Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société anonyme (SA) Voyages FRAM a demandé au Tribunal administratif de Montreuil la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008.
Par un jugement no 1405385 du 14 avril 2016 le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé partiellement la société Voyages FRAM des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle avait été assujettie au titre de la période en litige.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 9 août 2016 et 11 janvier 2017, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS demande à la Cour :
1° d'annuler les articles 1 et 2 du jugement attaqué ;
2° de mettre à nouveau à la charge de la société Voyages FRAM les rappels de taxe sur la valeur ajoutée dont elle a été déchargée, pour un montant total de 37 593 euros.
Le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS soutient que les croisières organisées par la société Voyages FRAM, intitulées " Parfums des îles grecques ", " Odyssée mauresque " et " Splendeurs égéennes ", n'entrent pas dans le champ des prestations qui se déroulent uniquement en dehors de l'Union européenne, en raison des escales qu'elles prévoient dans des ports de l'Union européenne, et ne peuvent être exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée, en application de l'article 262 bis du code général des impôts, tel qu'interprété par la documentation administrative DB 3 L 6143, désormais référencée BOI-TVA-SECT-60 du 12 septembre 2012.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Méry,
- et les conclusions de M. Chayvialle, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La SA Voyages FRAM, dont la mise en liquidation judiciaire a été prononcée le 25 novembre 2015, exerçait une activité de commerce de voyages. Elle a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, à l'issue de laquelle un avis de mise en recouvrement du 6 septembre 2013, d'un montant de 95 281 euros a été émis. Le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS relève appel du jugement du 14 avril 2016 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a fait partiellement droit à la demande de la société et l'a déchargée des rappels de taxe sur la valeur ajoutée à raison de ceux établis suite à l'inclusion partielle dans la base imposable, pour la période en cause, des croisières organisées en Méditerranée par la société.
Sur la recevabilité des conclusions aux fins de décharge totale des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige :
2. Aux termes de l'article 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les nom et domicile des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. /L'auteur d'une requête ne contenant l'exposé d'aucun moyen ne peut la régulariser par le dépôt d'un mémoire exposant un ou plusieurs moyens que jusqu'à l'expiration du délai de recours. ".
3. Si la SA Voyages FRAM conclut à la décharge totale des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, elle n'assortit ces conclusions que de moyens relatifs aux rappels mis à sa charge en lien avec l'organisation de croisières en Méditerranée. En conséquence, ses conclusions aux fins de décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée sans lien avec celle-ci ne sont pas recevables.
Sur le moyen de décharge retenu par le tribunal administratif :
En ce qui concerne la charge de la preuve :
4. Aux termes de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales : "Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. (...) ".
5. Il résulte de l'instruction que la SA Voyages FRAM, dans ses observations du 14 février et du 12 septembre 2011, a accepté les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en lien avec l'organisation de croisières en Méditerranée proposés par l'administration fiscale. Par suite, en application des dispositions citées au point précédent, il lui incombe, pour obtenir la décharge des rappels en litige, d'en démontrer le caractère exagéré.
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions en litige :
6. Aux termes des dispositions de l'article 262 bis du code général des impôts : " Les prestations de services réalisées par les agences de voyages et les organisateurs de circuits touristiques sont exonérées de la taxe sur la valeur ajoutée pour la partie de ces prestations se rapportant aux services exécutés hors de la Communauté européenne. ". Et aux termes du point n° 260 de l'instruction administrative référencée BOI-TVA-SECT-60, publiée au bulletin officiel des finances publiques du 12 septembre 2012, qui définit les circuits ou séjours se déroulant entièrement hors de l'Union européenne : " il en est ainsi lorsque le circuit ou le séjour comporte un transport aller et retour sans prestations liées à une escale dans l'Union européenne vers un pays ou territoire tiers n'appartenant pas à l'Union européenne (...). Les encaissements et les dépenses correspondants n'ont pas à être pris en compte pour calculer la base imposable. ".
7. D'une part, les premiers juges ont motivé le jugement attaqué en indiquant que " l'administration fiscale a fondé son redressement sur la circonstance que les circuits que la société requérante organise en mer Méditerranée se déroulent pour partie dans les eaux territoriales françaises et européennes ; que toutefois le passage par ces eaux territoriales n'intervient que pour le transport aller et retour, sans prestations liées à une escale ; que la société requérante énonce sans être contredite que ces circuits ne proposent de courtes escales qu'en Turquie " . Il résulte de l'instruction que le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS produit, dans le cadre de la présente instance, divers documents issus de sites sur internet, tendant à démonter que les croisières en cause, sur lesquelles a été établie une partie des rappels de taxe sur la valeur ajoutée exposés au point 1, se déroulaient partiellement en Union européenne. Le ministre soutient ainsi que ces croisières comprenaient des étapes dans des pays de l'Union, et ne pouvaient, par suite, être exonérées totalement de la taxe sur la valeur ajoutée en application de l'article 262 bis du code général des impôts, interprété au regard de la documentation administrative citée au point 2. Ces documents sont d'une valeur probante suffisante. La SA Voyages FRAM se contente, en défense, de déclarations générales sur la valeur probante des pièces produites par le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS, sans produire aucun élément à l'appui de sa contestation relatif au programme des prestations qu'elle offrait dont elle affirme qu'elles ne comportaient aucune escale avant la Turquie. En conséquence, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil, au motif que les croisières en litige se déroulaient entièrement en dehors de l'Union européenne, au sens du point n° 260 du bulletin officiel des impôts référencé BOI-TVA -SECT -60, a déchargé la SA Voyages FRAM des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie en lien avec la vente de ces croisières.
8. D'autre part, si la SA Voyages FRAM fait valoir, en défense, que la procédure fiscale menée à son encontre est entachée d'irrégularité, par méconnaissance du principe du contradictoire, elle ne l'établit pas en invoquant seulement, à l'appui de son moyen, la production de nouvelles pièces par l'administration dans le cadre de la présente instance, la production de pièces nouvelles en cours d'instance contentieuse, droit qui était ouvert à l'administration, n'étant pas susceptible d'avoir une quelconque influence sur la régularité de la procédure de vérification de comptabilité, et notamment sur le respect à ce stade du principe du contradictoire.
9. S'il appartient à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soutenus par la SA Voyages FRAM à l'appui de sa demande devant le Tribunal administratif de Montreuil, la société n'a soutenu devant celui-ci qu'un moyen tiré de la méconnaissance de l'interprétation administrative de la loi fiscale donnée par le bulletin officiel des impôts cité au point 2. Par suite, le MINISTRE DES FINANCES ET DES COMPTES PUBLICS est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a déchargé la SA Voyages FRAM des rappels de taxe sur la valeur ajoutée en lien avec les croisières en Méditerranée qu'elle a vendues au cours de la période en cause.
Sur les conclusions de la SA Voyages FRAM tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans le cadre de la présente instance, la somme de 5 000 euros demandée par la SA Voyages FRAM au titre des frais qu'elle a exposés, non compris dans les dépens.
Sur les conclusions de la SA Voyages FRAM relatives aux dépens de l'instance :
11. La présente instance n'a impliqué aucun frais au titre des dépens. Il y a lieu, par suite, de rejeter les conclusions de la SA Voyages FRAM tendant à mettre ces frais à la charge de l'État.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 14 avril 2016 du Tribunal administratif de Montreuil est annulé.
Article 2 : La somme de 37 593 euros est remise à la charge de la SA Voyages FRAM.
Article 3 : Les conclusions présentées par la SA Voyages FRAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées, ainsi que celles tendant à ce que soient mis à la charge de l'État les dépens de l'instance.
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N° 16VE02624