La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/02/2019 | FRANCE | N°17VE02016.doc

France | France, Cour administrative d'appel de Versailles, 7ème chambre, 07 février 2019, 17VE02016.doc


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 à 2010.

Par un jugement n° 1502492 du 24 avril 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 juin 2017, M.B..., représenté par Me Nataf, avocat, demande

à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Montreuil de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2008 à 2010.

Par un jugement n° 1502492 du 24 avril 2017, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 juin 2017, M.B..., représenté par Me Nataf, avocat, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la proposition de rectification afférente à l'impôt sur le revenu 2008 est insuffisamment motivée ;

- son droit à un débat oral et contradictoire a été méconnu dès lors que le service ne lui a pas communiqué les éléments relatifs à l'EURL Sport Event obtenus dans le cadre du droit de communication dont il a fait usage auprès de l'autorité judiciaire ;

- il n'a pas été informé de son droit à garder le silence avant de faire ses déclarations en garde à vue et l'intégralité de son dossier pénal exploité par le service ne lui a pas été communiqué, en violation des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le service a implicitement mais nécessairement entendu, pour établir les impositions en litige, faire application de la notion d'abus de droit prévue à l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, sans lui permettre de bénéficier des garanties prévues par ces dispositions ;

- le service ne pouvait, pour établir les impositions en litige, se fonder sur des éléments issus des procès-verbaux de ses auditions par les services de police dès lors que ces documents ont été ultérieurement déclarés illégaux par le juge judiciaire ;

- la somme de 270 625,56 euros ne pouvait faire l'objet d'un rehaussement au titre de l'impôt sur le revenu 2008 dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée dès lors qu'il justifie de l'origine de cette somme, qui provient de deux chèques émis à son ordre par la société AB Fenêtres Groupe ;

- l'existence d'une condamnation prononcée par le juge répressif faisait obstacle à l'infliction des pénalités prévues aux articles 1728 et 1729 du code général des impôts en raison de la règle du non bis in idem prévue par les stipulations de l'article 4 du 7ème protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 14 de cette convention et de l'article 50 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- il convient, en tout état de cause, que la somme des sanctions qui lui sont infligées n'excède pas le quantum de ce que prévoit le texte instituant la plus lourde des deux sanctions.

.....................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Illouz,

- et les conclusions de Mme Danielian, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B...a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle au titre des années 2008 à 2010 à l'issue duquel le service lui a notifié des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2008, 2009 et 2010, assortis des pénalités prévues aux articles 1728 et 1729 du code général des impôts. L'administration a, par la suite, partiellement accueilli certaines de ses réclamations relatives à ces impositions. M. B... relève régulièrement appel du jugement du 24 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à la décharge des impositions restées en litige.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Si, eu égard aux garanties dont le livre des procédures fiscales entoure la mise en oeuvre d'un examen de la situation fiscale personnelle d'un contribuable, l'administration est tenue, lorsque, faisant usage de son droit de communication, elle consulte au cours d'une vérification tout ou partie de la comptabilité tenue par l'entreprise unipersonnelle dont le contribuable vérifié est associé mais se trouvant chez un tiers, de soumettre l'examen des pièces obtenues à un débat oral et contradictoire avec le contribuable, il n'en est pas de même lorsque lui sont communiqués des documents ne présentant pas le caractère de pièces comptables de cette entreprise. Si M. B...soutient que les exigences découlant du caractère oral et contradictoire du débat qui s'est engagé avec le service auraient été méconnues du fait de l'absence de communication, par celui-ci, des éléments obtenus dans le cadre de son droit de communication à propos de l'EURL Sport Event, il n'est pas contesté que ces documents n'étaient constitués que des procès-verbaux de l'audition du contribuable devant les services de police et ne présentent ainsi aucun caractère comptable. Il n'est pas établi ni même allégué que des documents ayant un tel caractère n'auraient pas été communiqués à M.B.... Le moyen tiré de la méconnaissance du caractère oral et contradictoire du débat doit dès lors être écarté.

