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02/04/2019 | FRANCE | N°17VE02611

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 1ère chambre, 02 avril 2019, 17VE02611


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010, des rappels de taxe sur le chiffre d'affaires qui ont été mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2010 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1503454 du 25 avril 2017, le Tribunal administratif de

Cerg

y-Pontoise a déchargé M. A...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxque...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008, 2009 et 2010, des rappels de taxe sur le chiffre d'affaires qui ont été mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2010 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1503454 du 25 avril 2017, le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise a déchargé M. A...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti à raison de son entreprise individuelle au titre des années 2009 et 2010, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2010 et des pénalités correspondantes, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par un recours, enregistré le 4 août 2017, le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS demande à la Cour :

1°d'annuler l'article 1er de ce jugement ;

2°de rétablir M. A...au rôle de l'impôt sur le revenu des années 2009 et 2010, à hauteur des dégrèvements prononcés en exécution du jugement attaqué et de remettre à sa charge la TVA qui lui é été restituée au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010.

Il soutient que l'administration n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales dès lors que M. A...n'a établi aucun mandat de représentation et n'a, en conséquence, pas demandé à ce que la vérification de son activité professionnelle se déroulât dans les locaux de l'association Droit et Justice.

Vu le jugement attaqué.

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Dibie,

- et les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Suite à un examen de sa situation fiscale personnelle et à une vérification de comptabilité de son entreprise individuelle, M. A...s'est vu notifier, par deux propositions de rectification du 21 décembre 2011 et deux propositions de rectification du 27 août 2012, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti respectivement au titre de l'année 2008, selon la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 73 du livre des procédures fiscales et la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66 du même livre, et des années 2009 et 2010, selon la procédure de rectification contradictoire, ainsi que des rappels de taxe sur le chiffre d'affaires qui ont été mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2008, selon la procédure de taxation d'office prévue à l'article L. 66 du même livre, et au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2010, selon la procédure d'évaluation d'office instituée par l'article L. 74 du même livre. Par le présent recours, le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS relève appel du jugement du 25 avril 2017 en tant qu'il prononce la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. A...a été assujetti à raison de son entreprise individuelle au titre des années 2009 et 2010, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le

31 décembre 2010 et des pénalités correspondantes.

Sur les conclusions d'appel principal du MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS :

2. Aux termes des dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers. (...) ".

3. A la suite de l'avis de vérification du 21 décembre 2011, un premier rendez-vous avec le service, prévu le 17 janvier 2012 a été reporté au 31 janvier 2012, à la demande du contribuable, et n'a pas pu avoir lieu en raison de l'absence de ce dernier. Le 14 février 2012, le service a été destinataire d'un courrier intitulé " pouvoir de représentation et d'assistance " daté du 14 octobre 2011, par lequel M. A...a entendu l'informer de ce qu'il donnait mandat au dirigeant de l'association Droit et Justice, dont il allègue qu'il détenait ses documents comptables, " en vue de l'assister dans les locaux de l'association durant toute la procédure de vérification comptable de son entreprise individuelle " ainsi que d'une lettre, datée du

14 février 2012, par laquelle le mandataire l'a informé de ce que le requérant avait décidé que les opérations de vérification devaient se dérouler dans les locaux de son association. L'administration a répondu le même jour qu'elle refusait cette proposition, notamment au motif que le mandat fourni n'était pas valable et la réalisation des opérations de contrôle au siège de l'association serait susceptible d'imposer au service des sujétions trop importantes qui n'étaient pas justifiées. Le service a en conséquence effectué l'intervention suivante, le 24 février 2012, au siège de l'entreprise individuelle de M. A..., qui se trouvait être également son domicile. Ce dernier en a toutefois refusé l'accès au vérificateur et a fait adresser au service, le même jour, par le biais de son conseil, des observations écrites.

4. D'une part, il résulte de l'instruction que le courrier intitulé " pouvoir de représentation et d'assistance " daté du 14 octobre 2011et pris au visa des " articles 200-2 et R. 197-4 du livre des procédures fiscales et 431-6 du code de justice administrative " limite l'intervention de l'association " Droit et Justice " à un mandat d'assistance pour le dépôt de requêtes ou de réclamations contentieuses. Ainsi, ce mandat ne donnait nullement pouvoir au représentant de cette association pour demander un report de rendez-vous ou que les opérations de contrôle aient lieu au siège de cette association, ces demandes n'étant par suite pas opposables à l'administration fiscale. Il s'ensuit qu'en application des dispositions de l'article 13 du livre des procédures fiscales qui prévoit que la vérification de comptabilité a lieu en principe dans les locaux de l'entreprise, ce lieu pouvant être modifié d'un commun accord entre le vérificateur et l'entreprise pour se dérouler dans le lieu où se trouve la comptabilité de l'entreprise, le vérificateur ne pouvait que se rendre au siège de la société pour y effectuer les opérations de contrôle.

5. D'autre part, le contribuable a demandé un report de rendez-vous et, en conséquence de ce qui a été dit au point 4, ne s'est pas présenté à trois reprises aux rendez-vous fixés par l'administration. Dans ces conditions, et contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'administration doit être regardée comme ayant accompli toutes les diligences nécessaires pour que le contrôle fiscal ait lieu. Par suite, c'est à bon droit qu'elle a considéré que le comportement de M. A...était constitutif d'une opposition à contrôle fiscal et a procédé à une évaluation d'office des bases d'imposition du contribuable selon la procédure prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales.

6. Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le Tribunal administratif de

Cergy-Pontoise s'est fondé sur la méconnaissance des dispositions de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales pour décharger M. A...des impositions litigieuses.

7. Toutefois, il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...devant le tribunal administratif et la cour administrative d'appel.

8. En application de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la charge de la preuve " incombe (...) au contribuable à défaut de comptabilité ou de pièces en tenant lieu, comme en cas de taxation d'office à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle en application des dispositions des articles L. 16 et L. 69 ".

9. M. A...conteste la méthode de reconstitution de recettes de son chiffre d'affaires retenu par l'administration. Il résulte de l'instruction que le service a remis en cause le régime de micro-BIC et de franchise de TVA dont l'intéressé s'était prévalu au motif que ses recettes excédaient les plafonds prévus pour l'application de ces régimes, en se fondant sur les sommes encaissées sur le compte bancaire présenté par l'intimé comme essentiellement professionnel au cours des opérations de contrôle. Pour la taxe sur la valeur ajoutée, le service a assis les rappels sur les encaissements bancaires. Pour les bénéfices industriels et commerciaux, le service a appliqué aux achats effectués par la société auprès de ses principaux fournisseurs un coefficient de marge brute moyen déterminé à partir d'un panel d'entreprises comparables, puis a déduit de ce chiffre d'affaires reconstitué un taux de charges de 50%. L'intimé, qui eu égard à la procédure d'évaluation d'office dont il a fait l'objet supporte la charge de la preuve de l'exagération des impositions en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales précité, en se bornant à soutenir qu'une partie des encaissements ne correspond pas à des recettes professionnelles et à reprocher au service de ne pas lui avoir appliqué le taux de charge des entreprises à partir desquelles a été calculé le coefficient de marge brute n'établit pas l'exagération des impositions litigieuses.

10. Aux termes de l'article 1732 du code général des impôts : " La mise en oeuvre de la procédure d'évaluation d'office prévue à l'article L. 74 du livre des procédures fiscales entraine : / a) L'application d'une majoration de 100% aux droits rappelés ou aux créances de nature fiscale qui doivent être restituées à l'Etat ; (...). "

11. M. A...soutient d'une part que la majoration de 100 % réprimant l'opposition à contrôle fiscal qui lui a été appliquée est infondée dès lors qu'il ne s'est pas placé dans une telle situation. Toutefois il résulte de ce qui a été dit au point 5 que M. A...s'est effectivement opposé au contrôle fiscal dont il faisait l'objet.

12. M. A...soutient, d'autre part, qu'il y a lieu en tout état de cause d'en moduler le taux conformément aux exigences tirées des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Cependant, l'amende sanctionnant l'infraction d'opposition à contrôle fiscal, instituée par les dispositions précitées de l'article 1732 du code général des impôts, appartient à un même ensemble de sanctions relatives à la violation des obligations déclaratives, qui comporte notamment les sanctions prévues aux articles 1728 et 1729 du même code réprimant les comportements de retard, d'insuffisance ou d'omission de déclaration, dont elle constitue la plus sévère compte tenu de sa particulière gravité. Ainsi la loi elle-même assure, dans une certaine mesure, la modulation des peines en fonction de la gravité des comportements réprimés, et le juge de l'impôt exerce un plein contrôle sur les faits invoqués et la qualification retenue par l'administration pour appliquer l'amende et décide, selon les résultats de ce contrôle, soit de maintenir cette amende, soit d'en prononcer la décharge. Il suit de là que les dispositions de l'article 1732 du code général des impôts ne sont pas incompatibles avec les stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, alors même qu'elles ne confèrent pas au juge un pouvoir de modulation du taux de l'amende qu'elles prévoient.

13. Il résulte de ce qui précède que le MINISTRE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a déchargé M. A...des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti à raison de son entreprise individuelle au titre des années 2009 et 2010, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui ont été mis à sa charge au titre de la période comprise entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2010 et des pénalités correspondantes.

Sur les conclusions d'appel incident de M.A... :

14. M. A...n'a développé aucun moyen dans la présente instance au soutien de ses conclusions tendant à la décharge des impositions et rappels supplémentaires établis au titre de l'année 2008. Il s'ensuit que ses conclusions d'appel incident doivent être rejetées.

Sur les conclusions au titre des frais exposés et non compris dans les dépens :

15. Aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens (...) ". L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, il a lieu de rejeter les conclusions de M. A...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. A... a été assujetti à raison de son entreprise individuelle au titre des années 2009 et 2010 et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée assignés à M. A...au titre de la période du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, assortis des pénalités correspondantes sont remises à sa charge.

Article 2 : Le jugement n° 1503454 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 25 avril 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions d'appel incident de M. A...et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

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N° 17VE02611


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02611
Date de la décision : 02/04/2019
Type d'affaire : Administrative

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité - Procédure.

Contributions et taxes - Généralités - Règles générales d'établissement de l'impôt - Contrôle fiscal - Vérification de comptabilité - Pouvoirs de l'administration.


Composition du Tribunal
Président : M. BEAUJARD
Rapporteur ?: Mme Alice DIBIE
Rapporteur public ?: M. CHAYVIALLE
Avocat(s) : DESURMONT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-04-02;17ve02611 ?
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