". Les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. B... ne peuvent donc, et en tout état de cause, qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme que demande M. B...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête du préfet du Val-d'Oise est rejetée.

Article 2 : Les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte, de même que celles présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par M. B... sont rejetées.

5

N° 18VE03588


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE03588
Date de la décision : 09/04/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour - Procédure.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme LEDAMOISEL
Rapporteur ?: Mme Hélène LEPETIT-COLLIN
Rapporteur public ?: Mme BRUNO-SALEL
Avocat(s) : LEVY

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-04-09;18ve03588 ?
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