3. Aux termes de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. (...) ". Il résulte du texte même de cet article que l'ensemble de ces stipulations n'est applicable qu'aux procédures contentieuses suivies devant les juridictions lorsqu'elles statuent sur des droits et obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale et qu'il n'énonce aucune règle ou aucun principe dont le champ d'application s'étendrait au-delà des procédures contentieuses suivies devant les juridictions. Cet article, qui n'est pas applicable aux procédures administratives, ne peut dès lors pas être, en principe, invoqué par le contribuable à l'appui de sa contestation de la régularité de la procédure d'imposition suivie. Il en va cependant différemment s'agissant des procédures aboutissant à l'infliction de pénalités qui présentent le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elles visent et n'ont pas pour objet la seule réparation d'un préjudice, et qui constituent, par suite, des accusations en matière pénale au sens de ces stipulations.

4. Si le service s'est fondé, comme il l'a indiqué au contribuable dans la proposition de rectification, sur certains éléments d'information notamment révélés par la consultation du dossier de la procédure judiciaire dont M. B...a fait l'objet, il n'en résulte pas, comme le prétend l'appelant, une imbrication de cette procédure avec la procédure fiscale engagée à son encontre près de deux années plus tard, qui serait de nature à conférer un caractère pénal à cette dernière procédure et à la faire rentrer dans le champ des stipulations précitées. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en tant qu'il se rapporte aux impositions litigieuses en droits et à l'intérêt de retard mis à la charge de M. B...sur le fondement de l'article 1727 du code général des impôts, est inopérant.

5. Aux termes de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d'office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. Cette notification est interruptive de prescription. Lorsque le contribuable est taxé d'office en application de l'article L. 69, à l'issue d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut être saisie dans les conditions prévues à l'article L. 59. ". Il résulte de ces dispositions qu'est suffisamment motivée une proposition de rectification qui comporte la mention des bases d'imposition, de calcul de ces bases et de la catégorie d'imposition.

6. La proposition de rectification datée du 13 décembre 2011 indique que le service a mis en oeuvre la procédure de taxation d'office. Elle précise que le rehaussement en litige résulte de la remise en cause du bien-fondé de la déduction, par la SA Sporting Club de l'Ouest (SCO) d'Angers, de certains frais de déplacement de M.B.... Elle distingue le montant de ces frais par catégorie de dépenses, qualifie ceux-ci de revenus de capitaux mobiliers perçus par l'intéressé et détaille enfin les modalités de calcul de la base imposable ainsi rectifiée. Cette proposition est, dès lors, suffisamment motivée au regard des exigences posées par les dispositions précitées de l'article L. 76 du livre des procédures fiscales.

7. Aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales : " Afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. / En cas de désaccord sur les rectifications notifiées sur le fondement du présent article, le litige est soumis, à la demande du contribuable, à l'avis du comité de l'abus de droit fiscal. L'administration peut également soumettre le litige à l'avis du comité. (...) ".

8. Il résulte de l'instruction que, pour notifier à M. B...des suppléments d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2009, le service a notamment réintégré, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, le résultat reconstitué de l'EURL Sport Event au motif qu'aucune activité n'avait été réellement accomplie par cette société, laquelle avait pour seule raison d'être de permettre à l'intéressé de recevoir des rémunérations de la part de la SA SCO d'Angers dont il était alors l'associé dirigeant. Ce faisant, l'administration fiscale s'est bornée à requalifier les documents comptables et flux financiers liés à cette EURL dont elle a eu connaissance et n'a pas entendu arguer, contrairement à ce que soutient l'appelant, du caractère fictif des statuts de cette entité ou de tout autre acte émis par celle-ci. Par suite, le moyen tiré de ce que les impositions auraient été établies au terme d'une procédure irrégulière, faute pour le service d'avoir mis à même M. B...de bénéficier des garanties prévues par les dispositions précitées de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'exploitation de documents déclarés illégaux par le juge judiciaire :

9. Aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette, le contrôle et le recouvrement des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées. (...) ". L'article L. 82 C de ce livre dispose quant à lui : " A l'occasion de toute procédure judiciaire, le ministère public peut communiquer les dossiers à l'administration des finances. (...) ". Eu égard aux exigences découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, les dispositions des articles L. 81 et L. 82 C du livre des procédures fiscales ne permettent pas à l'administration de se prévaloir, pour établir l'imposition, de pièces ou documents obtenus par une autorité administrative ou judiciaire dans des conditions déclarées ultérieurement illégales par le juge.

