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07/02/2019 | FRANCE | N°18VE00451

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 2ème chambre, 07 février 2019, 18VE00451


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...D...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 21 février 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1706170 du 11 janvier 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du préfet du Val-d'Oise en date du 21 février 2017 et a enjoint au préfet du Val-d

'Oise de délivrer à M. A...D...un titre de séjour portant la mention " vie privée et fa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...D...a demandé au Tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté en date du 21 février 2017 par lequel le préfet du Val-d'Oise a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1706170 du 11 janvier 2018, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du préfet du Val-d'Oise en date du 21 février 2017 et a enjoint au préfet du Val-d'Oise de délivrer à M. A...D...un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du jugement.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 8 février 2018, le préfet du Val-d'Oise demande à la Cour :

1° d'annuler ce jugement ;

2° de rejeter la demande de M. A...D....

Le préfet du Val-d'Oise soutient que sa décision est exempte d'erreur manifeste d'appréciation au regard de la situation personnelle du requérant dès lors que l'intéressé a conservé de fortes attaches familiales dans son pays d'origine et qu'il n'établit pas avec certitude que sa pathologie ne pourrait pas y être soignée.

.....................................................................................................................

Vu :

- les autres pièces du dossier.

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Guével a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet du Val-d'Oise relève appel du jugement en date du 11 janvier 2018 par lequel le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date du 21 février 2017 refusant de renouveler le titre de séjour de M. A...D..., ressortissant congolais, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourra être reconduit.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif :

2. Il ressort des pièces du dossier, d'une part, que si la présence de M. A...D...sur le territoire français est avérée depuis 2010 notamment par la production de ses récépissés de demande de titre de séjour, il n'a occupé depuis lors aucun emploi de manière stable et durable mais a au contraire multiplié les missions d'intérim depuis 2014. En outre, l'intéressé, qui est célibataire, ne conteste pas ne pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses deux enfants, sa mère et sa fratrie et où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de trente-quatre ans. D'autre part, si le requérant fournit des attestations émanant d'un seul spécialiste, celles-ci, bien que mentionnant qu'un retour dans son pays d'origine pourrait avoir de très graves conséquences sur son état de santé et que son traitement médical ne serait pas en vigueur au Congo, ne permettent pas, à elles seules, de remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé émis le 18 janvier 2017 et attestant qu'il existe un traitement approprié dans son pays d'origine. Dès lors, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise s'est fondé sur le motif que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation pour annuler son arrêté du 21 février 2017.

3. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...D...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise.

Sur les autres moyens soulevés en première instance et en appel par le requérant :

4. Les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ont été signées par Mme B...C..., chef de service à la préfecture du Val-d'Oise, qui avait reçu délégation pour signer ce type d'acte par arrêté du préfet en date du 20 juin 2016 régulièrement publié. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur des décisions attaquées doit être écarté.

5. La décision portant refus de titre de séjour, qui vise notamment les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales applicables en l'espèce, relève en particulier, d'une part, que M. A...D..., ne remplit aucune des conditions prévues par l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où les pièces qu'il verse au dossier ne permettent pas de remettre en cause l'avis du médecin de l'agence régionale de santé, et, d'autre part, qu'il ne peut davantage bénéficier des dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il est célibataire et n'est pas dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où résident ses deux enfants, sa mère et toute sa fratrie. Cette décision comporte ainsi les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivée. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet du Val-d'Oise n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A...D....

6. Il ressort des pièces du dossier que l'avis du médecin de l'agence régionale de santé en date du 18 janvier 2017 a été produit par le préfet du Val-d'Oise en cours d'instance devant le Tribunal. Par suite, M. A...D..., qui a ainsi disposé de la possibilité d'identifier son auteur et d'en contester alors la régularité, ne peut utilement se prévaloir du défaut de communication de cet avis pour demander l'annulation de l'arrêté du 21 février 2017.

7. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable au litige : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) ; 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. ".

8. Pour refuser le renouvellement de son titre de séjour à M. A...D...sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Val-d'Oise s'est notamment fondé sur l'avis émis le 18 janvier 2017 par le médecin de l'agence régionale de santé qui a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, dont le traitement approprié est disponible dans son pays d'origine et que son état de santé lui permet de voyager sans risque. Les certificats médicaux produits par le requérant, s'ils attestent qu'il est suivi médicalement en France, qu'un retour dans son pays d'origine pourrait avoir de très graves conséquences et que son traitement médical ne serait pas en vigueur au Congo, ne suffisent pas, eu égard aux termes dans lesquels ils sont rédigés, à remettre en cause l'avis donné par le médecin de l'agence régionale de santé. Dès lors, l'intéressé ne justifie pas qu'il ne pourrait pas bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, la République démocratique du Congo. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

9. Aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. (...). ". Aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable au jour de la décision attaquée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

10. Compte tenu des éléments portant sur la situation personnelle et familiale de M. A... D..., mentionnés au point 2, le préfet du Val-d'Oise n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels il a pris sa décision. Dès lors, il n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les motifs ci-dessus, le préfet n'a pas davantage commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressé.

11. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de titre de séjour qui lui a été opposé à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français.

12. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étranger et du droit d'asile : " I.- L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) ; 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ;/(...) ; La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. ".

13. M. A...D...soutient que la décision portant obligation de quitter le territoire français contestée n'est pas suffisamment motivée. Toutefois, dès lors qu'en l'espèce, la décision du 21 février 2017 du préfet du Val-d'Oise faisant obligation à l'intéressé de quitter le territoire français accompagne une décision relative au séjour, elle-même explicite et motivée, la mesure d'éloignement n'avait pas à faire une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation ne peut qu'être écarté.

14. Aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) ; 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ;/(...). ". Pour les motifs développés au point 8 du présent arrêt, le moyen tiré de ce que l'obligation faite au requérant de quitter le territoire français méconnaîtrait ces dispositions doit être écarté.

15. Pour les motifs développés aux points 2 et 10 du présent arrêt, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation soulevés à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français doivent être écartés.

16. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Val-d'Oise est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal Administratif de Cergy-Pontoise a annulé son arrêté en date du 21 février 2017 et que la demande de M. A...D...présentée devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise doit être rejetée.

Sur les frais liés au litige :

17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante à l'instance, soit condamné à verser au requérant la somme qu'il demande sur le fondement de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1706170 du 11 janvier 2018 du Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. A...D...devant le Tribunal administratif de Cergy-Pontoise est rejetée.

2

N° 18VE00451


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18VE00451
Date de la décision : 07/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BRUMEAUX
Rapporteur ?: M. Benoist GUÉVEL
Rapporteur public ?: Mme ROLLET-PERRAUD
Avocat(s) : PARASTATIS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-02-07;18ve00451 ?
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