10. Il est constant que les procès-verbaux n° 2009/76/55 et n° 2009/76/56 relatant les auditions de M. B...devant les services de police au cours de sa garde à vue ont été déclarés illégaux par un jugement du tribunal de grande instance d'Angers du 1er juin 2011 devenu définitif. Il résulte cependant de l'instruction que le service, qui a également eu accès à d'autres procès-verbaux d'auditions non déclarés illégaux, a, après avoir constaté l'absence de toute comptabilité tenue par l'EURL Sport Event, reconstitué le chiffre d'affaires de cette entité au moyen de ses relevés de comptes bancaires, de ceux de M.B..., du contrat de prestation de services signé avec la SA SCO d'Angers et de factures émises par cette dernière société. Le ministre de l'action et des comptes publics précise en outre sans être sérieusement contredit qu'aucun des éléments contenus au sein du procès-verbal n° 2009/76/55 n'a servi à l'établissement de l'imposition en litige tandis que ceux contenus au sein du procès-verbal n° 2009/76/56 étaient déjà connus de l'administration du fait de l'examen des documents qui viennent d'être évoqués. Il s'ensuit que les éléments sur lesquels le service s'est fondé pour établir cette imposition ne peuvent être regardés comme ayant été recueillis à l'occasion d'auditions de M. B...consignées dans des procès-verbaux ultérieurement déclarés illégaux par le juge judiciaire. Cette constatation ne fait, par ailleurs et par elle-même, pas obstacle à la préservation du caractère concret et effectif des droits protégés par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le moyen tiré de ce que les impositions en litige auraient été établies sur la base de documents obtenus dans des conditions déclarées ultérieurement illégales par le juge manque dès lors en fait.

En ce qui concerne les revenus d'origine indéterminée :

11. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office, la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition. ". L'article R. 193-1 du même livre précise que : " Dans le cas prévu à l'article L. 193, le contribuable peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition mise à sa charge en démontrant son caractère exagéré ". M. B..., qui a été taxé d'office sur le fondement des dispositions du 1° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales du fait de l'absence de dépôt, dans le délai légal, de déclaration de l'ensemble de ses revenus, ne peut obtenir la décharge ou la réduction des impositions qu'il conteste qu'en apportant la preuve de l'exagération des bases retenues par l'administration.

12. Si l'appelant soutient que le service ne pouvait procéder à la taxation d'office, dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée, de la somme de 270 625,56 euros dès lors qu'il justifie de l'origine de cette somme, il se borne à soutenir que celle-ci provient de deux chèques émis à son ordre par la société AB Fenêtres Groupe, sans produire aucune pièce de nature à établir la véracité de ces allégations, et sans indiquer ni la nature et l'objet de ces versements, ni la catégorie dans laquelle ceux-ci auraient dû être, selon lui, imposés. La circonstance que la liquidation judiciaire de cette société rendrait difficile l'accès à ses documents comptables n'est pas, à elle seule, de nature à délier M. B...de la charge de la preuve de ce que les sommes en cause, dont il ne conteste pas qu'elles constituent des revenus imposables, auraient dû être incluses dans une autre catégorie. C'est, par suite, à bon droit que le service les a imposées dans la catégorie des revenus d'origine indéterminée.

Sur les pénalités :

13. En premier lieu, si, ainsi qu'il a été dit au point 3, l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui n'est pas applicable aux procédures administratives, ne peut pas être, en principe, invoqué par le contribuable à l'appui de sa contestation de la régularité de la procédure d'imposition suivie, il en va cependant différemment s'agissant des procédures aboutissant à l'infliction de pénalités qui présentent le caractère d'une punition tendant à empêcher la réitération des agissements qu'elles visent et n'ont pas pour objet la seule réparation d'un préjudice, et qui constituent, par suite, des accusations en matière pénale au sens de ces stipulations.

14. D'une part, les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales n'ont ni pour objet ni pour effet d'imposer à l'autorité qui envisage de prononcer de telles pénalités de notifier au contribuable son droit de garder le silence durant les auditions dont il fait l'objet. D'autre part, s'agissant du droit d'accès de M. B...à son dossier pénal qui résulte de ces stipulations, le ministre de l'action et des comptes publics fait valoir sans être contredit que certaines pièces de ce dossier, obtenues par l'administration en faisant usage de son droit de communication, étaient jointes aux propositions de rectifications adressées à l'intéressé et qu'une suite favorable a été réservée aux demandes complémentaires de communication de pièces ultérieurement présentées par celui-ci. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit, s'agissant des pénalités prononcées sur le fondement des dispositions des articles 1728 et 1729 du code général des impôts, être écarté en ses deux branches.

15. En deuxième lieu, l'article 4 du protocole additionnel n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, introduit dans l'ordre juridique français par l'effet conjugué de la loi du 31 décembre 1985 qui en autorise la ratification et du décret du 24 janvier 1989 qui en a ordonné la publication, stipule que : " 1. Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat (...) ".

16. Toutefois, l'article 55 de la Constitution implique, en cas d'incompatibilité entre ces deux normes, que le juge administratif fasse prévaloir le traité ou l'accord sur la loi, dès lors que celui-ci remplit les conditions ainsi posées à son application dans l'ordre juridique interne et crée des droits dont les particuliers peuvent directement se prévaloir. Lorsqu'un traité ou un accord a fait l'objet de réserves, visant, pour l'Etat qui exprime son consentement à être lié par cet engagement, à exclure ou à modifier l'effet juridique de certaines de ses clauses dans leur application à son endroit, il incombe au juge administratif, après s'être assuré qu'elles ont fait l'objet des mêmes mesures de publicité que ce traité ou cet accord, de faire application du texte international en tenant compte de ces réserves. De telles réserves définissant la portée de l'engagement que l'Etat a entendu souscrire et n'étant pas détachables de la conduite des relations internationales, il n'appartient pas au juge administratif d'en apprécier la validité.

17. La règle dite du non bis in idem, telle qu'elle résulte du paragraphe 1 de l'article 4 du protocole n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ne trouve à s'appliquer, selon la réserve accompagnant l'instrument de ratification de ce protocole par la France et publiée au Journal officiel de la République française du 27 janvier 1989, à la suite du protocole lui-même, que pour " les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale ", et n'interdit ainsi pas le prononcé de sanctions administratives parallèlement aux décisions définitives prononcées par le juge répressif. Il n'appartient pas, en conséquence, à la Cour de se prononcer sur la validité de cette réserve, non dissociable de la décision de la France de ratifier ce protocole. M. B...ne saurait, dès lors, utilement se prévaloir de l'invalidité de cette réserve dans la présente instance. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 4 du protocole n° 7 à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté. Il en va de même, en raison de l'absence d'identité de l'ordre de juridiction statuant en matière pénale et fiscale et en tout état de cause, du moyen tiré de ce que la somme des sanctions infligées à l'appelant excèderait le quantum de ce que prévoit le texte instituant la plus lourde des deux sanctions.

18. En troisième lieu, si M. B...se prévaut également des stipulations de l'article 50 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, cette charte n'est applicable que dans la mise en oeuvre du droit de l'Union européenne. Les dispositions du code général des impôts relatives à l'imposition des revenus des personnes physiques et aux pénalités pour manquement délibéré et absence de déclaration dans le délai légalement prescrit ne procèdent pas de la mise en oeuvre de ce droit. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations ne peut, dès lors, qu'être écarté.

19. En quatrième et dernier lieu, il résulte des termes mêmes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que le principe de non discrimination qu'il édicte ne concerne que la jouissance des droits et libertés reconnus par ladite convention et par les protocoles additionnels à celle-ci. Dès lors, il appartient au contribuable qui se prévaut de la violation de ce principe d'invoquer devant le juge administratif le droit ou la liberté dont la jouissance est affectée par la discrimination alléguée. M. B..., qui n'invoque la violation d'aucun droit ou liberté protégés par cette convention autre que celui issu des stipulations du paragraphe 1 de l'article 4 du protocole n° 7 dont il ne peut utilement se prévaloir, n'est, par suite, pas fondé à invoquer la méconnaissance du principe de non discrimination édicté par les stipulations de son article 14.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

2

N° 17VE02016


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Versailles
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 17VE02016.doc
Date de la décision : 07/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-04-015 Contributions et taxes. Généralités. Amendes, pénalités, majorations.


Composition du Tribunal
Président : Mme HELMHOLTZ
Rapporteur ?: M. Julien ILLOUZ
Rapporteur public ?: Mme DANIELIAN
Avocat(s) : CABINET NATAF et PLANCHAT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.versailles;arret;2019-02-07;17ve02016.doc ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award